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COURS

DE DROIT

COMMERCIAL

MARITIME.

AVERTISSEMENT.

Nous suivrons, dans les derniers volumes de cet ouvrage, la même méthode que nous avons adoptée pour les premiers. Nous aimerons toujours à citer, à l'appui de nos décisions, les savans jurisconsultes qui nous ont précédé dans la carrière : les Casa-Regis, les Valin, les Émérigon, les Pothier, etc., doivent être pour nous des autorités magistrales.

D'ailleurs, sans examiner ici si d'autres écrivains, d'un talent très-distingué, ont mieux fait que nous, en prenant une marche toute contraire, nous pensons que le seul, l'unique moyen de faire faire de grands progrès à la jurisprudence commerciale maritime, est de remonter à la source des principes, de les indiquer, et de mettre à lieu d'en apprécier soi-même la sagesse et la justice. Quand on connaît le point de départ d'une science, on sait mieux comment la science s'est perfectionnée, et comment elle peut se perfectionner encore. Au surplus, nous parlons sur un droit spécial et en général peu familier, et nous écrivons pour des jeunes gens qui ne désirent rien tant que de s'instruire.

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DE DROIT

COMMERCIAL

MARITIME.

TITRE IX.

DES CONTRATS A LA GROSSE.

L'ORIGINE du contrat à la grosse se perd dans l'antiquité.

Dans le droit romain, le contrat à la grosse est ordinairement appelé pecunia trajectitia, et quelquefois pecunia nautica, fœnus nauticum.

La loi première du tit. 2, liv. 22, ff de nautico fænore, dit que l'argent trajectice est celui qui est transporté outre mer: Trajectiția ea pecunia est, quæ trans mare vehitur; c'est-à-dire, qui est transporté outre mer aux risques du donneur d'argent, et pour être employé au profit du preneur d'argent.

T. III.

1

Cæterùm, au reste, dit la loi, si cet argent est consommé dans le lieu même où il a été fourni, il n'est point trajectice: Cæterùm, si eodem loco consumatur, non erit trajectitia.

Sed videndum, ajoute-t-elle, mais si, dans le lieu où il a été fourni, cet argent est employé en marchandises, conserve-t-il sa qualité d'argent trajectice? Oui, si les marchandises sont embarquées aux risques du donneur: Sed videndum, an mercedes ex eâ pecuniâ comparata, in eâ causâ habeantur? Et interest utrum etiam ipso periculo creditoris navigent, tunc enim trajectitia pecunia fit. D'où il résulte qu'il est de l'essence du contrat à la grosse que les risques maritimes soient à la charge du donneur d'argent.

La loi troisième du même titre, liv. 3, ff eod., ne met le péril de l'argent nautique à la charge du créancier, c'est-à-dire, du donneur, que depuis le jour où le navire a fait voile: In nautica ресиnia, ex eâ die periculum spectat creditorem, ex quâ navem navigare conveniat, parce que les risques ne courent que de ce moment pour le compte du don

neur.

Peu importe, dit la loi quatrième, ff eod., que l'argent trajectice ait été fourni dans le principe, à condition que le péril maritime ne sera pas à la charge du créancier, c'est-à-dire, du donneur; peu importe que le péril ait cessé d'être à sa charge par l'événement du terme ou de la condition; dans l'un et l'autre cas, il n'est dû que le simple intérêt légi

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time. Nihil interest trajectitia pecunia sine periculo creditoris accepta sit, an post diem præstitutum, et conditionem impletam periculum esse creditoris desierit; utrubique igitur majus legitimâ usurâ fœnus non debebitur.

Mais dans le premier cas, c'est-à-dire, lorsque le créancier n'aura point couru le risque maritime de l'argent trajectice, on ne pourra jamais exiger que l'intérêt ordinaire, parce que ce n'est alors qu'un contrat de grosse imparfait, qui ne peut donner cours à l'intérêt nautique. Dans le second cas, c'est-à-dire, lorsque le risque du créancier aura cessé par l'échéance du terme, ou par l'événement de la condition, l'intérêt légitime prendra son cours par la cessation de l'intérêt nautique : sed in priore quidem specie, semper; in alterâ verò, discusso periculo. Ceci trouvera son application ciaprès dans la sect. 4.

Dans l'un et dans l'autre cas, le créancier ne pourra retenir les gages et hypothèques qui lui ont été donnés, et s'en servir de moyen pour faire courir les intérêts nautiques, qui ne lui seraient pas dus nec pignora vel hypothecæ, titulo majoris usuræ, tenebuntur.

Il était permis de donner à la grosse, ou pour l'entier voyage, ou pour un tems déterminé; mais le change maritime cédait la place à l'intérêt de terre, dès que le péril de la mer cessait d'être à la charge du créancier, discusso periculo.

Suivant le S de la loi 4, ff eod., lorsque l'ar

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