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et des travaux publics, ainsi que des projets de loi sur les chemins de fer.

14 Juin.-Chambre des députés. Dans la discussion générale qui s'ouvrit sur l'impôt du sucre indigène, M. Corne se prononça hautement contre le régime de l'ordonnance que l'on tendait à substituer à la loi dans la question des sucres. Il fallait, selon lui, que la législation intervînt pour faire cesser l'incertitude du mode de perception de l'impôt et les entraves apportées à la fabrication du sucre; c'était aussi l'avis de la commission et de M. Vivien, rapporteur.

On se souvient que la loi de 1837 avait frappé le sucre indigène d'un impôt avec l'exercice au lieu de la fabrication; acceptant ce fait accompli, M. Defitte déplorait le joug glacial du fisc pesant sur la liberté du travail, joug si funeste à l'alliance de l'agriculture et de la fabrication du sucre indigène, et s'il consentait à la prorogation de cette loi demandée par le Gouvernement, c'était uniquement parce que l'impôt devait être payé au 1er juillet.

Décider le principe d'un impôt sans établir le mode de perception, c'était pour M. Gauthier de Rumilly laisser la question sans solution, car l'impôt consistait dans le mode de perception, mode que la loi a toujours mission de régler.

M. Jollivet ne trouvait pas inconstitutionnel le mode de percevoir l'impôt. Les plaintes des producteurs de betteraves lui paraissaient mal fondées; en effet, le sucre colonial était grevé d'un impôt de 49 fr. 50 c., tandis que celui qui pesait sur le sucre indigène n'était que de 11 francs, y compris le décime.

Un amendement proposé par M. Barrillon avait pour but de fixer au Gouvernement un délai précis, un délai de trois mois à partir de l'ouverture de la prochaine session (1839), dans lequel les réglements d'administration publique sur le mode de perception de l'impôt seraient soumis aux Chambres pour être convertis en lois.

Cet amendement était appuyé par M. Corne, qui ne voulait pas, à l'exemple de M. Jollivet, que l'on fit des expé

riences en matière d'impôts indirects; il reconnaissait la nécessité d'une grande expérience pour faire une bonne loi d'impôt; mais il voulait cette expérience dans le législateur et non pas au détriment des contribuables.

Le système d'expérimentation était néanmoins soutenu par l'honorable rapporteur M. Vivien, et les termes du projet de la commission lui semblaient assez impératifs.

Le ministre des finances ayant objecté à M. Barrillon que son amendement était incomplet, en ce qu'il ne s'appliquait qu'au réglement relatif au mode de perception, et que l'époque proposée par lui était indéterminée comme celle de la session elle-même; il déclara le retirer.

La prorogation pure et simple jusqu'à la session de 1839, fut donc mise aux voix et adoptée par 202 suffrages, sur 257 votants.

Plusieurs projets de chemins de fer, dont nous avons indiqué déjà les plus importants, avaient attiré l'attention des deux Chambres. Le 13 juin, M. Vivien, député de l'Aisne, présenta son rapport sur le projet de loi relatif au chemin de fer de Paris à Orléans, route importante et pouvant former la tête de presque tous les chemins qui s'avanceraient vers l'ouest, le midi et même une partie de l'est de la France. Le système de concession proposé par le Gouvernement avait paru à la commission préférable au système d'adjudication; aussi la discussion du 16 juin, en faisant connaître l'opposition de M. Chasles à ce projet de loi, contraire à des intérêts de certaines localités, fut-elle de courte durée. Après que M. de Laborde eût déclaré qu'il s'agissait de deux innovations qui manquaient à la France: de la création des chemins de fer sur la plus grande échelle, et de l'esprit d'association dans sa plus large acception; le vote des articles ne souleva qué des questions de détail, et la Chambre adopta le projet de loi à une grande majorité, sur 234 votants il n'y eût que 27 opposants.

Les séances des 18 et 19 juin furent consacrées à l'adoption des divers chemins de fer de Lille à Dunkerque, de Sedan

à Mézières, de Gier à l'Allier et de Montpellier à Nîmes; celui de Bordeaux à Langon fut ajourné à l'année suivante.

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5 et 6 Juillet. - La Chambre des pairs adopta les projets de loi relatifs aux chemins de fer de Lille à Dunkerque, de Paris à Orléans et des mines de Gier à la rivière de l'Allier; mais l'époque avancée de la session ne lui permit pas de voter les autres lignes déjà consenties par la Chambre des députés.

Chambre des députés.-Restait la question de l'achèvement des travaux publics qui montaient cette année à la somme énorme de 12,136,000 fr. Le 28 avril, M. Guizard avait présenté un rapport à ce sujet au nom de la commission qui fit quelques réductions importantes.

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Ce projet de loi avait pour but la reconstruction ou l'achèvement de l'hôtel du quai d'Orsay, des Archives du royaume, d'une partie de l'hospice de Charenton, de la coonne de Boulogne et d'autres édifices destinés aux bureaux des ministères de l'intérieur, du commerce et de l'instruction publique.

15 Mai. Après une courte discussion sur les évàluations ministérielles et la nécessité de ces divers travaux, la Chambre accorda à la majorité de 182 voix sur 271 votants un crédit de 10,482,000 fr. à imputer sur les exercices 1838 et 1839.

Chambre des pairs. - Le 14 juin, la commission de la Chambre des pairs approuva ce projet de loi, par l'organe de M. le comte Siméon; la discussion n'offrit de remarquable que l'observation que firent MM. le comte de Tascher et le marquis de Dreux-Brézé, sur le scandale qu'il y avait à laisser les ouvriers travailler le dimanche et à ne pas consacrer par le repos ce jour destiné aux exercices religieux. Le ministre assura les nobles pairs que le Gouvernement userait à cet égard des pouvoirs qui lui étaient dévolus par la législation de 1814, reconnue récemment par un arrêt de la Cour de Cassation, et, aussitôt après, la Chambre passa

au scrutin sur cette loi, qui donna pour résultat 96 suffrages sur 100 votants.

Dans la même séance, les 200,000 fr. demandés pour la célébration de l'anniversaire de juillet furent alloués, malgré l'opposition de M. le vicomte Dubouchage, qui regardait comme injuste cette espèce d'impôt payé par tous les départements pour les fêtes de la capitale, fêtes renouvelées chez eux et à leurs frais particuliers.

Les crédits d'Afrique, qu'on se souvient avoir été longuement débattus les 6, 7, 8 et 9 juin et accordés par la Chambre des députés ( voyez page 183 et suivantes), furent soumis le 3 juillet à l'examen de la Chambre des pairs, par l'honorable rapporteur M. Périer.

Ces divers crédits extraordinaires, dont l'ensemble s'élevait à 16,671,408 fr., devaient encore donner lieu, au palais du Luxembourg, à de graves et solennelles discussions sur l'avenir de notre colonie.

Il s'agissait, au moyen de cette allocation, de maintenir notre armée d'Afrique sur le pied de 48,000 hommes et de 11,372 chevaux, pendant tout le cours de 1838; d'affermir le Gouvernement, de pourvoir aux dépenses secrètes, et aux travaux civils et militaires de l'Algérie.

Le 5 juillet, dans la discussion, M. le baron de Villaret, partisan de l'occupation restreinte, voulait que la France conservât la mer et le littoral, et qu'elle abandonnât le reste, c'est-à-dire l'intérieur, aux Arabes.

Le crédit demandé était, pour M. Mérilhou, le gage d'un établissement permanent et définitif en Algérie et non d'une simple occupation militaire; le traité de la Tafna (30 mai 1837) et la prise de Constantine (13 octobre 1837), avaient, aux yeux de l'honorable orateur, une signification réelle et puissante, et il réclamait pour les provinces conquises un gouvernement SOLIDE et FRANÇAIS, et une espèce de dictature par ordonnance, mais de dictature légale et provisoire.

Au vou exprimé par M. le baron Pelet (de la Lozère), de voir à l'avenir moins de latitude laissée aux gouverneurs

d'Afrique en fait d'expéditions aventureuses, et de savoir la France véritablement maîtresse de l'Algérie, M. le président du Conseil répondait, que le Gouvernement n'avait jamais abandonné ses droits, et que la seule question militaire avait été soumise à l'appréciation du maréchal Clausel, c'est-à-dire l'évaluation des troupes pour l'expédition de Constantine.

Dans le même discours, le ministre repoussait la généra→ lité du système d'occupation de M. Mérilhou, mais l'état de la propriété, le droit d'acquérir et les abus qui en résultaient en Algérie, abus signalés incidemment par cet honorable pair, lui paraissaient de nature à être étudiés et régularisés, et il espérait y parvenir en imposant la terre dans cette contrée.

Le chancelier, ayant alors mis aux voix le crédit extraordinaire de 16,671,408 fr., il fut adopté à la majorité de 103 contre 8 sur 111 votants.

Un des derniers actes de la Chambre des pairs devait être autant judiciaire que politique. En effet, le 21 juin, sur le rapport de M. Barthe, garde-des-sceaux, en vertu de l'article 28 de la Charte, elle se constitua sur le champ en cour de justice pour connaître de l'affaire Laity, ex-lieutenant d'artillerie, accusé d'attentat à la sûreté de l'État et auteur d'un écrit intitulé: Relation historique des événements du 30 octobre 1836, le prince Napoléon, à Strasbourg.

Le 9 juillet.-M. Armand Laity, comparut à la barre de la haute Chambre, assisté de Me Michel de Bourges, son défenseur et de Me Delangle.

M. le procureur-général Franc-Carré, après avoir déclaré dans son réquisitoire que l'intention du Gouvernement n'était pas d'imposer silence à la polémique des partis, mais de mettre un terme à un système scandaleux de provocations criminelles, trouvait que la pensée qui avait dicté l'écrit était la même que celle qui avait inspiré le complot de Strasbourg, et que l'écrit comme la révolte avaient eu pour but le renversement du Gouvernement.

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