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d'engager les fidèles à opérer de bonnes oeuvres, à céder à la voix de leur conscience, à faire des dons et à produire des actes que la loi civile ne prohibe point, n'a fait en çela qu'user de la liberté accordée à l'exercice de la religion et du culte catholique; que cette liberté lui est garantie par la Charte constitutionnelle, article 6; et, de plus, par la jurisprudence d'un arrêt de la Cour de cassation, du 30 novembre 1810, en faveur d'un prêtre qui, condamné par la Cour alors impériale de Jemmappe, fut ensuite acquitté par la Cour de cassation de Paris, contrairement aux conclusions du procureur-général impérial Merlin et fut maintenu dans le privilége incontestable et sacré de ne pouvoir être forcé à faire une chose qui blessait la morale religieuse, la doctrine de l'Eglise et la liberté du culte catholique; que si un prêtre catholique, auquel des magistrats voulaient faire violence, quant à la pratique de sa morale et à l'exercice de son ministère, a obtenu justice contre eux devant les juges d'un usurpateur et sous son règne tyrannique, l'exposant est bien plus sûr de l'obtenir contre ses accusateurs, devant des juges institués par notre Souverain légitime, et sous son règne protecteur de l'innoAppel.

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cence et conservateur de la foi, de la morale et de la religion de nos pères.

D'après ces motifs, l'abbé Vinson supplie qu'il plaise à la Cour, faisant droit sur l'arrêt rendu contre lui par défaut, le 18 octobre 1816, mettre ledit arrêt et tout ce dont est appel, au néant; émendant, décharger ledit abbé Vinson des condamnations contre lui prononcées; statuant au principal, le renvoyer de l'accusation intentée contre lui à la requête de M. le Procureur-général, et ordonner la remise tant de son Concordat expliqué au Roi, que de son Mémoire justificatif, pour en user et faire comme il avisera : et vous ferez justice.

L'ABBÉ VINSON.

POST-SCRIPTUM.

APRÈS avoir achevé cette Requête, et préparé tous mes moyens de défense pour le moment où je serais appelé devant la Cour royale, et autorisé à plaider la cause de Dieu contre M. le Procureur du Roi, je me suis informé si mon Mémoire justificatif avait été lu par tous et chacun de mes juges qui l'ont condamné comme séditieux; si la foi catholique était de quelque poids dans la balance actuelle de la justice; si la double légitimité politique et religieuse formait la base de la nouvelle jurisprudence, et des principes d'après lesquels on allait me condamner ou m'absoudre; si la morale de l'Évangile devait ou ne devait pas, suivant toute probabilité, être sacrifiée à la politique du jour; si l'impartialité des magistrats était véritablement et fortement plastronée contre les traits et les coups-de-feu ministériels; si, dans ma position, la masse des craintes surpassait on non la somme des espérances; s'il était possible enfin que je gagnasse une affaire théologique et religieuse qui allait être jugée par une Cour laïque, et qui, déjà perdue trois fois par trois sentences uni

formes, annonce une invariable uniformité de condamnation, à laquelle elle ne semble devoir échapper que par miracle?

L'ami clair-voyant et sage que j'ai consulté sur tous ces points, m'a répondu en homme qui connait parfaitement les magistrats que nous avons, le code qui nous régit, et les circonstances où nous sommes: en conséquence,

Áttendu que la main du Très-Haut qui, dans sa juste vengeance, dit le Roi-prophète, a livré Jérusalem aux nations étrangères, et son peuple au joug des Égyptiens, et ses murailles à la destruction, et ses temples à la profanation, et ses prêtres au glaive des assassins, et ses fruits à la rigueur des frimas, et ses moissons aux insectes, et ses champs à la stérilité (Ps. 77); cette main pesante qui, pendant vingt-cinq années consécutives, n'a pas traité moins sévèrement la France et ses habitants, ses prêtres, ses pontifes, ses temples, ses autels, ses champs et ses moissons, ne s'est point encore allégée ni retirée de dessus notre patrie malheureuse;

Attendu qu'elle n'est peut-être pas éloignée la nuit heureuse et salutaire, où l'ombre du Roi martyr viendra dire à la France: Et moi aussi j'ai consenti à voir dans - mon royaume l'Église gallicane expropriée, et

ses libertés violées, et sa hiérarchic mutilée, et sa sainte milice stipendiée ; et moi aussi je me suis laissé influencer et conduire par les hommes et les principes nouveaux, et j'ai cru devoir suivre pas à pas, dans la marche de mon gouvernement et de mes lois, le funeste progrès des lumières du siécle; et moi aussi j'ai usé d'une excessive et dangereuse clémence envers des hommes révolutionnaires qui, baignés du sang de mes plus fidèles sujets, n'avaient pas encore été regicides, mais qui se disposaient bientôt à l'étre: - et moi aussi j'ai pris pour ministres des hommes recommandables par l'excellence de leurs idées libérales, les C... les Du... les Bi.... les Servan, les Rolland, les Clavière, qui m'ont donné le conseil étrange de suivre l'impulsion fougueuse de la révolution, pour en arrêter le cours, de m'y abandonner pour lui résister avec succès; de la favoriser pour la détruire; de l'épouser enfin pour en délivrer mon royaume; et qui, par cette incompréhensible politique, sont morts presque tous, comme ma famille et moi même, victimes de cette longue et sanguinaire révolution; et moi aussi j'ai cru devoir plutôt cher

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