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vrage. La raison n'est pas de même nature, mais l'importance de cette précaution est ici encore plus grande. Un puits ouvert dans un souterrain aquifère y forme un drain dans lequel affluent les eaux de toutes les couches traversées; celles-ci viennent donc s'accumuler au droit de la galerie et lorsque dans le percement on approche du puits, les difficultés contre lesquelles on a à lutter se trouvent augmentées dans une proportion souvent considérable. En outre les puits de sondage sont toujours ouverts plusieurs mois et souvent plusieurs années avant la galerie, et leurs parois sont toujours consolidées d'une manière imparfaite; si on a affaire à des terrains fluents, il y a beaucoup de chances pour qu'ils se désagrègent et coulent dans le puits; on rencontre alors en perçant la galerie dans le voisinage de l'emplacement de celui-ci des masses désagrégées dans lesquelles l'avancement est toujours très difficile, et dont la consolidation exige parfois beaucoup de temps et de dépense.

Les petites galeries de recherche horizontales présentent les mêmes inconvénients lorsqu'elles sont percées en terrain aquifère. Lorsqu'on y a recours dans les terrains de cette nature, il faut les faire à côté et, s'il est possible, plus bas que le souterrain à ouvrir; de cette manière, au lieu d'appeler les eaux dans celuici, elles assèchent son emplacement et rendent le percement beaucoup plus facile. Mais il est en général plus prudent de ne pas recourir à ces petites galeries en mauvais terrain.

Les observations qui précèdent ne s'appliquent qu'aux galeries percées en terrain aquifère; mais par cette expression il ne faut pas entendre seulement les terrains imbibés d'eau comme les sables argileux. Du moment

qu'il existe de l'eau dans la masse, le drain puissant formé par le puits ou la galerie l'attire, parcequ'il existe toujours des vides à travers lesquels elle peut se faire jour; les canaux presque imperceptibles par lesquels se produisent de simples suintements s'agrandissent peu à peu, il s'établit des courants et la roche, si elle est attaquable par l'eau, finit par se désagréger. Il se produit un effet analogue à celui qu'on observe sur le bord des plateaux, aux points où les torrents prennent naissance. Là où il n'existait d'abord qu'une simple rigole, il se produit un vaste entonnoir et les effets destructifs deviennent de plus en plus grands.

Lorsqu'on est dans des terrains sans eau, et qu'il s'agit seulement d'en déterminer la dureté, on peut percer dans l'axe même du tracé des galeries d'expérience à petite section (en général 2m sur 2m environ), qui permettent de se renseigner à ce sujet. L'ingénieur peut ainsi établir ses prix et l'entrepreneur son rabais en connaissance de cause. Ces galeries ont en outre, lorsqu'on les entreprend avant le commencement des travaux, l'avantage d'avancer la date d'achèvement du tunnel, car le percement d'une petite galerie est toujours la première et la plus longue phase du travail.

128. Direction.

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Il est très important de suivre dans le percement une direction rigoureuse. En effet, on attaque toujours les souterrains par les deux têtes et quelquefois par des points intermédiaires auxquels on accède par des puits verticaux ou des galeries horizontales; la moindre erreur de direction donnerait à la rencontre des diverses attaques un écartement qui les empêcherait de se rejoindre. Il est vrai

que, comme on commence généralement par ouvrir une petite galerie, on pourrait ensuite corriger ce défaut s'il n'était pas trop grand; mais cela entraînerait au moins des fausses manoeuvres. En général on met son amour-propre à ce que les axes des petites galeries se rejoignent sinon rigoureusement, au moins à quelques centimètres près.

Pour tracer un souterrain on se sert de balises extérieures qui donnent l'alignement et, pour plus de garantie, dans les grands souterrains, on opère au moyen du théodolithe qu'on installe sur des points élevés ou au besoin sur des échafaudages. Dans l'intérieur des souterrains, on se dirige à l'aide de fils à plomb pendus à la calotte, et on fait des vérifications fréquentes au moyen d'instruments de précision; la lumière qu'on obtient en brûlant des fils de magnésium est très commode dans ce cas. C'est aussi le fil à plomb qui sert à projeter l'alignement extérieur au fond des puits verticaux.

Lorsque les souterrains sont en courbe, on se guide à l'intérieur au moyen d'instruments angulaires comme pour le tracé extérieur; il faut des opérateurs exercés et très soigneux, parce que leur travail est très incommode en souterrain.

129. – Procédés d'extraction. - Les procédés courants d'extraction sont les mêmes qu'à ciel ouvert : on emploie la pioche, le pic et la mine ; c'est cette dernière qu'on utilise le plus souvent, car presque tous les souterrains sont creusés dans le rocher sur la plus grande partie de leur longueur. Depuis trente ans, on a beaucoup augmenté la rapidité du percement des grands souterrains par l'emploi de perforateurs mécaniques.

On a commencé au Mont-Cenis par les perforateurs Sommeiller destinés à produire mécaniquement le travail du mineur sur un certain nombre de barres à mines. Ce travail consiste à désagréger la roche par une

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série d'entailles en étoile en frappant sur la barre et la faisant tourner après chaque coup d'un petit angle. La percussion était obtenue dans l'appareil Sommeiller par le mouvement alternatif d'un cylindre à double effet mû par l'air comprimé; un mécanisme spécial annexé au cylindre produisait la rotation saccadée ; et le jet d'eau d'une lance était envoyé au fond de chaque trou. Le nombre de coups de barre à mine par minute était très grand. Au Saint-Gothard, on a employé les perforateurs Dubois et François, les perforateurs Ferroux et les perforateurs Mac Kean; à l'Arlberg on a employé les perforateurs Ferroux et les perforateurs Brandt. Les premiers fonctionnent par percussion comme les appareils Sommeiller; le perforateur Brandt perce les trous en grattant la roche au moyen d'un couteau d'acier très dur muni de dents, qui tourne sous une très forte pression (100 atmosphères). Toutes ces machines sont destinées à opérer dans la roche dure et à faire seulement des trous de mines; on emploie ensuite. la dynamite ou la poudre. Pour le tunnel de la Manche, qui serait percé dans la craie, c'est-à-dire dans une roche tendre, on a essayé avec succès les machines Brunton et Beaumont qui creusent elles-mêmes la galerie entière; la première se compose d'un arbre ar

mé de bras aux extrémités desquels sont des molettes en acier qui rabotent la roche la seconde agit par rotation comme une sorte de machine à fraiser. Les perforateurs mécaniques sont toujours actionnés par un moteur placé en dedans du souterrain; la transmission de la force se fait le plus souvent par l'air comprimé, qui sert en même temps à la ventilation; mais on emploie aussi l'eau sous forte pression, et depuis quelques années l'électricité.

130. Boisage. Lorsqu'on se trouve dans des terrains susceptibles de s'ébouler en exerçant des poussées, il faut les maintenir jusqu'à ce qu'on puisse exécuter le revêtement, ou tout au moins pendant le temps qu'on l'exécute; on les maintient au moyen de boisages. Le boisage comprend toutes sortes d'appuis depuis la simple chandelle destinée à retenir un bloc insuffisamment solide, jusqu'à l'étrésillonnement complet du terrain. Les boisages sont des charpentes, mais, en raison de leur caractère provisoire et des conditions difficiles dans lesquelles ils s'exécutent, ce sont des charpentes d'une nature particulière et extrêmement simples. On y emploie presque toujours des bois ronds, souvent en grume; le pin et le sapin sont tout indiqués pour cet usage à cause des formes bien droites qu'ils présentent généralement; les assemblages se composent surtout d'embrèvements maintenus au besoin par des clous, et le serrage des pièces est obtenu par des cales en bois. L'ouvrier boiseur est habituellement un ouvrier mineur qui se détache du chantier lorsqu'il en est besoin. Il n'a en général que deux outils: la scie pour couper les pièces de longueur et une hachette (qui sert en même temps de marteau) pour tailler les embrèvements.

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