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30. Le délai d'un an, dans lequel le propriétaire de parcelles régulièrement incorporées peut former l'action possessoire en vue de son droit à l'indemnité, court du jour de la décision portant refus d'accorder l'indemnité réclamée, ce refus constituant le trouble prévu par l'article 23 C. proc. civ. (nombreuses décisions), pourvu que, d'autre part, elle soit exercée avant l'expiration du délai fixé par l'article 18 de la loi de 1836.

31. Les actions civiles dirigées contre les communes ou intentées par elles, à l'occasion des chemins vicinaux, sont jugées comme affaires sommaires et urgentes conformément à l'article 405 C. proc. (L. 21 mai 1836, art. 20.)

§ 2.

Réglement de l'indemnité en cas d'élargissement. Formules.

32. Les parcelles incorporées à un chemin en cas d'élargissement sont ordinairement d'une valeur minime. D'autre part, les riverains ont le plus souvent intérêt à ce que la voie reçoive les améliorations qui doivent la rendre propre aux communications vicinales; aussi consentent-ils fréquemment la cession gratuite des terrains nécessaires.

33. Lorsqu'il n'y a pas cession gratuite, le propriétaire exigeant le paiement de la valeur des terrains expropriés, la commune tente un règlement amiable.

34. S'il y a accord entre elle et le propriétaire sur le montant de l'indemnité à allouer, les conditions offertes sont consignées dans un acte soumis d'abord à l'acceptation du conseil municipal, puis à l'approbation de la commission départementale.

35. Si, au contraire, il y a désaccord, la demande d'indemnité ne peut qu'être portée devant le juge de paix (1).

(1) Avant la loi de 1836, le règlement de l'indemnité appartenait au tribunal d'arrondissement par application de la loi du 8 mars 1810 sur l'expropriation.

Nos 36-41. Le débat prenant dès lors le caractère d'une instance judiciaire, les formalités auxquelles sont sujettes les demandes formées contre les communes doivent être

observées.

36. Le propriétaire adresse au préfet ou au sous-préfet un mémoire exposant l'objet et les motifs de sa réclamation et précisant les chiffres de la demande que la commune n'a pas ratifiés; il lui en est donné récépissé. Le préfet ou le sous-préfet adresse immédiatement le mémoire au maire avec l'invitation de convoquer le conseil municipal dans le plus bref délai pour en délibérer. La délibération du conseil municipal est ensuite transmise au conseil de préfecture qui décide si la commune doit être autorisée à ester en justice. La décision du conseil de préfecture doit être rendue dans les deux mois à dater du dépôt du mémoire. A l'expiration de ce même délai l'action peut être portée devant le juge de paix. (L. 5 avril 1884, art. 124 et suiv.). Toutefois la procédure est suspendue jusqu'à décision du conseil d'État en cas de pourvoi contre la décision du conseil de préfecture.

37. Procédure. Le propriétaire fait citer le maire de la commune devant le juge de paix du canton (V infrà no 61, formule de citation), pour être statué sur rapport d'experts, conformément à l'article 15 de la loi du 21 mai 1836.

38. Le propriétaire et le maire désignent chacun un expert. Si l'une ou l'autre des parties omet ou refuse de faire cette désignation, le juge de paix y procède d'office. (Avis Cons. d'Etat, 30 décembre 1841; Règlement de 1854, art. 7).

39. Les experts, régulièrement nommés, prêtent serment avant de procéder à l'expertise (C. proc. art. 42, 305, 307), et ce à peine de nullité. (Cons. d'État, 9 janv. 1843). 40. Le serment est reçu par le juge de paix. (Vo infrà, no 62, formule de prestation de serment.)

41. Si les experts ne sont pas d'accord, il est procédé d'office par le juge de paix à la nomination d'un tiers

expert. Il est vrai que l'article 15 de la loi de 1836 renvoie à ce sujet à l'article 17 de la même loi d'après lequel « en cas de discord le tiers-expert sera nommé par le conseil de préfecture. » Mais la plupart des auteurs admettent que l'article 15, en s'en référant pour la nomination d'un tiersexpert à l'article 17, spécial aux indemnités à régler par le conseil de préfecture, n'a point entendu que cette nomination, au lieu d'être faite par le juge saisi, serait renvoyée devant un tribunal administratif, mais a seulement rappelé le principe qui l'attribue à la juridiction saisie. Cette doctrine a été consacrée par la jurisprudence et la pratique administrative. (Cons. d'Etat, 26 avril 1844; Règl. de 1854, art. 7; Cass. 21 déc. 1864. D. P. 66. 1. 225.)

42. Dans leur estimation les experts doivent tenir compte, conformément à l'article 51 de la loi du 3 mai 1841, de la plus-value acquise par suite de l'exécution des travaux (Cass. 14 déc. 1847); mais la plus-value ne doit jamais absorber en entier l'indemnité. (Cass. 28 fév. 1848).

43. L'expertise peut avoir lieu avant que l'autorisation de plaider ait été accordée. Cette expertise constitue un acte judiciaire, mais les parties ont pu y faire procéder d'un commun accord pour que le rapport serve de base soit au règlement amiable soit au règlement contentieux devant le juge de Paix. (Cass. 25 juin 1878; S. 79. 1. 247.)

44. La minute du rapport des experts est déposée au greffe de la justice de paix. (C. proc., art. 319.)

45. Compétence. La compétence du juge de paix est spéciale au cas prévu par l'article 15 de la loi de 1836 et ne peut être étendue à d'autres hypothèses. Il est donc nécessaire qu'il s'agisse du réglement de l'indemnité due par suite de l'emprise de terrains pour l'élargissement d'un chemin vicinal. Sa compétence ne s'étendrait pas aux actions en indemnité pour dégradation ou travaux accessoires occasionnés par l'élargissement du chemin. (Cons. d'État, 15 juill. 1841.)

46. Le juge de paix compétent est celui du canton

NOS 47-51. dans le ressort duquel se trouve établi le chemin qu'il y a lieu d'élargir. Il est seul compétent; aussi le tribunal civil, saisi au pétitoire, ne pourrait-il accessoirement régler l'indemnité. Il statue comme juge et non comme arbitre.

47. Sa compétence est légalement prorogée. Il statue quelqu'élevée que puisse être l'indemnité réclamée pourvu que la propriété ne soit pas contestée. Mais ses décisions sont susceptibles d'appel lorsque la demande excède 100 francs ou est indéterminée.

48. Il faut, pour que le juge de paix puisse statuer sur l'indemnité, que le propriétaire dépossédé et l'administration municipale s'entendent sur le terrain formant l'emplacement du chemin, ou sur les parties destinées à l'agrandissement de sa largeur, ou qu'un jugement ait prononcé. Si les parties n'étaient pas d'accord, il devrait surseoir jusqu'au jugement de la question par l'autorité compétente.

49. Il doit surseoir dès qu'il s'élève des difficultés sur le fond même du droit à l'indemnité; par exemple, lorsque l'arrêté de classement, portant augmentation de la largeur du chemin, n'indique pas spécialement sur quelles parties des terres riveraines l'élargissement sera pris. (V. suprà n° 23). Il faut dans ce cas un nouvel arrêté interprétatif pour déterminer exactement quels sont les ayants-droit (Orléans, 12 mai 1881; D. P. 82. 2. 220); ou lorsque la commune et le réclamant sont en désaccord sur la propriété même des terrains, la question préjudicielle de propriété devant être renvoyée au tribunal civil.

50. Mais le juge de paix ne doit pas surseoir à statuer lorsque les droits des propriétaires ne sont pas contestés ou ont été déjà reconnus par des décisions passées en force de chose jugée. (Cass. 3 mai 1887.)

51. L'expertise est obligatoire; toutefois, l'avis des experts ne lie pas le juge. Agissant comme juge, il ne saurait être tenu d'entériner purement et simplement le rapport des experts. Il peut donc, sans s'arrêter à leur avis, ordonner une nouvelle expertise, et recourir à tous les moyens d'information qui sont à sa disposition comme

dans les affaires de sa compétence ordinaire. (Avis com. de législ. 19 mars 1840. Infrà, no 54.)

52. L'action en indemnité des propriétaires pour les terrains qui ont servi à la confection des chemins vicinaux est prescrite par le laps de deux ans. (L. 1836, art. 18). Si l'exception de prescription était soulevée par la commune, le juge de paix, qui n'a mission que de régler l'indemnité, devrait se déclarer incompétent et surseoir à statuer jusqu'à solution de la question par le tribunal civil. Suivant l'instruction générale du min. de l'int. du 24 mai 1836 et l'opinion de la plupart des auteurs, le point de départ de la prescription biennale opposable à l'action en indemnité du propriétaire est l'époque de la prise de possession effective par la commune des terrains nécessaires à l'élargissement du chemin.

Il faut supposer que la commune a procédé régulièrement. La prescription de l'article 18 est absolue et ne souffre aucune preuve contraire; le serment ne peut être déféré.

Elle est interrompue lorsque le principe du droit à l'indemnité réclamée a été, au cours de pourparlers amiables entre la commune et le propriétaire, reconnu par le fonctionnaire, dans l'espèce le maire, qui avait qualité pour le réglement. (Cass. 8 déc. 1885.)

Cette prescription particulière n'est pas applicable au cas où l'indemnité a été fixée de gré à gré entre la commune et le propriétaire, parcequ'en cas d'action en paiement il ne s'agit que d'une demande relative à une créance ordinaire et qui, par suite, n'est prescriptible que par 30 ans. Il en est de même lorsqu'il y a eu jugement rendu par le juge de paix, ayant acquis l'autorité de la chose jugée.

Elle ne saurait frapper les incapables tels que les mineurs et les interdits, qui sont protégés par l'art. 2252 C. civ.

53. La construction et l'entretien des chemins vicinaux étant une dépense communale, les indemnitées dues aux propriétaires sont à la charge de la commune.

54. Appel. L'appel des décisions du juge de paix doit être porté, comme celui de ses jugements ordinaires, devant le Tribunal de première instance de l'arrondisse

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