Page images
PDF
EPUB

général, et uniquement pour donner satisfaction à une prétention privée du locataire. Comme on le voit, il est impossible de reconnaître au locataire la faculté que l'art. 50 de la loi du 3 mai 1841 accorde au propriétaire, sans détruire ou compromettre le droit de celui-ci. Et telle est sans doute la raison pour laquelle le législateur n'a conféré cette faculté qu'au propriétaire seul, la refusant virtuellement au locataire par le fait seul de son silence. Remarquons, en effet, qu'à la différence du locataire, qui ne pourrait exiger l'expropriation totale de son bail qu'au détriment des droits du propriétaire, le propriétaire qui requiert l'acquisition entière de sa propriété, ne porte directement ni indirectement aucun préjudice aux droits du locataire, celui-ci ayant l'option entre la continuation ou la cessation du bail, sauf indemnité dans les deux cas, ainsi que nous l'avons dit plus haut.

« De toute cette discussion, il résulte qu'au propriétaire seul appartient le droit d'exiger l'acquisition totale de ses bâtiments partiellement atteints par l'expropriation, et qu'on ne peut, par analogie, admettre le locataire à requérir l'expropriation totale de son bail. Reconnaître ce droit au locataire, comme l'a fait l'arrêt que nous critiquons, c'est anéantir les droits du propriétaire; c'est ajouter au texte de la loi, contrairement à son esprit. »

510. La position de l'usufruitier semble plus favorable, et cependant, nous ne croyons pas qu'il puisse non plus être admis à exercer le droit consacré par l'art. 50. Ce serait mettre le nu-propriétaire à sa merci et subordonner la propriété à l'un

de ses démembrements, et à un démembrement dont le caractère est de n'être que temporaire.

Art. 5.

511.

512. 513.

[ocr errors]

Droit du propriétaire exproprié sur les terrains qui n'ont pas été affectés aux travaux,

Les anciens propriétaires peuvent réclamer la remise des terrains non employés.

Mode de fixation du prix de la rétrocession.

Délai dans lequel ce droit peut s'exercer.

514. - Forme du contrat de rétrocession.

[blocks in formation]

Il n'y a pas lieu à rétrocession pour les terrains acquis sur la réquisition du propriétaire.

[ocr errors]

511.-L'État n'a pas acquis au même titre qu'un simple particulier; l'utilité publique justifiait seule la dépossession à son profit; il n'a pu devenir, il ne peut rester propriétaire que pour cause d'utilité publique. (Voy. suprà no 327.) Si cette cause ne se réalise pas, il est juste que les propriétaires dépossédés puissent, s'ils le veulent, recouvrer la jouissance des immeubles qu'ils ont été contraints de céder; et ce n'est qu'à leur refus de les reprendre à un prix équitablement réglé, que l'administration peut procéder à une vente publique.

--

Tel est le principe du droit que l'art. 60 consacre en ces termes: <<< Si les terrains acquis pour des << travaux d'utilité publique ne reçoivent pas cette << destination, les anciens propriétaires ou leurs

ayant-droit peuvent en demander la remise. »> (Voy. art. 60, § 1o.) Cette disposition s'applique aussi bien aux terrains qui, après l'arrêté du préfet, ont fait l'objet d'un traité amiable qu'à ceux dont l'expropriation a été prononcée par le tribunal. Dans

les deux cas, l'aliénation a été réellement forcée; mais s'il s'agissait d'un terrain acquis à l'amiable, l'ancien propriétaire qui l'aurait cédé, sans y être contraint par la menace d'expropriation, ne pourrait invoquer le privilége résultant de l'art. 60 pour demander la rétrocession des parties devenues inutiles au service. (Voy. Solution de la régie, 8 déc. 1847, Menu du Ménil.)

La question de savoir si des terrains sont devenus inutiles au service public, implique une appréciation de faits qui est du domaine exclusif de l'administration (Voy. Cass. 28 déc. 1852, Vve Cuzieux), mais, en cas de contestation entre diverses personnes qui prétendent user, chacune à son profit, du droit d'obtenir la rétrocession, l'autorité administrative est incompétente pour décider à qui il appartient de l'exercer. Elle doit surseoir à statuer jusqu'à ce que la partie la plus diligente ait fait trancher la difficulté par les tribunaux civils. (Voy. ord. 1er avril 1840, Autun.)

512. « Le prix des terrains rétrocédés est fixé « à l'amiable, et s'il n'y a pas accord, par le jury, <«<< dans les formes ci-dessus prescrites. La fixation << par le jury ne peut, en aucun cas, excéder la somme moyennant laquelle les terrains ont été acquis. >> (Voy. art. 60, § 2.)

er

Ce texte, non plus que celui du § 1o, n'admet pas de restriction. L'art. 60 est donc applicable, dans le cas où les travaux ne sont pas exécutés, comme dans celui où, après l'exécution, une partie des terrains reste non employée. Mais, dans le cas d'une rétrocession partielle, la limite fixée, comme maximum, à

l'évaluation du jury, se trouvera souvent sans utilité. Vouloir, en effet, établir le prix maximum de la parcelle qui reste, en raison de son étendue comparée à celle du terrain entier, serait souvent blesser les intérêts de l'État; nous pensons que le devoir du jury est seulement de ne jamais excéder la somme moyennant laquelle le terrain entier a été acquis. Cette latitude, laissée au jury, pourrait présenter quelque inconvénient pour les intérêts privés, si les jurés ne se pénétraient pas de la pensée que les rédacteurs de la loi n'ont pas entendu faire profiter l'État de la plus-value que l'immeuble peut avoir acquise. « Il n'y a pas de plus-value au profit de l'État, disait M. Martin (du Nord), rapporteur; si la propriété était restée entre les mains du propriétaire, n'aurait-elle pas augmenté de valeur ? La cause d'utilité publique, l'expropriation, est résolue, et le propriétaire rentre en possession de la chose comme s'il n'en avait pas été dépossédé. Il est évident qu'il y aurait injustice à lui faire payer un prix supérieur à celui qu'il aurait reçu. >>

513. — « Un avis publié de la manière indiquée « en l'art. 6, fait connaître les terrains que l'adminis«tration est dans le cas de revendre. Dans les trois << mois de cette publication, les anciens propriétaires qui veulent réacquérir la propriété desdits terrains, << sont tenus de le déclarer. » (Voy. art. 61.)

La loi ne prescrit aucune forme pour la déclaration destinée à manifester l'intention du propriétaire, en sorte que toute notification, pourvu qu'elle fût parvenue à l'autorité compétente, suffirait, selon nous, pour conserver le droit; on fera cependant

sagement de suivre, en employant le ministère d'un huissier, l'indication que donne l'art. 2, § 8, de l'ordonnance du 28 sept. 1833, qui fixe l'émolument attaché à l'acte de notification.

Il est à remarquer que le délai de trois mois, n'est pas prolongé en faveur des incapables. Pour eux, comme pour tous autres, il emporte déchéance du privilége offert à l'ancien propriétaire.

514. L'ordonnance du 22 mars 1835, règle, d'après la loi de 1833, dont la disposition à cet égard est devenue l'art. 61 de la loi de 1841, l'exercice de ce privilége.

« Les terrains ou portions de terrains acquis pour << des travaux d'utilité publique, et qui n'auraient << pas reçu ou ne recevraient pas cette destination, << seront remis à l'administration des domaines pour « être rétrocédés, s'il y a lieu, aux anciens proprié<«<taires ou à leurs ayant-droit, conformément aux << art. 60 et 61 de la loi du 7 juillet 1833.

<< Le contrat de rétrocession sera passé devant le préfet du département ou devant le sous-préfet, sur délégation du préfet, en présence et avec le con« cours d'un préposé de l'administration des do<<maines et d'un agent du ministère pour le compte << duquel l'acquisition des terrains avait été faite.

[ocr errors]

<< Le prix de la rétrocession sera versé dans les << caisses du domaine. » (Voy. ordonn. 22 mars 1835, art. 1er.)

C'est dans le mois de la fixation du prix, soit amiable, soit judiciaire, que le contrat de rachat doit être passé et le prix payé (Voy. art. 61); et ce délai est encore prescrit à peine de déchéance. Lorsqu'elle est

« PreviousContinue »