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LA COUR, Sur les conclusions de M. Laplagne Barris, avocatgénéral ; — Vu les art. 117, 120 et 122 de la loi du 26 mars 1817, portant: « Art. 117. Avant que les voitures puissent étre mises en circulation, il sera « apposé sur chacune d'elles, par les préposés de la régie, et après vérifi<cation, une estampille.... Il sera également délivré, pour chaque voiture, << un laissez-passer conforme à la déclaration, dont les conducteurs doivent a toujours être porteurs. Art. 120. Toute voiture publique qui circule<< rait sans estampille ou sans laissez-passer, ou avec un laissez-passer qui «< ne serait pas applicable, sera saisie, ainsi que les chevaux et harnais. — « Art. 122. Toute contravention aux dispositions du présent paragraphe << ou à celles des lois et règlemens confirmés par l'article précédent sera << punie de la confiscation des objets saisis et d'un amende de 100 à 1000 fr...>>; « Considérant que, d'après les dispositions de ces articles, les entrepreneurs de voitures publiques ne peuvent faire circuler aucune voiture non revêtue de l'estampille de la régie et dont le conducteur ne soit porteur du laissez-passer; - Que, dans l'espèce, il a été constaté, par un procès verbal régulier des préposés de la régie, et qu'il est d'ailleurs reconnu au procès, que le sieur Plique, entrepreneur de voitures d'occasion et à volonté, a fait circuler une voiture par lui conduite et dépourvue d'estampille et de laissez-passer; que dès lors il avait encouru les peines de confiscation et d'amende portées par ledit art. 122; —Que néanmoins le tribunal correctionnel de Beauvais n'a point prononcé de peine; qu'il en a fait dépendre l'application de la preuve du fait allégué par le prévenu qu'il n'avait perçu aucune rétribution de ceux qui occupaient des places dans sa voiture, et qu'ils y étaient gratis ; — Que cependant ce fait n'était point de nature à soustraire le prévenu aux peines de la loi; — Qu'il résulte en effet de l'art. 113 de la loi précitée que l'impôt sur les voitures publiques d'occasion n'est point établi sur le prix, mais sur le nombre des places qu'elles contiennent et le nombre des roues sur lesquelles elles sont montées; que le transport gratuit des voyageurs ne peut donc soustraire les entrepreneurs aux devoirs que la loi leur a imposés, ni conséquemment aux peines qu'elle a attachées à leur transgression; Qu'il s'ensuit donc qu'en soumettant la condamnation du prévenu à la preuve qu'il n'avait rien reçu des voyageurs qu'il conduisait dans sa voiture, le tribunal correctionnel de Beauvais a violé la loi du 25 mars 1817; - D'après ces motifs, faisant droit au pourvoi de l'administration des contributions indirectes, CASSE et ANNULE le jugement rendu le 15 mars 1824, par le tribunal correctionnel de Beauvais, sur la poursuite intentée contre François-Charlemagne Plique; renvoie, etc. »

COUR DE CASSATION.

L'intimé peut-il interjeter incidemment appel non seulement des chefs du jugement qui dépendent de l'appel

principal, ou qui y sont connexes, mais encore de toutes autres dispositions du jugement? (Rés. aff.) Cod. de proc., art. 443.

MATON, C. BELLOC-DUMAINE.

L'arrêt attaqué avait jugé que l'intimé ne pouvait appeler incidemment que des chefs dont il y a appel principal, et qu'à l'égard des autres, il est nécessaire d'user de l'appel principal dans les délais et dans les formes prescrits pour cette sorte d'appel. De là résultait une contravention formelle à l'art. 445 du Cod. de proc., qui autorise l'intimé à interjeter incidemment appel, sans aucune restriction.

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Du 22 mars 1826, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Cassaigne rapporteur, MM. Guillemin et Godard avocats, par lequel:

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« LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. de Vatimesnil, avocat - général ; Vu l'art. 443 du Cod. de proc. civ.; - Considérant I que cet article autorise l'intimé à interjeter incidemment appel en tout état de cause, quand même il aurait signifié le jugement sans protestation; que cette disposition est générale et absolue, sans aucune distinction ni exception, et a essentiellement pour objet de rétablir l'équilibre dans les droits et prétentions respectifs des parties; qu'elle autorise par conséquent l'intimé à interjeter incidemment appel des chefs distincts et indépendants de ceux dont il y a appel principal, comme de ceux qui dépendent de cet appel ou qui y sont connexes; qu'en jugeant le contraire l'arrêt viole formellement ledit article; - Par ces motifs, CASSE. »

COUR DE CASSATION.

Dans les partages autorisés par l'art. 1075 du Cod. civ., les ascendants doivent-ils se conformer aux règles établies pour les partages ordinaires, et surtout observer l'égalité entre les copartageants? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 826, 852 et 1075.

SPÉCIALEMENT, est-il interdit aux père et mère, qui font le partage de leurs biens entre leurs enfants, de donner tous les immeubles à l'un d'eux, et de n'assigner aux autres qu'une part en argent? (Rés. aff.)

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LES ENFANS GIRAUD-VINAY.

Les époux Giraud-Vinay ont eu de leur mariage un fils et quatre filles.

Le 14 juillet 1806, le mari et la femme, usant de la facalté que leur laissait l'art. 1075 du Cod. civ., ont fait chacun un testament, par lequel ils ont procédé au partage de leurs biens entre leurs cinq enfants de la manière suivante :

Ils ont donné par préciput et hors part à leur fils toute la portion disponible; ensuite, pour le remplir tant de son préciput que de sa part légitimaire, ils ont mis tous les immeubles dans son lot, sans déclarer qu'ils étaient impartageables; enfin ils l'out chargé de payer toutes les dettes et charges de leur succession, et notamment les légitimes de ses sœurs, qu'ils réduisent à une somme d'argent. Il convient de faire observer que les époux Vinay possédaient, chacun de son côté, des biens immeubles assez considérables.

Quoi qu'il en soit, la femme est morte en 1809 et le mari en 1810. A cette double époque leur fils se mit en possession des biens, et il paraît qu'il en a joui sans trouble pendant plusieurs années. Mais en 1816, Félicité Giraud, l'une des ́ sœurs, et les enfants Chabot et Enfantin, représentants deux autres sœurs lors décédées, ont attaqué les actes de partage, et en ont demandé la nullité, 1° parce qu'ils présentaient une lésion à leur préjudice; 2o parce que leur légitime avait été assignée en argent, au lieu de l'être en corps d'héritages, bien qu'il y eût dans les deux successions des immeubles importants et susceptibles d'une division facile.

Le tribunal civil de Valence, et la cour d'appel de Grenoble, successivement saisis de la contestation, se sont bornés à ordonner une expertise, à l'effet de constater seulement s'il y avait lésion; mais, quant à la demande en nullité du partage, fondée sur ce que la légitime des sœurs n'avait pas été assignée en immeubles, bien qu'il y en eût qui pouvaient être commodément partagés, les juges de première et de se- · conde instances l'ont unanimement rejetée. Dans son arrêt du 14 août 1820, la cour royale a considéré « que le chap. 7, liv. 3, du Cod. civ. (art. 1075 et suiv.), renferme dans les six articles qui le composent toute la volonté du législateur concernant les partages des ascendants; que, le législateur n'y ayant point prescrit de règles, il faut admettre qu'il s'est entièrement confié à eux sur la manière de faire la distribution de leurs biens; qu'il les a rendus arbitres sur les points de décider si leurs immeubles ne peuvent pas se partager com

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modément, et si le morcellement peut être nuisible; 'qu'il les a rendus maîtres enfin de distribuer leurs biens ainsi qu'ils le jugent convenable pour l'avantage de chacun de leurs enfants, suivant leur position, et n'a mis d'autres bornes à la confiance placée en eux que celles qui sont posées par les art. 1078 et 1079 ».

Les héritiers Giraud-Vinay ont demandé la cassation de cet arrêt, pour violation des art. 826 et 832 du Cod. civ.

Les articles précités, ont dit les demandeurs, posent des règles spéciales pour les partages. L'égalité entre copartageants, la faculté pour l'héritier de demander sa part en nature des meubles et des immeubles, la fixation des lots et leur division entre les parties intéressées, telles sont les règles élémentaires qu'il faut suivre en matière de partage. L'art. 1075, en permettant aux père et mère de faire entre leurs enfants la distribution et le partage de leurs biens, les a-t-il affranchis de ces conditions essentielles et principales? Nullement. Ses termes mêmes décèlent l'intention du législateur: car en se servant dans cet article du mot partage, il indique assez clairement que c'est un véritable partage que doivent faire les ascendants, un partage soumis à toutes les conditions prescrites pour la validité des actes de cette nature; un partage enfin qui ne soit point l'ouvrage d'une volonté arbitraire, mais où l'égalité entre les copartageants soit observée, et qui présente dans la formation des lots une division pondérée des meubles et des immeubles, toutes les fois qu'elle est praticable. Ainsi, fausse application de l'art. 1075, et violation des art. 826 et 832 du Cod. civ., telle est la double contravention que présente l'arrêt attaqué: impossible par conséquent qu'il puisse échapper à la censure de la

cour.

Le défendeur n'a fait que reproduire les motifs de l'arrêt attaqué. Suivant lui, le partage autorisé par l'art. 1075 est un acte de magistrature domestique, qui n'est soumis à aucune règle particulière, et qui ne peut être attaqué que pour cause de lésion.

Du 16 août 1826, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Zangiacomi rapporteur, MM. Nicod et Isambert avocats, par lequel:

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<< LA COUR, Sur les conclusions de M. Cahier, avocat-général;

Vu les art. 826 et 832 du Code civil; — Considérant que l'art. 1075 de ce Code donne aux père et mère et autres ascendants le droit de faire, entre leurs enfants et descendants, la distribution et le partage de leurs biens; Que, cet article ni aucun autre ne les ayant dispensés de se conformer aux règles qui tiennent essentiellement à la nature des partages, ils sont, par une conséquence nécessaire, tenus de s'y conformer; Que la principale de ces règles est l'égalité entre les copartageants, et qu'il résulte des art. 1075 et suiv. qu'elle doit être observée dans les partages faits par les ascendants comme dans les autres partages; — Qu'il est visible que cet égalité serait détruite si le père de famille qui possède un ou plusieurs immeubles susceptibles de division pouvait arbitrairement en donner la totalité à l'un de ses fils, et réduire les autres à une condition moins avan-, tageuse, en ne leur assignant qu'une part en argent ; Que c'est pour prévenir ce genre d'inégalité et le préjudice qui pouvait en être la suite que les art. 826 et 832 du Cod. civ. veulent que les propriétés immobilières d'une succession soient partagées entre tous les héritiers, si ce n'est dans le cas où cette opération est impossible ou ne peut pas être faité commodément; - Qu'il suit de ces principes que, lorsqu'en exécution des art. 1075 et suiv. le père de famille fait la distribution de ses biens' entre ses enfants, il doit, conformément aux art. 826 et 832, distribuer entre eux tous ses immeubles, à moins que ces propriétés ne soient im~. partageables ou ne puissent être morcelées sans inconvénient;

«Considérant, en fait, que, dans le partage auquel les mariés GiraudVinay ont procédé, ils ont donné à leurs fils toute la portion disponible; qu'ils lui ont donné de plus la totalité de leurs immeubles, consistant eu dix-nenf corps d'héritages, sans même expliquer pourquoi ils ne les distribuaient pas sen plusieurs lots, et qu'ils n'ont donné à leurs quatre filles, réduites à la réserve, qu'une somme en argent; - Que trois de ces filles ou leurs représentants ont formé une demande en partage des immeubles délaissés par leurs père et mère, en soutenant qu'ils pouvaient très facilement être divisés, et offrent de fournir la preuve de ce fait; — Que l'arrêt attaqué a rejeté cette demande, non pas parce qu'il a reconnu qu'il y avait impossibilité ou inconvénient à ce qu'il fût procédé au partage de ces im-" meubles, mais parce qu'il a jugé en principe que les art. 826 et 832 étaient, dans tous les cas, inapplicables aux partages faits par les ascendants, en quoi il a violé ces articles; CASSE et ANNULE l'arrêt, ci-dessus mentiouné, rendu par la Cour royale de Grenoble le 14 août 1820, etc. »

Nota. Voici comment s'exprime M. Toullier sur la question posée en tête de cet article: « Si les biens n'étaient pas susceptibles d'être commodément divisés, le père de famille, en faisant le partage entre ses enfauts, pourrait donner aux uns un corps de ferme ou une maison, et de l'argent et des Tome ler de 1827. Feuille 12.

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