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d'après une note qui lui avait été transmise par le président de la chambre de commerce de Glascow: « Les contrats de construction portent ordinairement que le vaisseau sera payé en trois ou quatre à-compte, répartis sur les différentes phases de la construction. Tant que le navire est sur chantier, le constructeur a un droit sur le navire pour toutes les sommes qu'il n'a pas encore touchées... Comme on ne peut enregistrer l'embarcation que sur un certificat du constructeur, il refuse son certificat tant qu'il n'est pas complètement payé. Mais si le navire est inscrit et délivré, le constructeur, fût-il encore créancier de tout ou partie du prix, n'a aucune garantie spéciale sur le navire. Il est traité comme les autres créanciers de l'armateur, à moins qu'il ne s'arrange pour obtenir une hypothèque en bonne forme pendant ou après l'enregistrement et qu'il ait soin de la faire inscrire (1). » Quant au mandat d'hypothéquer, il se manifeste, on le sait (v. n. 1212), sous la forme d'un certificate of mortgage, délivré par le registrar. Le capitaine ne reçoit pas de son préposant le mandat implicite d'hypothéquer (mortgage) le navire (Willis v. Palmer, 29 L. J. (C. P. 194) (2).

Le merchant shipping act de 1854 prévoit et règle la révocation du mandat de constituer l'hypothèque éventuelle (art. 83) (3).

On lit dans le code civil du Bas-Canada: « Les parties contractantes peuvent convenir que le bâtiment dont la quille est posée sera la propriété de la personne qui avance les deniers ou effets pour le parachever, et cette convention transfère de plein droit à celui qui fait les avances, pour lui en assurer le paiement, non seulement la propriété de la partie du bâtiment alors construite, mais celle du bâtiment jusqu'à et subséquemment à son parachè

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(1) V. toutefois ci-dessus, n. 1211, l'arrêt rendu dans l'affaire Bell v. Bank of London. (2) Voici la formule de Maclachlan the master has no authority, except by power of attorney. (3) Cet article est ainsi conçu: « Le propriétaire immatriculé à l'époque où un certificat d'hypothèque ou de vente a été accordé pour un navire ou une part de navire, certificat spécifiant la place ou les places où le pouvoir ainsi donné doit être exercé, peut, par un acte écrit de sa main, autoriser le registrar par lequel ledit certificat a été accordé à donner avis aux registrars ou agents consulaires, aux dites places, que le certificat est révoqué. Avis conforme en sera donné, et tous registrars ou agents consulaires recevant cet avis le communiqueront ou l'exhiberont à toutes personnes qui pourraient s'adresser à eux en vue d'effectuer ou d'obtenir une hypothèque. L'avis une fois transcrit, le certificat, en ce qui concerne toute hypothèque à réaliser sur ladite place, sera considéré comme révoqué et de nul effet; et tout registrar ou agent consulaire inscrivant un tel avis fera connaître alors au registrar par lequel le certificat a été accordé s'il a été préalablement usé du pouvoir auquel le certificat avait trait.

vement, en sorte qu'il peut obtenir l'enregistrement du bâtiment, le vendre et en consentir un titre quitte et valable, sauf au propriétaire son droit d'action en reddition de compte ou autre recours que la loi lui accorde contre celui qui a fait les avances >> (art. 2378). Celui qui a fait les premières avances peut, de la même manière, hypothéquer le bâtiment, l'affecter d'un droit de gage ou le transporter à tout autre fournisseur, et celui-ci à un autre subséquent, pourvu que les formalités ci-après prescrites soient observées et non autrement; et dans tel cas le propriétaire a son action en reddition de compte contre le premier fournisseur et les fournisseurs subséquents conjointement et solidairement >> (art, 2379).

D'après l'article 770 du code de commerce de l'Uruguay, celuilà seul peut hypothéquer qui à la capacité d'aliéner; l'hypothèque ne peut être consentie pour le compte des incapables que si l'on se conforme aux règles prescrites pour l'aliénation de leurs biens. L'article 1121 du même code énonce que le capitaine ne pourrait pas hypothéquer le navire pour ses affaires personnelles. Il pourrait toutefois, s'il était en même temps copropriétaire, l'engager (empeñar) pour sa part et portion, pourvu que celle-ci ne fût pas déjà englobée dans un engagement général.

<< Sont privilégiées sur le bâtiment, aux termes du code finlandais (art. 11 § 1 et 2), les avances en espèces ou en marchandises faites pendant la construction et pour y aider par celui qui fait construire le navire, en tant qu'il s'est réservé par écrit ce privilège. Si quelqu'un fait construire un navire pour son propre compte et a reçu d'un autre des avances dans ce but, celles-ci sont privilégiées aux mêmes conditions... » (1). L'armateur gérant ne peut pas hypothéquer le navire sans une autorisation spéciale de la société (art. 22). Il serait responsable de la dette s'il avait affecté le navire sans cette autorisation et le contrat d'hypothèque serait nul (art. 23).

L'article 136 de la loi belge du 21 août 1879 est ainsi conçu : L'hypothèque sur le navire ne peut être consentie que par propriétaire ou son mandataire justifiant d'un contrat spécial. Le mandat doit être donné par écrit ». D'après les explications données dans le rapport fait le 6 décembre 1877 à la chambre des représentants, un copropriétaire de navire ne peut pas hypothéquer sa part sans le consentement des autres. L'article 23 de la même loi s'exprime en ces termes : « Si le bâtiment était frété du con

(1)« Tout privilège semblable cesse aussitôt le navire sorti du port et le débiteur est tenu de remplir ses engagements envers le créancier avant ce moment là » (art. 11 § 4).

sentement des propriétaires et que quelques-uns d'eux fissent refus de contribuer aux frais nécessaires pour l'expédier, le capitaine pourra, en ce cas, vingt-quatre heures après sommation faite aux refusants de fournir leur contingent, emprunter pour leur compte, même hypothécairement, sur leur portion d'intérêt dans le navire, avec autorisation du juge ». L'addition des mots «même hypothécairement, a dit M. de Lantsheere à la chambre des représentants, implique dérogation à deux principes. Nul ne peut donner hypothèque sur le bien d'autrui sans un mandat spécial en due forme or nous autorisons le capitaine à prendre hypothèque sur la part appartenant à l'un des copropriétaires du navire en vertu d'un mandat virtuel. Il y a une deuxième dérogation. L'hypothèque sur portion de navire n'est pas permise au propriétaire de cette portion lui-même. L'article proposé autorise le capitaine à donner cette hypothèque que le propriétaire lui-même n'aurait pas la faculté de donner aux termes du titre de l'hypothèque ma. ritime.

L'article 4 § 11 de la même loi belge répute le constructeur du navire inachevé propriétaire du navire. Dans ce cas, lit-on encore dans le rapport de 1877, le privilège conféré à celui qui fait les avances rend l'hypothèque inutile. Mais « celle-ci n'en conserve pas moins une très grande utilité dans tous les cas où le constructeur ne travaille pas pour une personne déterminée. Elle lui permettra d'obtenir une entière sécurité pour les prêteurs de fonds soit pour achever les constructions, soit pour en entreprendre de nouvelles ».

D'après l'article 507 du nouveau code italien, si le navire est frété du consentement des propriétaires ou par une décision de la majorité et si quelques-uns des copropriétaires refusent de contribuer aux frais nécessaires de l'expédition, le capitaine peut, vingt-quatre heures après la sommation faite à ceux qui refusent de payer leur contingent, se faire autoriser par le tribunal de commerce ou, à défaut, par le préteur (dal pretore), à emprunter à la grosse ou hypothécairement (a cambio maritimo o con pegno), pour leur compte, la somme nécessaire sur leur portion d'intérêt dans le navire.

CHAPITRE III

FORME. PUBLicité.

1214. « Le contrat par lequel l'hypothèque maritime est consentie doit être rédigé par écrit; il peut être fait par acte sous signatures privées» (art. 2 § 1 1. 10 juillet 1885).

Nous disions à propos de la vente, en commentant l'article 195 § 1 du code de commerce: « Le code exige un acte écrit, mais seulement pour la preuve du contrat, ad probationem tantum, non ad solennitatem. Si la vente est avouée par les contractants, elle sera obligatoire entre eux et devra s'exécuter. Ajoutons le serment à l'aveu...». En effet l'aveu fait, le serment prêté devant le juge engendrent un contrat judiciaire constaté par écrit. Mais puisque la preuve doit être faite par un acte, la vente déniée ne pourrait pas être prouvée par témoins ni même par les livres et correspondances des parties, par bordereaux, factures, etc. Il faut appliquer à l'hypothèque ce que nous disions de la vente et nous donnons la même portée aux expressions employées par les lois de 1874 et de 1885: « le contrat... doit être rédigé par écrit (1) ».

Après quoi le législateur, dérogeant à l'article 2127 du code civil, décide que ce contrat peut être fait par acte sous signatures privées. Ainsi l'avait déjà proposé la commission de 1865. « C'est dans le sens le plus favorable à la liberté des transactions que votre commission s'est prononcée sans hésitation, lit-on encore dans le rapport de M. Grivart. Aucun principe n'est ici engagé, car on ne saurait prétendre qu'il est de l'essence de l'hypothèque de ne pouvoir être constituée que par acte authentique, et il doit même sembler naturel que le navire, pouvant être vendu par acte sous seing privé, puisse être hypothéqué dans la même forme. Les prin

(1) « On ne pouvait, en une matière aussi grave, rien abandonner au hasard de la preuve testimoniale » (rapport de M. Grivart).

cipes étant saufs, c'est de l'intérêt des parties que nous devions exclusivement nous préoccuper. Or, en matière commerciale, où tout ce qui peut épargner une perte de temps est d'un grand prix, il n'est point indifférent que les contractants, pressés souvent par des délais inflexibles, puissent, s'ils le jugent bon, réaliser leurs conventions sans recourir au ministère d'un notaire ou d'un autre officier public. La forme authentique est d'ailleurs coûteuse; si les frais qui en résultent semblent déjà lourds en matière civile, où les prêts sont faits en général pour une longue durée, ils paraîtraient exorbitants, s'appliquant à des opérations qui seront faites le plus souvent à un court terme. Rien ne sera, du reste, plus simple à rédiger que l'acte d'hypothèque maritime, et il est permis de croire que sa rédaction n'excèdera pas la capacité du plus grand nombre des commerçants ».

L'acte de prêt hypothécaire, s'il est sous seing privé, peut-il être fait en un seul original? La question est très délicate. S'il s'agissait d'un contrat synallagmatique, nous proposerions encore d'appliquer, ainsi que nous l'avons fait dans notre tome I, n. 73, l'article 1325 du code civil. Mais il s'agit d'un contrat unilatéral (1). Cependant M. Mallet enseigne, dans son excellente thèse (2), qu'il faut rédiger l'acte constitutif en deux originaux au moins. En effet, dit-il, un exemplaire sous seing privé est conservé à la douane lors de la réquisition de l'inscription et, lors de la radiation, un second exemplaire de l'acte constitutif doit être présenté au receveur avec un seul original sous seing privé, d'ailleurs, le créancier ne pourrait utiliser la forme à ordre. Le tribunal de commerce de Nantes a néanmoins jugé le 5 novembre 1881 qu'il n'y avait pas lieu d'exiger, à peine de nullité, un double original: l'article 2, dit ce jugement, ne subordonne pas à la formalité du double original la validité de la constitution d'hypothèque ; pourquoi suppléer une nullité que la loi n'a pas prononcée? Les articles 8 et 9 (de l'ancienne loi), dont on se prévaut en sens contraire n'ont trait qu'aux formalités de l'inscription et de la radiation. S'ils prévoient la création de plusieurs originaux, c'est qu'ils raisonnent de eo quod plerumque fit; leurs prescriptions mêmes, ainsi qu'il résulte des travaux préparatoires, ne sont pas imposées nécessairement à peine de nullité (3). Au demeurant, les dispositions de ces deux articles «tendent à couvrir la responsabilité du receveur des douanes, à sauvegarder l'intérêt du créancier et non à permettre d'introduire une nullité dont il n'a été question que

(1) V. Pont, Petits contrats, I, n. 144 et 170. - (2) p. 31 et 32. — (3) L ́assemblée nationale repoussa, en effet, un amendement de M. Clapier, qui proposait d'ajouter à l'article 8 les mots « à peine de nullité».

DR. MAR. T. V.

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