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<< n'avait pas élevé de semblables difficultés ; « que sa majesté avait dû calculer que, pen<< dant la guerre actuelle, les choses reste«raient sur le même pied que celui de la << dernière guerre; que les divisions de l'ar«mée française avaient en conséquence tra« versé quelques parties du territoire prus<«<< sien en Franconie, comme l'avaient fait << pareillement le corps autrichien qui s'était << présenté sur la Rednitz, et les troupes de « l'électeur de Bavière, pendant leur re<< traite. >>

La violation était manifeste; le maréchal Bernadotte avait reçu des ordres positifs, et dans ces termes : « Traverser ces territoires, << éviter d'y séjourner, faire beaucoup de pro<< testations en faveur de la Prusse, témoigner << beaucoup d'attachement pour elle, le plus « d'égards qu'on pourra, puis traverser ses << possessions avec rapidité, en alléguant l'im« possibilité de faire autrement, parce que « cette impossibilité est réelle. »

La cour de Berlin fit éclater son mécontentement, et s'exprima énergiquement dans

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une note officielle remise par le baron de Hardenberg, le 14 octobre, au ministre de France, M. de Laforêt, et au maréchal Duroc. «Sa majesté prussienne, non moins << étonnée de cette marche à travers ses prin<< cipautés de Franconie, que de la singu« lière manière dont on prétendait la justi<< fier, rappelait à messieurs les envoyés << français que son ministre leur avait tracé <«<lui-même, sur la carte, la route que les << troupes, françaises devaient suivre pour << éviter de couper la ligne de neutralité; les << précédens, qu'on invoquait, ne pouvaient « donc s'appliquer au cas présent; et puis« que l'on n'avait eu aucun égard aux repré<< sentations, aux protestations des autori«<tés, il ne restait plus à sa majesté d'autre << moyen que de considérer comme non-ave<< nues ses conventions avec la France, et de << prendre, pour la sûreté de ses états, les << mesures qu'exigeraient les circonstances. >> On ne s'en tint pas à ces menaces; les effets suivirent de près : il fut permis aux troupes russes de traverser la Silésie et les autres

provinces prussiennes pour se rendre à leur destination. L'entrevue du roi et de l'empe reur de Russie, qui devait avoir lieu sur la frontière, et à laquelle devait se trouver le duc de Brunswick, fut différée, ne devant plus avoir le même objet. Le maréchal Kalkreut, qui devait prendre le commandement d'un corps d'observation en Poméranie, reçut l'ordre de se rendre au quartier, général de l'empereur Alexandre, et les trou, pes dirigées sur la frontière russe furent arrêtées dans leur marche; les dispositions furent changées on forma trois armées; une en Franconie d'environ soixante mille hommes, sous les ordres du prince de Hohenlohe; une en Basse-Saxe de cinquante mille, sous les ordres du duc de Brunswick, et la troisième en Westphalie, commandée par le feld - maréchal prince de Hesse, de vingt mille hommes.

Tout devint hostile à Berlin; les souve nirs glorieux se réveillèrent dans l'armée et dans la nation; l'esprit public se manifesta particulièrement au théâtre, dans une repré

sentation solennelle de la belle tragédie de Schiller, le Camp de Wallenstein. Les cris et les chants de guerre retentirent de toutes parts. Les deux cours impériales profitèrent de ces circonstances pour renouer les négociations, arracher la Prusse à son système de neutralité, et la décider à coopérer activement à l'exécution de leurs plans.

Dans le même temps l'orage grossissait au nord de l'Allemagne; le roi de Suède, le plus ardent, mais le moins puissant ennemi de Napoléon, venait de conclure, avec le gouvernement anglais, un nouveau traité de subsides, par lequel il s'engageait à envoyer et entretenir un corps de douze mille hommes en Pomeranie, pour agir, de concert avec l'armée russe, sous les ordres du comte de Tolstoy. La force de cette armée combinée devait être de trente-six mille hommes, et le premier objet de ses opérations était de reconquérir le Hanovre. L'occupation de cet électorat par les troupes prussiennes avait donné lieu à de vives discussions; il avait été convenu que, jusques à la paix, le roi

de Prusse ne permettrait pas que, du côté de ses possessions en Westphalie, les troupes françaises que le maréchal Bernadotte avait laissées dans l'électorat sous les ordres du général Barbou (et qui n'y conservaient pour point de sûreté que la forteresse de Hamel), fussent inquiétées : mais les représentations du cabinet de Berlin n'avaient pu détourner les alliés d'entreprendre une diversion à laquelle ils attachaient une grande impor

tance.

Une escadre russe, composée de trois vais. seaux de ligne et une frégate, et quarante bâtimens de transport, partirent des ports de Revel et de Cronstadt sous les ordres du viceamiral Senavin; l'escadre parut le 4 octobre sur les côtes de la Poméranie suédoise. Le gé néral Tolstoy, avant de faire débarquer ses troupes, se rendit auprès du roi de Suède dans l'île de Schonen, et l'accompagna à Stralsund, où se réunirent les troupes suédoises venues de Carlscrona. Le 20 octobre, cette armée alliée, à laquelle devait aussi se joindre la légion hauovrienne formée en Angle

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