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rir, la perte en doit être supportée par le légataire, sans qu'il puisse prétendre aucun droit aux autres choses sur lesquelles s'étendait le Choix, avant qu'il fût fait. La raison en est qu'à l'instant de la perte, il était propriétaire de la chose, et que res perit domino.

Lorsque l'héritier ou le légataire ont une fois choisi, soit en justice ou de gré à gré, ils ne peuvent plus varier, parceque le droit que le testateur leur avait donné, est consommé par ce premier Choix.

Le legataire qui a le droit de faire un Choix, ne peut l'exercer, avant que l'héritier ait accepté la succession. La raison en il pût faire connaître son Choix, et qui put est qu'auparavant il n'y aurait personne à qui ou le contester ou l'accorder, et faire la délivrance du legs. Ce serait par conséquent en vain qu'il aurait fait un Choix.

Si le testateur léguait une ou deux choses d'entre plusieurs au Choix d'un légataire, et le reste à un autre, et que celui auquel le Choix aurait été attribué, renonçát à son droit, toutes ces choses appartiendraient au second légataire, sans que l'héritier en pût prétendre aucune. La raison en est que l'expression des choses qui restent après le Choix du premier légataire, les comprend toutes lorsqu'il n'en prend aucune.

Si le legataire vient à mourir avant d'avoir fait le Choix auquel il était autorisé, il transmet à son héritier, et le droit au legs et celui du Choix.

Au surplus, V. l'article Option en matière de Legs. (M. GUYOT.)*

*CHOMAGE D'UN MOULIN. C'est l'espace de temps qu'un moulin est sans travailler.

Suivant l'art. 45 du tit. 27 de l'ordonnance des eaux et forêts du mois d'août 1669, ceux qui occasionnent le Chômage d'un Moulin, par leur navigation ou flottage, doivent payer 40 sous d'indemnité, pour le temps de vingtquatre heures, au propriétaire de ce moulin, ou au meunier, son fermier mais cette indemnité n'est due que pour le Chómage des moulins établis avec titre et concession, sur les rivières navigables ou flottables. Il est au surplus très-expressément défendu d'exiger une indemnité plus forte que celle dont on vient de parler, et de retarder, en aucune manière, la navigation ou le flottage, à peine de 1,000 liv. d'amende, outre les dépens, dommages et intérêts qui, dans ces cas, doivent être réglés par les officiers des maîtrises.

L'art. 46 du titre cité porte que, s'il arrive quelque différend pour le droit de Chomage des moulins, ou pour les salaires des maîtres de pont et gardes des pertuis, portes et écluses des rivières navigables ou flottables, ces droits ou salaires doivent être réglés par le grand-maître, ou en son absence, par les officiers de la maîtrise, après que les marchands trafiquans et les propriétaires ou meuniers ont préalablement été ouis. Les ordonnances rendues à cet égard, doivent s'exécuter par provision, nonobstant l'appel et sans y préjudicier.

L'art. 14 du chap. 17 de l'ordonnance du mois de décembre 1671, a aussi réglé à 40 sous vient à chomer au sujet du passage des bois par jour le Chomage d'un moulin, de quelque nombre de roues qu'il soit composé, lorsqu'il flottés la même loi porte que, si les marchands de ces bois sont en possession de payer une moindre somme aux propriétaires des moulins ou à leurs meuniers, ceux-ci seront tenus de s'en contenter : elle défend d'ailleurs aux meuniers, à peine du fouet, de se faire payer aucune autre somme, sinon pour leur travail particulier, comme ils ont pu en convenir de gré à gré avec les marchands ou

leurs facteurs.

V. Moulin, Flottage, etc. (M. GUYOT.)*

[[Le décret du 25 janvier 1807, concernant le flottage des bois sur les ruisseaux et canaux qui coulent dans la vallée de Neustadt, portait, art. 10, « que le Chômage des >> moulins...., occasioné par le passage des » flottes, serait payé aux propriétaires ou à » leurs fermiers, à raison de 2 fr. 25 cent. par » vingt-quatre heures ».

L'art. 11 du même décret ajoutait « qu'il » ne serait payé aucun Chômage pour les » moulins à huile et à scies ».

« Il est expressément défendu (continuait » l'art. 12) à tout propriétaire ou fermier » d'exiger, pour le Chômage, une indem»nité plus considérable que celle ci-dessus » fixée, à peine de restitution du triple » et d'une amende qui ne pourra excéder » 100 francs ».

On voit que ce décret, en fixant à 2 fr. 25 cent. l'indemnité due pour le Chômage, dé"rogeait à l'art. 45 du tit. 21 de l'ordonnance de 1669. Mais cette dérogation devait être resserrée dans les limites du territoire pour lequel le législateur l'avait faite.

Le sieur Gally, propriétaire d'un moulin sur la rivière de Cousain, fait citer les marchands de bois flottés pour l'approvisionnement de Paris, devant le juge de paix du canton d'Avalon, pour se yoir condamner à lui

payer une indemnité de 5 fr. par jour, à raison du Chómage auquel le passage de ces bois force son moulin. - Les marchands de bois offrent 40 sous par jour, conformément à l'ordonnance. Jugement qui, attendu la hausse qu'ont éprouvée les denrées depuis 1669, fixe le Chomage à 3 fr. par jour.· Appel au tribunal civil d'Avalon, qui, par jugement du 2 juillet 1806, confirme celui du juge de paix. Recours en cassation. Par arrêt du 27 juillet 1808, au rapport de M. Sieyes, « vu l'art. 45, tit. 27, de l'ordon»nance de 1669; attendu que la disposition » de l'article ci-dessus n'a jamais été révoquée » ni modifiée, qu'elle est obligatoire pour » tous les tribunaux, et qu'il y a été formel»lement contrevenu; la cour casse et an. >> nulle.... ».

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Du reste, la loi du 28 juillet 1824 contient là-dessus de nouvelles dispositions. ]]

* CHOSE JUGÉE. C'est ce qui est décidé par un jugement eu dernier ressort, ou par une sentence dont il n'y a ou ne peut y avoir d'appel, soit parceque l'appel n'est point recevable, ou qu'il y a un acquiescement à ce que porte la sentence de condamnation, soit parcequ'on n'en a point appelé dans le temps, ou que l'appel a été déclaré périmé. Voilà ce qu'on doit entendre par Chose jugée, aux termes de l'art. 5 du tit. 27 de l'ordonnance de 1667.

L'acquiescement est l'obstacle le plus insurmontable qu'on puisse opposer, en matiere civile, aux tentatives que l'on pourrait faire pour revenir contre un jugement. V. Acquiescement.

Pour ce qui est du délai d'interjeter appel, il faut distinguer, [[ en matière civile ]], entre une sentence qui a été signifiée, et une sentence qui ne l'a pas été. Lorsqu'une sentence n'a pas été signifiée, l'appel s'en reçoit en tout temps; il suffit qu'on l'oppose, pour qu'on puisse en appeler, quand même elle serait contradictoire et d'une date de plus de trente ans, [[pourvu néanmoins que, dans l'intervalle elle soit restée trente ans sans exécution. ]] C'est ce qui est nettement décidé par un arrêt qu'on trouve dans la Collection de jurisprudence et dont voici l'espèce.

«La princesse de Nassau demandait au sieur de Bethery, détenteur d'un héritage, qu'il lui passat titre nouvel d'une redevance en grains, qu'elle prétendait lui être due à cause de cet héritage, et qu'il lui en payât vingt neuf années d'arrérages. Elle n'appuyait sa demande que sur une sentence de

1682, qui en énonçait une autre de 1657..... Et sur le fondement de ces deux sentences, le sieur de Bethery avait été condamné à payer la redevance, par sentence rendue au bailliage de Troyes le 25 juin 1748.

» Le sieur de Bethery interjeta appel, et de cette dernière sentence et de celle de 1682, qui n'avait été ni signifiée ni exécutée par la prestation de la rente. La princesse de Nassau le soutenait non-recevable dans l'appel de la sentence de 1682; elle disait que cette sentence étant contradictoire, elle devait passer en force de Chose jugée. Le sieur de Bethery soutenait, au contraire, que son appel était recevable, au moyen de ce que la sentence n'avait vu le jour pour la première fois qu'au moment de la demande ».

Par arrêt du 22 août 1748, le parlement de Paris, en infirmant la sentence de 1748, débouta la princesse de Nassau de sa demande,

A l'égard des sentences signifiées, V. Appel, sect. 1, §. 5.

Un autre moyen à la faveur duquel une sentence peut obtenir la force de Chose jugée, est la péremption d'appel. Il est certain que, lorsqu'on laisse périr son appel,. ne fût-il porté que dans un tribunal inférieur, comme dans un bailliage ou une sénéchaussée, cette péremption emporte de plein droit la confirmation de la sentence. V. Péremption, sect. 1. (M. DAREAU.)*

[[Il s'est présenté, à la cour de cassation, un très-grand nombre de questions relatives à l'autorité de la Chose jugée, à l'exception qui en résulte aux cas où elle peut avoir lieu, et aux personnes à qui elle peut être opposée. Voici les plus remarquables.

S. I. Les motifs d'un jugement qui sont relatifs à un objet sur lequel il n'y a point eu de conclusions prises par les parties, suffisentils pour que, sur cet objet, non compris d'ailleurs dans le dispositif, il résulte du jugement une exception de Chose jugée ?

V. le plaidoyer du 11 germinal an 13, rapporté à l'article Cens, §. 5.

Les principes qui y sont développés et les autorités qui y sont citées, sont encore confirmés d'une manière bien positive par l'arrêt de la cour de cassation du 5 juin 1821, qui est transcrit au S. suivant, no 2.

S. I. bis. 10. Peut-on, après avoir succombé sur la demande en nullité d'un acte notarié que l'on attaquait comme irrégulier sous un rapport, former une nouvelle demande en nullité du même acte, en l'attaquant comme irrégulier sous un autre rapport?

2o. L'héritier qui, en défendant à la demande en délivrance d'une donation entrevifs, conclut à ce qu'elle soit déclarée révoquée par survenance d'enfant, et soutient en même temps qu'elle est susceptible de réduction comme entamant sa légitime ou réserve, peut-il encore, après avoir succombé sur sa demande en révocation, se pourvoir pour faire réduire la donation? Le peut-il surtout, si le jugement qui a rejeté sa demande en révocation, a déclaré par ses motifs que la donation n'était pas sujette à réduction pour légitime?

I. Sur la première question, l'affirmative ne serait pas douteuse, si la cause d'une demande s'identifiait avec le moyen sur lequel une demande est fondée; car l'exception de Chose jugée ne peut, aux termes de l'art. 1351 du Code civil, sortir du jugement qui a rejeté une demande, que lorsque la demande nouvelle est fondée sur la même cause que la première. Mais il s'en faut de beaucoup que, dans le langage de la loi, fonder une demande sur un nouveau moyen, ce soit la fonder sur une nouvelle cause. Dans le cas sur lequel porte notre question, la cause de la demande était la nullité de l'acte attaqué. Cette cause, le demandeur pouvait la déduire de tels moyens qu'il jugeait expédient d'employer; mais il devait les employer tous à la fois; et tant pis pour lui, s'il en a négligé quelques-uns. La loi ne lui laisse plus de ressource pour revenir sur ses pas, à moins que la voie de la requête civile ne lui soit ouverte par l'art. 481 du Code de procédure civile, comme mineur non valablement défendu.

Ces vérités élémentaires ont été solennellement consacrées dans l'espèce suivante :

Le 14 décembre 1814, arrêt de la cour royale de Colmar, qui déboute le sieur Erhard de la demande qu'il avait formée en nullité d'un acte notarié du 16 floréal an 10, sur le fondement que, suivant lui, l'un des témoins instrumentaires était mineur.

Peu de temps après, il reproduit la même demande devant le tribunal de première instance de Belfort, et la fonde sur ce que le second témoin instrumentaire était étranger.

Le sieur Lévi, son adversaire, lui oppose l'exception de Chose jugée.

Jugement qui, sans s'arrêter à cette exception, ordonne aux parties de plaider au fond.

Appel de la part des héritiers du sieur Levi, et le 1er juillet 1816, arrêt infirmatif de la cour royale de Colmar, « attendu que,

» par un précédent arrêt, du 14 décembre » 1814, confirmatif d'un jugement du 28 juil» let 1813, la nullité prétendue de l'obliga» tion notariée, base des poursuites des appe»lans, a été rejetée; qu'ainsi, cette obligation » est défendue par l'autorité de la Chose » jugée; que l'intimé n'a pu, sans y porter >> atteinte, remettre en question cette même » nullité, sous prétexte d'un autre vice de » forme que celui qu'il avait d'abord objecte; » que la simple proposition d'un nouveau » moyen ne constitue pas une nouvelle cause » de demande ou d'exception; que les cas » rares où une partie peut, par des moyens » qu'elle aurait omis de produire, faire ré» tracter les arrêts ou jugemens en dernier » ressort, sont énoncés parmi les ouvertures » de requête civile, voie que l'intime n'a » tenté ni pu tenter ».

Le sieur Erhard se pourvoit en cassation. Mais sa requête est rejetée le 3 février 1818, « attendu que, lors du premier arrêt du 14 » décembre 1814, Erhard se refusait à l'ac>>complissement de son obligation, sur le » motif qu'elle était nulle; que, lors du se»cond, aujourd'hui dénoncé à la cour, c'est » sur le même motif qu'il y résistait, et de» mandait par suite l'annullation des pour» suites dirigées contre lui; qu'à la vérité, » lors du premier arrêt, Erhard fondait la » nullité alléguée sur la minorité du témoin » Kauffman; tandis que, lors du second, il » la fondait sur la qualité d'étranger non-na»turalisé de l'autre témoin instrumentaire » de l'acte (Matthias Eblé); que ce n'était » point là une cause différente, mais scule»ment un moyen nouveau qu'Erhard faisait » valoir lors de l'arrêt dénoncé; d'où suit que » l'une et l'autre action ont eu évidemment » le même objet et la même cause, qui était » la nullité de l'obligation, et que toutes deux » s'étant successivement agitées entre les » mêmes parties, ayant été formées par elles » et contre elles en la même qualité, l'arrêt » dénoncé, loin de violer les art. 1351 et 1352 » du Code civil et l'art. 480 du Code de pro» cédure, en a fait au contraire la plus juste » application ».

II. La seconde question devrait sans difliculté se résoudre par la négative, si la demande en réduction d'une donation formait, par sa nature et son objet, une exception contre la demande en exécution de la donation attaquée comme révoquée, par survenance d'enfant ; à cette hypothèse, en effet, s'appliquerait le principe que le défendeur doit opposer à la demande intentée contre

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lui, toutes les exceptions dont elle est passible, comme le demandeur doit employer à l'appui de sa demande, tous les moyens qui peuvent la justifier; et que, par suite, le défendeur qui a négligé de faire valoir une exception à l'aide de laquelle il eût pu repousser son adversaire, n'est plus recevable, comme le décident expressément la loi 4, C de judi ciis (1), et la loi 2, C. sententiam rescindi non posse (2), à la reproduire dans une nouvelle instance pour faire juger une seconde fois la question.

Mais ce n'est pas ainsi que l'on doit considérer la demande en réduction pour réserve ou légitime: elle n'est pas une défense à la demande en exécution de la donation; elle est, au contraire, subordonnée à lavalidité et à l'efficacité de la donation même, car elle ne peut avoir lieu qu'autant que la donation est ou reconnue valable et non révoquée, ou jugée telle. Elle n'a donc pas la même cause, et par conséquent elle ne peut pas être écartée par le jugement qui a rejeté la demande en révocation pour survenance d'enfant.

C'est ce que jugent formellement deux arrêts rendus en 1821 par la cour de cassation et par la cour royale de Bourges, et qui prononcent en même temps sur d'autres ques tions indiquées aux mots Ratification, no 8 bis; Renonciation, S. 3, no 1; Réserve, sect. 3, no 3 bis; et Transaction, S. 4, no 2.

Voici le premier, tel qu'il existe dans les registres de la cour suprême.

«Par contrat du 15 prairial an 2, le sieur Girault, se mariant en secondes noces avec la dame Prévost, veuve Guignard, lui fit donation entre-vifs et irrévocable de tout ce

dont les nouvelles lois lui permettaient de disposer, sous la réserve, néanmoins, de l'usufruit pendant sa vie.

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» Le 6 pluviose an 9, le sieur Gírault se remaria avec la demoiselle Crossard, et lui fit encore une donation entre-vifs.

» Le 8 messidor suivant, il mourut laissant sa femme enceinte et sa legataire.

» Par son décès, l'usufruit qu'il s'était réservé des biens compris dans la donation du 15 prairial an 2, ayant pris fin, les dames Delorme et Laurendeau, filles et héritières de la dame Prévost, assistées de leurs maris, firent signifier, le 24 du même mois de messidor, cette donation à la dame Crossard, veuve Girault, avec défense de s'immiscer dans les biens donnés, opposition aux scellés qu'elle avait fait apposer, et saisie des loyers et fermages; et le 1er thermidor suivant, elles la citérent en conciliation, pour faire déclarer valables ces défense, opposition et saisie, pour avoir délivrance des meubles donnés existans sous les scellés, des souches de bestiaux et des titres de propriété des immeubles compris dans la donation, dont, en cas de besoin, l'exécution serait ordonnée selon sa forme et teneur, et pour la faire condamner à vider la maison de la Brillière, faisant partie des mêmes biens.

» La veuve Girault déclara qu'elle était enceinte, et qu'elle avait fait nommer un curateur qui fit, de son côté, ses protestations dans l'intérêt de l'enfant à naître. Elle accoucha, le 10 nivôse an 10, d'un enfant mále qui mourut le 19 du même mois, la laissant pour son héritière, d'après la loi du 17 ni

vóse an 2.

» Le 21 du même mois, la veuve Girault, agissant en qualité d'héritière de cet enfant qui était lui-même héritier de son père, cita, à son tour, les sieurs et dames Delorme et Laurendeau en conciliation, pour, sans s'arrêter à leurs opposition, saisie et défense, avoir main-levée pure et simple du tout, ainsi que des scellés apposés sur les meubles qui garnissaient la maison de la Brillière et les autres domaines composant la succession de feu Girault; pour, lesdits meubles et effets mobiliers, lui être délaissés en pure et pleine propriété et jouissance.

» Loin de se concilier sur cette demande, les sieurs et dames Delorme et Laurendeau assignèrent, le 9 ventóse suivant, la veuve Girault devant le tribunal civil de Montmorillen, aux fins de leur citation du premier thermidor.

» De son côté, le 20 du même mois, elle les assigna devant le même tribunal, aux fins de sa citation du 21 nivóse, prétendant que la donation faite le 15 prairial an 2, avait été

révoquée par la survenance de l'enfant né du mariage subséquent dudit Girault avec elle.

» Par jugement du 11 messidor an 10, le tribunal de Montmorillon jugea que la donation était révoquée par la survenance de cet enfant, et adjugea à la veuve Girault les fins de sa demande.

» Les motifs de ce jugement furent que, suivant l'ordonnance de 1731, les donations étaient révoquées par survenance d'enfant; que, si cette ordonnance faisait exception des donations faites entre époux, ce n'était qu'à l'égard des enfans nés de l'union en faveur de laquelle elles étaient faites, et que cette doctrine, loin d'être abrogée par la loi du 17 nivóse an 2, se trouvait en harmonie parfaite

avec elle.

» Sur l'appel, au contraire, par arrêt du 25 nivòse an 11, la cour royale de Poitiers décida que la donation n'était pas révoquée, et adjugea aux sieurs et dames Delorme et Laurendeau les conclusions par eux prises.

» Les motifs furent que l'ordonnance de 1731 était abrogée par la loi du 17 nivóse an 2; que cette loi consacrait, en faveur du mariage, le système le plus étendu de libéralités entre époux, et ne plaçait à côté que deux cas de restriction, savoir: celui où il y avait des enfans de leur union, et celui où il en existait d'un précédent mariage du donateur; qu'elle ne parlait aucunement du cas où il lui surviendrait des enfans d'un mariage subséquent, ce qui alors eût rendu la loi sans effet pour le donataire décédé.

» La veuve Girault se pourvut en cassation de cet arrêt. Le 19 messidor an 11, son pourvoi fut rejeté, attendu que l'art. 61 de la loi du 17 nivose an 2 n'avait pas abrogé l'art. 39 de l'ordonnance de 1731, puisque la première de ces lois ne traitait pas de la révocation des donations par survenance d'enfant; que cet art. 39 ne permettait pas de révoquer les donations faites entre époux, même par survenance d'enfant, et que les art. 13 et 14 de la loi du 17 nivóse ne réduisaient les donations faites entre époux qu'en faveur des enfans nés de leur union ou d'un précédent mariage du donateur; qu'ainsi, l'arrêt dénoncé n'avait violé aucune loi (1).

» L'arrêt de la cour de Poitiers fut exécuté relativement à certains chefs; mais les par

(1). mon Recueil de Questions de droit, aux mots Révocation de donation, S. 1.

ties entrèrent en instance relativement au surplus des condamnations, et elles étaient sur le point d'y entrer encore relativement à la conversion d'une rente perpétuelle due par Riche, en une rente viagere. Désirant faire cesser et prévenir ces contestations, elles passèrent, le 12 floréal an 12, une transaction par laquelle, après avoir traité sur le tout, elles terminèrent leur accord par une clause portant qu'au moyen des présentes, lesdites contestations demeuraient éteintes et terminées, sans autres répétitions de part et d'autre.

» Les choses étaient en cet état, lorsque, par exploit du 14 février 1818, la veuve Girault fit citer les sieurs et dames Delorme dire qu'attendu la réserve légale à laquelle et Laurendeau en conciliation, pour voir

elle avait droit comme héritière de son fils, qui était lui-même héritier de feu Girault, laquelle réserve était des trois quarts des biens de ce dernier, aux termes de l'art. 1er de la loi du 4 germinal an 8, il serait fait une masse tant des biens compris dans la donation du 15 prairial an 2, que de ceux échus postérieurement audit sieur Girault, pour les trois quarts de ladite masse des biens être remis à la veuve Girault en sadite qualité, auquel effet estimation serait faite desdits biens.

» Les parties n'ayant pu se concilier sur cette demande, elle fut portée, par suite de récusation, devant le tribunal de Loudun, où les sieurs et dames Delorme et Laurendeau soutinrent que la demande en réduction était non-recevable, parcequ'elle avait été jugée et rejetée par l'arrêt du 25 nivòse an 11, et parceque la donation avait été exécu tée

par la délivrance volontaire d'une partie des biens donnés, et ratifiée par la transaction du 12 floréal an 12.

» Par jugement du 12 mars 1819, le tribunal de Loudun, sans s'arrêter à ces fins de non-recevoir, ordonna que la veuve Girault plaiderait au fond.

» Sur l'appel, au contraire, par arrêt du 24 décembre suivant, la cour royale de Poitiers accueillit ces deux fins de non-recevoir, et déclara la veuve Girault purement et simplement non-recevable dans sa demande.

» Les motifs furent, 1o que la veuve Girault étant défenderesse en l'instance jugée par l'arrêt du 25 nivôse an 11, avait dû opposer en défense la demande en réduction, et que, faute de l'avoir fait, il résultait de cet arrêt une exception de Chose jugée, qui la rendait non-recevable dans sa réclamation; que, quand elle pourrait être réputée deman

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