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tant qu'elle lui a été cédée dans les formes prescrites par l'art. 1690 du Code civil. Cette cession ou transport n'a d'effet, à l'égard de l'assureur, que par la signification qu'on lui en fait ou par son acceptation, qui ne soumet d'ailleurs le cédant qu'à garantir l'existence de la dette, conformément à l'art. 1693 du même Code, et qui ne rend pas ce dernier responsable de la solvabilité de l'assureur, à moins qu'il ne s'y soit engagé. Le porteur n'est véritablement qu'un simple cessionnaire; il n'a pas plus de droit que l'assuré, son cédant. Il en est ici comme d'un contrat à la grosse qui ne serait pas fait à ordre. (Voyez ci-dessus la sect. 6 du tit. 9, et Jousse, sur l'art. 30, titre des lettres de change de l'ordonnance de 1673.)

Mais l'assureur paierait-il valablement à celui qui présenterait une police où la clause payable au porteur ne serait pas stipulée ? Celui-ci aurait-il action contre l'assureur, par cela seul qu'il aurait la police en ses possessions? Il faudrait, dans ce cas, se diriger par la disposition du droit commun, et dire que sitôt que la police ne lui a été transportée, ni par la clause payable à ordre, ni par un transport régulier, que n'ayant aucun titre légal de propriété, le possesseur de la police n'a aucune action envers l'assureur. Il en est ici comme de la lettre de change. « A l'égard du porteur, dit Dupuy de la Serra, il ne suffit pas d'être saisi » d'une lettre de change pour en exiger le paie>ment; il faut qu'il ait un titre valable, sans quoi

» il n'a aucun droit de le demander. D'un autre » côté, on court risque de ne pas payer valable» ment. Il faut prendre les précautions nécessaires. ~ (Voyez Dupuy de la Serra', article des lettres de change, p. 89.)

Au reste, la négociation de la police est inutile si les objets assurés arrivent à bon port. Dans ce cas, l'assuré n'a rien à réclamer vers l'assureur, ni le porteur davantage, puisqu'il n'a pas plus de droit que son cédant. Aussi, dans cette hypothèse, l'as sureur n'aurait contre le porteur aucune action, si la prime n'avait pas été payée : le privilége sur les effets assurés doit lui suffire.

Si le tems du paiement de l'assurance n'est pas réglé par la police, l'assureur sera tenu de payer l'assurance, en cas de perte, trois mois après la signification du délaissement, conformément à l'art. 382 du Code de commerce.

Si le tems du paiement est réglé par la police, les assureurs doivent payer, dans le tems convenu, les sommes assurées, pourvu toutefois que le délaissement leur ait été fait.

Mais nous reviendrons sur cet objet, quand nous traiterons du délaissement.

SECTION V.

Des choses qui peuvent être l'objet du Contrat d'assurance.

IL est de principe général qu'on peut faire assurer tout ce que la loi ne défend point de faire assurer: Assecurari possunt omnia, quæ assecurari nec de jure, nec de consuetudine quæ vim juris habet, prohibentur. (Voyez Kurike, diatr. de assecur.)

Il est également de principe que lorsque quelqu'un a fait assurer, avec une chose que les lois permettaient de faire assurer, une autre chose que les lois ne permettent pas de faire assurer, comme lorsqu'un prêteur à la grosse a fait assurer avec son capital le profit maritime, le contrat d'assurance n'est pas entièrement nul; il ne l'est que quant à la chose que la loi ne permettait pas de faire assurer. Il faut distraire de l'assurance cette chose défendue, et l'assurance sera valable pour le surplus. (Voyez Pothier, Traité des assurances, n°. 44.)

Enfin, il est de principe qu'on peut faire assurer toutes choses ou valeurs estimables à prix d'argent, sujettes aux risques de la navigation.

L'art. 334 du Code de commerce, tiré de l'art. 7 du titre des assurances de l'Ordonnance, porte:

« L'assurance peut avoir pour objet le corps et quille du vaisseau vide ou chargé, armé ou non › armé, seul ou accompagné; les agrès et appa» raux, les armemens, les victuailles, les sommes › prêtées à la grosse; les marchandises du charge» ment, et toutes autres choses ou valeurs estimables » à prix d'argent, sujettes aux risques de la navigation..

Il est de la plus haute importance de bien spécifier dans les polices les objets sur lesquels porte l'assurance; car autre chose est d'assurer le corps et quille du navire, ses agrès et apparaux, les armemens et les victuailles, etc., et autre chose est d'assurer les marchandises qui y sont chargées: l'assurance des uns n'influe nullement sur les au

tres.

Le Réglement d'Anvers défendait, par son art. 8, de faire assurer le navire, s'il est vide ou sans charge, à moins qu'il n'eût la moitié de son lest. Mais l'Ordonnance, et d'après elle le Code de commerce, ont corrigé cette disposition. Néanmoins, l'une comme l'autre exige, en permettant d'assurer le navire, que l'on déclare et que l'on sache s'il est vide ou chargé. Valin dit, et quelques commentateurs de la loi nouvelle ont répété, que l'assurance n'étant que sur le naviré, il importe peu qu'il soit chargé ou vide, puisque l'assureur et l'assuré n'ont que le navire pour objet.

Ni les uns ni les autres n'ont voulu apercevoir les justes motifs de cette désignation. Le premier,

c'est que tout ce qui augmente ou diminue les risques, les chances heureuses ou funestes, doit être connu de l'assureur. On sent qu'un navire chargé a souvent une marche plus lente, qui l'expose plus long-tems aux dangers de la mer; il a moins de facilité pour éviter l'ennemi. Le second motif, c'est qu'en cas de délaissement, le fret appartient à l'assureur: il importe donc encore à celui-ci de savoir s'il en sera dû à la fin du voyage. -(Art. 586 du Code de commerce.)

Il importe également de savoir si le navire est armé ou non armé, seul ou accompagné; si le navire est armé en course, ou armé en course et marchandises, et s'il doit aller sous escorte. Ce sont autant de circonstances qui influent plus ou moins sur l'étendue des risques, et qui décident l'assureur à traiter ou à ne pas traiter, ou à traiter à une prime plus haute ou plus faible. Il n'est sur-tout pas indifférent qu'un navire soit ou ne soit pas armé en tems de guerre, qu'il navigue seul ou accompagné.

Tout cela doit être déclaré par l'assuré dans la police, et sa déclaration doit être conforme à la vérité, sous peine de nullité de l'assurance, suivant l'art. 548 du Code de commerce, lequel déclare l'assurance indéfiniment nulle en cas de fausse déclaration, même quand cette circonstance n'aurait pas influé sur le dommage ou la perte de l'objet

assuré,

En conséquence, il faut écarter l'opinion de Valin, qui disait qu'en cas de fausse déclaration de

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