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immeubles saisis. Ce n'est pas là un changement, dire, ou modification prohibés par les art. 694 et 727, C.P.C. (1).

(Fournet C. Douesnard.).

5 juill. 1850, saisie de divers immeubles à la requête de M. Douesnard.-18 juill., dépôt du cahier des charges dont la lecture est fixée au 19 août suivant.-17 août, dire par lequel M. Douesnard déclare distraire de la saisie la partie des immeubles attribués à la dame Fournet pour la remplir de ses propres dotaux paternels aliénés.-La dame Fournet conteste la régularité de ce dire, conclut à son rejet, et réserve l'etercice de ses droits contre M. Douesnard.-Jugement du tribunal de Lisieux, qui maintient le dire.-Appel de la dame Fournet qui, dans ses conclusions, ne mentionne plus les réserves prises en première instance.

ARRÊT.

LA COUR;-Considérant que quelques portions de biens saisis ont été donnés, en remploi de ses biens aliénés, à la dame Fournet par l'acte de donation de la veuve Guérin à ses enfants, reçu par Me Peiel, notaire, le 22 janvier 1842, dûment enregistré; Considérant que Douesnard, craignant que la vente de ces biens ne devint l'occasion, soit contre lui-même, soit contre les tiers, d'une demande nouvelle, a déclaré distraire de cette vente les objets qui servent de remploi à la dame Fournet; Considérant que les craintes du créancier poursuivant paraissent d'autant plus fondées, que la dame Fournet, tout en réclamant que l'adjudication frappe sur tous les objets compris dans la saisie, se réserve en même temps le droit d'exercer une action en revendication contre les tiers, et au besoin contre Douesnard une action en dommages-intérêts pour n'en avoir pas distrait les portions de biens qui lui ont été données en remploi,contradiction flagrante entre l'iusistance qu'elle met d'un côté pour que Douesnard procède à l'adjudication de tous les immeubles saisis, en se réservant en même temps le droit de l'attaquer pour y avoir procédé;-Considérant que la demande formée par Douesnard ne peut être considérée comme une modification au cahier des charges, telle que l'entend l'art. 694, C.C., et que, sous ce rapport encore, la dame Fournet n'est pas fondée à provoquer la vente de tous les biens compris dans la saisie;-Confirme et condamne les appelants à l'amende et aux dépens, que le poursuivant est autorisé à employer comme frais extraordinaires de poursuite.

Du 10 févr. 1851.-1 Ch.--MM.Jallon, p. p.-Feuguerolles et Trolley, av.

(1) J'ai toujours décidé qu'aucune modification ne pouvait être apportée au cahier des charges par un dire nouveau après la lecture qui en a été faite (Voy. J. Av. 1. 72, p. 312, art. 144, p. 331, art. 150; t. 75, art. 320, lettre D, p. 508, art. 931; mais, dans mes observations sur un arrêt de Toulouse, j'ai excepté le cas de la distraction demandée et obtenue. Cette exception résulte des termes mêmes de l'art. 727, C.P.C.: la Cour de Caen me paraît donc avoir saisi, dans son arrêt, le véritable esprit de la loi.

ARTICLE 1212.

COUR D'APPEL DE PARIS.

1° SAISIE IMMOBILIÈRE.—Folle enchère,-DÉLAI.-Distance. 2o SAISIE IMMOBILIÈRE.-FOLLE Enchère. - Revente.

1o Il n'est pas nécessaire d'observer les délais de distance, en matière de folle enchère, à dater du commandement de payer, ou de la sommation d'assister à l'adjudication faite au fol encherisseur au domicile élu par une des clauses du cahier des charges (1).

2° Lorsque l'adjudicataire, qui a revendu l'immeuble adjugé, poursuit le nouvel acquéreur par voie de saisie immobilière, les porteurs de bordereaux ont le droit d'arrêter cette poursuite en prenant la voie de la folle enchère (2).

(Senéchault C. Lhuillier et Manet.)

Le 30 juill. 1846, M. Senéchault, alors juge à Rochefort, maintenant conseiller à la Cour d'appel de la Martinique. se rend adjudicataire sur saisie immobilière d'un immeuble connu sous le nom de Blanchisserie générale de la Seine. Le 10 juin 1847, il revend cet immeuble à une compagnie; cette compagnie ne paie pas. M. Senéchault commence une poursuite en saisie immobilière qui est bientôt convertie en vente volontaire. Cependant, MM.Lhuillier et Manet, colloqués dans l'ordre ouvert sur le prix de la vente de 1846, et porteurs de leurs bordereaux, font commandement de payer à M. Senéchault au domicile élu chez l'avoué qui s'était rendu adjudicataire pour lui, et au même domicile ils lui font notification d'assister à la revente sur folle enchère au jour indiqué.

M. Senéchault oppose deux moyens; le premier tiré de ce

(1) Cette solution est contraire à l'opinion que j'ai développée dans les Lois de la Procédure civile, t. 5, p. 791, guest.2429, mais conforme au sentiment de mon savant collègue, M Rodière (Voy. J. Av., t. 75, p. 662, art. 993, lettre D). Je persiste à penser que le conseil que j'ai donué à MM. les avoués est beaucoup plus prudent. Dans l'espèce, ce n'était qu'un retard, parce que la demande en folle enchere devait nécessairement arrêter la poursuite en saisie immobilière. Le tribunal de première instance s'était fondé sur ce que les notifications devaient être faites au domicile de l'avoué; ce motif, qui était insuffisant en lui-même, parce qu'une notification peut bien être autorisée au domicile élu, sans que, pour cela, le demandeur soit dispensé d'observer les délais de distance, étant applicable par ce motif, peut n'avoir pas d'avoué constitué, et qu'alors les notifications doivent avoir lieu à son domicile Aussi la Cour, tout en adoptant les motifs des premiers juges, at-elle cru devoir ajouter que la procédure en folle enchère était un incident. J'ai répondu (loco citato) à cette objection.

(2) Cette question ne pouvait souffrir la moindre difficulté, puisque la folle enchère, que j'ai assimilée à une demande en résolution avait été no ifiée avant une nouvelle adjudication, et que, d'ailleurs, la saisie immbilière avait été convertie en vente volontaire

qu'on n'a pas observé les délais de distance, à raison de l'existence de son domicile actuel à la Martinique; le second de ce que la saisie immobilière était un obstacle à la folle enchère. Jugement du tribunal civil de la Seine ainsi conçu :

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LE TRIBUNAL; Attendu qu'en exécution d'une clause formelle du cahier des charges, les époux Senéchault avaient fait élection de domicile chez Me Jolly, avoué; que, par conséquent, c'est le domicile élu, et non le domicile réel qui devait être pris en considération pour le commandement, l'apposition des affiches et la sommation d'assister à l'adjudication;-Attendu qu'aux termes de l'art. 736, C.P.C., cette sommation doit être faite à la partie saisie, au domicile de son avoué, sans que cette disposition prescrive l'observation des délais de distance entre le domicile élu et le domicile réel;-Qu'aux termes de l'art. 735 l'apposition des placards doit avoir lieu dans les trois jours de la signification du bordereau, et que l'adjudication ne peut excéder le délai de trente jours à partir de l'apposition des affiches ;—Que ces dispositions ne seraient pas d'une exécution possible dans beaucoup de cas, si lesdits délais de distance étaient imposés; -Attendu que le législateur, dont l'intention est manifestée par l'art. 718, C.P.C., a voulu concentrer la procédure entre les avoués pour en accélérer la marche; -Attendu qu'il n'est pas justifié du décès de Leroux de Lens; que ce décès n'a pas été notifié aux demoiselles Thuillier et consorts;Attendu que la folle enchère, poursuivie par les demoiselles Thuillier et consorts, est un incident de l'adjudication prononcée, le 30 juillet 1846, au profit des époux Senéchault; - Que la saisie pratiquée en 1848 sur Tremeau, Montesson et C2, et la conversion de cette saisie, ne peuvent porter aucune atteinte aux conséquences légales de l'adju dication précédente, et notamment au droit de poursuivre la folle enchère. Appel.

ARRÊT.

LA COUR;-Considérant que les procédures de folle enchère constituent un incident de la saisie immobilière ;-Qu'aux termes de l'art. 718, C.P.C., les demandes y relatives sont formées sans augmentation du délai de distance, si ce n'est dans le cas de l'art. 726;-Adoptant, au surplus, les motifs des premiers juges;-Confirme.

Du 5 juill. 1851.-3 ch.-MM. Poultier, prés.- Levesque, av. gén. (concl. conf.)—Dupuich et Forest, av.

ARTICLE 1213.

Dissertation.

DISTRIBUTION PÅR CONTRIBUTIon.—Ordre.—Cloture d'office.

Le juge-commissaire, dans les ordres et distributions, peut-il, d'office, procéder aux clôtures provisoires et définitives?

Comme examen préliminaire, il faut déterminer, d'une manière précise et conforme aux principes, la position du magistrat vis-à-vis des plaideurs.

Le magistrat a-t-il personnellement, d'office, une action, un droit quelconque, indépendant des plaideurs?

Poser ainsi la question, n'est-ce pas la résoudre?

En principe, le magistrat, dans les affaires civiles, peut être comparé à l'oracle: il garde le silence tant qu'il n'est pas interrogé.

Si telle est la règle, y a-t-il dans les lois sur la procédure, et notamment dans les ordres et distributions de prix, une exception à cette règle?

Sur cette question, deux systèmes sont en présence : l'un, pour l'affirmative, est soutenu par Delaporte, Thomine des Mazures, Carré, Bioche et Goujet, le Praticien Français, Ledru-Rollin.

L'opinion contraire, celle que nous adoptons, est enseignée par Pigeau, Demiau-Crouzillac, Delaporte, Lepage.

Tous ces auteurs, sans exception, ont indiqué plutôt que traité la question; les uns l'ont résolue par une formule, les autres par quelques mois.

Pour tous, la question a dû être si facile à résoudre, dans leur sens respectif, qu'ils n'ont pas indiqué les motifs de leur conviction. Un d'eux est allé plus loin, c'est Delaporte, il a été pour et contre.

En réalité, cette question n'est pas suffisamment traitée, la doctrine est presque muette, et, fait non moins remarquable, c'est que la jurisprudence l'est tout autant, et pourtant la question est d'une importance fort grande, d'une utilité pra tique presque journalière.

Avant de nous occuper de la doctrine, lisons la loi.

Art. 663.-Le délai ci-dessus fixé expiré, et même auparavant, si les créanciers ont produit, le commissaire dressera, en suite de son procès-verbal, l'état de distribution sur les pièces produites; le poursuivant dénoncera, par acte d'avoué, la clôture du procès-verbal aux créanciers produisants et à la partie saisie, avec sommation d'en prendre communication, et de contredire sur le procès-verbal du commissaire, dans la quinzaine.

Art. 755. Le mois expiré, et même auparavant, si les créanciers ont produit, le commissaire dressera, en suite de son procès-verbal, un état de collocation sur les pièces produites. Le poursuivant dénoncera, par acte d'avoué à avoué, aux créanciers produisants et à la partie saisie, la confection de l'état de collocation, avec sommation d'en prendre communication et de contredire, s'il y échet, sur le procès-verbal du commissaire, dans le délai d'un mois.

Lors de la présentation du Code, la rédaction de ces articles

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fut acceptée sans discussion (lire en outre les art. 665 et 759, C.P.C.).

Le terrain de la controverse est donc parfaitement indiqué; les termes des art. 663-755 sont les seules armes des partisans de l'autorité du juge.

Ces termes, à notre avis, doivent fléchir devant l'ensemble des dispositions qui régissent la matière, devant ce principe souverain, incontestable que juges et tribunaux, sans réquisitions ou con clusions des parties, ne peuvent agir ni pro

noncer.

Y a-t-il de ordonnances sans requêtes des parties, des jugements sans conclusions, des instances sans demandeurs et défendeurs? Enfin le Code de procédure offre-t-il l'exemple d'une affaire quelconque où juge, tribunal, puissent prononcer sans réquisition? Cet exemple, nous l'avons vainement cherché.

A part quelques rares mesures d'instruction, ordonnées d'office, le juge n'agit, ne statue que sur la demande formelle des parties.

Le principe posé par le législateur, principe incontestable, recjonnu de tout le monde, c'est que, pour obtenir ordonnances et ugements, il faut requêtes et conclusions.

Etait-il nécessaire de proclamer, de renouveler ce principe dans tous les articles qui en exigeaient l'application ? Assurément non, et le législateur, en se dispensant de le faire, n'a laissé aucun doute sur sa pensée; son œuvre n'en est pas moins complète; seulement il en faut chercher le complément dans l'ensemble des dispositions, dans l'esprit général qui régit la

matière.

Ou dira probablement que l'ordre n'est pas une instance, et que, par conséquent, les principes que nous invoquons ne lui sont pas applicables.

L'ordre ne serait pas une instance, et l'on admet, contre la décision du juge-commissaire, l'opposition, la tierce opposition et, parfois, l'appel!

L'ordre ne serait pas une instance, et le juge-commissaire prononce la déchéance des créanciers non produisants, rejette des demandes privilégiées ou autres, ordonne, enfin, la radiation des inscriptions ne venant pas en rang utile!

Tant d'intérêts en cause, de décisions, d'autorités, ne constitueraient point une instance!

Qu'est-ce donc qu'une instance?

- Une réclamation contre un tiers, un droit à faire déterminer, une créance à liquider ou à recouvrer par la décision ou avec le concours du juge, voilà une instance judicaire.

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Dans l'ordre, y a-t-il un demandeur, des défendeurs, un juge

qui prononce? Si tout cela s'y trouve, l'ordre est donc une

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