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traits des princes et de leurs familles '. Le duc d'Orléans, qui fut assassiné à Paris par Jean sans Peur, avait réuni dans un cabinet secret divers portraits qu'il montrait à ses familiers et qui représentaient des dames de la cour, ses maîtresses. Quelques années plus tard, l'incendie du château de Bicêtre, qui appartenait au duc de Berry, consuma une suite de portraits originaux des empereurs d'Orient et d'Occident et des rois de la troisième race 2. Mais les lignes de ces portraits étaient dures, les couleurs fausses et heurtées; la vie, l'âme enfin était absente. Le premier, parmi les peintres du Nord, Jean Van Eyck reproduisit les caractères individuels de la figure humaine. Fier d'avoir à sa cour un aussi grand peintre, Philippe le Bon écrivait en 1434 « qu'il n'y « en avoit point de pareil à son gré, ni si excellent « en son art et science 3. » Lorsque l'illustre artiste mourut en 1440, il laissa, du moins, des élèves dont quelques-uns devinrent célèbres, et c'est sans doute l'un d'eux qui fit le plus estimé des divers portraits de Jacques Cœur. Moins somptueux, à la vérité, que le duc de Bourgogne, car les revenus de la France étaient bornés et la défense du royaume les absorba en entier pendant longtemps, Charles VII encouragea néanmoins les peintres, et les exempta

1 M. de Laborde, La renaissance des arts, etc., p. 38.

2 Collection Petitol, Tableau du règne de Charles VII, p. 266 et 298.

3 Le moyen áge et la renaissance, M. A. Michiels, Peinture sur bois, cuivre et toile, t. V.

peint dans le genre grisaille, représentait une galère capitane'. L'artiste qui les exécuta était sans doute Henri Mellin, à qui l'on doit les verrières de Riom, plusieurs vitraux de la cathédrale de Bourges, et qui peignit aussi sur des vitraux destinés pour l'église Saint-Paul, à Paris, les portraits, malheureusement détruits, de Charles VII, de Jeanne Darc et de Jacques Cœur 2.

En même temps, c'est-à-dire vers le milieu du quinzième siècle, la grande peinture prenait enfin son essor et s'élevait, presque sans transition, aux plus hautes sphères qu'il lui ait été donné d'atteindre. Longtemps comprimée par l'influence de l'école byzantine et par l'imperfection des procédés employés pour la préparation des couleurs, la peinture attendait le génie qui la débarrasserait de ses langes. Cet honneur fut réservé à Jean Van Eyck. Jamais révolution plus heureuse et plus féconde que cell dont les arts lui furent redevables. Mais Jean Var Eyck ne perfectionna pas seulement la préparation des couleurs, il fut aussi un peintre de génie. Déjà depuis des siècles, les rois avaient, dans le personne de leur maison, des hommes chargés tout à la fois d peindre la sellerie, les armures, la pâtisserie des cu sines et en même temps de conserver à la postérité le

1 Ce vitrail existe encore dans le musée de Bourges, où il y er aussi un autre représentant les armoiries de Jacques Coeur, a des allégories. Voir ci-dessus, p. 18.

2 M. F. Bourquelot, Histoire de la peinture et des arts du des en France, dans Patria, cole 2256.

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vive pour la peinture; par malheur, le goût des arts ne supplée pas le talent, et celles de ses œuvres qui sont restées annoncent qu'il avait plus de bonne volonté et de persévérance que de génie '. Les contemporains du roi René et les chroniqueurs provençaux le jugèrent, à la vérité, différemment. Un historien de Provence a dit de ce bon et excellent prince, roi populaire, même de son vivant, bien qu'il ait été malheureux dans toutes ses entreprises, mais peintre et poëte médiocre, que « sur toutes choses aimoit, et

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Un grand nombre d'autres artistes italiens sont nés dans le quinzième siècle; je ne cite ici que ceux dont la France possède quelque tableau qui ait été jugé digne de figurer dans le grand salon du musée du Louvre.

1 M. Alex. Lenoir a reproduit dans son ouvrage (Monuments des arts libéraux, mécaniques et industriels de la France, depuis les Gaulois jusqu'à François Ier, 1 vol. in-folio, p. 46), le dessin d'un tableau du roi René à deux volets, sur l'action duquel il fournit divers renseignements. M. Lenoir remarque que le roi René peignait dans le genre de Jean Van Eyck, avec lequel on suppose qu'il entretenait des relations. Le musée de l'hôtel de Cluny possède du roi René un tableau peint sur bois représentant Marie-Madeleine à Marseille. « Ce tableau, dit avec rai« son le catalogue du musée, emprunte une grande partie de « son intérêt à son royal auteur. Sur le premier plan sont « les figures du roi René et de la reine Jeanne de Laval. Au<< tour d'eux sont groupés les habitants de Marseille, rangés en « cercle devant Marie-Madeleine, debout sur une tribune, en alti«tude de parler à l'assemblée; dans le fond, on voit la ville de << Marseille, les forts et la haute mer... » — Le plus beau spécimen

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d'un amour passivené, hi jenture, et I avoit la « nature devé e indiurd a want exorbeste a « ceste noble profession qu'il endt en bruit et ré«putation entre les plus excedents peintres et enlumineurs de son temps, alusi qu'on peut voir « en plusieurs divers chefs-d'œuvre achives de sa « divine et royale main *...

Mais, si le roi Rezé resta un artiste inferieur dans
la grande peinture, on peut dire qu'il se distingua,
sans y prendre néanmoins le premier rang, dans
celle des manuscrits. Cette peinture, qui compte
aussi ses chefs-d'œuvre, touchait quelquefois aux li-
mites mêmes du domaine de l'art. Ses premiers essais
en France paraissent remonter à l'époque de l'inva-
sion romaine. Plusieurs Bibles du huitième siècle
sont ornées de miniatures. Au treizième siècle, ce
genre de peinture s'agrandit et se perfectionna sous
l'influence des magnifiques verrières qui excitaient
l'admiration publique. Les miniatures d'un psautier
de saint Louis et d'un manuscrit du fameux roman

de l'école française existant au musée de Cluny est un tableau
peint sur bois, à volets, représentant le sacre de Louis XII, en
1498. — On admire, en outre, dans la salle de la cour d'appel à
Paris, un beau tableau de la fin du quinzième siècle représentant
un Crucifiement. « Nulle production de Hemling, dit M. A. Mi-
- Voir
« chiels (Peint. sur bois, cuivre, toile, loc. cit.), n'offre un art
« aussi avancé, une composition aussi profonde, des types aussi
« originaux. La Belgique et la Hollande ne renferment pas une
œuvre du même style qu'on puisse dire plus belle. » -
aussi sur ce tableau, Les ducs de Bourgogne, par M. le comte de
Laborde, IIe partie, t. I. Preuves, p. cxL.

«

1 César Nostradamus, Histoire et chronique de Provence, citée par le catalogue du musée de Cluny, p. 103.

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