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sont réputés mis en demeure par le seul effet des publications et affiches auxquelles il a dû être procédé pour annoncer le dépôt du plan à la mairie. (Voy. art. 6.)

385.-La purge des priviléges et des hypothèques n'est pas moins nécessaire que l'extinction des actions réelles. S'il est, d'ailleurs, loisible aux particuliers de négliger les mesures propres à assurer la conser vation de leurs droits, la même liberté ne peut appartenir aux administrateurs des biens de l'État; les formalités de la purge sont donc ici obligatoires, sauf le cas de conventions amiables. (Voy. art. 19.) La première de ces formalités, c'est la transcription.

Le jugement qui exproprie doit être, immédiatement après l'accomplissement des formalités prescrites par l'art. 15, transcrit au bureau de la conservation des hypothèques de l'arrondissement, conformément à l'art. 2181 du Code civil. (Voy. art. 16.)

C'est là un emprunt à la législation civile ordinaire, mais la loi du 3 mai 1841 s'en écarte aussitôt pour adopter des formes plus rapides, et fait notamment, subir au droit commun deux graves dérogations.

386.- La première consiste en ce que les hypothèques légales doivent être inscrites dans les quinze jours de la transcription. Déjà sous l'empire de la législation antérieure à la loi du 23 mars 1855, cette obligation existait, aux termes de l'art. 834. du Code de procédure civile, à l'égard des hypothèques conventionnelles et judiciaires, mais l'inscription des hypothèques légales pouvait se faire et, sous les restrictions qui résultent de l'art. 8 de la loi du 23 mars 1855, peut encore avoir lieu dans le délai de deux

mois à partir du jour où le dépôt au greffe des actes translatifs de propriété a été notifié conformément à l'art. 2194 C. Nap. (1).

« La matière d'expropriation, disait, en 1833, M. Martin (du Nord) pour justifier cette innovation, n'est pas une matière ordinaire, et si le propriétaire peut être contraint à céder une propriété que dans toute autre circonstance, rien ne pourrait lui enlever, pourquoi, de leur côté, les hypothèques légales conserveraient-elles, au détriment de la chose publique, tous leurs priviléges? Pourquoi la loi s'attacherait-elle au maintien rigoureux de formalités et de lenteurs dont l'expérience a si fréquemment d'ailleurs justifié l'inutilité ? N'est-il pas certain, au surplus, pour tous les hommes raisonnables, que la publicité, la notoriété qui précèdent et accompagnent l'acte de cession ou le jugement d'expropriation seront bien autrement utiles pour avertir les intéressés que ces formes que nous venons d'apprécier à leur juste valeur, et qui manquent si souvent le but pour lequel elles ont été établies? Au moyen de ces dispositions, il n'y aura plus, à l'expiration de la quinzaine, aucun doute à l'égard des hypothèques : S'il n'existe pas d'inscription, le bien exproprié ou cédé est libre et ne peut cesser de l'être.» (Voy. Moniteur de 1833, p. 211.)

(1) La loi du 3 mai 1841 n'est, d'ailleurs, aucunement atteinte ni modifiée par l'effet de celle du 23 mars 1853 sur la transcription. En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, les règles concernant la transcription soit à l'égard de l'administration, soit par rapport aux créanciers, restent exactement et complétement ce qu'elles étaient auparavant. (Voy. sur ce point, une excellente dissertation de M. Cabantous insérée dans la Revue critique de législation, année 1855, t. VII, p. 92 et suiv.)

La seconde dérogation consiste en ce qu'il n'est fait aucune notification aux créanciers individuellement. C'est encore une conséquence de ce principe qu'en matière d'expropriation, l'administration ne connaît que le propriétaire inscrit sur la matrice des rôles. Dans les cas ordinaires, le titre transcrit contient, outre le nom et la désignation précise du vendeur, un établissement de propriété qui permet de rechercher les créanciers inscrits sur les propriétaires antérieurs; mais ici, le législateur ne pouvait, sans se mettre en contradiction avec lui-même, astreindre l'administration à l'accomplissement des formalités de l'article 2183 du C. Nap. Les créanciers inscrits, soit sur le propriétaire actuel, soit sur les anciens propriétaires, sont donc assimilés en tout aux intéressés dont s'occupe le § 2 de l'art. 21, et sont tenus de se faire connaître dans le même délai de huitaine.

387. — A défaut d'inscription dans le délai de quinze jours, « l'immeuble exproprié sera affranchi << de tous priviléges et hypothèques de quelque nature << qu'ils soient, sans préjudice des droits des femmes, <«< mineurs et interdits sur le montant de l'indemnité, << tant qu'elle n'a pas été payée ou que l'ordre n'a « pas été réglé définitivement entre les créanciers. >> (Voy. art. 17, § 2.)

Cette dernière disposition, à ne considérer que son texte, semblerait ne reconnaître de droit de préférence sur le prix qu'aux créanciers protégés par une hypothèque légale ; et cependant, sa portée est tout autre, il en faut conclure que du moment que les intérêts de l'administration sont sauvegardés, il y a lieu de faire retour aux principes du droit commun pour

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tout ce qui est à régler vis-à-vis des créanciers. La discussion dont la loi a été l'objet, et le rapprochement des art. 54 et 59 avec l'art. 17 ne permettent aucun doute à cet égard.

388.- Les principes du Code civil veulent que tout créancier qui n'a pas concouru à la fixation du prix de l'immeuble sur lequel il a une hypothèque inscrite puisse surenchérir, mais, en matière d'expropriation, la nature même des choses s'opposait à l'exercice d'un droit de cette espèce. La surenchère entraîne une adjudication nouvelle, et elle est par cela même impossible. Comment admettre en effet, qu'un autre que l'État puisse devenir maître du terrain exproprié? La garantie que la loi devait aux créanciers inscrits est ailleurs. Elle les autorise à ne pas se contenter de la valeur conventionnelle qui serait attribuée à la propriété et à exiger que dans tous les cas, la fixation de l'indemnité soit faite d'après les règles tracées par la loi de 1841 dans son titre IV. (Voy. art. 17, § 3.) 589.-Aux termes de l'art. 19, § 1o, « les règles posées dans le § 1or de l'art. 15 et dans les art. 16, << 17 et 18 sont applicables dans le cas de conven<< tions amiables passées entre l'administration et les « propriétaires. »

On avait proposé dans les deux chambres, de n'appliquer ce mode particulier de purger les hypothèques aux contrats amiables que s'ils avaient été passés postérieurement au dépôt des plans prescrit par l'art. 5, mais il a été entendu dans la discussion qu'il suffisait que le traité amiable ne fût pas antérieur à la déclaration d'utilité publique, et l'on a regardé cette déclaration, combinée avec les formalités pres

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crites par l'art. 15, § 1o, comme constituant une publicité suffisante pour avertir les intéressés. On a considéré, d'ailleurs, que, pour les routes royales, départementales et les chemins de grande communication, l'obligation de lever et de déposer des plans parcellaires imposerait à l'administration une perte inutile de temps et d'argent. Pour ces voies de terre, les conventions amiables sont beaucoup plus nombreuses que les jugements d'expropriation. Ce n'est qu'exceptionnellement qu'on a recours à ce dernier moyen, et toutes les fois qu'on s'en peut dispenser, on ne dresse pas de plans parcellaires. Le tracé une fois approuvé, on le jalonne sur le terrain; on marque à droite et à gauche la limite de la route, et un appréciateur se rend ensuite sur la ligne des travaux pour traiter avec les propriétaires. La publicité qui aurait pu résulter du dépôt des plans, ne présentait pas assez d'avantages pour faire renoncer à ce mode expéditif et économique de procéder.

des

390. Les règles de la comptabilité publique obligent l'administration à accomplir toutes les formalités sans lesquelles le paiement ne saurait s'effectuer avec une entière sécurité. Elle est cependant, sous réserve des droits des tiers, autorisée à payer sans accomplir les formalités prescrites pour la purge priviléges et hypothèques, le prix des acquisitions dont la valeur ne s'élève pas au-dessus de 500 fr. (Voy. art. 19, § 2.) Il est acquis en fait que l'économie obtenue sur les frais de purge dépasse, dans une grande proportion, le montant des sommes qui ont dû être payées deux fois.

Un arrêt de la cour de Colmar avait refusé de dé

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