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de terminer, par une transaction à l'amiable, les difficultés qui se sont opposées jusqu'à ce jour à la liquidation complète et au payement des créances des sujets de S. M. B., dont les réclamations étaient fondées sur l'article additionnel de la Convention du 20 novembre 1815, confirmé par l'article additionnel (séparé) de la Convention du 25 avril dernier (1), les soussignés, le Duc de Richelieu, Ministre Secrétaire d'État au Département des Affaires Étrangères de S. M. T. C. et Président du Conseil de ses Ministres, etc., et le Chevalier Charles Stuart, Ambassadeur Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire près la Cour de S. M. T. C., etc., munis de l'autorisation de leurs Gouvernements respectifs, sont convenus de ce qui suit :

1o Le montant total des payements à faire par la France pour l'acquittement et l'extinction totale des créances des sujets de S. M. B., fondées sur la décision de S. M. T. C., relativement aux marchandises Anglaises introduites à Bordeaux, par suite du tarif des douanes publié le 24 mars 1814, est fixé à la somme de 450,000 fr.

2o Ladite somme de 450,000 fr. sera versée entre les mains des Commissaires désignés à cet effet par S. M. B., par portions égales de 75,000 fr. chacune, dont le payement aura lieu le premier de chaque mois, à dater du 1er août prochain, de manière à ce que la somme totale soit acquittée au 1er janvier 1819.

3o Les présents articles seront ratifiés et les ratifications en seront échangées dans le terme d'un mois, ou plus tôt si faire se peut.

En foi de quoi, les Soussignés les ont signés et y ont apposé le cachet de leurs armes.

Fait à Paris, le 4 juillet 1818.

RICHELIEU.

Charles STUart.

Exposé des motifs du projet de lof présenté aux Chambres le 26 Avril 1818 par le Duc de Richelieu, Ministre des Affaires Etrangères, relativement à un crédit de 24 millions de rentes pour l'exécution des Traités du 25 avril 1818. (V. ci-après la loi du 6 mai 1818 qui a consacré l'ouverture de ce crédit.) (2)

MM.... A l'ouverture de votre session, le Roi vous a fait connaître ses espérances pour la diminution des charges qui pèsent sur notre patrie et pour l'affranchissement de notre territoire. Nous venons aujourd'hui, d'après ses ordres, vous communiquer le résultat des négociations déjà terminées et vous demander les moyens de con1) V. ci-contre, p. 136.

2) Cet exposé de motifs a été rédigé par M. le comte de Rayneval. successivement Ambassadeur de France en Suisse et en Espagne.

clure celles qui le seront, nous osons nous en flatter, avant que vous vous réunissiez de nouveau dans cette enceinte.

En signant le Traité du 30 mai 1814, les Puissances Contractantes renoncèrent réciproquement à la totalité des sommes qu'elles se devaient; mais en faisant l'abandon de leurs droits, les Gouvernements durent consacrer ceux des particuliers; des articles précis en prononcèrent la garantie. La France s'engagea formellement à faire liquider et payer les sommes qu'elle se trouvait devoir hors de son territoire à des individus ou des établissements particuliers en vertu de contrats et d'engagements formels. On s'occupait de préparer les mesures nécessaires pour l'accomplissement d'une obligation que la France se serait imposée d'elle-même, lorsque les funestes événements de 1815 vinrent détruire toutes les espérances de repos et de prospérité qu'il nous était permis de concevoir.

Je ne vous retracerai point, MM., le souvenir de calamités trop présentes encore à votre mémoire; mais qu'il me soit permis de le dire l'idée seule de les adoucir a pu nous soutenir dans la pénible tâche qu'il y eût peut-être alors quelque courage et quelque dévouement à accepter.

Depuis, l'espoir d'abréger les maux de la patrie a fait toute notre force et occupé sans relâche toutes nos pensées.

Après l'époque désastreuse que nous venons de rappeler, la France. s'est trouvée sous le poids de deux sortes de charges: les unes, fondées sur le Traité du 30 mai 1814, provenaient, comme nous venons de le dire, des dettes contractées à diverses époques envers des sujets des Gouvernements étrangers; les autres, créées par les Traités du 20 novembre 1815, nous ont donné ces Gouvernements eux-mêmes pour créanciers.

Les premières, celles qui ont fait l'objet de la négociation qui vient d'être terminée, ont pour but, vous ne l'ignorez pas, non comme quelques personnes ont affecté de le croire, de procurer des indemnités aux habitants des pays ravagés par la guerre, encore moins d'en accorder aux Gouvernements de ces pays, mais seulement d'assurer le payement des dettes contractées en vertu d'actes positifs du Gouvernement Français, d'obligations légales. La politique changeait les rapports des différents pays de l'Europe, mais les individus ne devaient pas avoir à souffrir de ces changements. Les obligations contractées envers eux devaient être garanties et maintenues. Ces dettes contractées par la France sont de la même nature que qui forment l'arriéré dont nos lois ont réglé le payement, et qu'on aurait été obligé, en tout état de cause, de liquider et de payer dans les divers ministères. Les créances dont la Convention du 20 novembre a prescrit la liquidation, ne sont donc point des créances qu'elle

celles

a constituées, des titres qu'elle a créés contre la France. Elle a seulement établi des moyens de reconnaître et de faire valoir ceux qui existaient antérieurement et indépendamment de tout traité.

En envisageant les choses sous ce point de vue, qui est le seul juste, puisqu'il est le seul vrai, vous jugerez que la reconnaissance de nos dettes envers des individus et des établissements particuliers hors de notre territoire, dérivait d'un principe de droit civil, indépendant de toute convention politique. Aussi fut-il admis sans difficulté par le Traité du 30 mai 1814. Les deux Conventions du 20 novembre 1815, relatives l'une aux sujets des Puissances continentales, l'autre à ceux de la Grande-Bretagne, ne firent que déterminer avec plus de précision les applications de ce principe et régler les formes de la liquidation.

En affectant au payement des dettes de cette nature un capital de 7 millions de rentes, ces Conventions stipulèrent qu'en cas d'insuffisance, le Gouvernement Français serait tenu d'y pourvoir. C'est d'après cela que la loi du 25 décembre 1815 créa un supplément de 2 millions. L'importance de cette réserve n'eût pu être appréciée à cette époque qu'autant que la somme totale des créances eût été dès lors susceptible d'une évaluation approximative; mais, en principe, il était difficile de la contester, et en fait, son admission était encore le résultat de la nécessité.

Une année, à partir de la date de l'échange des ratifications, avait été accordée pour la présentation des réclamations. Elle expirait au 28 février 1817. Ce n'est donc qu'après que ce terme eût été atteint et lorsque la récapitulation de ces réclamations a été achevée, que le Gouvernement a pu connaître qu'elle formait une masse telle qu'en appliquant strictement à leur liquidation les règles prescrites par la Convention du 20 novembre, le montant s'élèverait de beaucoup au-dessus du capital assigné pour leur remboursement et qu'ainsi un déficit considérable serait à couvrir. Ce déficit aurait formé une dette immense. S'il avait été impossible de le calculer et de refuser d'avance d'y satisfaire, c'était un devoir de représenter qu'elle excédait évidemment et la prévoyance des traités et les forces de la France. Ce devoir, les Ministres du Roi se sont hâtés de le remplir, en portant à la connaissance des Cours étrangères les résultats inattendus qui venaient de se révéler. Une négociation s'est entamée pour représenter aux Gouvernements étrangers la situation. où allaient mettre la France ces stipulations faites de bonne foi et dans l'intérêt de tous les peuples. Le Roi leur parla le langage de la confiance et de la franchise. Il s'adressait à des Souverains dignes de l'entendre.

Je voudrais qu'il fût possible, MM., de vous faire connaître toutes

les difficultés inséparables d'une pareille négociation, sans exemple peut-être dans les annales de la politique. Il s'agissait de lutter, non contre des vues générales, non contre des combinaisons politiques, mais de combattre les prétentions souvent exagérées d'une multitude de créanciers, solennellement appelés à faire valoir leurs titres, qui, de toutes les parties de l'Europe, pressaient leurs Gouvernements de n'en abandonner aucune, leur en contestant même, pour ainsi dire, le droit. Ces obstacles, d'une nature inconnue jusqu'ici dans les affaires publiques, auraient été peut-être insurmontables, sans les sentiments d'équité qui animaient les Ministres chargés de débattre et de soutenir les intérêts des peuples, et sans l'impartialité, la modération de l'illustre médiateur que la confiance de l'Europe a appelé à présider à cette importante négociation. Elle a enfin été terminée. De nouveaux arrangements conclus avec tous les États qui ont pris part aux Conventions du 20 novembre 1815, ont définitivement réglé la dette de la France envers leurs sujets et ses moyens de libération. S. M. nous a donné l'ordre de vous en communiquer les résultats en attendant qu'elle puisse vous faire connaître les actes eux-mêmes, lorsqu'ils auront reçu les ratifications nécessaires pour qu'il soit permis d'en publier la teneur.

L'un de ces actes concerne les Puissances continentales. Moyennant la renonciation au remboursement des capitaux de rentes que le Gouvernement aurait eu à réclamer en vertu de l'article 21 du Traité du 30 mai 1814 et des articles 6 et 22 de la Convention du 20 novembre 1815, le supplément que la France doit encore fournir pour le payement de ses dettes envers leurs sujets est définitivement. fixé à 12,040,000 fr.

Par un arrangement particulier avec l'Espagne, 1 million est spécialement affecté à ce qui est dû à cette Puissance en vertu de l'article additionnel du Traité conclu avec elle en 1814; mais comme cet article est réciproque et applicable aux Français créanciers de l'Espagne, aussi bien qu'aux Espagnols créanciers de la France, il a été stipulé d'un commun accord, que les fonds destinés à acquitter cette portion de nos dettes, resteraient en dépôt jusqu'au moment où le Gouvernement Espagnol aurait fait droit, d'après les bases et les principes posés dans les Traités, aux justes réclamations des Français.

Une Convention séparée, conclue avec l'Angleterre pour assurer l'exécution de l'article additionnel du Traité du 30 mai 1814 et de la Convention spéciale du 20 novembre 1815, fixe à 3 millions la rente à inscrire pour le complément définitif du fonds dont la création a été stipulée dans l'article 9 de la Convention relative à la liquidation des créances des sujets de S. M. Britannique.

Ainsi, MM., les arrangements qui viennent d'être conclus, nous

imposent l'obligation de créer 16,040,000 fr. de rente. S. M. nous a chargés de vous présenter la loi (1) qui doit ordonner leur inscription au Grand-Livre.

Par là, MM., sera fermé sans retour cet abîme dont, en 1815, il avait été impossible de mesurer la profondeur et qui menaçait d'engloutir la fortune publique. Sans doute, il est douloureux d'avoir à vous présenter une charge aussi pesante comme un grand soulagement. Plus d'une fois dans le cours de nos efforts, nous nous sommes sentis pénétrés d'une profonde douleur en considérant quel fardeau aurait encore à supporter la patrie, quand nous aurions obtenu tout. ce que nous demandions; mais nous avons la consolation de penser que nous n'avons rien négligé pour le diminuer, et c'est après nous être bien convaincus que ce nouveau sacrifice était inévitable, et que notre conscience nous ordonnait d'en prendre sur nous la responsabilité, que nous nous sommes déterminés à le soumettre au consentement du Roi.

Pour apprécier les résultats de nos efforts, il faut reporter avec calme nos regards vers le passé, et considérer toutes les conséquences du système désastreux qui avait accumulé sur la France des charges aussi exorbitantes.

La masse des réclamations présentées s'est élevée à 1,600 millions. Sur cette masse, environ 280 millions ont été acquittés sur les fonds de garantie, créés le 23 décembre 1815, ainsi que vous le verrez par les tableaux que le Roi nous a prescrit de vous communiquer. 30 millions environ ont été reconnus inadmissibles à la charge de la France. Il restait donc encore 1,390 millions à liquider. De quelque réduction qu'on puisse croire cette somme susceptible par une liquidation conforme aux règles tracées dans la Convention du 20 novembre, il est impossible de penser qu'elle fût restée au-dessous du capital représenté par la rente de 16 millions que nous vous demandons de créer.

Mais ce n'est pas là la seule modification aux Traités que nous avons obtenue.

Les rentes supplémentaires que nous étions tenus d'affecter au payement des créances étrangères, devaient toutes être délivrées avec la jouissance du 22 mars 1816. Il est aisé de concevoir quel accroissement de charges serait résulté de cette condition pour les nouvelles inscriptions qui auraient dû avoir lieu successivement jusqu'à notre entière libération, qui, d'après le mode suivi jusqu'à présent, aurait certainement été reculée de plusieurs années. Les rentes à créer aujourd'hui ne porteront que la jouissance du semestre cou

(1) V. le texte de cette loi promulguée à la date du 6 mai 1818, ci-après, p. 144.

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