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on de pourvoir a la sureté des Citoyens et des Esclaves. Il seroit funeste aux Colonies et à la Métropole elle-même, que qui que ce soit ne fût autorisé à rendre sur-le-champ les règlemens provisoires que nécessitent de telles circonstances.

3°. Quant à l'ordre judiciaire, les appels des jugemens du Tribunal terrier supprimé en 1787, et ceux des Ordonnances rendues par les Administrateurs, devoient être portés au Conseil du Roi; beaucoup de causes de ce genre y sont pendantes en ce moment; mais on pense que les Décrets de l'Assemblée Nationale autorisent provisoirement le Conseil de Sa Majesté à connoitre de ces affaires contentieuses.

DU MERCREDI 28 OCTOBRE. M. Camus a emporté de six voix la Présidence sur M. Emmeri, c'est-à-dire, de 378 contre 372.

M. Fréteau a adressé à l'Assemblee un Discours de remercimens, et M. Camus a aussi prononcé le sien.

M. P'Evêque de Rhodes a rapoorté qu'il avoit trouvé les Députes blessés, en beaucoup meilleur état, et que M. Viard etoit hors de danger.

On a repris l'ordre du jour, sur la seconde partie de la Motion de M. de Mirabeau, qui exclut de la Représentation Nationale, les enfans des faillis ou banquerou tieres, etc.

M. Mougins de Roquefort a proposé la rédaction suivante :

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Les enfans qui auront recueilli la succession du failli, d'apres la remise à lui faite par ses créanciers d'une partie de la seront soumis aux mêmes prohibi

créance,

tions, jusqu'à ce qu'ils aient satisfait à la dette de leur pere, en proportion des biens qu'ils auront reçus de lui.»

M. Lanjuinais a considéré cette loi comme parfaitement injuste, et comme beaucoup trop dure pour les enfans.

M. Prieur limitoit la oi aux enfans seulement qui profiteroient de la succession de leur père.

M. Martineau. Cette loi est très - propre à ramener la pureté des mœurs publiques et l'ancienne bonne foi; elle rendroit les -pères plus réservés et plus circonspects, les enfans plus laborieux et plus empressés à réhabiliter la mémoire de leur auteur; mais cette question demande un plus grand examen: on doit l'ajourner, pour s'occuper de la formation des Municipalités.

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Cet ajournement a été rejeté; et M. Barnave a prisla parole pour combattre laMotion. « Cetteloi, a-t-il dit, est morale et estimable dans son intention, mais une loi bonne pour une petite République comme Geneve, qui ne peut être coasidérée que comme une maison de Banque (1), devient inadmissible dans un

(1) Les Etrangers croient que Genève n'existe que par la Banque ; c'est un vrai contre-sens. Ce commerce en se dénaturant a fait à la Republique à-peu-près tout le mal qu'il pouvoit lui faire. Elle lui doit le transport d'une grande partie de ses capitaux dans les fonds publics étrangers, et plus spécialement dans ceux de France; la dégéneration morale et l'égoïsine qui dérivent de ce genre de propriété, l'amour plus vif des jouissances qui énerve l'esprit domestique

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grand royaume comme la France. Il est des

et celui d'économie; la chute de plusieurs branches d'industrie privées de capitaux; le renchérissement du prix de l'argent, mortel dans une Ville de fabriques; le dégoût da travail lent et utile, remplacé par l'émulation des fortunes rapides du lansquenet de l'agiotage; les angoisses de mille familles, à qui chaque Courrier de Paris porte le désespoir ou l'espérance, bientôt suivie d'alarines renaissantes ; une stagnation, un vide de numéraire qui dessèchent toutes les affaires, aux premiers payemens suspendus ou arriérés à l'Hôtel-de-Ville de Paris; enfin, et par-dessus tout, une servitude d'argent qui offense l'indépendance publique et celle des Citoyens, en les mettant à la merci des révolutions de l'Etranger, en subordonnant leurs intérêts politiques à des crises qui menaceroient leur liberté même, si jamais on venoit à en redouter la perte, moins que celle d'une banqueroute.

Genève est une ville d'arts autant que de commerce. Elle a prospéré, elle s'est enrichie, elle s'est honorée par des spéculations, par des travaux, par des mœurs auxquelles la banque ne donnoit aucun mouvement; mœurs et travaux qui lui ont même résisté jusqu'ici. Genève est encore, non une place de Banque, mais une Cité peuplée de Négocians actifs et expérimentés, de savans laborieux, de philosophes sans charlatanerie, d'hommes libres qui savent respecter la liberté d'autrui; d'artistes habiles en tout genre, et dont les connoissances politiques, comme le remarquoit J. J. Rousseau, feroient honte à beaucoup de Docteurs.

principes existans avant tous les autres : le premier, que toutes les fautes sont personnelles; le second, que les lois ne peuvent pas punir ce qu'elles ne défendent pas : enfin la loi est une; elle n'a pas deux esprits, deux décisions; elle ne condamne pas ici ce qu'elle approuve là: ou la loi obligera le fils de famille de payer les dettes de son père, ou non; si elle ne l'oblige pas, il est inutile de prévoir ce que la loi décidera à cet égard, et ce seroit aller contre la déclaration des droits, si l'on punissoit un homme de'n'avoir pas fait ce que la loi ne lui ordonnoit pas ; ce que la loi ne fait point, c'est à l'opinion publique à le faire. Celui qui ne payera pas les dettes de son père, sera un objet de mépris, et ne sera jamais élevé aux emplois. Je conclus à rejeter l'article.» (Extrait du POINT DU JOUR, Feuille périodique d'où nous tirerons littéralement toutes les Opinions de M. Barnave, lorsqu'il nous arrivera de le citer.

M. Prieur proposa par amendement, de n'exclure les enfans faute d'avoir payé leur portion virile des dettes de leur père, que lorsqu'ils auroient recueilli, et qu'il retiendroient quelque portion de l'héritage hérité.

M. Tronchet ajouta, pour sous-amendement, de ne pas exclure les enfans mariés qui ont reçu une dot avant la faillite de leur pere.

L'amendement et le sous-amendement furent adoptés.

M. de Mirabeau défendit pleinement sa Motion, contre les raisonnemens de M. Barnave et d'autres. Par l'exclusion des enfans, il n'avoit pas entendu prononcer une peine infamante. On a avoué la loi moralement bonne, en la jugeant politiquement

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mauvaise. Je ne sais pas comment la loi morale seroit contraire au droit public et à celui des homines. Les lois morales sont les mêmes pour les Républiques comme pour les Monarchies, pour les Commerçans comme pour les Agriculteurs. Et n'importe-t-il pas aux mœurs qu'il se forme une solidarité domestique de foi publique et privée? Trentesix mille personnes sont unies de for, d'intérêt et de prospérité à Genève; pourquoi un plus grand nombre de citoyens ne pourroit-il pas avoir en France les mêmes liens?

M. de Saint-Fargeau remarqua qu'au mot d'enfans, il falloit substituer le terme plus générique d'héritiers, et au surplus, renvoyer Particle au Comité de rédaction. Cet avis a été adopté, ainsi que le principe posé par M. de Mirabeau, avec son amendement.

M. de Dieusic a ensuite renouvelé une riche clause d'exclusion dans l'exercice du droit d'election, ou dans celui d'éligibilité, contre tout homme interdit, pour quelque chose que se soit, ou repris de justice,

Plusicurs Membres ont appuyé cette opi

nion.

M. Dupont, au contraire, a regardé une loi pareille comme superflue, chez une Nation aussi délicate sur l'honneur.

M. Target ainsi que M. Barrère de Vieuzac, firent sentir qu'au milieu de la barbarie de nos lois, le meilleur Citoyen peut être décrété et repris de justice, sans mériter l'exclusion des droits politiques attachés au titre de Citoyen.

Aussi l'Assemblée décida qu'il n'y avoit lieu à délibérer sur la Motion. Alors M. de Muabeau reprit la parole, pour proposer une loi qui ordonnât de former dans les Assem

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