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"seule peut l'expliquer. Quand vous serez grand, vous paye "rez sa dette et la vôtre. N'oubliez jamais dans quelque "position que vous placent ma politique et l'intérêt de mon "empire, que vos premiers devoirs sont envers moi, vos se"conds envers la France; tous vos autres devoirs, même ceux "envers les peuples que je pourrais vous confier, ne viennent "qu'après."

RÉVOCATION PRÉTENDUE DES DÉCRETS DE BERLIN ET DE MILAN.

Copie de la lettre du ministre des relations extérieures, le duc de Cadore, à M. Armstrong.

Monsieur,

Paris, 5 Août, 1810.

J'ai mis sous les yeux de S. M. l'empereur et roi, l'acte du congrès du 1er Mai, extrait de la gazette des Etats-Unis que vous m'avez fait passer. S. M. aurait désiré que cet acte et tous les autres actes du gouvernement des Etats-Unis qui peuvent intéresser la France, lui eussent toujours été notifiés officiellement. En général, elle n'en a eu connaissance qu'indirectement et après un long intervalle de temps. Il résulte de ce retard des inconvénients graves qui n'auraient pas lieu, si ces actes étaient promptement et officiellement communiqués.

L'empereur avait applaudi à l'embargo général, mis par les Etats-Unis sur tous les bâtimens, parce que cette mesure, si elle a été préjudiciable à la France, n'avait au moins rien d'offensant pour son honneur. Elle lui a fait perdre ses colonies de la Guadeloupe, de la Martinique et de Caïenue. L'empereur ne s'en est pas plaint. Il a fait ce sacrifice au principe qui avait déterminé les Américains à l'embargo, en leur inspirant la noble résolution de s'interdire les mers, plutôt que de se soumettre aux lois de ceux qui veulent s'en faire les dominateurs.

L'acte du ler Mars a levé l'embargo, et l'a remplacé par une mesure qui devait nuire surtout aux intérêts de la France, dans le temps qu'il l'autorisait pour l'Espagne, Naples, et la Hollande, c'est-à-dire, pour les pays sous l'influence française, et prononçait la confiscation contre les bâtiments qui entreraient dans les ports d'Amérique. La représaille était de droit et commandée par la dignité de la France, circonstances sur la quelle il était impossible de transiger. Le sequestre de tous les bâtimens américains en France a été la suite nécessaire de la mesure prise par le congrès,

Aujourd'hui le congrès revient sur ses pas. Il révoque l'acte du ler Mars. Les ports de l'Amérique sont ouverts au commerce français et la France n'est plus interdite aux Américains. Enfin le congrès prend l'engagement de s'élever contre celle

des puissances belligérantes qui refuserait de reconnaître les droits des neutres..

Dans ce nouvel état de choses, je suis autorisé à vous déclarer, Monsieur, que les décrets de Berlin et de Milan sont révoqués, et qu'à dater du ler Novembre, ils cesseront d'avoir leur effet, bien entendu qu'en conséqence de cette déclaration les Anglais révoqueront leurs arrêts du conseil, et renonceront aux nouveaux principes de blocus qu'ils ont voulu établir, ou bien que les Etats-Unis, conformément à l'acte que vous venez de communiquer, feront respecter leurs droits par les Anglais.

C'est avec une satisfaction toute particulière, Monsieur, que, que je vous fais connaître cette résolution de l'empereur. S. M. aime les Américains. Leur prospérité et leur commerce sont dans les vues de sa politique. L'indépendance de l'Amérique est un des principaux titres de gloire de la France. Depuis cette époque, l'empereur s'est plu à agrandir les EtatsUnis, et dans toutes les circonstances, ce qui pourra contribuer à l'indépendance, à la prospérité, et à la liberté des Amériques, l'empereur le regardera comme conforme aux intérêts de sou empire.

CADORE.

16 Août, 1810.

Paris, le 15 Août.

Hier à l'audience aux Thuileries, M. l'amiral Verrhuell, président de la députation de Hollande, a porté la parole en ces

termes.

Sire,

Vos très-fidèles sujets de la Hollande, membres du conseil, du corps-législatif, des députations des armées de terre et de mer, et la députation de la ville d'Amsterdam, ont l'honneur de se présenter aux pieds du trône de V. M. pour exprimer respectueusement les sentimens d'admiration, de confiance et d'o-" béissance qui les animent.

Le peuple hollandois, sire, connu dans les annales de l'histoire par les exploits de ses guerriers, l'intégrité de ses politiques, et par ses efforts à conquérir et conserver son indépen dauce, possède encore le souvenir des vertus de ses ancêtres.

Les grands événemens dont l'Europe a été témoin pendant ce siècle, ont changé entièrement les systèmes et rapports politiques des états; et l'indépendance, que nos ancêtres avaient conquise au prix de leurs biens, au prix de leur sang, au prix de tout ce qu'ils avaient de plus cher au monde, devrait éprou ver nécessairement des modifications par la force des circon stances.

Réunis enfin au premier peuple du monde appelés par le plus grand prince de l'univers à partager les bienfaits que son vaste génie et ses boutés paternelles répandent partout en abondance sur ses sujets heureux, et dont la Hollande a déjà reçu des preuves, les Hollandais osent se flatter qu'ils mériteront la protection d'un gouvernement puissant, magnanime, juste et libéral, par leur dévouement, par leur obéissance, et surtout par leur attachement à leur prince et à leur père.

S. M. a répondu:

"Messieurs les députés du corps-législatif, des armées de "terre et de mer de la Hollande, et MM. les députés de ma "bonne ville d'Amsterdam, vous avez été depuis trente ans “le jouet de bien des vicissitudes. Vous perdites votre liberté lorsqu'un des grands officiers de votre république, favorisé par l'Angleterre, fit intervenir les bayonnettes prusiennes aux "délibérations de vos conseils: les constitutions politiques que " vous teniez de vos pères furent déchirées et le furent pour toujours.

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"Lors de la première coalition, vous en fites partie. Par suite, les armées françaises conquirent votre pays, fatalité "attachée à l'alliance de l'Angleterre.

"Depuis la conquéte, vous fûtes gouvernés par une admi"nistration particulière; mais votre république fit partie de "l'empire. Vos places fortes et les principales positions de "votre pays restèrent occupées par mes troupes. Votre ad"ministration change au gré des opinions qui se succédent en "France.

"Lorsque la providence me fit monter sur ce premier trône "du monde, je dus, en fixant à jamais les destinées de la "France, régler le sort de tous les peuples qui faisaient partie "de l'empire, faire éprouver à tous les bienfaits de la stabilité "et de l'ordre, et faire disparaître chez tous les maux de "l'anarchie. Je terminai les incertitudes de l'Italie, en plaçant

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sur ma tête la couronne de fer. Je supprimai le gouverne"ment qui régissait le Piémont. Je traçai dans mon acte de "médiation les constitutions de la Suisse, et conciliai les cir"constances locales de ce pays, les souvenirs de son histoire avec la sûreté et les droits de la couronne impériale.

"verner.

"Je vous donnai un prince de mon sang pour vous gouC'était un lien naturel qui devait concilier les in"térêts de votre administration et les droits de l'empire. Mes "espérances ont été trompées. J'ai, dans cette circonstance "usé de plus de longanimité que ne comportaient mon carac"tère et mes droits. Enfin, je viens de mettre un terme à la "douloureuse incertitude où vous vous trouviez et de faire

cesser une agonie qui achevait d'anéantir, vos forces et vos "ressources. Je viens d'ouvrir à votre industrie le continent. " Le jour viendra où vous porterez mes aigles sur les mers qui

** ont illustré vos ancêtres. Vous vous y montrerez alors dignes "d'eux et de moi, D'ici là, tous les changemens qui survien"dront sur la surface de l'Europe auront pour cause première

le systême tyrannique, aveugle et destructif de sa propre δε prospérité, qui a porté le gouvernement anglais à mettre le commerce hors de la loi commune, en le plaçant sous le régime àrbitraire des licences.

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"Messieurs les députés du corps législatif, des armées de ** terre et de mer de la Hollande, et messieurs les députés de "ma bone ville d'Amsterdam, dites à mes sujets de Hollande, que je suis satisfait des sentimens qu'ils me montrent; que “ je ne doute pas de leur fidélité; que je compte que leurs ef"forts se réuniront aux efforts de tous mes autres sujets pour

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reconquérir les droits maritimes que cinq coalitions succes"sives, fomentées par l'Angleterre, ont fait perdre aux continens. Dites-leur qu'ils peuvent compter, dans toutes les cir"constances, sur ma spéciale protection."

20 Août, 1810.

Paris, le 19 Août.

DÉCRETS IMPÉRIAUX.

Au palais de Saint Cloud, le 24 Juillet. 1810.

Napoléon, empereur des Français, roi d'Italie, protecteur de la confédération du Rhin, médiateur de la confédération suisse, &c. &c. &c.

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit:

TITRE PREMIER.

Création d'un conseil de marine.

Art. 1. Il y aura près de notre ministre de la marine un conseil de marine, composé de quatre conseillers d'état.

Un auditeur ou maître des requêtes fera les fonctions de secrétaire-général,

2. Le conseil de marine se réunira toutes les fois que notre ministre de la marine le convoquera, et au moins une fois par semaine.

3. Les procès-verbaux rédigés par le maître des requêtes ou auditeur secrétaire-général, seront transmis à notre ministre secrétaire d'état, pour nous être soumis.

TITRE DEUXIÈME.

Attributions du conseil.

4. On discutera à ce conseil tous les marchés et les affaires de comptabilité, marchés, approvisionuemens, et tout ce qui est relatif à la formation et à l'équipement de nos escadres.

5. Le conseil n'a que voix consultative, et notre ministre de la marine, après l'avoir entendu, fera ce qu'il jugera le plus conforme au bien de notre service.

6. Chaque objet mis en délibération sera discuté, et l'avis des membres sera consigné au procès-verbal; ils pourront même rédiger eux-mêmes leur opinion, et faire insérer la rédaction au procès-verbal.

Si un membre du conseil avait un avis à ouvrir sur une question de personnel, de matériel, de finance, ou autre objet qui intéressat le service de la marine, il pourra le faire insérer au procèsverbal, au commencement de la séance.

TITRE TROISIÈME.

Des attributions des membres du conseil.

8. Les conseillers d'état, membres du conseil, auront, eu outre, sous leur direction particulière: l'un,

L'organisation, les revues, la solde et la comptabilité de nos bataillons de marine et de tous les équipages de nos bâtimens; La situation et les mouvemens de l'inscription maritime ;

La solde de tous les entretenus et non entretenus de la marine;

La caisse des invalides, les prises, les prisonniers de guerre ; Le second aura les constructions et radoubs;

Les travaux hydrauliques et les bâtimens civils;

Les salaires des ouvriers, les marchés par entreprise générale,

et pour main d'œuvre;

La police de la navigation et de la pêche;

Les chiourmes;

Le troisième aura les marchés pour approvisionnement;

Le transport des munitions et marchandises;

Le martelage et l'exploitation des bois;

Les manufactures et forges impériales ;

La comptabilité des approvisionnemens, tant en matières qu'en deniers;

La quatrième aura les vivres, les hôpitaux; la comptabilité générale des fonds;

Chacun desdits conseillers d'état devra travailler, chaque jour, avec notre ministre de la marine, sur toutes les parties du service confiées à sa direction,

8. Notre ministre de la marine est chargé de l'exécution da présent décret.

Par l'empereur,

(Signé)

Le ministre secrétaire d'état.

NAPOLÉON.

(Signé) H. B. duc de BASSANO.

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