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MARS 1685. arrivés, d'en avertir, dans huitaine au plus tard, les gouverneur et intendant desdites îles, à peine d'amende arbitraire; lesquels donneront les ordres nécessaires pour les faire inscrire et baptiser dans le temps convenable.

3. Interdisons tout exercice public d'autre religion que celle de la catholique, apostolique et romaine; voulons que les contrevenans soient punis comme rebelles et désobéissans à nos commandemens. Défendons toutes assemblées pour cet effet, lesquelles nous déclarons conventicules, illicites et séditieuses, sujettes à la même peine, qui aura lieu même contre les maîtres qui les permettront, ou souffriront à l'égard de leurs esclaves.

4. Ne seront préposés aucuns commandeurs à la direction des nègres, qu'ils ne fassent profession de la religion catholique, apostolique et romaine; à peine de cor fiscation desdits nègres contre les maîtres qui les auront préposés, et de punition arbitraire contre les commandeurs qui auront accepté ladite direction.

5. Défendons à nos sujets de la religion prétendue réformée d'apporter aucun trouble ni empêchement à nos autres sujets, même à leurs esclaves dans le libre exercice de la religion catholique, apostolique et romaine, à peine de punition exemplaire.

6. Enjoignons à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu'ils soient, d'observer les jours de dimanches et fêtes qui sont gardés par nos sujets de la religion catholique, apostolique et romaine. Leur défendons de travailler ni de faire travailler leurs esclaves auxdits jours, depuis l'heure de minuit jusqu'à l'autre minuit, à la culture de la terre, à la manufacture des sucres, el à tous autres ouvrages, à peine d'amende et de punition arbitraire contre les maîtres, et de confiscation tant des sucres que des esclaves qui seront surpris par nos officiers dans le travail.

7. Leur défendons pareillement de tenir le marché des nègres, et de toutes autres marchandises auxdits jours, sur pareilles peines de confiscation des marchandises qui se trouveront alors au marché et d'amende arbitraire contre les marchands.

8. Déclarons nos sujets qui ne sont pas de la religion catholique, apostolique et romaine, incapables de contracter à l'avenir, aucuns mariages valables. Déclarons bâtards les enfaus qui naftront de pareilles conjonctions, que nous voulons être tenues et réputées, tenons et réputons pour vrais concubinages.

9. Les hommes libres qui auront un ou plusieurs enfans de leur concubinage avec des esclaves, ensemble les maîtres qui l'au

ront souffert, seront chacun condamnés à une amende de deux mille livres de sacre; et s'ils sont les maîtres de l'esclave de laquelle ils auront eu lesdits enfans, voulons, outre l'amende, qu'ils soient privés de l'esclave et des enfans, et qu'elle et eux soient adjugés à l'hôpital, sans jamais pouvoir être affranchis. N'entendous toutefois le présent article avoir lieu, lorsque l'homme libre qui n'étoit point marié à une autre personne durant son concubinage avec son esclave, épousera, dans les formes observées par l'église, ladite esclave, qui sera affranchie par ce moyen, et les enfans rendus libres et légitimes.

10. Les solennités prescrites par l'ordonnance de Blois, et par la déclaration du mois de novembre 1639, pour les mariages, seront exécutées tant à l'égard des personnes libres que des esclaves, sans néanmoins que le consentement du père et de la mère de l'esclave y soit nécessaire, mais celui du maître seulement.

Défendous très expressément aux curés de procéder aux mariages des esclaves, s'ils ne font apparoir du consentement de leurs maîtres; défendons aussi aux maîtres d'user d'aucune contrainte sur leurs esclaves pour les marier contre leur grẻ.

12. Les enfans qui naîtront des mariages entre les esclaves, seront esclaves et appartiendront aux maîtres des femmes esclaves, et non à ceux de leurs maris, si le mari et la femme ont des maîtres differens.

13 Voulons que si le mari esclave a épousé une ferme libre, les enfans tant mâles que filles soient de la condition de leur mère, et scient libres comme elle, nonobstant la servitude de leur père; et que si le père est libre et la mère esclave, les enfans soient esclaves pareillement.

14. Les maîtres seront tenus de faire enterrer en terre sainte, et dans les cimetières destinés à cet effet, leurs esclaves baptisés : et à l'égard de ceux qui mourront sans avoir reçu le baptême, ils seront euterrés de nuit dans quelque champ voisin du lieu où ils seront décédés.

15. Défendons aux esclaves de porter aucune arme offensive, ni de gros bâtons, à peine du fouet, et de confiscation des armes au profit de celui qui les en trouvera saisis, à l'exception seulement de ceux qui seront envoyés à la chasse par leurs maîtres, et qui seront porteurs de leurs billets, ou marques connues.

16. Défendons pareillement aux esclaves appartenans à différens maîtres, de s'attrouper, le jour ou la nuit, sous pré

MARS 1685. 497 texte de noces ou autrement, soit chez un de leurs maîtres, ou ailleurs, et encore moins sur les grands chemins ou lieu x écartés, à peine de punition corporelle, qui ne pourra être moindre que du fouet et de la fleur de lys; et en cas de fréquentes récidives et autres circonstances aggravantes, pourront être punis de mort, ce que nous laissons à l'arbitrage des juges. Enjoignons à tous nos sujets de courir-sus aux contrevenans, de les arrêter et de les conduire en prison, bien qu'ils ne soient point officiers, et qu'il n'y ait contre eux aucun décret.

17. Les maîtres qui seront convaincus d'avoir permis ou toléré telles assemblées composées d'autres esclaves que de ceux qui leur appartiennent, seront condamnés en leur propre et privé nom, de réparer tout le dommage qui aura été fait à leurs voisins à l'occasion desdites assemblées, et en dix livres d'amende pour la première fois, et au double en cas de récidive.

18. Défendons aux esclaves de vendre des cannes de sucre, pour quelque cause et occasion que ce soit, même avec la permission de leurs maîtres, à peine du fouet contre les esclaves, de dix livres tournois contre le maître qui l'aura permis, et de pareille somme contre l'acheteur.

19. Leur défendons d'exposer en vente au marché, ni de porter dans les maisons particulières pour vendre, aucune sorte de denrées, même des fruits, légumes, herbes pour la nourriture des bestiaux et leurs manufactures, sans permission expresse de leurs maîtres, par un billet, ou par des marques connues; à peine de revendication des choses ainsi vendues, sans restitution du prix par les maîtres, et de six livres tournois d'amende à leur profit contre les acheteurs.

20. Voulons à cet effet que deux personnes soient préposées par nos officiers dans chaque marché, pour examiner les denrées et marchandises qui sont apportées par les esclaves, ensemble les billets et marques de leurs maîtres dont ils seront porteurs.

21. Permettons à tous nos sujets habitans des îles, de se saisir de toutes les choses dont ils trouveront les esclaves chargés, lorsqu'ils n'auront point de billets de leurs maîtres, ni des marques connues, pour être rendues incessamment à leurs maîtres, si leur habitation est voisine du lieu où les esclaves auront été surpris en délit, sinon elles seront incessamment envoyées à l'hôpital pour y être déposées jusqu'à ce que les maîtres eu aient été avertis. 22. Seront tenus les maîtres de faire fournir, par chaque semaine, à leurs esclaves âgés de dix ans et au-dessus, pour leur

nourriture, deux pots et demi, mesure de Paris, de farine de Manioc, ou trois cassaves pesant chacune deux livres et demie au moins, ou autre chose équivalente, avec deux livres de bœuf salė, ou trois livres de poisson, ou autres choses à proportion; et aux enfans, depuis qu'ils sont sevrés jusqu'à l'âge de dix ans, la moitié des vivres ci-dessus.

23. Leur défendons de donner aux esclaves de l'eau-de-vie de cannes ou guildive, pour tenir lieu de la subsistance mentionnée au précédent article.

24. Leur défendons pareillement de se décharger de la nourriture et subsistance de leurs esclaves, en leur permettant de travailler certains jours de la semaine pour leur compte particulier.

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25. Seront tenus les maîtres de fournir à chaque esclave, par chacun an, deux habits de toile, ou quatre aunes de toile, au gré desdits maîtres.

26. Les esclaves qui ne seront point nourris, vêtus et entretenus par leurs maîtres, selon que nous l'avons ordonné par ces présentes, pourront en donner avis à notre procureur, et mettre leurs mémoires entre ses mains; sur lesquels et même d'office, si les avis lui viennent d'ailleurs, les maîtres seront poursuivis à sa requête et sans frais; ce que nous voulons être observé pour les crimes et traitemens barbares et inhumains des maîtres envers leurs esclaves.

27. Les esclaves infirmes par vieillesse, maladie ou autrement, soit que la maladie soit incurable ou non, seront nourris et entretenus par leurs maîtres, et en cas qu'ils les eussent abandonnés, lesdits esclaves seront adjugés à l'hôpital, auquel les maîtres seront obligés de payer six sols par jour, pour la nourriture et entretien de chaque esclave.

28. Déclarons les esclaves ne pouvoir rien avoir qui ne soit à leurs maîtres; et tout ce qui leur vient par industrie ou par la libéralité d'autres personnes, ou autrement, à quelque titre que ce soit, être acquis en pleine propriété à leurs maîtres, sans que les enfans des esclaves, leurs pères et mères, leurs parens, et tous autres, y puissent rien prétendre par successions, dispositions entre vifs ou à cause de mort; lesquelles dispositions nous déclarons nulles, ensemble toutes les promesses et obligations qu'ils auraient faites, comme étant faites par gens incapables de disposer et contracter de leur chef.

29. Voulons néanmoins que les maîtres soient tenus de ce que

leurs esclaves auront fait par leur commandement; ensemble de ce qu'ils auront géré et négocié dans les boutiques, et pour l'espèce particulière du commerce à laquelle leurs maîtres les auront préposés, et en cas que leurs maîtres ne leur aient donné aucun ordre, et ne les aient point préposés, ils seront tenus seulement jusqu'à concurrence de ce qui aura tourné à leur profit; et si rien n'a tourné au profit des maîtres, le pécule desdits esclaves que leurs maîtres leur auront permis d'avoir, en sera tenu, après que leurs maîtres en auront déduit par préférence ce qui pourra leur en être dû; sinon que le pécule consistât en tout ou partie en marchandises, dont les esclaves auroient permission de faire trafic à part, sur lesquelles leurs maîtres viendront seulement par contribution au sol la livre avec les autres créanciers. 30. Ne pourront les esclaves être pourvus d'office ni de commission ayant quelque fonction publique, ni être constitués agens pour autres que pour leurs maîtres, pour gérer et administrer aucun négoce, ni être arbitres, experts, ou témoins, tant en matière civile que criminelle; et en cas qu'ils soient ouïs en témoignage, leurs dépositions ne serviront que de mémoires pour aider les juges à s'éclaircir d'ailleurs, sans qu'on en puisse tirer aucune présomption, conjecture, ni adminicule de preuve.

ni

31. Ne pourront aussi les esclaves être parties ni çiter en jugement en matière civile, tant en demandant qu'en défendant, être parties civiles dans les matières criminelles, sauf à leurs maîtres d'agir et défendre en matière civile, et de poursuivre en matière criminelle la réparation des outrages et excès qui auront été commis contre leurs esclaves.

32. Pourront les esclaves être poursuivis criminellement, sans qu'il soit besoin de rendre leurs maîtres parties, sinon en cas de complicité et seront, les esclaves accusés, jugés en première instance par les juges ordinaires et par appel au conseil souverain, sur la même instruction, et avec les mêmes formalités que les personnes libres.

33. L'esclave qui aura frappé son maître, ou la femme de son maître, sa maîtresse, ou le mari de sa maîtresse, ou leurs enfans avec contusion on effusion de sang, sera puni de mort.

34. Et quant aux excès et voies de fait qui seront commis par les esclaves contre les personnes libres, voulons qu'ils soient sévèrement punis, même de mort, s'il y échet.

35. Les vols qualifiés, même ceux de chevaux, cavales, mulets, bœufs ou vaches, qui auront été faits par les esclaves, où

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