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imposées aux enfants dans les filatures de coton. Des chambres de commerce avaient déjà fait sentir la nécessité de réglements sur la nature et la durée du travail des enfants.

Sur les observations de M. Arago, le ministre des travaux publics promettait de renouveler ses instances auprès du Conseil royal de l'instruction publique, pour que l'école des arts et des manufactures cessât d'être soumise à la rétribution universitaire.

La somme de 700,000 fr. pour le nouveau service des poids et mesures fut allouée après une courte discussion, ainsi qu'une augmentation de 115,000 fr. pour le personnel du corps des ponts et chaussées. La Chambre accorda ensuite la dépense si utile de 24 millions 440,000 fr. destinés à l'entretien des routes royales, ponts, etc., et celle de 50,000 fr. pour les chemins de fer.

Passant au budget extraordinaire des travaux publics, défendu en partie par M. Billaudel et en totalité par M. Legrand, la Chambre vota :

Chapitre Ier, pour les routes royales classées avant le 1er janvier 1837, 13,500,000 fr.;

Ch. II, pour les routes royales classées depuis le 1er janvier 1837, 750,000 fr.;

Ch. III, pour les routes royales et ports maritimes de la Corse, 600,000 fr.;

Ch. IV, pour l'achèvement des routes stratégiques dans l'Ouest, mémoire ;

Enfin pour les chemin de fer, 2,000,000.

Le 15 mai, la Chambre entendit le rapport de la commission sur le budget du ministère de l'intérieur, présenté par M. Léon de Maleville, député de Tarn et Garonne. Le rapporteur, simplifiant cet examen annuel, signalait quelques améliorations à apporter dans le personnel de l'administration centrale, où moins de mobilité et plus de suite étaient désirés. Après bien des vicissitudes, la nouvelle organisation des bureaux de l'intérieur, datant du mois d'avril 1838, modifiait nécessairement la

répartition des fonds affectés au personnel de l'administration centrale.

Le crédit porté à cet effet au budget de 1839 dépassait celui de 1838 de 6,000 francs, destinés à pourvoir au traitement d'un inspecteur général des bâtiments civils, et se trouvait ainsi fixé à 796,000 francs.

En allouant simplement les 80,000 fr. pour les archives du royaume, la commission attendait que la loi du 17 février dernier sur les monuments à réparer relevât et agrandît les différents corps de logis de l'hôtel Soubise, où étaient entassés les documents depuis le décret de l'Assemblée constituante.

Le chiffre des dépenses secrètes et ordinaires de la police générale montait cette année à 1,265,500 fr., la commission exprimait toutefois le désir d'une diminution pour l'avenir.

Le chapitre XIII des réparations des maisons centrales et de correction, ramenait les esprits à l'examen du système pénitentiaire; la philanthropie, en descendant des régions du sentiment sur le terrain des faits, était encore partagée en France entre le régime pénitentiaire d'Auburn et celui de Pensylvanie; le premier, prescrivant l'isolement des condamnés pendant la nuit, le travail en commun pendant le jour, l'observation rigoureuse du silence maintenu par des châtiments corporels; le second, celui de Pensylvanie, condamnant chaque prisonnier à l'isolement le plus absolu de jour et de nuit, et ne tempérant l'horreur silencieuse qui l'environne que par la distraction d'un travail toujours solitaire ou par le secours de quelques pieuses lectures.

Cette question essentiellement réformatrice, déjà soulevée l'année précédente, était traitée par le rapporteur d'une manière très-remarquable. Les avantages et les inconvénients des divers systèmes étaient signalés par lui, et nous regardons comme un devoir de reproduire ses savantes et philanthropiques conclusions.

Elles tendaient à approuver la réserve du Gouvernement

à se prononcer exclusivement pour un système ou pour un autre; elles appelaient l'attention sur cette classe si nombreuse de prévenus et de condamnés correctionnels, dont la corruption moins profonde était plus susceptible d'amendement, ainsi que celle des jeunes détenus, qu'il importait de ne pas soumettre au même régime que des hommes faits.

La commission adoptait la séparation complète de chacun des détenus des prisons départementales, où l'emprisonnement durait moins d'un an; mais elle repoussait l'isolement absolu du système de Pensylvanie pour les maisons centrales qui réunissaient tant de degrés divers de criminalité, et elle indiquait l'organisation de la prison de Beaulieu, près de Caen, comme mettant sur la voie d'un régime mixte qui présenterait les avantages des systèmes d'Auburn et de Pensylvanie, sans en avoir les inconvénients.

Il s'agissait, disait le rapporteur, d'établir, dans chacune de nos maisons centrales, un nombre limité de cellules, disposées pour le jour et pour la nuit. Elles permettraient de séparer de la foule des prisonniers les criminels endurcis, qui s'enorgueillissent du crime, le professent, et déploient pour le propager une activité, une persévérance vraiment effrayantes. D'après l'avis de la plupart de ceux qui ont suivi attentivement le régime des prisons, et comme nous l'avons déjà fait remarquer plus haut, ces caractères dominateurs, ces dangereux, missionnaires sont en beaucoup moins grand nombre qu'on ne le pense. Une fois écartés, une fois soumise au sévère régime de Pensylvanie, il serait possible de concentrer sur eux une plus grande somme d'attention et de surveillance, et moins difficile d'exercer sur leur moral une influence réformatrice. Pour la grande majorité des prisonniers, ils sont d'une nature moins redoutable, moins rebelle, et bien souvent ils montrent plus d'égarement que de réelle dépravation. L'expérience prouve tous les jours qu'on les plie facilement aux sévérités d'une discipline inflexible, mais non brutale. Des travaux communs, des enseignements simultanés, une émulation sagement excitée, développeraient leur intelligence, sans briser leur instinct de sociabilité, indispensable élément de tout progrès. On aurait le système d'Auburn, moins les vices qui lui sont reprochés.

Ainsi donc, pénitenciers de jeunes détenus;

Prisons départementales;

Maisons centrales;

Voilà, dans l'ordre de leur importance morale, trois sortes d'établisse

ments qui réclament trois organisations, trois régimes distincts. Dans cette variété même on trouvera des sources d'économie et des transitions plus faciles aux réformes qu'appelle si hautement l'opinion publique.

Les calculs de l'administration portant à 8,000 fr. le prix moyen de chacune des cinquante mille cellules nécessaires dans le système de Pensylvanie, étaient un nouvel argument contre cette réforme radicale.

Le choix des directeurs de prisons semblait à la commission un point capital, essentiel, et, en accordant le crédit de 100,000 fr. destiné aux travaux des maisons centrales, elle rappelait au ministre que l'engagement sérieux avait été pris dans le discours du trône de présenter, dans le cours de la session actuelle, une loi sur le système pénitentiaire.

Sur le chapitre XIX: Subventions aux théâtres royaux, la commission ne proposait point de réduction à la somme de 1,200,000 fr. demandée. Loin de s'en prendre à l'administration de l'espèce de décadence du théâtre en France, elle reconnaissait que le bon goût et le génie ne se décrètent pas, et que le seul devoir d'un gouvernement était de les encourager et de les secourir.

Quant au chapitre XXI: Subventions aux établissements genéraux de bienfaisance, comprenant l'institution des Jeunes Aveugles et l'hospice des Aliénés de Charenton, et l'institu tion royale des Sourds-Muets de Paris et de Bordeaux; la commission signalait les progrès de l'éducation de ces derniers, si noblement commencée en France, par l'abbé de l'Épée et son digne successeur l'abbé Sicard. Cependant le nombre des sourds-muets étant dans notre pays de 22,000, c'est-à-dire de 1 sur 1,500 habitants, la donnée moyenne de la vie étant de 32 ans et celles des cours d'institution de 6 années, il s'ensuivait que, pour que tous les sourds-muets puissent recevoir l'instruction nécessaire, il fallait que 3,000 au lieu de 700 fréquentassent les écoles. La commission se contentait donc de supprimer les 4,000 fr. destinés au traitement d'un inspecteur général des quatre établissements, en

question, dont on proposait la création sans en justifier suffisamment l'utilité.

Arrivant au chapitre XXV. Secours aux étrangers réfugie's en France, la commission, mue par un sentiment de générosité tout-à-fait nationale, proposait d'allouer les 2,350,000 francs demandés; elle faisait seulement observer que l'effectif des réfugiés espagnols variant journellement et s'étant quatre ou cinq fois renouvelé dans l'espace de deux ans, il était du devoir d'un gouvernement, ami de la cause constitutionnelle, de ne pas soudoyer imprudemment les réfugiés carlistes pour lesquels le séjour de la France n'était qu'une sorte de quartier d'hiver; la commission insistait donc sur la nécessité d'une surveillance active qui distinguât parmi les réfugiés espagnols ceux que le malheur recommandait à la générosité du Gouvernement, de ceux qui ne devaient exciter que la juste méfiance.

En résumé, toute compensation faite des réductions et augmentations des divers chapitres, sur les 74,941,276 fr. du budget du ministère de l'intérieur de 1839, la commission ne proposait qu'une réduction de 98,000 fr.

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29 Mai. Dans la discussion du projet de ce budget l'article 1er fournit à M. Armand (de l'Aube), l'occasion d'attaquer le défaut de fixité de son organisation intérieure et de demander la création d'un sous-secrétaire d'état investi d'une large part d'autorité, sous la surveillance des ministres. C'était, selon lui, le moyen le plus efficace de régulariser la marche des affaires, d'opérer le redressement des abus et d'imprimer une marche uniforme à l'administration.

Sur le chapitre des encouragements aux arts, la réduction de 50,000 fr. proposée par la commission, fut adoptée après deux épreuves douteuses. Le motif de cette diminution était le mauvais emploi qu'on avait fait jusqu'alors de ces fonds en encourageant des médiocrités.

Mais la question des subventions aux théâtres royaux avait pour M. Liadières une grande importance: il y voyait

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