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Woldenberg, Deutsch-Krone, Iastrow, Preuss-Friedland, Könitz et Schönek. Arrivé à Danzig le 20 mai, il prit aussitôt le commandement de toute la cavalerie qui se trouvait dans la place et aux environs. Elle se composait: du 2° régiment de chasseurs (colonel Mathys), du 9 lanciers polonais (colonel Psichikowsky), du 7° hussards (colonel Eulner), et du 9o chevaulégers, en formation à Boitzenburg. Si ces divers régiments avaient eu l'effectif réglementaire de 1,100 hommes montés, le commandement de Pajol eût été celui d'un général de division. Mais, pour compléter leur organisation de campagne, il leur manquait encore beaucoup d'hommes et de chevaux. Les régiments polonais surtout étaient très- faibles, et c'était sur ces corps que Davout avait particulièrement appelé l'attention de Pajol (1).

Du reste, tout à Danzig se renforçait et se développait : l'infanterie comme la cavalerie, les ouvrages de fortification comme les approvisionnements. Il régnait dans cette place une activité fiévreuse, qu'augmentait encore la présence d'officiers généraux envoyés par l'Empereur pour accélérer l'exécution des ordres donnés de Paris. Les renforts venant de France, en hommes, en chevaux, en matériel, étaient d'abord dirigés sur Hamburg,

(') La cavalerie légère prit sa dénomination depuis 1791, époque à laquelle on s'empressa d'en distraire ce qui ne pouvait lui convenir. Elle ne se composa plus que de chasseurs à cheval, créés en 1758, et de hussards, institués en 1692.

Il n'existait plus de chevau-légers depuis 1784; un régiment, composé de Belges, fut créé le 15 octobre 1791, et supprimé le 4 juin 1793. L'armée n'en compta plus jusqu'au 30 septembre 1806, époque à laquelle il fut levé un nouveau régiment dans le grand-duché de Berg. Ce régiment fut supprimé le 29 mai 1808.

Le 3 février 1811, l'Empereur fit organiser un régiment de chasseurs-lanciers. Le 2 juin parut l'ordonnance ministérielle de la formation de trente régiments de chasseurs-lanciers. A cet effet, le maréchal Davout demandait de Hamburg, le 17 juillet, au général commandant les troupes du grand-duché de Varsovie, quinze à vingt bons instructeurs polonais, sachant parler l'allemand et le français, pour exercer les trente régiments de chasseurs-lanciers au maniement de la lance.

Ces corps prirent donc naissance avant la campagne de 1812; l'Empereur sentait la nécessité d'opposer aux Cosaques qu'il aurait à combattre une troupe légère ayant avec eux quelque analogie.

Cet essai sembla répondre à son attente, car, le 18 août de la même année (1811), il institua huit régiments de chevau-légers armés de la lance. Cette dernière formation fut la seule de nouvelle création; les autres régiments étaient tirés des dragons et d'une légion polonaise dite de la Vistule.

d'où ils étaient portés à Danzig par Stettin et la nouvelle route militaire. Les détachements d'infanterie ou de cavalerie étaient organisés en régiments de marche, et, de Hamburg, on les acheminait vers les corps auxquels ils appartenaient.

Au 1er juillet, les régiments de Pajol présentaient les effectifs suivants : le 2 régiment de chasseurs, à quatre escadrons, comptait 41 officiers, 911 hommes et 845 chevaux; le 9o lanciers polonais, à quatre escadrons, 39 officiers, 697 hommes et 784 chevaux, y compris son 3 escadron, arrivé le 19 juin et fort de 166 hommes et 174 chevaux; le 7° hussards, à quatre escadrons, comprenait 39 officiers, 1098 hommes et 926 chevaux. Le régiment de chevau-légers polonais, toujours en formation à Boitzenburg, commençait à s'organiser sérieusement.

Le commandement du général Pajol prenait donc chaque jour plus d'importance, non-seulement à cause de l'augmentation des effectifs des régiments, mais encore en raison des nombreux cantonnements qu'ils occupaient autour de Danzig. Un seul régiment ayant pu trouver place dans la ville, il avait fallu répartir les autres sur la rive gauche de la Vistule et dans les villages les mieux approvisionnés en fourrages.

Pajol visitait souvent les cantonnements, et prescrivait les changements qu'exigeaient la bonne exécution du service de surveillance dont il était chargé et le bien-être des hommes et des chevaux. Il avait auprès de lui, pour le seconder dans l'exercice de-son commandement, une sorte d'état-major de division, composé du capitaine Draiman, faisant fonction d'adjudant commandant, et du capitaine adjoint Lafond. Jusqu'au 15 juillet, il avait eu deux aides de camp : le chef d'escadron de la Chasse de Vérigny et le capitaine Daubenton. Le premier de ces officiers, ayant passé au 20° chasseurs, fut remplacé, le 13 août, par le lieutenant Biot, du 11° chasseurs. Biot resta avec le général Pajol jusqu'à la chute de l'Empire.

Au 1er août, le 11° régiment de chasseurs polonais, commandé par le colonel Chlebowsky, étant arrivé à Danzig, fut encore placé sous le commandement de Pajol, qui eut ainsi, pendant quelque temps, cinq régiments à ses ordres.

Sur ces entrefaites, un incident fâcheux se produisit aux

Tuileries, à la réception du 15 août, jour de la fête de Napoléon. Le prince Kourakine, pris à partie par l'Empereur, au sujet des échecs éprouvés par les Russes dans leur guerre contre la Turquie, essuya quelques railleries, dont le czar fut très-froissé. Les relations entre les deux gouvernements se tendirent de plus en plus, et la guerre parut imminente.

Nos préparatifs prirent une plus grande extension.

L'armée de Davout, renforcée des quatrièmes et sixièmes bataillons, eut l'ordre de se tenir prête à marcher vers la Vistule; une seconde armée, dont l'Empereur se réservait le commandement, se formait en arrière; enfin à Danzig on rassemblait des quantités considérables de provisions de toute espèce, et la garnison devait être portée à 20,000 hommes.

La cavalerie du général Pajol fut réduite, le 15 septembre, à trois régiments: le 2 chasseurs (44 officiers, 881 hommes et 897 chevaux), le 9o lanciers polonais (34 officiers, 592 hommes et 690 chevaux) et le 9° chevau-légers polonais, enfin organisé, et commandé par le colonel Pirgs (37 officiers, 756 hommes et 869 chevaux).

Dans ses courses nombreuses, Pajol avait pris des renseignements sur le nombre de chevaux qu'il serait possible de se procurer dans les pays occupés par ses troupes et dans le voisinage, c'est-à-dire en Pologne et même en Russie. Il avait découvert des ressources sérieuses en chevaux capables de monter la cavalerie légère, et il avait adressé au ministre, à l'époque où Napoléon prescrivait des achats, un mémoire très-complet sur les moyens à employer pour acheter ceux qu'il signalait. Le ministre, tout en remerciant Pajol du travail intéressant qu'il lui avait fait parvenir, le prévenait qu'il le soumettait à l'appréciation du maréchal Davout (1). Il n'en fut plus question.

Contrairement aux stipulations du traité de paix signé à Tilsit en 1807, la Prusse commençait des armements sérieux. Napoléon, prévoyant qu'elle se disposait à faire alliance avec la Russie, adressa au cabinet de Berlin des remontrances sévères, et ordonna à Davout et aux généraux commandant les places fortes en notre pouvoir, de prendre, au besoin, des mesures énergiques.

() Voir Pièces justificatives, no 78.

Le général Rapp devait surtout observer avec soin les mouvements et les rassemblements des Prussiens, afin d'éviter toute surprise de leur part. Pajol devait faire rentrer dans la place de Danzig les détachements qui pourraient se trouver aventurés dans la campagne. Il prescrivit à ses autres postes d'interdire, sur les points qu'ils occupaient, le passage de la Vistule aux troupes prussiennes et aux charrois qui leur seraient destinés. Enfin, si la Nogath n'était pas garnie de détachements nombreux, Pajol devait y lancer des reconnaissances et chercher à s'emparer des approvisionnements rassemblés par la Prusse.

Pour compléter ces mesures coercitives envers un gouvernement disposé à trahir ses engagements, Davout eut l'ordre de se préparer à marcher, de Stettin, où il avait établi son quartier général, sur Berlin, et de prendre des dispositions telles, qu'il pût désarmer facilement tous les rassemblements prussiens qui chercheraient à se porter sur la Vistule.

Le roi de Prusse, intimidé par l'attitude menaçante de Napoléon, avait acquiescé à toutes ses demandes et fait suspendre les armements commencés : les travaux avaient subitement cessé dans les places fortes, où l'on avait voulu réparer les fortifications. Les paysans qui y étaient employés, et dont on comptait faire des recrues, furent renvoyés chez eux. Les inquiétudes du côté de la Prusse se dissipèrent. Napoléon entama immédiatement des négociations avec cette puissance, pour la faire consentir à une alliance offensive et défensive.

Du côté de Saint-Pétersbourg, par contre, la guerre devenait chaque jour plus certaine; il ne restait aucun espoir de rapprochement entre les deux souverains. Les armements de la France et de la Russie n'étaient plus dissimulés, et tout portait à croire que les hostilités éclateraient au printemps de 1812.

Danzig était particulièrement l'objet de l'attention de Napoléon, qui voulait en faire une place importante de ravitaillement et de dépôt. La cavalerie de Pajol, toujours stationnée dans les environs de cette ville, continua son service de surveillance; elle subit plusieurs fois des augmentations ou des diminutions, suivant que Davout avait besoin, sur d'autres points, de régiments de cavalerie légère. Ainsi, le 7o hussards vint à Stettin au 1er octobre, et le 9° chevau-légers polonais se rendit, peu de jours après,

à Verden. Le 2o chasseurs et le 9 lanciers polonais restèrent seuls constamment à Danzig et aux environs.

Avec ces deux derniers régiments, Pajol passa l'hiver de 1811 à 1812 sur les bords de la Vistule, entre Danzig et Dirschau; il faisait de fréquentes excursions dans la Nogath et à Elbing, afin de reconnaître les mouvements des Russes sur le Niemen.

Le commencement des hostilités, au printemps de 1812, trouva le général Pajol dans cette même position, qu'il ne quitta que pour entrer en Russie, avec le corps du maréchal Davout, auquel il resta définitivement attaché.

La baronne Pajol, qui avait passé l'hiver à Danzig, s'éloigna de cette ville dans les premiers jours de mars 1812, pour rentrer en France. Elle accomplit heureusement ce long voyage, malgré bien des difficultés, qu'augmentait encore une grossesse déjà

avancée.

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