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au rétablissement du commerce maritime, dont nous avons fixé la jurisprudence par divers réglemens, et par notre ordonnance du mois d'août 1681, plusieurs de nos sujets ont fait des polices et contrats d'assurance avec beaucoup d'avantage, ayant évité de grandes pertes moyennant des sommes modiques qu'ils ont payées pour faire assurer leurs vaisseaux et marchandises. C'est ce qui nous a porté à exciter plusieurs négocians et autres personnes entendues au commerce de s'associer ensemble pour l'établissement d'une chambre générale d'assurance, en corps de compagnie, fonds et signatures communes, à condition de faire par eux un fonds considérable, afin que les négocians qui voudroient se servir de ce moyen pour diminuer les risques qu'ils courent dans leur commerce ordinaire, l'entreprennent et le continuent avec plus de facilité et de sûreté. A ces causes, etc. Voulons et nous plaît.

ART. 1. Qu'il soit établi une compagnie générale des assurances et grosses aventures en notre bonne ville de Paris, en tel lieu que les intéressés en icelle trouveront le plus convenable, pour en faire le bureau général des assurances, y faire les assemblées nécessaires, et traiter des affaires de leur société.

2. Elle sera composée de trente associés seulement; cinq desquels seront élus à la pluralité des voix, pour en être les directeurs pendant le temps qui sera fixé par la compagnie; et les noms de tous les associés seront inscrits dans un tableau qui sera posé et demeurera au bureau.

3. Six mois après la première élection, deux sortiront de charge, et les trois autres six mois après, et ainsi successivement de six mois en six mois; en la place desquels d'autres seront élus eu pareil nombre, au lieu de ceux qui seront sortis: en sorte que dans la direction il reste toujours deux ou trois anciens directeors, qui ne pourront être continués de suite plus de deux fois, et entre lesquels il y aura toujours trois négocians.

4. Le fond capital de la compagnie sera de trois cent mille livres, et réparti en soixante quinze actions de quatre mille livres chacune, qui seront fournies par les associés au temps qui sera porté par leur société, conformément au réglement qui sera fait entr'eux; afin qu'incontinent après la publication des présentes, la, compagnie puisse commencer d'assurer ceux qui se présenteront. Et durera ladite société six années du jour de l'enregistrement desdites présentes.

5. Si quelques uns des associés manquent de payer aux termes

qui seront réglés par la société, la part pour laquelle chacun d'eux devra contribuer à proportion de son intérêt au fonds des trois cent mille livres, ce qu'ils auront avancé leur tombera en pure perte, et demeurera au profit des autres associés, sans qu'ils puissent être déchargés des pertes qui pourront arriver sur les engagemens que la compagnie aura contractés, jusques y compris le jour qu'ils auront été en défaut de payer.

6. Les polices et contrats d'assurance et grosses aventures, lettres et billets de change, missives, procurations et autres actes concernant l'administration de la compagnie, seront signés par les directeurs, et en tout cas par trois d'iceux en l'absence des autres; et en ce cas ils valideront de même que si tous les associés les avoient signés.

surance,

7. Les directeurs qui auront signé les polices et contrats d'aset autres actes concernant ledit commerce, non plus que les autres associés, ne seront réputés obligés, ni contraints solidairement au-delà de trois cent mille livres du fonds de la socité. Pourront cependant lesdits directeurs et autres associés être contraints chacun au sou la livre, et à proportion de son intėrêt dans ladite société, au-delà desdites 300,000 livres.

8. En cas que par les comptes qui seront faits par la compagnie dans les temps portés par la société, le fonds de 300,000 livres se trouve diminué par les pertes, il sera incontinent rétabli par contribution au sou la livre, et à proportion de la part que chacun des associés aura signée dans la société ; à quoi faire ils seront tenus et obligés. Et en cas de refus par aucuns d'eux, les refusans demeureront exclus de la société de plein droit, huitaine après une sommation faite à leurs personnes, ou domicile élu, et perdront toutes leurs avances qui demeureront au profit des autres associés, entre lesquels les actions de ceux qui auront été exclus seront réparties à proportion de leurs intérêts.

9. La compagnie pourra établir des commis et correspondans dans toutes les villes qu'elle jugera à propos.

10. Toutes les polices d'assurance contiendront la soumission des parties à l'arbitrage en cas de contestation, sous telle peine qui sera convenue entre la compagnie et l'assuré.

11. En cas de contestation entre la compagnie et l'assuré, ils seront tenus de nommer, chacun de leur part, un arbitre marchand on banquier non intéressé, et de signer sur le registre un compromis ou soumission d'en passer par leur jugement sous les peines dont ils conviendront, qui ne pourront être réputées

comminatoires: et s'ils ne peuvent convenir d'arbitres, ils seront nommés d'office par le lieutenant général de l'amirauté, à la première réquisition de l'une des parties. Lesquels arbitres rendront leurs jugemens dans le bureau de la compagnie, qui seront par eux prononcés aux parties, et expédiés par le commis au greffe.

pour cent

12. Si pendant la contestation l'assuré demande d'être payé par provision de ce qui pourra lui être dû, la compagnie sera tenue de lui remettre la somme en deniers comptans, à la charge toutefois par l'assuré de rapporter le principal et les intérêts à six et d'y être contraint comme dépositaire de biens de justice, s'il est ainsi ordonné en fin de cause, dont il fera la soumission sur le registre, et donnera bonne et suffisante caution qui sera reçue avec les directeurs par les arbitres convenus ou nommés.

13. Les sentences arbitrales seront homologuées au siége de la table de marbre à Paris; et en cas d'appel, l'appelant sera tenu, auparavant qu'il puisse y être reçu, de payer la peine portée par le compromis, nonobstant qu'il prétendît qu'elle fût nulle et contraire aux ordonnances; après quoi y sera fait droit.

14. Les appellations qui seront interjetées desdites sentences arbitrales seront jugées en dernier ressort par les sieurs lieutenant général de police, prevôt des marchands de notre bonne ville de Paris, et tel de nos conseillers en nos conseils et en notre conseil d'état qui sera par nous commis: et ce sur le rapport qui en sera fait par le lieutenant général de l'amirauté, et sur les piéces qui seront remises entre ses mains trois jours après la dénonciation et sommation qui en aura été faite à l'assuré, ou aux directeurs, sans qu'il soit besoin de la réitérer, ni du ministère d'aucuns avocats ni procureurs.

15. Attribuons pareillement comme dessus auxdits sieurs commissaires la connoissance de tous les différends qui pourroient naître entre les directeurs, associés, officiers et commis de la compagnie pour les choses où elle aura intérêt, circonstances et dépendances.

16. Ne pourront les actionnaires et associés de la compagnie s'y faire assurer, ni prendre les deniers à la grosse aventure

d'elle directement ou indirectement sur aucun vaisseau ou chargement dans lequel ils auront quelque intérêt, à peine de nullité de la police, perte de la prime, au profit de la compagnie, restitution de l'argent qui aura été pris avec l'intérêt à dix pour cent, et autre plus grande peine s'il y échoit, si ce n'est qu'ils

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aient auparavant déclaré par écrit, tant aux directeurs qu'au greffe, l'intérêt qu'ils y ont, et qu'ils en soient convenus avec

eux.

17. Et d'autant que le fonds de la société doit être certain et assuré, il demeurera spécialement affecté aux polices et contrats d'assurance que la compagnie aura faits, sans qu'il puisse être saisi ni diverti pour aucunes autres dettes, non pas même pour deniers royaux, dont nous avons déchargé et déchargeons lesdits associés.

18. Ceux qui entreront dans ladite société et commerce ne dérogeront point à la noblesse.

19. Quand les places des directeurs viendront à vaquer dans la compagnie des Indes orientales, elles seront remplies de l'un desdits trente associés, en acquérant le nombre des actions porté par la déclaration du mois de février 1685.

20. Voulons en outre que l'un des associés négocians soit choisi et élu tous les deux ans à la pluralité des voix, pour entrer et être reçu dans le consulat de la ville de Paris.

21. Ceux desdits associés qui n'ont point droit de committimus par leurs offices ou autrement, auront leurs causes commises en première instance pardevant notre prevôt de Paris pour leurs affaires civiles et criminelles, tant en demandant qu'en défendant; et à l'égard de celles qui concerneront leur commerce et négoce particulier, pardevant les juges et consuls de ladite ville.

22. Nous avons accordé et accordons par ces présentes à ladite compagnie l'entière propriété du greffe des assurancés, ensemble des droits et émolumens qui en proviendront, savoir : l'assuré payera pour le droit du greffe, un quart pour cent des sommes qu'il fera assurer, et l'assureur un sixième pour cent, lorsque les directeurs enverront signer les polices dans le public, suivant l'usage ordinaire. Celui qui empruntera de la compagnie à la grosse aventure paiera pareillement un quart pour cent des sommes qu'elle lui prêtera, suivant l'usage ordinaire. Pour l'acte et expédition de la police, l'assuré paiera vingt sous; pour l'enregistrement et signification d'une perte, abandon, ou avaries, quinze sous; pour tout autre acte de signification aux directeurs, dix sous; pour l'acte de remise des pièces justificatives au greffe, quinze sous; pour l'enregistrement de l'acte de soumission et compromis, quinze sous; pour l'enregistrement et expédition des sentences, lesquelles ne pourront être écrites qu'en papier,

cinq sous par rôle ordinaire; pour l'enregistrement et expédition d'un contrat à la grosse, cinq sous par rôle ordinaire; pour chacun extrait de délibérations, cinq sous; sans que lesdits associés soient tenus de nous en compter ni payer aucune finance, dont nous les avons déchargés et déchargeons, et en tant que de besoin, fait et faisons don.

23. Les associés pourront nommer et choisir un commis intelligent et de probité connue, pour remplir le greffe, le destituer et remplacer d'autres; ce qui toutefois ne se pourra faire sans cause légitime, et par délibération commune; lesquels commis seront tenus de prêter serment devant le lieutenant général de police.

24. Accordons à ladite compagnie le cachet de nos armes pour s'en servir aux expéditions qui la concerneront.

25. Il ne pourra être fait aucun commerce d'assurances ni grosses aventures dans notre bonne ville de Paris que par ladite compagnie, à peine de nullité, dépens, dommages et intérêts.

26. Néanmoins ladite compagnie pourra, après qu'elle aura signé ce qu'elle aura voulu sur les polices et contrats, les faire courir pour recevoir les signatures de tous les particuliers, sur lesquels il leur sera loisible de signer pour les sommes qu'ils voudront au gré des assurés,

27. Les marchands, négocians et autres particuliers des villes de Rouen, Nantes, Saint-Malo, La Rochelle, Bordeaux, Bayonne, Marseille, et autres villes qui font ledit commerce des assurances et grosses aventures, pourront le continuer comme ils ont fait avant la date des présentes, et non autreinent, à peine de nullité des polices.

28. Permettons auxdits associés de faire entre eux des articles et réglemens pour le gouvernement des affaires de leur société, lesquels seront autorisés par arrêt du conseil.

29. Les réglemens par nous ci-devant faits touchant le com. merce maritime, et notre ordonnance du mois d'août 1681, seront observés suivant leur forme et teneur, excepté en ce à quoi nous y avons dérogé par ces présentes, et nommément au réglement du 5 juin 1668. Si donnons, etc.

Suit l'acte de société en commandite.

FIN DU TOME TROISIÈME DU RÈGNE DE LOUIS XIV.

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