Page images
PDF
EPUB

FEB 17 1911

DES AVOUÉS.

QUESTIONS.

ART. 4570.

J. SAISIE IMMOBILIÈRE, SOMMATION AUX CRÉANCIERS INSCRITS, SUBROGATION, SOMMATION NOUVELLE.

Lorsqu'une saisie immobilière régulièrement transcrite et suivie du dépôt du cahier des charges et de la sommation aux créanciers inscrits prescrite par l'art. 692, C. proc., a été abandonnée par le saisissant à raison du paiement de sa créance par le débiteur, mais toutefois sans qu'il y ait eu de sa part mainlevée de la saisie, le créancier inscrit qui s'est fait subroger dans les poursuites de saisie est-il tenu de remplir lui-même la formalité de la sommation, soit à l'égard des créanciers déjà précédemment sommés par le saisissant, soit à l'égard de ceux qui ne se sont fait inscrire que depuis cette première sommation?

L'abonné qui nous soumet cette question incline bien à croire que le renouvellement de la sommation, de la part du subroge, n'est pas nécessaire à l'égard des créanciers déjà sommés par le saisissant; mais le doute lui semble permis à l'égard des créanciers qui ne se sont fait inscrire que depuis cette première sommation. « D'un côté, l'on dira, nous écrit-il, que les nouveaux créanciers ont pris la situation hypothécaire dans l'état où elle était au jour de leur inscription. Mais, d'un autre côté, on objectera que tout créancier inscrit doit être

appelé à prendre communication du cahier des charges et lié à la poursuite, et que, sans cela, il n'y aurait point purge à son égard. »

Pour nous, une nouvelle sommation nous paraît ne pouvoir être exigée, ni vis-à-vis des créanciers déjà précédemment sommés par le saisissant, ni à vis-à-vis de ceux qui n'ont pris inscription que depuis l'accomplissement de cette formalité. Le créancier subrogé dans les poursuites de saisie, prenant purement et simplement la place du saisissant, ne peut être obligé de recommencer les actes de procédure déjà régulièrement faits par celui-ci; il ne peut être tenu de refaire que les actes qui se trouveraient nuls, et doit continuer les poursuites d'après les derniers errements valables (Chauveau, Lois de la proc., quest. 2416 sexties; Bioche, Dict. de proc., vo Saisie immobil., n. 637; Dalloz, Répert., vo Vente publ. d'imm., n. 1074). Il est de jurisprudence, notamment, que le subrogé peut poursuivre l'expropriation sans avoir à signifier un nouveau commandement au débiteur: pourquoi en serait-il autrement en ce qui concerne les sommations aux créanciers inscrits?

[ocr errors]

Le saisissant, auquel il est substitué, n'était tenu de faire sommation qu'aux créanciers qui se trouvaient inscrits lors du dépôt du cahier des charges (Nancy, 2 mars 1818, J. Av., t. 20, p. 515: Carré et Chauveau, quest. 2326; Favard, Répert., t. 5, p. 55; Bioche, loc. cit., n. 351; Grosse et Rameau, Comment. de la loi du 21 mai 1858, t. 1, p. 34, n. 7; Ollivier et Mourlon, Saisie immobil. et ordres, p. 295, n. 57; Seligman, Id., p. 144, n. 10; Dalloz, loc. cit., n. 811); et cette sommation une fois faite, il n'avait pas besoin de la réitérer dans le cas d'interruption des poursuites (Cass. 23 juill. 1817, S.-V. chr.; Pigeau, t. 2, p. 253, note 1; Bioche, n. 361). Le subrogé ne saurait être lui-même astreint à des obligations plus étroites. Les créanciers inscrits postérieurement à la sommation, prévenus par la transcription de la saisie et par la publicité donnée aux poursuites, doivent y intervenir, sans avertissement, pour surveiller leurs droits.

Vainement prétendrail-on que l'adjudication n'opérera pas la purge à leur égard. La disposition du § 7 de l'art. 717, Cod. proc., s'applique à toutes les hypothèques inscrites sans distinction les seuls créanciers vis-à-vis desquels la purge ne soit pas opérée sont ceux qui, bien qu'inscrits lors du dépôt du cahier des charges, n'ont pas reçu la sommation prescrite par l'art. 692, ou n'ont reçu qu'une sommation irrégulière. V. Ollivier et Mourlon, p. 434, n. 246; Colmet Daage, Comment. de la loi de 1858, p. 15, n. 980; Dalloz, n. 1819; Chauveau, quest. 2403.

I

ART. 4571.

II. TIMBRE, QUITTANCE, CONTRAVENTION, DÉNONCIATION PAR LETTRE, DOMMAGES-INTÉRÊTS, RECEVEUR D'ENREGISTREMENT, VIOLATION DU SECRET DES LETTRES, GARANTIE.

Celui qui dénonce par lettre à un receveur d'enregistrement la contravention résultant du défaut d'apposition d'un timbre de 10 cent. sur une quittance qu'il lui envoie dans cette même lettre, se rend-il passible de dommages-intérêts envers le signataire de la quittance?

Dans le cas de l'affirmative, le dénonciateur est-il fondé à exercer un recours contre le receveur d'enregistrement, à raison de la violation du secret des lettres que celui-ci aurait commise en annexant, sans nécessité, la lettre du dénonciateur au procès-verbal constatant la contravention?

Il ne suffit pas qu'un fait porte préjudice à autrui, pour que celui qui en est l'auteur se trouve soumis à l'application de l'art. 1382, Cod. civ.; il faut encore que ce fait soit illicite, c'est-à-dire qu'il ne soit ni commandé, ni autorisé par la loi. V. Sourdat, Responsabilité, t. 1, n. 643 (2o édit.). Or, doit-on reconnaître ce caractère à la dénonciation d'une contravention fiscale? Si la loi n'a pas étendu à ce genre d'infraction l'obligation qu'elle impose à tout citoyen de dénoncer le fait délictueux dont il a connaissance, ne permet-elle pas du moins au parculier qui vient à découvrir une contravention fiscale, de la signaler aux agents du Trésor? Il semble difficile d'en douter en présence de l'intérêt, minime sans doute, mais réel cependant, qu'a ce particulier à procurer au Trésor toutes les ressources qui lui ont été créées par la loi; n'est-ce pas alors le cas d'appliquer la maxime: Nullus videtur dolo facere qui suo jure utitur?

Il est vrai qu'une semblable dénonciation répugne à nos mœurs, et qu'on ne peut guère y recourir sans soulever contre soi une sorte de réprobation; mais cette considération ne suffit point pour lui faire perdre son caractère de stricte légalité.

En matière de délit, la dénonciation ne peut entraîner une condamnation à des dommages-intérêts contre le dénonciateur, qu'autant qu'elle a eu pour objet un fait reconnu faux; il ne saurait en être autrement en matière fiscale. Lorsque la contravention dénoncée aux agents du Trésor est constante, celui

qui l'a commise ne peut se plaindre d'avoir à subir la pénalité qu'il a réellement encourue.

Supposons cependant que la solution contraire doive être. admise. Le dénonciateur, condamné à des dommages-intérêts envers l'auteur de la contravention dénoncée, sera-t-il fondé à se faire garantir par le receveur d'enregistrement à qui il a adressé la dénonciation par lettre, sur le motif que ce préposé, en joignant sans nécessité cette lettre au procès-verbal par lequel il a constaté la contravention, aurait violé le secret des lettres à son égard ? Nous ne saurions le croire. Il est de principe, à la vérité, que celui qui a reçu une lettre confidentielle ne peut la produire en justice sans le consentement de la personne qui la lui a écrite; mais ce principe ne peut recevoir ici son application. La lettre par laquelle on dénonce une infraction au fonctionnaire chargé d'en poursuivre la répression, ne saurait être considérée comme confidentielle; et, dans le cas particulier dont nous nous occupons, le receveur d'enregistrement avait parfaitement le droit de joindre à son procès-verbal celle qui lui avait été adressée, afin d'indiquer par quelle voie la pièce contenant la contravention et renfermée dans cette lettre, lui était parvenue. Sans doute, la contravention était suffisamment établie par la représentation de cette même pièce, selon les termes du 3°S de l'art. 23 de la loi du 23 août 1871; mais ce n'est pas à dire qu'il fût interdit au receveur d'ajouter à cette preuve la justification de l'origine de la possession de lapièce; justification qui a bien son intérêt, puisqu'il est de règle que les communications et les présentations laites aux employés sont les seuls moyens autorisés pour découvrir les contraventions fiscales, et que la découverte serait illégale si elle était obtenue d'une autre manière (Championnière et Rigaud, Dr. d'Enregistr., n. 3949). Compar. Cass. 14 avr. 1807; Dalloz, Répert., vo Enregistr., n. 6261.

[ocr errors]

G. DUTRUC.

« PreviousContinue »