Page images
PDF
EPUB

tite principauté allemande, et qui ne pouvait manquer d'éclater un jour.

Ce qui donnait lieu à ces prévisions, c'était encore l'ajournement de la promesse du gouvernement de faire construire une église catholique à Hanau, et d'établir une paroisse catholique à Gelnhausen, ajournement motivé par les affaires de Cologne et les différents concernant les mariages mixtes, mais qui excitait le mécontentement du parti tolérant et libéral de la Hesse-Cassel.

SAXE.

Le seul événement qui, en l'absence des Chambres, puisse être, jusqu'à un certain point, qualifié de politique dans le royaume de Saxe, est la mort du prince Maximilien de Saxe, père de Sa Majesté, arrivée le 7 janvier. Il était né en 1759. Après la mort du roi Antoine, son frère, il aurait dû succéder à la couronne; mais en 1830, lors des troubles de Dresde, il avait abdiqué en faveur de son fils Frédéric Auguste.

L'année précédente avait été consacrée à des travaux sérieux touchant la législation pénale, l'émancipation des juifs, l'affaire du Hanovre, etc.; mais l'aspect a bien changé, car nous n'avons à nous occuper cette fois que de voyages princiers et de quelques questions industrielles.

C'est ainsi que, vers la fin de juin, le roi de Saxe se trouvant en Dalmatie, fit une excursion remarquable dans le pays des Monténégrins, peuplade indépendante qui s'est placée sous la protection de la Russie, et qui obéit à un chef ecclésiastique appelé, dans le langage monténégrin, Wladica. On aurait dit un de ces khans au génie sauvage inaccessible à la civilisation, comme au temps de Charlemagne, et n'obéissant qu'à son culte fanatique. Il s'avança néanmoins, après en avoir délibéré avec les notables du pays, à la rencontre du roi de Saxe, auquel il fit présent

d'un beau cheval noir. Après avoir visité les hauteurs du Monténégro et assisté à un repas homérique dont l'unique plat consistait en un mouton entier rôti, S. M. Frédéric Auguste en était revenu avec sa petite escorte et une nouvelle réputation de bravoure, vu les mœurs vindicatives et sanguinaires de ces barbares et le danger qu'il avait couru.

De retour dans son royaume, il eut à recevoir LL. MM. l'empereur et l'impératrice de Russie, qui arrivèrent à Dresde le 17 juillet. La princesse d'Orange et la princesse royale de Prusse les avait précédés. Les augustes voyageurs se rendirent ensuite à Weimar. S. M. I. était accompagnée du comte Orloff et venait visiter la grande duchesse, qui fit à son illustre frère l'accueil le plus cordial, ainsi qu'au grand duc héritier de la couronne de Russie et à l'impératrice. Quelques semaines après les fêtes brillantes occasionnées par ces promenades princières, la ville de Dresde assistait à une solennité d'un autre genre, et que le nom de l'héroïne rend digne de remarque, en ce que l'art monte rarement jusqu'aux sommités sociales; nous voulons parler de la représentation d'une nouvelle comédie en cinq actes de S. A. R. la princesse Amélie, ayant pour titre : Der Majorats Erbe (l'Héritier d'un majorat). Cette pièce, jouée par les premiers artistes du théâtre royal, avait complétement réussi et mérité aux acteurs les remercîments de la princesse.

En fait d'industrie, le chemin de fer de Leipzick à Dresde était en complète activité depuis 1837, et celui de Dresde à Oberan allait être livré au public. Les locomotives qui devaient desservir ce rail-road avaient été construites à Birmengham, ce grand atelier de l'Europe industrielle.

Néanmoins, dans ce pays, comme dans plusieurs autres, une opposition ignorante, mais opiniâtre des classes ouvrières, et particulièrement de la corporation des charretiers, venait arrêter l'essor de ces admirables moyens de communications et de rapports intérieurs et extérieurs. C'est ainsi qu'à moitié de la route de Dresde à l'auberge de

la Grappe un convoi avait couru un grand danger par le placement d'une épaisse barre de fer en travers des ornières. Le remorqueur avait franchi sans difficulté cet obstacle, et la première voiture y ayant heurté avec une violence extrême aurait entraîné de graves accidents, si la chaîne qui l'attachait à la locomotive ne s'était heureusement brisée.

Un autre genre d'industrie mérite d'être mentionné ici, parce qu'il exerce une véritable influence sur la population de ce pays; nous voulons parler des brûleries d'eau-de-vie existantes en Saxe, et dont le nombre était, dans une statistique du gouvernement, porté à 3493, ce qui, comparé avec la population, montant en 1837 à 1,637,027 personnes, présentait la proportion d'une distillerie d'eau-devie par 460 personnes. Aussi le royaume de Saxe est-il, peut-être de toute l'Allemagne, le pays où il se consomme, proportionnellement, le plus d'eau-de-vie, et où l'abus des liqueurs fortes est le plus répandu.

BRUNSWICK, BRÊME, FRANCFORT.

On n'a pas oublié la protestation unanime des états du duché de Brunswick, au sujet des affaires du Hanovre et la promesse faite par le gouvernement ducal d'appuyer les droits de la nation hanovrienne auprès de la Confédération Germanique. Cette dissidence politique existant entre les deux pays toute grave qu'elle était, n'allait pas cependant jusqu'à compromettre les intérêts matériels réciproques, et le 25 janvier, c'est-à-dire, un mois environ avant l'ouverture des états du Hanôvre, un traité fut conclu entre ce royaume et le duché de Brunswick pour l'établissement de chemins de fer de Brunswick à Hartzbourg et Gosslar; l'un de ces chemins devait s'étendre de Brunswick à Hartzbourg, en passant par Wolfentbutel; l'autre, traverser le duché de Brunswick et avoir son point de départ à l'Oberhartz, d'où il s'étendrait jusqu'à Gosslar.

Quant à Brême, l'esprit de liberté qui régnait dans cette ancienne ville anséatique, sembla redoubler à la nouvelle du coup d'état du roi Ernest, qui avait révolutionné toute l'Allemagne.

Il en résulta un fait assez significatif. Dans les premiers jours de décembre, une pétition de la députation provinciale de Brême et de Warden fut répandue dans le Hanôvre et y produisit une sensation profonde, au point que le gouvernement hanovrien, afin de balancer cette impression, fit venir en toute hâte de Hildelsheim une pétition de quelques habitants de cette ville en faveur de la patente royale de 1837. Il s'efforça également d'obtenir une démonstration analogue de la bourgeoisie contre les magistrats et les présidents; mais il ne put réussir dans cette tentative, au milieu des troubles occasionnés par cette haute question de droit international.

Dans le même temps, un Francais habitant Brême, soupçonné d'avoir pris part aux désordres, avait subi une violation de domicile et en outre un jugement du tribunal criminel, sans que les autorités françaises réclamassent, comme le bruit en avait d'abord couru dans cette ville.

Les diverses résolutions de la plus grande partie des états allemands à l'égard de l'abolition de la constitution hanovrienne, ne laissaient pas de causer une vive émotion dans les esprits des habitants de Francfort. On ne savait pas encore quelle serait la décision de la Diète Germanique dans cette question politique; mais on ne pouvait supposer qu'elle dût être l'objet d'une délibération prématurée ou incomplète : il fallait donc se résigner à attendre, d'autant que M. le président de Munch-Belling-Hausen n'était pas encore de retour de Vienne.

CRACOVIE.

L'ouverture solennelle de la chambre des représentants de la ville libre de CRACOVIE, qui avait été ajournée, eut définitivement lieu le 28 décembre 1837, en présence des résidents des trois puissances protectrices. Dans cette session,

qui fut close le 23 février suivant, elle vota une adresse, par laquelle elle demandait: 1° que l'armée autrichienne se retirât du territoire de la république de Cracovie; 2° que, conformément à la constitution octroyée en 1816, par le congrès de Vienne, les frontières de cette république fussent ouvertes au commerce et aux voyageurs ; 3° qu'on remît en vigueur les institutions et les réglements de 1833; 4° qu'on rendit au sénat la considération et la force dont il jouissait anciennement; 5° que ce fût le sénat lui-même qui gouvernât dorénavant, et non la commission composée de trois résidents des puissances protectrices et du général autrichien commandant le corps d'occupation; 6o enfin, que la direction de la police et celle des douanes fussent remises entre les mains des autorités locales de la ville de Cracovie.

Cette adresse, qui exposait aussi l'état de misère où la république se trouvait réduite, fut jugée par les résidents comme n'étant pas de nature à être soumise aux trois souverains, et on la regarda, en conséquence, comme non

avenue.

Tel fut le résultat de la convocation dérisoire d'un sénat dont l'autorité ne s'étend pas même jusqu'au droit de présenter à ses protecteurs les plaintes et les vœux de la nation.

« PreviousContinue »