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diatement au procureur général près la cour impériale, si cette cour siége dans le département, sinon au procureur impérial du chef-lieu judiciaire. La liste relative à chacun des autres arrondissements est, en outre, transmise au procureur impérial du siége, et le magistrat fait déposer ces pièces au greffe de la cour ou du tribunal auquel il est attaché, afin que l'on puisse y avoir recours pour les désignations prescrites par les art. 30 et 33.

403. Dans le silence de la loi, c'est au préfet, appelé par la nature de ses fonctions à prendre l'initiative en matière d'expropriation, qu'il appartient de requérir la formation du jury spécial. Il s'adresse au procureur général ou au procureur impérial, suivant l'échéance des cas, et leur transmet une liste des affaires dont le jury doit connaître. Cette liste, en même temps qu'elle énonce la nature de ces affaires, contient aussi les noms des intéressés, afin que les magistrats évitent de les désigner.

<< Toutes les fois qu'il y a lieu, dit l'art. 30, de «< recourir à un jury spécial, la première chambre « de la cour royale dans les départements qui << sont le siége d'une cour royale, et dans les autres départements, la première chambre du tribunal « du chef-lieu judiciaire, choisit en la chambre du « conseil, sur la liste dressée en vertu de l'article << précédent pour l'arrondissement dans lequel ont << lieu les expropriations, seize personnes qui forme«ront le jury spécial chargé de fixer définitivement « le montant de l'indemnité, et, en outre, quatre "jurés supplémentaires ; pendant les vacances, ce « choix est déféré à la chambre de la cour ou du

« tribunal chargée du service des vacations. En cas « d'abstention ou de récusation des membres du tribunal, le choix du jury est déféré à la cour royale. » Il résulte de la teneur de cet article, et de la discussion d'où il est sorti, que la désignation des affaires à juger doit précéder celle des membres du jury. D'un côté, l'interprétation contraire serait inconciliable avec la disposition qui interdit de prendre pour jurés les propriétaires, fermiers, locataires, etc., des biens à évaluer; de l'autre, on voit par un discours de M. le ministre de l'Intérieur (voy. Moniteur, 11 mai 1833, p. 1317), qu'il a été dans le vœu et dans l'intention du législateur que les listes « embrassant plusieurs natures de capacité, donnassent la faculté au tribunal de choisir un jury approprié à la nature de la chose à exproprier. » C'est précisément pour répondre à cette intention que, le procureur général ou le procureur impérial doit recevoir du préfet, avec la liste générale annuelle, la nomenclature des affaires qui seront soumises au jury.

Le jury criminel devant être désigné par la voie du sort, il est à cet effet, procédé à un tirage au sort en audience publique; mais la délibération, que comporte en matière d'expropriation le choix à faire par la cour ou le tribunal, ne pourrait être publique, on le comprend : elle a lieu en chambre du conseil. Plusieurs cours et tribunaux ont adopté l'usage de nommer un rapporteur qui fait une étude spéciale des documents produits par l'administration et fournit à ses collègues les renseignements dont ils peuvent avoir besoin relativement aux exclusions et incompatibilités.

Il est tenu de la délibération un procès-verbal qui doit constater, à peine de nullité, que les magistrats qui y ont pris part étaient attachés à la première chambre du tribunal ou de la cour, et qu'ils étaient en nombre suffisant pour délibérer. (Voy. Cass. 22 nov. 1841, De Garel.)

Il est arrivé qu'il s'est glissé dans la liste du jury, dressée par l'arrêt de la cour ou le jugement du tribunal, des erreurs portant sur le nom de l'un des jurés. La cour suprême a décidé, dans ces cas, que l'erreur de nom emportait nullité de la décision du jury, quand il en était résulté que le juré, désigné par le conseil général, n'avait pu être valablement assigné ni concourir à la formation du jury (Voy. Cass. 2 fév. 1846, préfet des Bouches-du-Rhône); mais qu'une erreur légère, par exemple, la désignation d'un juré sous le nom de Soulouvard au lieu de Boulouvard, n'était pas une cause de nullité des opérations du jury; cette erreur, d'ailleurs, n'ayant pas été reproduite dans d'autres actes et n'étant de nature à amener aucune confusion de personnes (Voy. Cass. 22 juillet 1850, Achardy); et même, plus généralement, que l'erreur dans les noms et prénoms de quelques-uns des jurés, n'opère point nullité lorsque l'identité de ces jurés n'en a pas moins été reconnue et qu'ils ont siégé du consentement de toutes les parties. (Voy. Cass. 29 juin 1852, préfet des Bouchesdu-Rhône.)

404.- Pour terminer sur la composition du jury, il nous reste à parler des dispenses et des incompatibilités. En cette matière et pour les points qui n'ont pas été fixés par la loi nouvelle, on peut prendre,

sinon comme règle, au moins comme guide, les dispositions du Code d'instruction criminelle. (Voy. Moniteur, 7 fév. 1833, p. 317.) L'inobservation de ces dispositions ne pourrait, sans doute, donner ouverture à cassation, surtout si les parties n'avaient élevé aucune réclamation devant le magistrat directeur; l'art. 42 de la loi du 3 mai 1841, limite, en effet, rigoureusement les cas où le pourvoi pourra avoir lieu (Voy. Cass. 26 déc. 1854, Chaussade), mais il n'en est pas moins vrai qu'on se conformera aux intentions du législateur manifestées dans les discussions de 1833 et de 1841, en suivant la marche tracée pour la formation du jury criminel.

Ainsi, l'on ne pourrait convenablement appeler à faire partie du jury, les personnes qui exercent les fonctions de ministre, de préfet, de sous-préfet, de juge, soit au tribunal civil, soit au tribunal de commerce (Voy. Cass. 20 mars 1854, Davillier), de procureur général, de procureur impérial ou de substitut du procureur impérial ou du procureur général, les ministres d'un culte quelconque, les conseillers d'État chargés d'une partie d'administration, les commissaires de l'empereur près les administrations ou régies. (Voy. C. inst. crim., art. 383.) Il en serait de même de l'expert qui a dressé le plan de l'immeuble exproprié. (Voy. C. inst. crim., art. 392.) Toutefois, les juges suppléants des tribunaux peuvent faire partie du jury. (Voy. Cass. 6 décembre 1854, héritiers Bonnet.)

Les septuagénaires, s'ils le requièrent, sont dispensés des fonctions de juré. (Voy. art. 31, § 7.) On ne devra les comprendre sur les listes que si l'on a lieu

de penser que, malgré leur âge, ils consentiront à faire partie du jury. (Voy. circ. 17 juillet 1833.)

Une autre dispense a été introduite en faveur des jurés qui ont fait le service d'une session. Ils ne peuvent être portés sur le tableau dressé par le conseil général pour l'année suivante. (Voy. art. 47.)

Cette disposition, comme le disait M. Thiers, ministre des travaux publics (Voy. Moniteur, 16 juin 1833, p. 1690), a pour but de rendre plus légère la charge nouvelle qu'impose l'institution du jury spécial des indemnités. Elle ôle en même temps tout prétexte à la crainte manifestée à la chambre des députés, que, si les mêmes hommes étaient choisis plusieurs années de suite pour faire partie du jury spécial, ce jury ne dégénérât en commission permanente.Le texte de l'art. 47 montre que le service doit avoir été réellement fait pendant une session; il n'y aurait pas lieu d'écarter le juré qui, désigné pour siéger, aurait obtenu une dispense, mais il suffit que le juré ait rempli sa mission autant qu'il était en lui, lors même qu'à raison de sa qualité de juré supplémentaire, il n'aurait été appelé à participer à la décision d'aucune affaire pendant tout le cours de la session.

Si une année s'est écoulée sans réunion du jury, l'incapacité de siéger ne doit pas se reporter sur les personnes qui ont fait le service l'année précédente. (Voy. Cass. 28 novembre 1843, De Salase.)

L'art. 30 énumère trois catégories de personnes qu'il écarte du jury à raison de l'intérêt qu'elles peuvent avoir à exagérer le montant de l'indemnité. L'administration seule a intérêt à exclure ces personnes ; c'est à elle de produire les documents utiles pour

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