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すな

TOME IV.

obscurcissent votre vue. Vous
ne songez plus à ce qui vous
serait le plus utile, mais seule-
ment à ce qui peut assouvir
votre rage.
Il lui faut des
meurtres et des incendies.
C'est ainsi que lorsque la
paix est venue à Tilsit con-
soler l'Europe, et faire succé-
der la tranquillité au carnage,
vous avez frémi à la vue de
la prospérité du Continent,
comme les démons de Milton,
à l'esprit du bonheur du pre-
mier homme; et pour dissi-
per vos sombres vapeurs, vous
vous êtes procuré l'affreux
spectacle de l'embrâsement de
Copenhague! Vous venez de
voir deux grandes nations s'en-
tendre pour faire cesser la
guerre, et aussitôt, pour vous
consoler de la cessation de ses
calamitiés, vous avez recours
à de nouvelles scènes de des-
truction et de massacre! Puis-
que tel est votre instant,
suivez-le, mais épargnez l'i-
ronie aux malheureux que
vous faits! Lorsque les deux
Castilles, la Manche, l'Arra-
gon, la Navarre, la Biscaye, le
royaume de Léon, la province
de Salamanque, la Catalogne,
les trois quarts du royaume de
Valence, etc. sont en notre
pouvoir; vous voulez réunir les
cortès-généraux, vous parlez
d'assemblées politiques à des
hommes qui n'ont d'autres
mobiles et d'autres énergies
que le fanatisme et la super-
stition! Dites-nous, où pour-
ront se tenir ces cortès, à
moins que ce ne soit à bord de
vos vaisseaux ? Mais vous ne
croyez pas un mot de ce que
vous dites; la ville de Londres
le croit encore moins. Il y a
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trop d'Anglois en Espagne pour que vous puissiez tromper votre nation sur la véritable situation des choses dans ce pays. Votre but est seulement d'exciter les Espagnols à combattre les Français, pendant que vous regagnerez vos vaisseaux. Les guerres du continent assurent votre empire des mers. Vous voyez les François et les Espagnols se déchirer;" ce sont, dites-vous, des ennemis qui se battent; serious-nous assez insensés pour ne pas animer leur querelle, et pour ne pas leur fournir des armes ? Les Espagnols ne payent-ils pas ces funestes présens du prix le plus précieux pour nous? ils les payent de leur propre sang!" Ce passage achève de dévoiler votre conduite, et donne à tout homme qui pense un nouveau sujet de malédiction contre vous.

Nous remarquons dans le même paragraphe une autre prostitution du pouvoir souverain. On y parle du roi Ferdinand VII, comme si le roi Charles IV n'existait plus, ou comme si le fils pouvait avoir des droits du vivant de son père. Que dirait George III, si, ce passage à la main, le prince de Galles montait sur son trône, et si, à la tête des gardes de Windsor et du peuple de Londres, il enfermait son vieux père aveugle dans la Tour? Il faut l'avouer, l'Europe serait autorisée, à dire au roi Georges : Vous l'avez mérité ! Quelle doctrine pour un roi qui a des fils de 40 ans ! quelle erreur et quelle immoralité! Ainsi, parce que le résultat d'une émeute

de valets et de gardes a été qu'un roi blanchi sur le trône en a été précipité par son fils, vous reconnaissez Ferdinand VII! Ce seul mot explique suffisamment vos intrigues sur les affaires de l'Espagne. Vous reconnaissez Ferdinand parc que vous avez séduit ses entours, et que vous vous êtes servi du duc de l'Infantado pour l'entraîner dans des complots contre son père et sa mère, sous le prétexte d'attaquer le Prince de la Paix. Le plan arrêté par vos partisans étoit qu'aussitôt que le roi Charles aurait été renversé, on aurait approvisionné et fortifié les places, fait marcher des troupes vers les Pyrénées, changé ensuite de systême, et fait la paix avec l'Angleterre. Vous connaissiez assez le caractère de l'empereur des Français pour savoir qu'il ne transigerait pas, et que la France attaquerait l'Espagne; et vous pensiez que celle-ci serait obligée de se jeter dans vos bras, et deviendrait votre esclave! Voilà le noeud et le secret de toutes les affaires d'Espagne. Vos partisans ont fait éclater leurs complots. Vos fumestes intrigues avoient réussi à armer le fils contre le père. Le roi Charles, voyant sa vie menacée, a réclamé l'appui de son allié et le secours de son armée, et il est venu, avec la reine, chercher au milieu de l'armée française un abri contre des fureurs de la populace.

Si même on pouvait penser qu'un fils pût avoir quelque droit au trône du vivant de son père, Ferdinand n'a-t-il pas renoncé à ses droits, et sa re

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du public toutes les pièces de ce grand procès.

se

Lorsque les partisans de l'Angleterre eurent suscité l'émeute d'Aranjuez, lorsque le roi Charles eût été forcé, le pistolet sur la gorge, à démettre en faveur de son fils, le roi et la reine envoyèrent auprés du général qui commandait l'armée française, se mirent sous sa protection, et réclamèrent le secours de leur allié! Ferdinand entra à Madrid. L'empereur, pour être plus près du theâtre de ces grands événemens, vint à Bayonne : le roi Charles demanda de venir l'y joindre, et son fils y vint également. L'un et l'autre proposèrent de prendre l'empereur pour juge et pour arbitre. Tout le monde sait que le roi Charles et Ferdinand sont venus à Bayonne de leur plein gré, et qu'il n'aurait pas été dans la puissance de l'empereur de les faire venir autrement. Ferdinand était encore à Vittoria au milieu de ses partisans et de ses troupes, lorsque l'empereur lui écrivit pour l'inviter à venir. L'empereur proposa au roi Charles de le rétablir sur son trône; mais le roi, accablé d'infirmités, l'esprit frappé des dangers qu'il venait de courir, et ayant horreur de la conduite de son fils, et des excès auxquels s'était portée une effrénée populace, aima mieux couler dans la retraite des jours paisibles, et céda tous ses droits à Tous l'empereur Napoléon. ceux qui étaient alors à Bayoune, et qui ont été témoins de l'auguste colère du vieux roi toutes les fois que son fils se

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