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CHAPITRE XII.

LAMARTINE

LES INDECIS : SOUMET ET GUIRAUD
UN ATTARDE : CASIMIR DELAVIGNE
UN ISOLE: BERANGER

BIBLIOGRAPHIE1

Lamartine. Méditations poétiques, 1820; Nouvelles Médita tions, 1823; Harmonies poétiques et religieuses, 1830 ; Voyage en Orient, 1835; Jocelyn, 1836; La Chute d'un Ange, 1838; Recueillements poétiques, 1839; Histoire des Girondins, 1847; Les Confidences, 1849; Raphaël, 1849; Nouvelles Confidences, 1851; Graziella, 1852;

Poésies

inédites, 1873; Euvres chez Hachette et chez Lemerre, Paris.

Sainte-Beuve. Portraits contemporains, I; Lundis, I, IV, IX, X, XI, ouv. cit.

Ch. de Mazade. Lamartine, sa vie littéraire et politique, 1872, Paris, Didot.

E. Ollivier. Lamartine, 1874, Paris, Garnier.

E. Faguet. Dix-neuvième siècle, 1887, Paris, Lecène et Oudin.

Ch. de Pomairols. Lamartine, 1889, Paris, Hachette.

J. Lemaître. Les Contemporains, IV et VI, 1890-1896, Paris, Lecène et Oudin.

F. Reyssié. La Jeunesse de Lamartine, 1891, Paris, Hachette.

A. France. L'Elvire de Lamartine, 1893, Paris, Champion
E. Deschanel. Lamartine, 1893, Paris, Calmann-Lévy.
E. Rod. Lamartine, 1893, Paris, Lecène et Oudin.

F. Brunetière. Evolution de la Poésie lyrique au XIX® siècle, I, 1894, Paris, Hachette.

E. Zyromsky. Lamartine, poète lyrique, 1897, Paris, Colin et Cie.

Th. von Poplawsky. L'Influence d'Ossian sur l'Euvre de Lamartine, 1905, Heidelberg.

Léon Séché. Lamartine de 1816 à 1830. Elvire et les Méditations, 1905, Paris, Soc. du Mercure de France.

M. Citoleux. La poésie philosophique au XIXe siècle, Lamartine, 1905, Paris, Plon-Nourrit et Cie.

1 Voir la Bibliographie générale, page VI.

J. Des Cognets. Les Idées morales de Lamartine, 1908, Paris, Bloud.

G. Allais. Lamartine en Toscane et les Harmonies; Les Harmonies, 1910, Paris, Soc. française d'Imp. et de Lib. P. M. Masson. Lamartine, 1911, Paris, Hachette.

P. de Lacretelle. Les Origines et la Jeunesse de Lamartine, 1911, Paris, Hachette.

R. Doumic. Lamartine, 1912, Paris, Hachette.

Jean Des Cognets. La vie intérieure de Lamartine, Paris, Soc. du Mercure de France.

Marguerite Marie. Le roman d'une grande Ame: Lamartine, 1921, Paris, Plon-Nourrit.

Soumet. La pauvre fille, 1814; La Divine Epopée, 1840, Paris.

Guiraud. Elégies savoyardes, 1823; Poèmes et chants élégiaques, 1824, Paris.

Casimir Delavigne. Les Messéniennes, 1818, 1830; Chants populaires, 1831; Derniers Chants, 1845, Paris, Didot ; Euvres, éd. Garnier.

F. Vuacheux. Casimir Delavigne, 1893, Rouen, Lestringant. Fauchier-Delavigne. Casimir Delavigne intime, Paris, Boivin et Cie.

M. Souriau. Moralistes et Poètes, 1907, Paris, Vuibert. Béranger. Chansons, 1815, 1821. 1825, 1828, 1833; Derniè res Chansons, 1858; Œuvres, 1834, Paris, Perrotin. Voir aussi l'éd. Garnier.

Sainte-Beuve. Portraits contemporains, I; Lundis, 11; Nouveaux lundis, I, ouv. cit.

J. Bernard Béranger et ses Chansons, 1858, Paris, Dentu. A. Arnould. Béranger, ses amis, ses ennemis et ses critiques, 1864, Paris, Cherbuliez.

Th. Bernard. La Lisette de Béranger, 1864, Paris, Bachelin Deflorenne.

J. Janin. Béranger et son temps, 1866, Paris, Pincebourde. Walter Bagehot. Literary Studies, II, 1879, London.

J. E. Demangeot. Biographie de Béranger par ses Chansons, 1892, Paris, Barrière-Bérard.

Ch. Causeret. Béranger, 1894, Paris, Lecène et Oudin. A. Boulle. Béranger, sa vie, son œuvre, 1908, Paris, Gaillard.

Les Méditations de Lamartine parurent le 13 mars 1820 chez l'éditeur Nicolle. Leur auteur a raconté1 comment l'éditeur Didot, cherchant son manuscrit enfoui sous plusieurs piles de papier lui dit : « J'ai lu vos vers, Monsieur; ils ne sont pas sans talent, mais ils sont sans étude. Ils ne ressemblent à rien de ce qui est reçu et recherché de nos poètes. On ne sait pas où vous avez pris la langue, les idées, les

1 Dans Raphaël, CXVIII. (Hachette).

images de cette poésie. Elle ne se classe dans aucun genre défini. C'est dommage; il y a de l'harmonie. Renoncez à ces nouveautés qui dépayseraient le génie français. Lisez nos maîtres, Delille, Parny, Michaud, Raynouard, Luce de Lancival, Fontanes. Voilà des poètes chéris du public. »

On ne saurait produire de témoignage plus frappant du goût littéraire aux environs de 1820. Lamartine trouva heureusement en Nicolle un éditeur plus audacieux, et les Méditations furent accueillies comme l'avait été jadis le Génie du Christianisme: ce fut une révélation.

La vie et surtout la jeunesse de Lamartine sont si intimement liées à son œuvre qu'il est nécessaire tout au moins de les esquisser. Lamartine naquit le 21 octobre 1790 à Mâcon, « parmi les pasteurs », où son père s'était retiré pour mener l'obscure existence du gentilhomme campagnard. Jusqu'à l'âge de onze ans, Lamartine ne quitte point sa mère et il lui doit les dispositions tendres et sérieuses de son caractère. La direction de ses études est confiée à un prêtre romanesque ». Cette double influence. d'une femme et d'un prêtre, à laquelle s'ajoute celle non moins importante de lectures faites un peu au hasard dans la Bible, l'Imitation, la Nouvelle Héloïse, la Jérusalem délivrée, Paul et Virginie, René, Lara et Ossian, contribua fortement à déterminer le tour d'esprit qui lui est particulier. Il faut y joindre l'ambiance du pays natal pour lequel son amour ne faiblit jamais et les impressions de son voyage en Italie où il rencontra la cigarière napolitaine qui fut l'héroïne de Graziella. Avant 1820 et depuis longtemps déjà il s'était essayé à la poésie et il avait même entrepris des tragédies. Le retour des Bourbons l'arracha aux séductions de Milly et vint interrompre ses essais. Il entra dans les gardes du corps du roi Louis XVIII, mais pour fort peu de temps. Il abandonna bientôt. la carrière des armes et revint à son pays natal, à ses rêveries et à ses lectures. Ce fut en 1816 qu'il entreprit le voyage dans les Alpes au cours duquel il rencontra la femme qui devait être l'inspiratrice du

Lac, Mme Charles, l'Elvire des Méditations et la Julie de Raphaël.

L'année qui suivit la publication des Méditations, il fut nommé secrétaire d'ambassade à Florence et en 1822, il épousa une jeune anglaise, Miss Birch. En 1823 parurent les Nouvelles Méditations et la Mort de Socrate; en 1825, le Chant du Sacre et le Dernier Chant du Pélerinage de Childe-Harold.

En 1830, Lamartine fut élu à l'Académie et publia ses Harmonies poétiques et religieuses. Puis, abandonnant la carrière diplomatique, il entreprit en 1832 un voyage en Orient d'où il rapporta un livre d'impressions, publié en 1835 (Voyage en Orient). Ensuite vinrent Jocelyn, en 1836, la Chute d'un Ange, en 1838 et les Recueillements poétiques, l'année suivante. Le reste de la vie de Lamartine fut partagé entre la politique, jusqu'au 2 décembre 1851 (date à laquelle il l'abandonna définitivement) et des travaux de librairie qui furent son gagne-pain jusqu'à ce que l'Etat lui accordât une pension dont il ne profita guère. Il mourut le 21 mars 1869.

Lamartine sacrifia tout d'abord à la mode. Ses œuvres de début qu'il a détruites étaient dans le style de Parny et même dans les Méditations, il y a encore un reste du goût de la périphrase dont il ne saura d'ailleurs jamais se défaire tout-à-fait. C'est ainsi qu'il parle du « char de l'Aurore », du «< char de vaporeux de la reine des ombres», du « sein de Thétis» et de l'œil du jour ». Il convenait lui-même qu'en jeune épicurien, il avait savouré Bertin et Parny et qu'il les avait même imités. Mais, dit-il « la pointe de feu des premières grandes passions réelles n'eut qu'à toucher et qu'à brûler mon cœur pour y effacer toutes ces puérilités et tous ces plagiats d'une fausse littérature. Dès que j'aimai, je rougis de ces profanations de la poésie aux sensualités grossières. L'amour fut pour moi le charbon de feu qui brûle mais qui purifie les lèvres. >>

Après avoir rencontré sur les bords du lac du Bourget Mme Charles, l'Elvire de son chef-d'œuvre, jeune femme morte à 33 ans, le Lamartine épicurien se meut en spiritualiste. Il écarte tout ce qui serait impur, tout

ce qui est trop matériel pour se donner tout entier à un sentiment idéalisé qu'il exprime en évitant les angles de la précision (tendance que nous retrouverons chez Verlaine1) si bien que certains de ses poèmes font penser à ces pastels légers et pâles dont la netteté des contours s'est doucement atténuée.

Elvire morte, Lamartine est devenu l'homme de l'Isolement. Sa solitude est si grande qu'il ne peut s'empêcher de crier avec amertume:

Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières,
Vains objets dont pour moi le charme est envolé ?
Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères,

Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé !

Dès lors, le platonicien qu'il y a en lui n'a plus qu'un désir, celui de « laisser sa dépouille à la terre », parce qu'alors « ce qu'il a tant rêvé paraîtrait à ses yeux. »

Là, je m'enivrerais à la source où j'aspire ;
Là, je retrouverais et l'espoir et l'amour,
Et ce bien idéal que toute âme désire,
Et qui n'a pas de nom au terrestre séjour ?2

Mais la nature offre à son âme blessée la sympathie que les hommes ne sauraient lui donner, c'est vers elle qu'il se tourne et c'est en elle qu'il cherche la consolation.

L'amitié te trahit, la pitié t'abandonne...

Mais la nature est là qui l'invite et qui t'aime ;
Plonge-toi dans son sein qu'elle t'ouvre toujours ;

Il est intéressant de constater cette similitude de goûts chez Lamartine et chez les Symbolistes. Cf. Verlaine:

Rien de plus cher que le Chanson grise
Où l'Indécis au Précis se joint...

(Jadis et Naguère, 1884).

2 Ici, Lamartine, se rencontre avec Joachim du Bellay dont le sonnet de l'Idée, inspiré de Daniello, contient les deux tercets:

La est le bien que tout esprit desire,
La, le repos ou tout le monde aspire,
La est l'amour, la, le plaisir encore.

La, ô mon ame, au plus hault ciel guidée,
Tu y pourras recongnoistre l'Idée

De la beauté, qu'en ce monde j'adore.

De plus, en recherchant les sources des Méditations, on a trouvé que le thème de l'Isolement est dans le sonnet de Pétrarque: Valle, che de lamenti miei se' piena,

Fiume, che spesso del mio pianger cresci,... etc.

(Voir le Lamartine de Léon Séché, p. 168. Soc. du Mercure de France).

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