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que sous la condition qu'il n'aurait que les deux tiers de ses revenus, et qu'il retournerait à l'âge de sa majorité dans sa patrie, et y établirait son domicile.

La régence de son pays ne lui a donc laissé ni l'administration de ses biens, ni la liberté de s'établir ailleurs que chez lui; il restait donc mineur et étranger.

Ayant contracté mariage avec une Française, cette Française ne lui donnait pas la qualité de citoyen français; au contraire, suivant la condition de son mari, elle devint elle-même étrangère. Art. 19 du Code Napoléon.

Arnsperger n'a pas de domicile en France, et ne peut pas y en avoir; il ne fait que résider momentanément en France.

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Pour qu'il pût devenir Français pendant sa minorité, il lui aurait fallu la permission du gouvernement de son pays; il ne l'a pas.

Et supposé qu'il pût le devenir sans le consentement de ses tuteurs et de son souverain, avant l'âge de vingt-cinq ans, il faudrait qu'il se fût adressé au gouvernement français, pour être admis à établir son domicile en France, et y jouir des droits civils (art. 13 du Code Nap.) ou qu'il se fût placé à Durckheim, dans l'intention d'y fixer son domicile, et qu'il y eût fait sa déclaration expresse à la municipalité, ou que cette intention de changement de domicile résultât d'autres circonstances. Art. 103, 104 et 105 du Code Nap.

Il ne s'est jamais adressé au gouvernement français pour obtenir la permission de se fixer en France; jamais déclaration n'a été faite à la municipalité de Durckheim, et aucune circonstance n'annonce qu'il ait voulu contrevenir à l'ordre de sa régence, et se domicilier à Durckheim.

Il n'est donc pas Français.

Mais supposé même qu'il existât des circonstances desquelles on pourrait inférer qu'il fût domicilié en France, ou qu'il fût Français, ce serait assez qu'il se fût élevé une discussion sur cette question préliminaire, pour que le tribunal de commerce eûl dû suspendre la connaissance du fond, et renvoyer les parties pour faire prononcer sur la question préalable par les juges compétens.

Ses jugemens doivent donc être annullés pour cause d'incompétence et excés de pouvoirs.

Le dernier motif du jugement a trait au fond, et ne mérite aucune réfutation, puisqu'il consacre une hérésie judiciaire. Qui cum alio contrahit, vel est, vel debet esse non ignarus conditionis ejus cum quo contrahit, dit l'adage de droit. Dans le système du premier juge, tous les contrats passés avec des mineurs devraient donc être valables, à moins qu'il n'eût été publié qu'ils étaient mineurs.

L'intimé a répondu :

Qu'il lui paraissait inutile d'entrer dans l'examen du mérite des considérans du premier juge, par la raison qu'en tout cas il avait bien jugé au fond..

Les

Les mineurs ne sont pas, d'après les principes de droit, restitués comme mineurs, mais comme lésés. Non tanquam minores, sed tanquam læsi. Donc, dès qu'il était prouvé au premier juge que l'appelant n'a pas souffert de lésion, et dès qu'il s'agissait de lettres de change, à l'égard desquelles les tribunaux de commerce sont compétens pour en connaître entre toutes personnes (art. 2 du titre 12 de l'ordonnance de commerce de 1673). Le tribunal de commerce de Mayence n'avait plus à s'occuper de l'état de l'appelant mineur ou majeur, il était soumis à sa juridiction et devait être condamné au paiement des lettres de change qu'il avait souscrites.

Pour justifier le jugement attaqué, il ne reste par conséquent qu'à prouver que l'appelant n'a point été lésé.

Or, c'est un fait avoué que l'intimé a prêté son argent à l'appelant, pour le sauver de la contrainte par corps que d'autres créanciers allaient faire prononcer contre lui, et que cet argent a été employé à l'acquittement de ces créanciers.

Ainsi, il y avait in rem versum, et cela seul suffit pour maintenir le jugement attaqué, quoique par d'autres motifs que ceux allégués par le premier juge,

Mais les appelans ont répliqué que la question de savoir, si le mineur a été lésé ou non, est déjà de sa nature hors des attributions des tribunaux de commerce, et appartient à la connaissance des juges ordinaires; sur-tout lorsque, comme dans l'espèce, le mineur ne fait pas notoirement le commerce;

Que l'intimé était d'ailleurs dans une grande erTome 1, N." 1.

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reur,

s'il croyait qu'un emprunt fait en minorité pour payer des dettes ruineuses, également contractées en minorité, pût être considéré comme une dette légitime, tournée à l'avantage réel du mineur; tandis que la saine raison nous dit déjà que l'une et l'autre sont affectées du même vice.

ARRÊT TEXTUEL.
TUEL.

<< Attendu que quoique l'action au fond ait pu « être portée devant le tribunal de commerce, néan « moins l'incident qui s'est élevé devant ce tribunal, « sur la question de savoir, si la majorité du dé« fendeur devait étre réglée d'après les lois de l'em« pire français, ou bien d'après les lois du pays « où il est né, ne pouvait être décidée par le même << tribunal, cette question étant d'ordre public, et ne pouvant être jugée par des tribunaux d'excep«<tion mais seulement par les tribunaux ordi<< naires ;

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« Par ces motifs,

« La Cour dit qu'il a été incompétemment et nul. «lement jugé par le jugement du tribunal de com«merce de Mayence, du 2 complémentaire an XIII, << en ce qu'il a prononcé sur la question relative à « la majorité de l'appelant; en conséquence annulle « ledit jugement et tout ce qui s'en est suivi; rena voie sur ladite question les parties devant qui de « droit, sauf à revenir sur l'action principale devant « le tribunal de commerce, s'il y a lieu, etc., etc. »

Prononcé le 10 juillet 1807.

Plaidant MM. Ruppenthal, pour les appelans; Georgel, assisté de Begin, avoué, pour l'intimé.

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« Les actes sous seing-privé, qui contiennent des ■ conventions synallagmatiques, ne sont valables « qu'autant qu'ils ont été faits en autant d'originaux • qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct.

Il suffit d'un original pour toutes les personnes • ayant le même intérêt.

Chaque original doit contenir la mention des ori« ginaux qui en ont été faits.

« Néanmoins le défaut de mention que les origi « naux ont été fails doubles, triples, etc. ne peut étre a opposé par celui qui a exécuté de sa part la con« vention portée dans l'acte ». Art. 1325, Code Napoléon.

DANS les contrats et conventions, l'engagement doit être réciproque; s'il dépend de la volonté de l'une des parties de rendre la convention sans effet, l'engagement est nul.

Il ne suffit donc pas de rédiger, en double ou tri

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