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nous ne faisons pas difficulté de croire qu'on eût trouvé les tribunaux plus sévères, si l'on se fût fait un jeu de refuser en chassant l'exhibition d'un port-d'armes dont on était légalement tenu d'être porteur, et de déterminer par ce moyen des poursuites inutiles de la part du ministère public, dont le caractère se trouverait ainsi compromis par des citations qu'il dépendrait des inculpés de rendre vaines et frustratoires.

L'article onze de la loi du 3 mai 1844 n'est pas conçu dans les mêmes termes que le décret de 1812. Il dit seulement seront punis d'une amende de 16 francs à cent francs, ceux qui auront chassé sans permis de chasse. Doit-on en conclure qu'il suffit, de l'avoir obtenu et que l'on est légalement exempt de peine, quand on s'abstient d'en justifier lorsqu'on en est requis par les agents de répression? La solution de cette question est plus difficile aujourd'hui, que lorsque le décret de 1812 était en vigueur; ce sera aux tribunaux à la décider par voie d'interprétation et à compléter ainsi l'œuyre du législateur. Mais il nous semble que sans violenter le texte de la loi, l'on peut encore juger que l'exhibition à toute réquisition est obligatoire et que celui qui, chassant, ne justifie pas du permis qu'il a obtenu, peut être réputé avoir chassé sans permis. Si on admettait pour tous les cas, que les chasseurs ne sont point tenus de représenter leur permis de chasse aux gardes et aux gendarmes qui les en requièrent, l'accomplissement des devoirs de ces agents serait des plus difficiles et déterminerait infructueusement la perte d'un temps précieux employé à la rédaction de procès-verbaux inefficaces.

5. Le chasseur avec permis de chasse qui n'a pas été sommé par les gendarmes ou par les gardes de justifier de son permis, est néanmoins passible d'action correctionnelle, et doit justifier de ce permis au tribunal devant lequel il est cité, à peine de condamnation

Vainement il dirait que le permis était à sa disposition lorsqu'il a chassé, qu'il n'a pas dû le conserver depuis, et que l'autorité doit s'imputer de ne l'avoir pas sommé de le produire. Ni le décret du 11 juillet 1810, la loi du 3 mai 1844, ni aucune autre, n ont subordonné le devoir de la justification du permis de chasse à une sommation préalable, faite au prévenu pour le mettre en demeure.

Le permis de chasse est une exception que le prévenu peut opposer au ministère public, mais qu'il ne peut faire valoir utilement sans en établir la preuve. (Cassation, 26 mars 1825.)

6. Des prévenus de délit de chasse sans permis, ne peuvent être renvoyés des poursuites sous prétexte 1° qu'ils n'ont chassé que le renard; 2° que cette chasse était autorisée par le maire;

3° qu'ils ignoraient les lois de la matière et qu'ils ont agi de bonne foi. (Cassation, 1 juillet 1826.)

7. Le fait de chasse sans permis, dans un bois qui n'est entouré que de fossés, est un délit pour qu'il n'y cût pas délit, il faudrait que le bois formât enclos et fût lié à une habitation. En fait de chasse, la loi ne reconnaît d'enclos que le lieu fermé au public, lié à une habitation et ne faisant avec elle qu'un corps de propriété sans intermédiaire. Un enclos doit être considéré comme l'habitation dont il est l'accessoire. (Cass., 29 mars 1823.)

8. L'arrêté par lequel un préfet défendrait de porter sans autorisation, des armes non prohibées, ne serait pas obligatoire pour les tribunaux, et aucune peine ne pourrait être prononcée pour son infraction.

Le 16 décembre 1808 le préfet du département de Monttonnerre prit un arrêté ainsi conçu :

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Art. 1 I es permis de port d'armes délivrés en 1808 seront annulés au 1er janvier 1809;

Art. 2. Nul ne pourra porter désormais, hors de sa demeure, une arme quelconque, à feu ou autre, sans un permis délivré par le préfet.

Art. 3. Il sera acquitté pour chaque permis une somme de 10 francs, plus un franc pour timbre, papier et impression.

Art. 15. Toute personne qui sera trouvée armée, sans s'être conformée aux dispositions ci-dessus, sera punie d'une amende de trois journées de travail, ou de trois jours d'emprisonnement, ainsi que de la confiscation des armes saisies, ou même d'une peine plus grave s'il y a lieu, conformément à la loi du 23 thermidor en 4.

Le 9 avril 1810, le maire de la commune de Wolfstein constata que Schneider avait été trouvé portant un fusil sans en avoir préalablement obtenu la permission. Schneider, traduit au tribunal de police pour violation de l'arrêté du préfet, fut renvoyé de la plainte. Le maire se pourvut en cassation contre le jugement, mais par arrêt en date du 25 mai 1810, la cour, considérant qu'aucune loi ne prohibe le port-d'armes, qu'aucune disposition prohibitive de l'arrêté du préfet du département de Monttonnerre du 16 décembre 1808, sur le port-d'armes, ne peut donc se rattacher dans son infraction à aucune peine qui soit prononcée par une loi en vigueur.

Que la loi du 23 thermidor an 4, rapportée dans l'art. 15 de cet arrêté, n'a pour objet que les délits ruraux absolument étrangers au port-d'armes :

Que dans ces circonstances, le tribunal de Wolsfstein qui n'aurait pu, sans commettre un excès de pouvoir, prononcer une peine qui n'aurait pas été ordonnée par une loi dont l'insertion aurait dû être faite dans son jugement, s'est renfermé

dans le cercle de ses attributions en renvoyant de l'action intentée, Schneider contre qui elle était dirigée par le ministère public.

Par ces motifs, la cour rejette le pourvoi du maire du canton de Wolfstein, en cassation du jugement rendu le 25 avril dernier à l'égard de Schneider.

Il est facile d'apprécier l'arrêté du préfet du département de Monttonnerre, et de reconnaître qu'il avait été pris en dehors des attributions de l'autorité administrative. En effet, en matière de police et en cas d'infraction aux réglements faits par l'administration, les tribunaux ne peuvent punir les infractions qu'autant que les réglemen's se rattachent à l'exécution d'une loi existante et portant une peine contre les contrevenants, ou qu'ils rentrent dans les objets confiés à la vigilance et à l'autorité des administrations municipales. Dans l'espèce, l'arrêté que nous venons de rapporter ne se rattachait à l'exécution d'aucune loi précédente en vigueur, et ne portait sur aucun des objets compris dans la disposition de l'art. titre 11 de la loi du 24 août 1790.-L'infraction à ce réglement ne pouvait donc rentrer dans l'application d'aucune loi pénale.

Les tribunaux ne sont compétents pour connaître des contraventions aux arrêtés de l'autorité administrative, que relativement à ceux de ces arrêtés qui ont été rendus sur des objets de police confiés à leur vigilance par la loi du 24 août 1790, ou par des lois particulières. Or, nulle loi ne défend le portd'armes sans permis, que lorsque le fait de chasse s'y trouve joint.

9. Celui qui porte des armes sans chasser ne commet ni délit ni contravention, le port-d'armes non-prohibées ni cachées étant un fait licite. (Cass., 10 septembre 1831.)

10. Tout Français jouissant de ses droits civils a celui de porter des armes pour sa défense personnelle, et le fusil de chasse n'est pas une arme prohibée. Ce droit de porter des armes pour sa défense a été consacré par l'art. 42 du code pénal qui le met au nombre des droits civiques dont les tribunaux peuvent, en certains cas, interdire l'exercice.

ARMES PROHIBées.

11. Le port et l'usage des fusils à vent sont défendus par le décret du deux nivôse an 14.

Tout porteur d'armes prohibées est passible d'un emprisonnement de 6 jours à 6 mois et d'une amende de 16 fr. à 200 fr., aux termes des art. 314 du code pénal et 1er de la loi du 24 mai 1834. L'art. 315 du code pénal autorise les tribunaux à placer sous la surveillance de la haute police, pendant 2 ans

au moins et 10 ans au plus, tous individus trouvés porteurs d'armes prohibées.

Il y a des armes défendues à toutes personnes, et proscrites notamment par la déclaration du 23 mars 1728 qui défend de porter sur soi des baïonettes, des pistolets ou autre arme offensive cachée et secrète, comme épée en bâton, etc., à peine de 500 fr. d'amende et de 6 mois de prison. Le décret du 12 mars 1806 ordonna l'exécution et la réimpression de cette loi souvent renouvelée par des réglements de police, et qui n'a jamais été abrogée par aucune loi nouvelle.

Le décret du 2 nivôse en 14 ordonna que toute personne trouvée porteur de fusil ou pistolet à vent, serait poursuivie devant les tribunaux correctionnels pour y être condamnée suivant la déclaration du 23 mai 1728.

La défense de porter ou de fabriquer des armes prohibées a encore été renouvelée par l'art. 314 du code de brumaire en 4.

12. L'art. 3 du titre 20 de l'ordonnance de 1669 interdisait à toute personne, sans distinction de temps ni de lieu, l'usage des armes à feu brisées par la crosse ou le canon; mais ces dispositions ne peuvent aujourd'hui être d'aucun effet. Quant à la manière dont chacun peut chasser sur ses possessions, l'art. 3 du décret du 4 août 1789 n'a apporté aucune restriction au droit de chasse.

Toutefois, si des ordonnances de police ou des lois défendaient, dans des vues d'utilité publique, l'usage des armes à feu brisées par la crosse ou par le canon, l'on encourrait une peine en s'en servant. Ce serait alors des armes prohibées dont on ne pourrait faire usage.

DECRET DU 23 DÉCEMBRE 1805

Qui interdit l'usage et le port des fusils et pistolets à vent.

Art. 1. Les fusils et pistolets à vent sont compris dans les armes offensives dangereuses, cachées et secrètes, dont la fabrication, l'usage et le port sont interdits par les lois.

Art. 2. Toute personne qui, à dater de la publication du présent décret, sera trouvée porteur desdites armes, sera poursuivie et traduite devant les tribunaux de police correctionnelle, pour y être jugée et condamnée conformément à la loi du 23 mars 1728.

13. La déclaration du roi du 23 mars 1728, relative aux armes cachées et secrètes, et remise en vigueur par les décrets des 23 décembre 1805 et 12 mars 1806, doit encore être observée aujourd'hui dans celles de ses dispositions qui n'ont pas été

modifiées par des lois postérieures, quant à la quotité des peines et amendes.

En conséquence, le port de pistolets de poche mentionnés dans ladite déclaration, est passible des peines déterminées par la loi. Une ordonnance du roi en date du 23 février 1837, range les pistolets de poche au nombre des armes prohibées.

14. L'avis du conseil d'état du 17 mai 1811, concernant la faculté de porter en voyage des armes pour sa défense personnelle, ne s'applique qu'aux armes apparentes et défensives, et non aux arines cachées et secrètes.

Le port des armes apparentes, telles que pistolets d'arçon et de ceinture, est permis en voyage, notamment par l'art. 5, titre 30 de l'ordonnance des eaux et forêts de 1669. Le port des pistolets de poche qui sont des armes offensives, cachées et secrètes, est prohibé par la déclaration du roi du 23 mars 1728 qui en défend toutes fabriques, commerce, vente, débit, port et usage, sous les peines y énoncées.

Les articles 314 et 484 de code pénal punissent d'une amende de 16 à 200 francs le port des armes prohibées.

Ainsi, il y a lieu à poursuites correctionnelles contre celui qui aurait été trouvé porteur de pistolets de poche, et aussi comme complice, contre celui qui les lui aurait fournis. (Cass., 6 août 1824.

15. Aux termes de la loi du 6 octobre 1791, les gardeschampêtres, les gardes des bois de l'état et des communes peuvent faire usage d'un fusil simple, lorsque, pour exercice de leurs fonctions, il y sont autorisés par le préfet de leur départe ment. Mais une circulaire du ministre de la police, en date du 6 mai 1806, leur a retiré cette faculté.

Plus tard, l'ordonnance du 24 juillet 1816 leur a permis, lorsqu'ils y sont autorisés par le préfet, de porter un fusil de guerre, et à défaut un sabre ou une lance.

16. Le gouverneur des possessions françaises en Afrique a le droit de promulguer, pour y avoir force de loi, les actes législatifs concernant la chasse.

L'ordonnance du 22 juillet 1834 lui confère le droit de faire en cette matière des arrêtés qui équivalent à une promulgation des actes législatifs dont il s'agit cela rentre dans les attributions qui lui sont conférées par l'article 5 de ladite ordonnance. · Arrêt de la cour de cassation du 21 mai 1836.

Ainsi tout individu qui, dans l'Algérie, se livre à l'exercice de la chasse devient passible des peines portées par les lois fran.çaises qui ont été promulguées dans la forme indiquée en l'ordonnance précitée.

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