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19 mars 1875; 28 juill. 1876. D. P. 77. 3.3; 13 juill. 1877; D. P. 78. 3. 46.)

73. La loi de 1836, par son article 16, met sur la même ligne l'ouverture et le redressement. L'ouverture, ainsi que le mot l'indique, est l'établissement d'un chemin nouveau. Il y a redressement lorsque l'on fait passer le chemin sur un fonds où il n'existait pas, en abandonnant l'ancien tracé (1); l'élargissement, comme on l'a vu, ne s'entend que d'une simple augmentation de la largeur, il est régi par l'article 15.

74. La décision du conseil général ou de la commission départementale (sauf l'exception relative aux terrains bâtis) ordonnant l'ouverture ou le redressement, entraîne déclaration d'utilité publique ; elle tient la place et produit les effets du décret qui, en matière de travaux publics d'intérêt général, déclare l'utilité publique conformément à la loi de 1841.

Mais la décision n'attribue pas au chemin la propriété du sol, comme lorsqu'il s'agit d'élargissement. L'incorporation n'aura lieu qu'après l'accomplissement des formalités de l'expropriation.

75. Ces formalités sont celles qui sont prescrites par la loi du 3 mai 1841, sauf les modifications résultant de l'article 16 de la loi de 1836 et relatives au nombre des jurés, à la désignation et au rôle du magistrat directeur. Toutes les formalités de la loi de 1841 doivent être observées, en effet, en matière d'expropriation vicinale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions spéciales de la loi de 1836. L'article 12 de la loi de 1841 indique, d'ailleurs, celles de ces dispositions qui ne sont pas applicables aux chemins vici

naux.

76. Après l'accomplissement des formalités prescrites par les articles 5, 6 et 7 de la loi de 1841, on procède à l'acquisition des terrains. Si l'acquisition a lieu à l'amiable, elle doit être approuvée par le conseil municipal; à défaut d'acquisition à l'amiable, l'expropriation est poursuivie devant les tribunaux.

(1) Un chemin vicinal ne peut être considéré comme faisant l'objet d'un redressement que lorsque l'ancien chemin a été complètement abandonné, avec substitution d'un nouveau tracé à travers des propriétés ne joignant pas cet ancien chemin. (Dijon, 26 nov. 1869; D. P. 70. 2. 162.)

77. Le préfet prend, à cet effet, un arrêté, en exécution de l'article 11 de la loi de 1841.

78. Le tribunal d'arrondissement est alors saisi par le procureur de la République de la demande de l'administration, et prononce l'expropriation pour cause d'utilité publique, après s'être assuré que toutes les formalités de la loi ont été remplies.

79. C'est le jugement du tribunal qui transfère la propriété du sol nécessaire à l'ouverture ou au redressement, et non le procès-verbal du jury comme semblerait l'indiquer l'article 16 de la loi de 1836. Le jury n'aura qu'à déterminer le quantum de l'indemnité qui, dès le jugement, est acquise en principe aux expropriés. Mais le versement de l'indemnité devra être préalable à la prise de possession. (L. 1841, art. 53.)

80. Le tribunal désigne en même temps, pour présider et diriger le jury spécial chargé de régler les indemnités, soit l'un de ses membres, soit le juge de paix du canton. C'est, le plus souvent, au juge de paix qu'il confie cette mission. Il désigne également un autre magistrat pour remplacer le juge de paix en cas de besoin. Le suppléant de la justice de paix ne le remplacerait pas de droit, car il est possible qu'en désignant le juge de paix en cette matière spéciale, le tribunal ait pris sa personne en considération. A défaut de désignation expresse du suppléant, les parties devraient présenter requête au président du tribunal pour qu'il soit pourvu au remplacement du juge de paix. (L. 1841, art. 14; Cass. 9 mars 1880).

81. Le tribunal désigne, en outre, quatre jurés et trois jurés supplémentaires pour constituer le jury spécial.

82. Le jugement est publié et affiché dans la commune où a lieu l'expropriation; il est inséré dans l'un des journaux de l'arrondissement; il est signifié aux intéressés à la requête du maire, représentant de la commune, lorsqu'il s'agit de chemins d'intérêt commun ou vicinaux ordinaires (V. suprà, no 10), et transcrit à la conservation des hypothèques.

§ 1. Nos 83-86. 83. Dans la huitaine qui suit la signification, le propriétaire est tenu d'appeler et de faire connaître à l'administration les fermiers, locataires, ceux qui ont des droits d'usufruit, d'habitation ou d'usage, tels qu'ils sont réglés par le code civil, et ceux qui peuvent réclamer des servitudes (1); si non, il reste seul chargé envers eux des indemnités qu'ils peuvent être en droit de réclamer (2). Les autres intéressés sont mis en demeure de faire valoir leurs droits par l'avertissement qui est publié à son de trompe ou de caisse dans la commune et qui est affiché tant à la porte principale de l'église du lieu qu'à celle de la mairie. (L. 3 mai 1841, art. 21.)

84. L'administration notifie aux propriétaires et à tous autres intéressés, qui ont été désignés ou qui sont intervenus dans le délai fixé par l'article 21 de la loi de 1841, les sommes qu'elle offre pour indemnités. Ces offres sont, en outre, affichées et publiées conformément à l'art. 6 (art. 23.)

85. Dans la quinzaine suivante, les propriétaires et autres intéressés sont tenus de déclarer leur acceptation ou d'indiquer le montant de leurs prétentions (art. 24). Ce délai est porté à un mois dans le cas des articles 25 et 26 (art. 27.)

86. Si les offres ne sont pas acceptées dans les délais prescrits par les articles 24 et 27, l'administration cite devant le jury les propriétaires et tous les autres intéressés qui ont été désignés ou qui sont intervenus, pour qu'il soit procédé par le jury au règlement des indemnités (art. 28). La citation contient l'énonciation des offres qui ont été refusées. (id.) V. infrà, form. de citation, no 220.

(1) Le propriétaire toutefois n'est tenu de faire connaître à l'expropriant, dans le délai prescrit, sous sa responsabilité, ceux qui peuvent avoir des servitudes sur l'immeuble exproprié, qu'autant que ceux-ci tiennent leurs droits des titres mèmes de ce propriétaire ou d'actes dans lesquels il serait intervenu. (Cass., 8 octobre 1868; P. 69. 297.) Lorsque ces droits dérivent d'une autre nature de titres, c'est aux intéressés eux-mêmes à se faire connaître dans la huitaine de l'avertissement prescrit par l'art. 6 de la loi de 1841.

(2) Toutefois l'expropriant ne peut opposer, dans la suite, la déchéance résultant de l'inobservation de cette prescription, lorsque les actes de procédure établissent qu'il a eu connaissance de la personne de l'intéressé et de son droit à une indemnité éventuelle. (C. de Paris, 20 mai 1887.)

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87. Le jury spécial n'est composé que de quatre jurés et de trois jurés supplémentaires choisis par le tribunal en chambre du conseil et désignés par le jugement.

88. La loi du 21 novembre 1872, relative au jury d'assises, qui a abrogé la loi du 4 juin 1853, établit ainsi dans son titre Ier les conditions requises pour être juré:

ART. 1er. Nul ne peut remplir les fonctions de juré, à peine de nullité des déclarations de culpabilité auxquelles il aurait concouru, s'il n'est âgé de 30 ans accomplis, s'il ne jouit des droits politiques, civils et de famille, ou s'il est dans un des cas d'incapacité ou d'incompatibilité établis par les deux articles suivants.

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1o Les individus qui ont été condamnés soit à des peines afflictives et infamantes, soit à des peines infamantes seulement;

2o Ceux qui ont été condamnés à des peines correctionnelles pour faits qualifiés crimes par la loi;

3o Les militaires condamnés au boulet ou aux travaux publics;

4o Les condamnés à un emprisonnement de trois mois au moins; toutefois les condamnations pour délits politiques ou de presse n'entraîneront que l'incapacité temporaire dont il est parlé au paragraphe 11 du présent article ;

5° Les condamnés à l'amende ou à l'emprisonnement, quelle qu'en soit la durée, pour vol, escroquerie, abus de confiance, soustraction commise par des dépositaires publics, attentats aux mœurs prévus par les articles 330 et 334 du Code pénal, délit d'usure; les condamnés à l'emprisonnement pour outrage à la morale publique et religieuse, attaque contre le principe de la propriété et les droits de famille, délits commis contre les mœurs par l'un des moyens énoncés dans l'article 1er de la loi du 17 mai 1819, pour vagabondage -ou mendicité, pour infraction aux dispositions des articles 60, 63 et 65 de la loi sur le recrutement de l'armée et aux dispositions de l'article 423 du Code pénal, de l'article 1er de la loi du 27 mars 1851 et de l'article 1er de la loi des 5-9 mai 1855, pour les délits prévus par les articles 134, 142, 143, 174, 251, 305, 345, 362, 363, 364, § 3, 365, 366, 387, 389, 399, § 2, 400, § 2, 418 du Code pénal; (1).

6o Ceux qui sont en état d'arrestation ou de contumace;

7° Les notaires, greffiers et officiers ministériels destitués;

8° Les faillis non réhabilités dont la faillite a été déclarée soit par les Tribunaux français, soit par jugement rendu à l'étranger, mais exécutoire en France;

(1) Conf. L. 29 juillet 1881.

9o Ceux auxquels les fonctions de jurés ont été interdites en vertu de l'article 396 du Code d'instruction criminelle ou de l'article 42 du Code pénal; 10° Ceux qui sont sous mandat d'arrêt ou de dépôt;

11° Sont incapables, pour cinq ans seulement, à dater de l'expiration de leur peine, les condamnés à un emprisonnement de moins de trois mois pour quelque délit que ce soit, même pour les délits politiques ou de presse;

12o Sont également incapables les interdits, les individus pourvus de conseils judiciaires, ceux qui sont placés dans un établissement public d'aliénés, en vertu de la loi du 30 juin 1838.

Pour nous, les conditions requises pour être juré et les incapacités qui sont relevées dans le texte de loi que nous venons de citer sont applicables aux jurés en matière d'expropriation. Il convient de noter que l'incapacité dont l'un des jurés se trouverait frappé n'aura pas pour effet de vicier les opérations auxquelles il aura concouru, s'il figurait sur la liste dressée par le conseil général, et si aucune réclamation n'a été formulée auprès du magistrat directeur. C'est ce qui a été décidé pour un failli non réhabilité, par un arrêt de la cour de cassation du 26 juin 1878. (P. 78. 1101.)

89. Les incompatibilités sont établies dans l'article 30 in fine, de la loi du 3 mai 1841.

Ne peuvent être choisis:

1o Les propriétaires, fermiers, locataires des terrains et bâtiments désignés en l'arrêté du préfet, pris en vertu de l'art. 11, et qui restent à acquérir; 2o les créanciers ayant inscription sur lesdits immeubles; 3° tous. autres intéressés désignés ou intervenant en vertu des articles 21 et 22.

Les septuagénaires seront dispensés, s'ils le requièrent, des fonctions de juré.

90. Il y a aussi incompatibilité entre les fonctions de jurés et celles de conseiller municipal de la commune, qui poursuit l'expropriation. (Cass. 5 avril 1854. S. V. 54.1.464). Mais lorsque le conseiller municipal n'a pas été récusé il n'y a pas lieu à cassation de la décision du jury à laquelle il a pris part. (Cass. 22 mai 1854. S. V. 55. 1. 217.)

91. Le maire ne peut faire partie du jury d'expropriation lorsque les propriétés à exproprier appartiennent à un bureau de bienfaisance. (Cass. 22 mai 1854.)

92. Il y a encore incompatibilité entre les fonctions de juge d'un tribunal de commerce et celles de membre d'un jury d'expropriation. (Cass. 20 mars 1854. S. V. 54. 1. 638.) Il en

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