Page images
PDF
EPUB

fleur de Lotus, quelquefois avec une coîffure tout-à-fait Ægyptienne, telle que nous l'offrent fréquemment les momies et différens ouvrages de sculpture; tout cela, cependant est déjà un peu grécisé; de l'autre côté est Osiris qui, outre ses attributs ordinaires, porte encore quatre aîles.

On sait que sur les Monumens Ægyptiens, plusieurs Divinités, entr'autres Isis, sont quelquefois représentées avec des aîles, mais Osiris. n'en a jamais; il se peut que le voisinage de la Sicile, dont les médailles offrent des Divinités aîlées (21), ait engagé les habitans de Malte à donner cet attribut à leurs figures d'Osiris; mais le nombre des aîles, c'est-à-dire quatre au lieu de deux, est une idée tout-à-fait Ægyptienne dont les Monumens nous offrent beaucoup d'exemples (22).

On sera moins surpris de voir sur les médailles de Catane, le sistre, Isis et son fils Horus, lorsqu'on voudra se rappeller que les Grecs confon

(21) Sur les médailles de Camarina, on voit des divinités ailées. M. Münter rapporte à cette occasion qu'il a vu chez un habitant d'Agrigente un moule en argile d'une Cérès ailée, qu'on y avoit trouvé sous les ruines d'un temple, et qui probȧblement avoit servi pour couler des figures de cette déesse.

(22) M. Münter cite, à ce sujet, une peinture de momie de la collection de feu le cardinal Borgia, dans laquelle on distingue deux figures ayant chacune quatre ailes. L'une a quatre têtes de bélier et les attributs ordinaires d'Osiris; M. Munter pense qu'elle a quelque rapport avec Ammon; l'autre a une tête de femme entre six têtes d'animaux. Dans le voyage de M. Denon, (pl. cxxvi), on voit aussi des figures AEgyptiennes ailées.

doient Isis et Demeter ( Cérès), et que la Sicile étoit le pays d'où étoit parvenu aux Grecs, le culte de la déesse à qui on attribuoit l'invention de l'agriculture; que son temple, le plus célèbre après celui d'Eleusis, étoit au milieu de la Sicile, et qu'on regardoit l'île entière comme appartenant à cette déesse et à sa fille. D'après cela, on ne doit donc pas être étonné de ce que les médailles de Catane offrent quelques représentations de Cérès sous les traits d'Isis, mais plutôt de ce qu'il n'y en a pas un plus grand nombre sur celles des autres villes de la Sicile. Il nous reste cependant, plusieurs traces des liaisons de cette ville avec l'Egypte, et M. Münter y revient vers la fin de sa dissertation.

Outre les médailles de Malte, plusieurs autres Monumens de cette île offrent des traces évidentes d'idées Ægyptiennes, et les découvertes faites en Ægypte, par les savans et les artistes qui ont fait partie de l'expédition française, autorisent à revendiquer pour les Ægyptiens plusieurs Monumens trouvés à Malte, et qui, jusqu'à présent ont été attribués aux Phéniciens.

Auprès de Citta nobile, on a trouvé en 1624, dans une chambre sépulchrale un Sarcophage en terre cuite, dont la forme extérieure ressem→ bloit beaucoup à celle d'une Momie, et qui contenoit encore les restes d'un corps humain. Il est vrai que la forme de ce Sarcophage n'est pas entièrement Ægyptienne; mais du moins la coiffure

l'est tout-à-fait et si la gravure qu'Abélà (23) en a donnée étoit faite avec plus de soin, il est probable qu'on trouveroit encore dans d'autres parties des points de ressemblance avec le costume Ægyptien. Abelà possédoit deux autres Sarcophages semblables, qui probablement existent encore à Malte. On ne peut pas cependant assurer que les tombeaux auxquels ils appartenoient fussent des tombeaux Egyptiens, car l'usage d'embaumer les morts et de les placer dans des Sarcophages, étoit aussi connu en Palestine et dans la Palmyrène ; il pouvoit d'après cela être en vigueur chez les Phéniciens et dans leurs colonies. Mais un petit Harpocrate en bronze, également trouvé à Malte et publié par Abelà (24) est sans doute d'origine Ægyptienne, quoique d'une époque moins reculée, et probablement de celle où les artistes Grecs s'occupoient à représenter des sujets de la mythologie Ægyptienne.

M. Münter pense qu'on ne sauroit porter un jugement aussi décisif d'une lame d'or de forme oblongue, qui étoit renfermée dans une petite capsule d'or et qu'on a trouvée dans la même île en 1693. Ce petit Monument publié par le prince Torrémuzza (25), offre sur deux rangées des

(23) Fra giov. Franc. ABELA descrittione di Malta Isola nel mare Siciliano, colle sue antichità ed altre notitie, Malta, 1647, p. 153.

(24) Ibid, p. 191.

(25) Siciliæ et adjacentium insularum veterum Inscrip tionum nova collectio; Panormi, 1769, classis xx. p. 299.

figures bizarres d'hommes, des figures humaines à tête d'animaux et des serpens. Au premier aspect, dit-il, tout cela paroît en effet être tout-àfait Egyptien. On y distingue même une figure à tête de chien, et ayant dans la main le Tau Ægyptien que portent encore plusieurs autres figures. On y pourroit aussi découvrir un buste d'Apis, et le bouc de Mendès; le tout paroît avoir évidemment rapport au culte des serpens. M. Münter pense qu'on ne doit pas regarder ce Monument comme Ægyptien ; il se croit plutôt porté à croire qu'il a rapport au culte secret des serpens connu parmi les Phéniciens; peut-être ce culte étoit-il d'origine Ægyptienne, que par la suite il a passé chez les Phéniciens, et que parmi eux il a changé son caractère primitif.

Le prince Torrémuzza a publié encore dans le même ouvrage (26), un vase de terre cuite avec des caractères que ce savant regarde comme Phéniciens, mais que M. Münter croit être Ægyptiens.

A Malte et dans les îles voisines, on trouve donc des traces évidentes de la langue et des idées religieuses des Ægyptiens. Quant à ces dernières, M. Münter fait cette observation très-fondée qu'elles devoient être autorisées publiquement, puisqu'elles sont exprimées même sur les monnoies du pays. Jupiter - Ammon, Osiris, Isis, Phthas et le bœuf sacré, étoient des objets du (26) Page 298.

culte religieux des habitans de ces différentes îles ; il faut donc croire que les Ægyptiens ont été pendant quelque temps les maîtres de Malte, de Gaulos et de Cossura, ou qu'ils y ont du moins exercé une influence assez grande pour qu'elle ait pu s'étendre jusque sur la religion du pays.

Les historiens nous laissent dans une ignorance absolue sur ce fait dont l'exactitude est garantie cependant par l'autorité des médailles. Mais cellesci ne nous donnent pas assez de lumières sur l'époque où ce mélange de la religion Ægyptienne avec celle des Phéniciens et des Carthaginois a eu lieu dans les îles de Malte de Gaulos et de Cossura.

[ocr errors]

M. Münter s'est occupé à rechercher cette époque. Swinton, dit-il à ce sujet, a publié une médaille de Gaulos avec la légende ΒΑΣΙΛΙΣΣΑΣ QIAIETIAOE dont le type est, du reste, dans le goût des autres médailles de cette île. Cette médaille est la seule de ce genre qui soit connue jusqu'à présent; si son authenticité étoit incontestable, M. Münter seroit porté à croire qu'elle appartient au 4. siècle avant notre ère, au temps des derniers rois de Perse, depuis ArtaxerxesMnemon. Mais on a lieu de suspecter l'authenticité de cette médaille, et il paroît que quelque faussaire l'aura fabriquée, en ajoutant le nom de Philistis à une médaille authentique. En effet, il n'en existe que le seul exemplaire conservé dans la bibliothèque Bodléienne, à Oxford, et on n'en a pas encore découvert dans la Sicile ni dans

« PreviousContinue »