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« Je me résume, et je demande que Sa Majesté soit très humblement suppliée :

1° De permettre la libre importation des cuirs et peaux en poil, secs, salés ou frais en poil, sans aucune exception, et sans aucun droit ;

«< 2o De grever d'un droit de 15 p. 100 tous les cuirs et peaux fabriqués, de quelque nature qu'ils soient, venant de l'étranger, lequel droit serait établi sur la valeur intrinsèque desdites marchandises, d'après la déclaration du propriétaire ;

«<3° D'exiger le même droit sur l'entrée des bottes, des souliers, des harnais, et généralement, sans aucune exception, sur tous les objets de corroierie, sellerie, culotterie, cordonnerie et ganterie entièrement confectionnés ; « C'est le seul moyen de favoriser en France la main-d'œuvre, d'assurer à un grand nombre d'ouvriers un travail continuel, et de soutenir avec avantage la concurrence avec l'étranger.

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M. Dufougerais lit, sur les droits à mettre à l'entrée des fers et tôles venant de l'étranger la note suivante :

<«< Il me paraît indispensable d'établir, sans délai, un droit sur les fers étrangers.

<< Leur introduction partielle a jeté l'effroi chez les maîtres de forges et les a privés de la vente d'une forte partie de leur fabrication. La quotité du droit à imposer doit être assez élevée pour soutenir le prix de nos fers aux taux où les a successivement porté le prix des bois et celui de la main-d'œuvre.

«En supposant le terme moyen du prix des fers en gros et petits échantillons à 250 francs les 500 kilogrammes, il convient, pour qu'ils puissent s'écouler à ce prix, que les fers étrangers soient frappés d'un droit de 100 francs par 500 kilogrammes, ce qui n'excédera que bien faiblement le droit dont les mêmes espèces de fer se trouvent atteintes à leur entrée dans les ports d'Angleterre, et l'on peut s'en rapporter à nos habiles voisins, lorsqu'il s'agit de combinaisons tendant à soutenir leurs fabriques, assurer leurs besoins et ménager leurs relations politiques.

<< Les fers de fonderie, feuillards et les petites tôles seront frappés, d'après les mêmes bases, d'un droit de 20 francs par 50 kilogrammes. Les tôles de grande dimension, celles de 20 à 50 pouces de largeur, devraient payer 25 francs par 50 kilogrammes.

« Ce droit, plus élevé qu'en Angleterre, doit être maintenu à ce taux, afin de conserver et d'encourager. »>

Pour copie conforme :

Le secrétaire membre du Conseil général,

DESCROIZILLES.

PIECE B

RAPPORT

AU CONSEIL DES MANUFACTURES

Commission de préparation et de révision des travaux des diverses commissions
chargées d'examiner les objets compris dans le tarif général des douanes.
MM. DE FONTENAY, président; DE GUENIFEY, D'Artigues, de Bray, Descroi-
ZILLES, membres; JUBIÉ, rapporteur.

Messieurs,

Séance du 12 juin 1817.

La commission que vous avez formée pour préparer et réviser les travaux des autres commissions, que vous avez chargée d'examiner les objets compris dans le tarif général des douanes, s'est occupée pendant le temps où vos assemblées ont été suspendues, à faire la distribution à chacune de ces commissions, des articles de ce tarif sur lesquels elle a pensé qu'elle devait porter leur attention, afin de fournir au Conseil leurs observations sur ceux de ces articles qui leur en paraîtraient susceptibles.

Mais ce travail des commissions n'aurait point l'utilité que l'on doit en attendre et pourrait présenter des contradictions, si les mêmes principes ne les dirigeaient pas toutes, si elles ne suivaient pas une marche uniforme, si elles ne tendaient pas au même but.

Votre commission de préparation et de révision croit donc de son devoir : 1° de vous faire l'exposé de ces principes; 20 de proclamer la marche uniforme à suivre ; 3o de montrer le but que l'on doit chercher d'atteindre; tels qu'elle les a puisés dans un mémoire sur cette matière qui a été rédigé par son honorable président (M. de Fontenay), tels que la discussion qui s'est établie contradictoirement avec lui les a fait ressortir avec avantage, tels que votre commission s'en est pénétrée, mais ce sera de votre approbation qu'ils recevront leur fonction et deviendront un guide certain pour tous nos collègues, lors de leur réunion dans les diverses commissions.

On pourra, sans aucun inconvénient, atteindre tous les objets d'une pure consommation intérieure par des droits plus ou moins forts, à l'entrée en France.

On pourra se prévaloir, à la sortie, par le même moyen, des avantages que présentent à l'étranger quelques-uns des produits de notre sol et de notre commerce de transit; les droits d'entrée et de sortie pourront être fixés suivant la protection plus ou moins grande due à chaque objet de notre agriculture, suivant les combinaisons de nos relations commerciales, suivant les convenances politiques, suivant les traités avec les puissances étrangères, suivant l'usage plus particulier de ces objets à la classe indigente ou à la classe riche, enfin suivant les chances que la quotité d'un droit trop élevé pourrait donner à la contrebande.

Chaque commission devra faire ses observations sur ces objets, d'après les réflexions que chacun d'eux aura fait naître, et le Conseil ne peut que laisser la plus grande latitude à ses commissions. Il est seulement de la dernière importance qu'elles ne perdent point de vue que le bonheur d'une nation est toujours en raison de la facilité que les individus qui la composent ont de se procurer les choses nécessaires, utiles, et même agréables, et que plus l'on accroît les produits de l'agriculture, du commerce et de l'industrie, plus on augmente la richesse particulière de ceux qui concourent à cet accroissement, et plus ils obtiennent cette facilité.

Mais lorsqu'on en viendra aux objets particulièrement propres à nos manufactures, chaque commission devra sans cesse se pénétrer de la vérité que l'existence de nos ateliers, comme leur prospérité, dépendent entièrement des moyens qui seront employés pour empêcher toutes les causes d'interruption de travail.

L'ouvrier, s'il est privé de travail, est réduit à la misère; il perd son talent et se dégrade toujours.

Il devient à charge à ses concitoyens et au gouvernement, il ne peut concourir au payement des contributions, quoique ce soit une obligation générale.

L'intérêt de l'État et de tous les citoyens est donc que l'ouvrier soit occupé ; il est même nécessaire que son travail produise au delà de ce que lui et sa famille sont forcés de consommer, afin qu'il puisse payer sa portion du fardeau commun à tous les habitants d'une même patrie.

Il résulte de là que les droits qui multiplient les occasions de travail sont utiles au gouvernement et aux gouvernés.et que ceux qui diminuent les occasions de travail frappent les fondements de la fortune publique et des fortunes particulières.

Le travail acheté aux étrangers amène d'ailleurs l'épuisement de nos capitaux nationaux et ne peut présenter des compensations d'aucune espèce pour en reproduire.

Ainsi, le travail étranger, si son introduction est permise, doit être imposé en France pour offrir quelque dédommagement à l'État.

Ainsi, les droits d'entrée doivent s'élever en raison de ce qu'il y a plus de travail fait à l'étranger et de ce qu'il en reste moins à faire aux nationaux. Ainsi, les matières premières, que notre sol ne produit pas ou qui n'y sont pas en quantité suffisante, doivent, si elles peuvent fournir un moyen de plus de travail pour nous et l'enlever à l'étranger,être admises en franchise de droit, ou avec le droit le plus léger.

Ainsi, l'on ne doit point laisser sortir les matières premières que produit notre sol si elles peuvent être employées avec avantage dans nos ateliers, et si l'agriculture est suffisamment encouragée à les produire, ou il faut au moins, suivant leur degré d'utilité, les assujettir à un droit plus ou moins fort.

Ainsi, les objets de notre industrie qui sont en concurrence avec ceux de l'étranger doivent être protégés par des primes accordées en faveur de l'exportation, afin de leur assurer partout une préférence, de faciliter les échanges et d'obtenir une balance qui nous soit avantageuse, en nous procurant des matières premières et du numéraire plus qu'il n'en sortirait de France.

C'est par ces moyens, c'est en s'attachant à un système soutenu de procurer un travail assidu et profitable à ses nombreux ouvriers, que l'Angleterre est parvenue à ce degré de prospérité commerciale qui a surpassé même ses espérances.

C'est en nous y attachant nous-mêmes que nous obtiendrons un pareil résultat, et la commission au nom de laquelle j'ai l'honneur de parler vous pro. pose d'arrêter pour la base des travaux des commissions d'examen des droits de douanes quant aux objets particulièrement propres à nos manufactures : 1. Que le travail étranger doit être soumis à l'impôt, si par sa nature il ne doit pas être prohibé;

2. Que cet impôt doit être relatif à la valeur que ce travail aura ajouté à la matière de l'objet importé et doit être combiné de manière à donner un encouragement suffisant à l'agriculture et à l'industrie nationales;

3° Que les matières premières étrangères, quand notre sol ne les produira pas, doivent à leur introduction en France être exemptes de droit ; et lorsque notre agriculture en fournit de pareilles et d'analogues, elles doivent être assujetties à un droit plus ou moins élevé, en raison de leur utilité ;

4o Que les matières premières qui proviennent de notre sol doivent à la sortie de France, si elles n'en sont pas prohibées, être soumises à des droits basés sur l'intérêt que nous avons à les conserver; mais de manière à ce que l'agriculture ait toujours ainsi intérêt à produire ces matières.

50 Enfin qu'il doit être sollicité des primes à l'exportation de tous les objets manufacturés qui en auront besoin pour soutenir la concurrence des fabriques étrangères et favoriser notre industrie.

Que, quant aux autres objets de consommation intérieure, à l'introduction de ceux des produits de notre sol et de notre commerce de travail, à la sortie, Les commissions se détermineront:

1° Suivant la production plus ou moins grande due à chaque objet de notre agriculture;

2o Suivant les combinaisons de nos relations commerciales avec l'étranger;

3o Suivant les convenances politiques;

4 Suivant nos traités avec les puissances étrangères ;

50 Suivant l'usage plus particulier de ces objets, à la classe indigente ou à la classe riche;

60 Enfin suivant les chances que la quotité d'un droit trop élevé pourrait donner à la contrebande.

Paris, le 12 juin 1817.
JUBIÉ.

PIÈCE C

COMITÉ CONSULTATIF DES ARTS ET MANUFACTURES

(AU MINISTÈRE DE L'Intérieur)

Séance du 22 novembre 1823.

M. le préfet des Basses-Pyrénées expose que le sieur Layrisse, négociant d'Oléron, est inventeur d'une machine qui abrège le travail de la préparation des étoffes et qui procure une grande économie; que ces avantages ont déterminé les fabricants de la dite ville à faire usage de cette machine, et que par suite de cette innovation, les ouvriers qu'ils employaient ont été réduits à l'inaction et à la misère.

M. le préfet, en plaignant le sort de ces malheureux, observe qu'il n'est pas en son pouvoir de l'améliorer par des mesures prohibitives, mais en même temps il semble regarder l'emploi des machines comme une source d'abus et demande si le gouvernement s'est occupé de les faire cesser,

Avis

Il eût été à désirer que M. le préfet des Basses-Pyrénées eût donné quelques détails sur la machine du sieur Layrisse; mais au surplus la question qui se présente ici est une question générale qu'on peut résoudre, abstraction faite des causes qui l'ont amenée. La substitution trop subite des machines aux procédés manuels peut nuire accidentellement au bien-être des individus qui trouvaient leur subsistance dans ce dernier mode de travail. La crise qui en résulte est une conséquence forcée, un véritable inconvénient, mais il n'est pas exact de dire que ce soit un abus. Cette expression nous porterait à croire que M. le préfet des Basses-Pyrénées partage l'opinion de ceux qui craignent que l'emploi des machines ne soit préjudiciable à la classe ouvrière. L'exemple de l'Angleterre, et particulièrement celui de Birmingham et de Manchester dont la population a décuplé depuis que la force mécanique y a remplacé celle des hommes ; l'exemple de Lyon, de Louviers, de Sedan, de Castres et autres villes manufacturières de France devrait suffire pour dissiper cette crainte sans retour. On oublie que la substitution des machines aux bras n'est jamais absolue ; qu'il faut des bras pour en faire le service,pour les construire et pour les entretenir. De plus, on devrait considérer que la facilité et l'économie des moyens de production tendent nécessairement à augmenter la consommation, et qu'importe qu'on emploie moins de bras pour fabriquer une pièce de drap, si l'on fabrique un plus grand nombre de pièces.

Avant l'introduction des métiers à bas en France, on tricotait les bas à la main, et des provinces entières subsistaient de ce travail. L'opinion populaire s'éleva contre l'usage des métiers; on eût dit que cette invention condamnait des milliers de malheureux à mourir de faim. Qu'arriva-t-il cependant ? C'est

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