Page images
PDF
EPUB

SEPTEMBRE-OCTOBRE

Manifeste du Comité général du parti socialiste à l'occasion du voyage de l'Empereur et de l'Impératrice de Russie.

Arrivée des souverains russes à Dunkerque et à Compiègne.

Texte des divers discours du Tsar et du Président de la République.

Revue de Bétheny, près Reims. Depart des souverains russes.
Révocation du maire de Rethel (Ardennes).

Attitude du maire de Lille (Nord).

Elections aux Conseils du travail.

Remplacement du genéral Davout, duc d'Auerstædt, grand chance. lier de la Légion d'honneur, par le général Florentin.

Assassinat du Président de la République des Etats-Unis, Mac-Kinley, par un anarchiste.

Situation des congrégations religieuses.

Vote des ouvriers mineurs de France au sujet de la grève générale. Ouverture de la session parlementaire extraordinaire de 1901. CHAMBRE: Discussion d'une proposition de loi présentée par M. Basly, député socialiste du Pas-de-Calais, fixant un minimum de salaire. Ajournement indéfini de la grève générale.

:

CHAMBRE Discussion et adoption d'une proposition de loi concernant l'admission temporaire des blés.

Interpellation Lasies sur l'application de la loi des boissons.

Discussion du projet de loi relatif à la marine marchande.

Dépôt par le ministre des finances d'un projet « d'émission de rentes » ou emprunt de 165 millions de francs pour payer les frais de l'expédition de Chine.

Conflit franco-turc.

Elections partielles.

Le mois de septembre fut presque entièrement rempli par le voyage de l'Empereur et de l'Impératrice de Russie,

les préparatifs qu'il nécessita et les commentaires auxquels il donna lieu,

Tandis que la plupart des partis politiques faisaient taire leurs dissentiments pour se réjouir de cet événenement heureux pour la France, le parti socialiste, aussi bien dans la fraction ministérielle que dans la fraction anti-ministérielle, votait des ordres du jour violents où l'Empereur de Russie était flétri du nom de « knouteur ».

Le Comité général du parti socialiste, composé en grande majorité de partisans de M. Millerand et de la politique ministérielle, vota un ordre du jour invitant les militants socialistes « à se tenir à l'écart de toutes les <<< manifestations humiliantes dont la venue du despote <«< russe sera l'occasion ». En outre, il engagea « les élus qui se réclament des principes socialistes à refuser tout «< crédit pour cette réception, sous peine de déchoir aux << yeux du prolétariat révolutionnaire >>.

Quelques journaux répandirent alors le bruit que M. Millerand, pour se conformer à des votes aussi impératifs, donnerait avant les fêtes sa démission de ministre du commerce. Il n'en fut rien, et on ne lui sut sans doute pas mauvais gré, au Comité général socialiste, de ne pas avoir pris très au sérieux ce fulgurant manifeste, car, quelques semaines plus tard, saisi d'une motion de blâme contre M. Millerand pour sa participation à la réception des souverains russes, le même Comité général se refusa à sévir et vota l'ordre du jour pur et simple sur cette question.

Ainsi se manifesta, une nouvelle fois, la tactique des dirigeants du parti socialiste qui, depuis la constitution du ministère Waldeck-Rouseau, se répandaient en paroles, en ordres du jour, en menaces et en récriminations parfois violentes, mais s'en tenaient strictement là de peur

d'arrêter l'essor d'une politique gouvernementale qu'ils jugeaient profitable à leurs intérêts.

L'arrivée de l'Empereur et de l'Impératrice de Russie dans le port de Dunkerque avait été fixée au 18 septembre, dans la matinée.

Mais les souverains russes, qui venaient de Dantzig où ils avaieut fait à l'empereur d'Allemagne Guillaume II une visite politique importante, ne purent débarquer dans le port de Dunkerque qu'à 2 heures 1/2 de l'après-midi, par suite de l'état de la mer.

Le Président de la République, les Présidents des Chambres et les Ministres étaient partis le 17 septembre de Paris, par train spécial, pour Dunkerque, à la rencontre des souverains russes.

Le matin du 18 septembre, le Président de la République et sa suite s'embarquèrent sur le Cassini et se rendirent, malgré le gros temps, au devant du yacht impérial, le Standart.

La rencontre eut lieu en mer. M. le Président Loubet, accompagné du Président du Conseil Waldeck-Rousseau et de M. Delcassé, ministre des affaires étrangères, ainsi que des membres de sa maison civile et militaire, prit place dans le canot amiral, remorqué par une chaloupe à vapeur qui le conduisit au yacht impérial. Ce fut sur ce yacht que les souverains russes et le Président passèrent la revue navale de l'escadre du Nord, complétée par des navires d'autres escadres.

Quant cette revue grandiose fut terminée, le Président regagna le Cassini et vint attendre les augustes visiteurs sur le quai de la Chambre du commerce de Dunkerque. Quand la marée le permit, le Standart accosta le quai, les souverains débarquèrent et, après que le Président leur eut présenté les ministres français, le cortège gagna

la Chambre du commerce où un banquet avait été préparé.

Ce fut à l'issue de ce banquet que les premiers toasts furent portés. Voici celui du Président Loubet :

Sire,

Au nom de la France, qui, dès la nouvelle de votre prochaine arrivée, a manifesté sa joie par l'organe des conseils généraux qu'elle venait d'élire, je prie Votre Majesté d'agréer nos souhaits de cordiale bienvenue.

Dans cette visite, à laquelle, comme il y a cinq ans, la gracieuse présence de l'impératrice ajoute tant de charme, la République française se plaît à voir une preuve de la bonne impression que vous avez gardée de votre premier séjour parmi nous. Le pays tout entier y est d'autant plus sensible que cette nouvelle visite s'adresse plus particulièrement à son armée et à sa marine. Elles sont l'objet, l'une et l'autre, de son incessante sollicitude, et il sait que, protégé par elles, il peut avec sécurité, avec dignité, poursuivre son labeur opiniâtre et fécond.

Les acclamations de nos marins sur votre passage sont celles qui, sur tous les points de la France, salueraient les souverains aimés de la grande nation qu'unit à la nôtre, avec des sympathies communes et des intérêts concordants, la politique chaque jour plus intime de leurs gouvernements.

Sire,

La marine française vous est profondément reconnaissante de l'honneur que vous venez de lui faire et, traduisant ses sentiments, je lève mon verre à la gloire du règne de Votre Majesté, au bonheur de Sa Majesté l'impératrice, de Sa Majesté l'impératrice Marie, et de la famille impériale; au succès de la vaillante marine russe, qui, hier encore, fraternisait avec la nôtre dans les mers de l'Extrême-Orient.

A son tour le tsar prit la parole et, suivant le texte sur un papier posé sur la table, près de son assiette, il porta le toast suivant d'une voix nette, presque sans accent, en insistant sur les mots « armée et alliée » et sur la phrase finale « je bois à la France entière».

Nous éprouvons, l'Impératrice et moi, un plaisir tout particulier à revenir en France au milieu de la nation amie et alliée, et nous sommes profondément touchés de l'accueil si sympathique qui nous est fait.

C'est avec la plus vive satisfaction que je viens d'admirer la splendide escadre du Nord, et je vous remercie bien sincèrement, monsieur le Président, de m'avoir offert ce frappant spectacle à mon arrivée dans les eaux françaises.

Je bois à la prospérité de la flotte française, qui fraternisait avec la mienne dans les mers de l'Extrême-Orient; à la vôtre, monsieur le Président, à celle de la France entière.

A l'issue du banquet, les souverains russes, le Président et les ministres partirent pour Compiègne. Le château de cette ville avait été splendidement aménagé pour recevoir nos hôtes et le Président, qui y demeura, ainsi que les Présidents des Chambres et les ministres, pendant toute la durée du séjour des souverains.

Seul, M. Caillaux, ministre des finances, resta à Paris, pour assurer l'expédition des affaires courantes.

Le 19 septembre, les souverains russes et le Président se rendirent, par train spécial, de Compiègne au fort de Witry, aux environs de Reims, pour assister aux grandes manœuvres de l'Est. Le tsar à cheval, suivi par le généralissime Brugère et un nombreux état-major, passa sur les positions, inspecta les troupes et rejoignit ensuite au fort de Witry l'Impératrice et le Président Loubet.

Là, il se fit montrer le nouveau canon de l'artillerie française et s'en fit expliquer le mécanisme.

Les manœuvres terminées, un grand déjeuner militaire fut servi au fort de Witry. A la fin du repas, le Président de la République porta le toast suivant :

Je suis heureux de transmettre à Votre Majesté le salut et les remerciements de l'armée, fière et reconnaissante de l'intérêt que vous venez de lui témoigner.

Si, d'un même cœur, la France et la représentation de la

« PreviousContinue »