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SECTION VI.

De la manière dont l'Assurance peut être faite, et de la désignation des effets

assurés.

LE Code de commerce, après avoir fait connaître, par l'art. 334, quelles choses pouvaient être l'objet du contrat d'assurance, dit, dans son article 335, que l'assurance peut être faite sur le tout ou sur une partie desdits objets, conjointement ou séparément; c'est-à-dire qu'elle peut être faite conjointement sur le corps et quille du vaisseau, les agrès et apparaux, les armemens, les victuailles, les marchandises du chargement, etc.; ou séparément sur l'un ou l'autre de ces objets, et qu'elle peut même être faite sur le total des effets chargés, ou sur chaque chargement particulier, ou partie de chaque chargement.

On fait assurer sur le corps de tel navire;

Sur les facultés de tel navire;
Sur cargaison de tel navire;
Sur corps et facultés, etc.

L'assurance sur le corps embrasse dans sa généralité tout ce qui regarde le navire. Le mot corps signifie le contenant et tous ses accessoires, la coque du vaisseau, ses agrès, les munitions de guerre.

et de bouche, les avances à l'équipage, et tout ce qui a été dépensé pour la mise hors. Ainsi, il est superflu que la police porte, ainsi qu'il est détaillé dans la formule de Londres, qu'on assure sur le corps, agrès ou apparaux, munitions, artillerie, et autres agrès du navire. Cette énumération est inutile; il suffit de dire qu'on assure sur le corps.

Mais en faisant assurer le corps du navire, eston censé faire assurer également la chaloupe?

Il faut décider l'affirmative, d'après ce que nous avons dit t. 1, p. 191 et 192. La chaloupe, comme le canot, est comprise dans les agrès du navire.

L'assurance sur facultés comprend toutes les marchandises contenues dans le navire. Comme le décide le Guidon de la mer, chap. 2, art. 3, il n'est pas besoin, en cette assurance, de spécifier la quantité ou qualité de la marchandise assurée, pour que l'assurance sur facultés soit valable; il suffit que l'aliment du risque se trouve contenu dans le navire. Il n'est besoin en l'assurance, > porte cet article, spécifier la quantité ou qualité » de la marchandise assurée. »

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L'assurance sur cargaison comprend aussi tout ce qui est chargé dans le navire, même les pacotilles de l'assuré.

Comme le contenu n'est pas le contenant, surtout en cette matière, l'assurance sur le corps ne s'étend point aux marchandises, ni celle sur les marchandises ne s'étend point au navire, à moins que les parties ne l'aient clairement stipulé.

Il est un principe général, c'est que la spécialité déroge à la généralité : de manière que si, dans la police, ou avait désigné une chose, et que cette chose n'eût pas été chargée dans le navire, l'assurance serait comme non avenue et nulle, quoique l'on eût pour son compte d'autres marchandises dans le navire.

Il en serait de même à l'égard de celui qui se ferait assurer nommément et uniquement sur pacotilles, et qui n'en aurait point; il ne pourrait rien demander aux assureurs en cas de sinistre, quoiqu'il eût intérêt sur la cargaison générale faite par les armateurs.

L'assurance sur corps et facultés embrasse géné ralement le navire et toutes les marchandises qui forment sa cargaison. Dans ce cas, le corps et les facultés forment une seule masse.

Mais si, par événement de force majeure, on est obligé de diviser l'assurance faite conjointement sur corps et facultés; par exemple, si le navire devient innavigable, et que l'on soit obligé de transborder les marchandises sur un autre navire, comment se fera cette division d'assurance?

Valin, sur l'art. 7 de l'Ordonnance, dit : « Si » l'assurance était faite sur le navire et son charge› ment, sans distinction, elle porterait moitié sur » le navire et moitié sur le chargement.

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La chambre de commerce de Marseille, consultée, en 1777, sur la manière dont cette division devait être opérée, fut d'avis que l'assurance était

censée porter moitié sur le corps et moitié sur les facultés, s'il n'y a pas une application différente dans la police.

L'opinion de Valin et celle des négocians de cette place si renommée, furent combattues par Émérigon et plusieurs de ses confrères, qui observaient que la loi, en permettant l'assurance sur corps et facultés, n'avait pas entendu parler d'une conjonc tion labiale, mais bien d'une conjonction re et verbis, et que si l'assurance portait moitié sur le navire et moitié sur les marchandises, il pourrait arriver qu'on aurait fait assurer sur le corps au-delà de ce qu'il était permis de faire assurer, et que l'assuré serait à découvert sur la marchandise.

Ces raisons, d'une évidence palpable, furent adoptées par l'art. 10 de la déclaration du 17 août 1779, qui décide ainsi la question :

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Dans le cas où le navire et son chargement se»ront assurés par la même police d'assurance, et » pour une seule somme, ladite somme assurée » sera répartie entre le navire et son chargement, par proportion aux évaluations de l'un et de l'au» tre, si elles ont été portées dans la police d'assu»rance; sinon, la valeur du navire sera fixée par » experts, d'après les procès-verbaux de visite du

navire, et le compte de mise hors de l'armateur, » et la valeur des marchandises, suivant les dispo»-sitions de l'Ordonnance de 1681, concernant l'é» valuation du chargement. - (Voyez Émérigon, t. 1o, p. 288 et suiv., et l'art. 339 du Code de com.).

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On peut encore assurer, soit sur corps ou soit sur facultés; mais une telle assurance ne donnerait pas à l'assuré la faculté de faire à sa volonté porter les risques de l'assureur, ou sur les facultés ou sur le corps, suivant les occurrences. L'assurance doit être appliquée sur le découvert que l'assuré aura sur l'un ou sur l'autre objet, et même capulativement sur les deux, si le découvert était égal des deux côtés. (LL. 29 et 55, ff de verb. sign.; loi 4 au Cod. eod.)

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Suivant les lois 94 et 75, ff de verb. oblig., la stipulation d'une chose dont on ne connaît ni la valeur, ni la quantité, est incertaine : incertam esse stipulationem dicendum est; et par conséquent nulle. Ainsi, l'assurance est nulle, si l'on ne désigne ni la mesure, ni le poids, ni le nombre, ni la somme d'argent d'une chose qui consiste en poids, en nombre ou mesure: une chose sans désignation ne signifie rien. Par exemple, une portion de bled; une portion de bled peut se réduire à un grain, et même à quelque chose de moindre. (Voyez Pothier, des obligations, no. 131.);

Mais si, dans la police, on avait déterminé la quantité de la chose, comme cent tonneaux de bled, sans désigner ni la qualité ni la valeur, alors, ent cas de sinistre, l'assureur serait obligé de payer la perte, parce que l'assurance porte sur une chose certaine. Mais la valeur du bled devra être estimée d'après les règles prescrites par l'art. 339 du Code:

de commerce.

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