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qu'ils ont été dans l'impossibilité de livrer la voiture pour le délai fixé, les essieux, commandés à Paris, ayant été retenus en voyage au delà de toute prévision, ce qui, vu les circonstances dans lesquelles s'est trouvée l'exploitation des chemins de fer, doit être considéré comme cas de force majeure.

JUGEMENT:

«Attendu qu'à la date du 5 juillet 1871, la maison défenderesse s'est obligée verbalement de fournir au demandeur une voiture neuve et telle qu'il a été convenu entre parties pour un jour fixé; que le défendeur s'est de plus obligé de fournir cette voiture au demandeur à Trèves, le 1er septembre 1871, au plus tard;

> Attendu que cette voiture n'a été offerte en livraison au demandeur que le 7 octobre suivant; que du chef de ce retard de trente sept jours, le demandeur a fait valoir des prétentions à des dommages-intérêts, et que, ne pouvant tomber d'accord avec la défenderesse, il a refusé d'accepter la voiture dont s'agit;

»Attendu que la défenderesse fait valoir que, par suite de difficultés de transport par chemin de fer pendant tout le cours de l'été de 1871, les essieux devant servir à la construction de la voiture du demandeur, et commandés à Louvreil-lez-Maubeuge, ont été retenus en voyage au delà de toute prévision, et que cette circonstance est à considérer comme cas de force majeure, rendant l'art. 1148 du C. c. applicable dans l'espèce;

>Attendu qu'on ne peut considérer comme fait de force majeure dans le sens de l'art. 1148 du C. civ., et par suite comme devant faire écarter l'ac

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VENTE PAR UN SECOND ACTE AU PROFIT DE L'UN DES DONATAIRES. VENTE DE DROITS SUCCESSIFS.

1. Deux actes, dont le premier porte

abandon par les père et mère de la totalité de leurs biens meubles et immeubles, avec réserve d'usufruit, et dont le second, passé pour ainsi dire simultanément avec le premier, devant le même notaire et les mêmes témoins, portant vente de leurs parts indivises pour une somme déterminée par deux des enfants, ainsi gratifiés, au dernier et troisième enfant institué dans le bien, constituent dans leur ensemble le partage d'ascendant prévu par l'art. 1075 du Code civil.

2. La stipulation de la réserve d'usufruit au profit des père et mère donateurs et du dernier vivant d'eux, quoique contenant un certain risque à charge de l'enfant institué, ne suffit pas pour imprimer à la convention de vente intervenue entre les enfants

le caractère d'une vente de droits successifs, non rescindable pour cause de lésion, aux termes de l'art. 889 du C. civ. (*).

Belche c Belche.

« Attendu que les deux actes Mertens, du 6 décembre 185%, constituent dans leur ensemble un partage d'ascendant;

»Attendu, en effet, que par le premier de ses actes, les père et mère Belche font abandon à leurs trois enfants de la totalité de leurs biens actuels, meubles et immeubles, avec réserve d'usufruit jusqu'au décès du dernier vivant d'eux, et que, par le second, passé pour ainsi dire simultanément avec le premier, devant le même notaire et les mêmes témoins, deux des enfants ainsi gratifiés, vendent, avec la charge ci-dessus, au troisième enfant, aujourd'hui institué dans le bien Belche, leurs parts indivises pour une somme déterminée; que ces deux actes, faits au profit et entre tous les enfants Belche, et contenant arrangement définitif sur tout le patrimoine de leurs auteurs, par l'unité de temps qui a présidé à leur confection, par l'esprit qui les a dictés, les causes déterminantes y énoncées, par le but proposé y relaté, par le concours plus que probable prêté par les père et mère aux stipulations y consignées, lesquelles sont à considérer comme la condition sine qua non de l'acte d'abandonnement, que ces deux actes se lient intimément, ne forment qu'un seul et même tout et constituent en réalité le partage d'ascendant prévu par l'art. 1075 du Code

(*) Conf. no 823 et notes ci-avant.
R. G. 1873.

civ. (Cass. Fr., 10 nov. 1862; Lyon, 1er mars 1865; Nimes, 22 août 1865; Limoges, 29 déc. 1868);

»Attendu que tout partage d'ascendant est rescindable pour cause de lésion de plus du quart;

»Attendu que, d'un autre côté, le défendeur prétend que la présente action en rescision pour cause de lésion de plus du quart n'est pas recevable, et ce, aux termes de l'art. 889 du C. civ.; qu'en effet le second des actes Mertens, qui a fait cesser l'indivision entre parties, constitue une vente de droits successifs, faite à ses risques et périls par ses codonataires; que ceux-ci, comme le porte expressément l'acte en question, lui ont vendu leur part indivise, sous la simple garantie de leurs faits el promesses, à ses risques et périls, et pour une somme stipulée à titre de forfait; qu'en réalité, à raison de la circonstance que les droits vendus étaient grevés d'usufruit au profit des père et mère et au dernier vivant d'eux, ladite convention de vente s'est trouvée affectée de l'aléa le

que

législateur a eu en vue dans l'article

889 du Code civil;

» Attendu que ces prétentions de la partie défenderesse ne sont pas

fondées;

»Attendu que ce n'est pas aux mots qu'il faut s'attacher pour apprécier le caractère d'une vente, mais bien à la chose, à la réalité du fait;

»Attendu que l'art. 889 du C. civ. ne peut trouver son application dans l'espèce; que la cession, intervenue par l'acte Mertens, n'est pas affectée de l'aléa tel qu'il est exigé par cet article; que cet aléa doit porter sur le droit héréditaire lui-même avec

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toutes ses incertitudes et ses chances (Demolombe, Successions, sur l'art. 889, no 444); que, dans l'espèce, les droits des parties, lors de la cession, étaient bors de tout conteste; qu'il résulte des faits et circonstances que le periculum, résultant d'un passif éventuel et ignoré, était nul; que les biens immeubles, cédés au défendeur, étaient parfaitement connus de toutes les parties, et que ceux meubles avaient été énumérés et estimés dans l'acte de donation Mertens, précédant immédiatement l'acte de vente en question;

>Attendu que la stipulation de la réserve d'usufruit au profit des père et mère donateurs et du dernier vivant d'eux, intervenue dans les deux actes Mertens, quoique contenant un certain risque à charge de la partie défenderesse, ne suffit pas pour imprimer à la convention de vente dont s'agit, le caractère d'un contrat aléatoire, devant être réglé par les dispositions de l'art. 889 du C. c.;

» Attendu que de nombreux actes de donation, comprenant la totalité de leurs meubles et immeubles, faits par des ascendants à l'un de leurs enfants, à charge de leur payer une rente viagère, ou bien avec réserve d'usufruit, et moyennant paiement de désistements aux autres enfants, ont été considérés par la justice du pays comme partages d'ascendant et déclarés rescindables pour cause de lésion de plus du quart (Arrêts de la Cour du 22 déc. 1848 et 23 nov. 1849 et autres, J. S. art. 373 et notes) (*); >Attendu d'ailleurs que, dans les

(*) Conf. notre Table gén. de 1857; déc. de

mœurs de nos campagnes, l'usufruit réservé aux ascendants sur un bien dans lequel un de leurs enfants se trouve institué, comme nu-propriétaire, ne constitue, au détriment de ce dernier, qu'une charge relativement minime;

Attendu qu'il échet de réserver la question de savoir, si la partie dé fenderesse a payé en entier ou non le prix stipulé dans l'acte de cession Mertens;

»Par ces motifs :

>Le tribunal dit que les deux actes d'abandonnement et de vente, passés devant le notaire Mertens, le 6 déc. 1855, constituent dans leur ensemble un partage d'ascendant; dit que ladite vente n'est pas nulle, comme portant sur le quart précipuaire, donné aux époux Welter-Belche, par contrat de mariage Rischard, du 25 juin 1840, et avant faire droit sur l'action en rescision pour cause de lésion, commet les sieurs ......, experts en cause, à l'effet d'évaluer les biens meubles et immeubles ayant fait l'ob jet desdits deux actes, du 6 décembre 1855, et ce d'après leur valeur au jour de ces actes; donne acte au défendeur Belche, qu'il entend fournir aux demandeurs le supplément de leur portion héréditaire, soit en nature, soit en numéraire, conformément à l'article 891 du C. c.; réserve la question de savoir si le défendeur Belche a payé en entier ou non le prix de cession stipulé dans l'acte de cession Mertens, du 6 décembre 1855. »

-Jugem. du tribunal de Diekirch, du 9 février 1872; prés. M. Funck;

1857 à 1867 (ce Rec., 1. 1, verbis Partage pl. MM Salentiny et Wolff.

d'ascendant); ce Rec., no 704.

COMPÉTENCE.

N° 827.

JUGE DE PAIX.- - RELIQUAT D'UNE SOMME PLUS Forte. PREUVE TESTIMONIALE.

A. La compétence du juge de paix se détermine d'après la somme demandée et contestée; il importe peu que la somme demandée soit le reliquat d'une somme plus forte, excédant les limites de la compétence de ce juge;

B. Lorsque l'intérêt de la convention contestée est supérieur à 150 fr., la preuve testimoniale n'est pas admissible (Art. 1344 du C. c.); C. Cependant lorsque l'appelant a accepté et exécuté, en ce qui le concerne, le jugement qui ordonne dans un cas pareil une preuve testimoniale, il n'est plus recevable à le quereller en degré d'appel, toute partie pouvant valablement se soumettre à ce mode de preuve en dehors des cas où il est autorisé.

Wahl c. Agnès.

En ce qui concerne les exceptions d'incompétence opposées par l'appelant:

Attendu que l'intimé, demandeur originaire, exerce la profession de tailleur de pierres; qu'il porte cette qualification dans tous les actes de la procédure; que si le contrat d'entreprise intervenue entre parties, comprenait la fourniture de la matière première, son objet principal portait cependant sur la façon à donner par l'intimé à cette matière première; que, par conséquent, la nature du litige était civile, et le juge a quo compétent pour en connaître;

> Attendu que l'appelant excipe encore que la somme demandée dans

l'exploit introductif, à savoir, 64 fr. 82 c., formait le reliquat d'une somme supérieure au taux du premier ressort, et qu'aux termes de l'art. 1er de la loi du 27 décembre 1842, le

juge de paix était encore incompétent pour connaître du litige;

» Attendu qu'il a été établi devant. le premier juge, que l'appelant devait à l'intimé, pour fournitures de pierres de taille et de dalles, une somme de 239 fr. 97 c., et qu'après dus paiements en à-compte et compensations, celui-là restait redevable à celui-ci d'une somme de fr. 64.52;

» Attendu que la compétence du juge de paix se détermine d'après la somme demandée et contestée; que si cette somme ne dépasse pas la limite de ses pouvoirs, il est compétent pour l'adjuger; qu'il importe peu que, pour décider si la chose demandée est due, le juge ait à s'élever à l'appréciation de conventions d'une valeur plus importante, sur lesquelles les parties ne lui demandent aucune décision; que, pour lui comme pour les parties, cette appréciation n'est qu'un moyen de preuve ou de vérification de la demande, mais nullement l'objet du jugement à rendre; que s'il puise dans cette appréciation ses motifs de décision, ces motifs ne sont pas eux-mêmes sa décision ou son jugement; que, d'ailleurs, son jugement n'aura toujours l'effet de la chose jugée que sur la chose demandée; qu'il est par conséquent indifférent que la somme demandée par l'intimé dans l'exploit introductif eût été le reliquat d'une somme plus forte, excédant les limites de la compétence du juge de paix; que celui-ci, en statuant sur celle qui

faisait le seul objet de la contestation, portée devant lui, et qui ne dépassait pas le taux de sa compétence, a compétemment et valablement jugé ;

(Note de Devilleneuve sur un arrêt contraire de la cour de cass. France, du 22 juin 1836; arrêts conformes de la cour de cass. France, du 29 nov. 1846, 23 août 1858, 12 nov. 1863.) (*) En ce qui concerne la non-admissibilité de la preuve testimoniale:

Attendu que par jugement du 24 décembre 1870, le juge de paix a admis l'intimé et l'appelant à prouver par témoins, le premier, le fait de la convention portant sur la fourniture de pierres de taille intervenue entre parties, et, le second, sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 95 fr., laquelle lui serait due par l'intimé pour argent avancé et dépenses d'auberge;

»Attendu que l'appelant a exécuté le jugement en question, a assisté à l'audition des témoins de l'intimé, a produit et fait entendre les siens propres ;

»Attendu que l'appelant prétend que l'intérêt de la convention dont s'agit était supérieur à 150 fr.; que, partant, aux termes de l'art. 1344 du C. civ.. la preuve testimoniale n'en était pas admissible;

» Attendu qu'il résulte du jugement dont appel, que l'appelant a accepté la preuve testimoniale, offerte par l'intimé; qu'il est de jurisprudence, qu'une partie peut valablement sc soumettre à la preuve testimoniale en dehors des cas où cette preuve

(*) Conf. jugem. du tribunal d'Anvers, du 7 août 1852, de Bruxelles, du 18 nov. 1853.

est autorisée (Bourges, 16 déc. 1826; Rennes, 25 févr. 1841; Bordeaux, 16 janv. 1846); que la plupart des auteurs qui ont écrit sur la matière partagent cette manière de voir (Boitard, Thomine-Demazures, Dalloz, Chauveau sur Carré, Bonnier, Bioche); que, partant, l'appelant n'est plus recevable à soutenir que ce mode de preuve n'aurait pas dû être admis par le premier juge;

En ce qui concerne le fond:

» Attendu que le premier juge a bien apprécié les faits de la cause;

> Par ces motifs et ceux du pre

mier juge:

»Le tribunal rejette les exceptions d'incompétence opposées par l'appelant Wahl; dit que celui-ci n'est plus recevable à critiquer l'admission de la preuve testimoniale prononcée par le jugement interlocutoire du 24 décembre 1870, et statuant au fond, dit que le jugement de la justice de paix du canton de Diekirch, du 1er avril 1870, est bien rendu, le confirme en sa forme et teneur, condamne l'appelant à l'amende de fol appel et aux dépens. »

-Jugem. du tribunal de Diekirch, du 21 juin 1872; prés. M. Funck; pl. MMes Mongenast et Mergen.

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