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aisée mais modeste, il se fit prêtre comme se font tant d'autres, pour la raison qu'il faut avoir un prêtre dans sa famille. En effet, il fut curé pendant plusieurs années, et aux moments où le souffle de la liberté et de l'indépendance traversait la Lombardie, Parocchi joignit sa voix à celle des libéraux, écrivant bien des pages dans ce sens. Était-ce l'enthousiasme du moment, ou une conviction intime? Avec de gros souliers et un esprit raffiné, il est certain qu'il sut comprendre son temps et il se fraya son chemin. De quelle façon s'y prit-il? En devenant journaliste. Il écrivit des articles sensés, qui témoignaient à la fois de sa doctrine et de son sens pratique.

Ses écrits attirèrent l'attention de ses supėrieurs; son aspect, sa conduite firent le reste, et un beau jour, jeune encore, il fut préconisé évêque de Pavie, un évêché des plus difficiles à obtenir. L'ambition de Parocchi s'accrut; et vraiment il donna des preuves de savoir gouverner un diocèse. Ses pastorales furent considérées comme des chefs-d'oeuvre, de sorte que Pie IX, ne réussissant pas à trouver un archevêque pour Bologne, le nomma, en 1877, à cette place, le créant cardinal presque en même temps. Mais l'évêque de Pavie ne fut pas agréé dans ce diocèse et le gouvernement ne voulut pas lui accorder l'exequatur, bien que des personnages

distingués, y compris Joachim Pepoli, eussent fait des démarches en sa faveur.

En 1879, je fus chargé de voir s'il y avait moyen d'aplanir les difficultés qui existaient entre le Vatican et le gouvernement. Le garde des sceaux d'alors, après m'avoir lu plusieurs documents qui déterminaient la conduite du gouvernement, me dit : « Que le pape nomme à ce siège qui bon lui semble, le Ministère ne fera d'opposition à qui que ce soit; mais Parocchi n'aura jamais l'exequatur ».

Ce qui semblait d'abord un malheur, devint une fortune pour le cardinal. Ayant été revêtu de la pourpre, il fut appelé à Rome, où pendant les premières années il se montra presque soumis. Comme il avait été journaliste, le pape lui confia la surveillance et la direction de la presse religieuse. Petit à petit il étudia le milieu où il se trouvait, tàchant de ne pas se créer des adversaires, et s'étant aperçu quel était le caractère de Léon XIII, il sut le disposer en sa faveur, le flattant et ne le contrariant jamais.

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Ainsi peu peu il arriva à être nommé vicaire de Rome, place qui, n'étant pas romain, lui procura des épines. Pourtant il aplanit habilement le chemin, en sorte qu'il est aujourd'hui l'arbitre des décisions du Saint-Père. Rien ne se fait sans l'avis du cardinal Parocchi:. aucun

évêque de la Lombardie, de la Vénétie, ni en deçà du Pô n'est élu sans son approbation. Cela n'a pas manqué pourtant de lui susciter des jalousies, on murmure, on forme des soupçons. S'il n'est pas le candidat de la majorité des cardinaux italiens, il l'est des cardinaux étrangers qu'il a pu approcher et dont il a su gagner l'affection par ses manières et par sa droite raison. Ceux-ci sont enthousiastes de Parocchi. Pour atteindre ce but, il s'est aussi appliqué à l'étude des langues étrangères.

Qu'en pense le cardinal Parocchi des principales questions qui se trouvent maintenant sur le tapis? La réponse est difficile à donner. Dans la position qu'il occupe, il a eu l'occasion de voir des personnages politiques de tout degré et de toute nuance, et dans ces entretiens il s'est toujours bien trouvé avec tous; tant les libéraux que les plus intransigeants du clergé n'ont pas eu de divergences avec lui sur les questions les plus vives du jour, sur la politique du Vatican et sur celle de l'Italie: il est également d'accord avec les cardinaux ultra-intransigeants qu'avec ceux qui penchent vers la conciliation.

Un patricien romain ultra-intransigeant, fou à attacher, mais qui a quelquefois des lueurs de bon sens, en parlant du cardinal Parocchi, avec lequel il doit avoir des rapports, dit souvent:

« Celui-là..... se moque de tout le monde ». Cela est vrai. On doit s'attendre à tout d'un pape semblable, même aux actions auxquelles on pense le moins. Il peut aboutir à la conciliation avec l'Italie comme à une lutte féroce. Sa vraie pensée est impénétrable. De manières douces, insinuantes, il laisse dans votre âme l'impression d'un homme de bien, d'un cardinal bien élevé, instruit et humble. L'observateur ne peut cependant pas être trompé: la pensée intime est toujours cachée.

Gustave-Adolphe d'Hohenlohe est un personnage qui ne compte pas pour le nombre de ses partisans, mais par sa naissance, par sa conduite sans tache et par son jugement ferme et impartial. Il n'approuve pas la politique mesquine des intrigues, des haines et des personnalités; c'est un parfait gentilhomme, dégoûté d'une politique papale que dans sa conscience il ne peut pas approuver, mais au sujet de laquelle il ne nourrit pas de rancune, ni se porte à des actions qui ne soient pas loyales. Sa parole vaut beaucoup; il n'est pas intransigeant, mais il ne suit pas non plus la politique des ambitieux, ainsi appelée des jeunes. Plutôt que de se plier à de mesquines mesures touchant à l'administration du diocèse suburbicaire d'Albano, il préféra y renoncer, sans se préoccuper nullement de son avenir. Sans

cela il serait aujourd'hui le doyen du Sacré Collège, qu'il aurait certes honorablement représenté. Il est vrai toutefois que ces qualitės ne lui ont pas beaucoup valu, ayant été mis à l'écart chaque fois que quelque occasion s'est présentée, ainsi qu'il arriva à l'égard de la charge de secrétaire des Brefs qui lui était dévolue du temps même qu'elle fut donnée au cardinal Serafino Vannutelli.

Le cardinal Hohenlohe est parent de l'empereur Guillaume II et des meilleures familles de l'Allemagne et de l'Autriche. D'un aspect superbe, de taille élevée, imposant, il a des manières très polies et distinguées. Né à Rothenburg (Fulda) le 26 février 1823, il est cardinal depuis 1866. Il demeure à Rome, étant archiprêtre de la basilique Libérienne.

Luciano Bonaparte, tout en portant un nom illustre, n'a aucun poids dans le Sacré Collège. Quoiqu'il soit considéré par beaucoup de monde comme un cardinal étranger, il est italien, étant né à Rome le 15 novembre 1828. Il n'est pas encore vieux, mais il paraît fort âgé. Très pieux, ce cardinal ne se mêle aucunement aux affaires et son vote sera pour celui qu'on lui indiquera.

Miécislas Ledochowski a été un cardinal de combat en Allemagne, à l'époque où M. de Bis

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