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grande division établie par le Code de procédure et par le tarif, et non à la distinction accidentelle des art. 327 et 328. Et comment en pourrait-il être autrement? Le tarif des frais et dépens, dans son art. 67, relatif aux affaires sommaires, porte <<< qu'il ne sera alloué aux avocats, dans ces sortes de aucun honoraire ». S'il n'est alloué aucun honoraire aux avocats, c'est que le législateur a pensé qu'ils ne défendraient pas les parties dans ces sortes d'affaires, c'est qu'il a voulu que celles-ci se contentassent de l'office d'un avoué.

causes,

Il est donc démontré que l'ordonnance du 27 février 1822 est entièrement conforme, sur le point qui nous occupe, au décret du 2 juillet 1812; qu'elle s'y réfère très explicitement; qu'elle n'a point abrogé ce décret ; qu'il est impossible d'établir, comme l'ont fait les avocats de Laon, une distinction entre les affaires sommaires proprement dites et les incidents; qu'enfin, bien loin que la concurrence, pour ces sortes d'affaires, entre les avocats et les avoués, puisse présenter des inconvénients, elle tourne au contraire tout entière au profit des justiciables, en diminuant les frais de la procédure.

Du 11 décembre 1826, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Vergès rapporteur, MM. Odillon-Barrot et Isambert avocats, par lequel:

<< LA COUR, Sur les conclusions de M. Cahier, avocat-général; Vu les art. 2 et 5 de l'ordonnance du 27 février 1822; —Attendu que cette ordonnance, d'après son préambulé et ses dispositions, forme sur les droits des avocats et les attributions des avoués un règlement légal et complet d'administration publique, indépendant des règlements antérieurs; - Que la plaidoirie a été exclusivement déférée aux avocats par cette ordonnance; Que l'instruction des affaires a été, au contraire, confiée aux avoués; Que cette ordonnance n'a établi, quant au droit de plaider, que deux exceptions en faveur des avoués ; · Que l'une de ces exceptions s'applique aux avoués qui ont obtenu des lettres de licence depuis la loi du 22 ventôse an 12 jusqu'à la publication du décret du 2 juillet 1812; Que l'autre exception concerne les avoués, même non licenciés, qui postulent près les tribunaux dans lesquels le nombre des avocats est reconnu insuffisant;

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« Que l'espèce de la cause ne rentre dans aucune de ces exceptions, puisqu'il ne s'agit ni d'avoués licenciés en vertu de la loi du 22 ventôse an 12, ni ď’avoués exerçant près un tribunal dans lequel l'insuffisance du nombre des avocats ait été reconnue; Qu'il s'agit uniquement de décider si, indépendamment de ces exceptions, les avoués des chefs-lieux de département ont conservé le droit qui leur avait été accordé, quant à la

plaidoirie des affaires sommaires, par l'art. 3 du décret ou règlement du 2 juillet 1812;

<< Attendu que l'ordonnance du 27 février 1822 n'a conservé aux avoués, hors les deux exceptions ci-dessus, que le droit de plaider, dans les affaires où ils occupent, les demandes incidentes de nature à être jugées sommairement, et les incidents de procédure; — Qu'il a été par conséquent dérogé par l'ordonnance à l'art. 3 du décret du 2 juillet 1812, qui autorisait les avoués des chefs-lieux de département à plaider les affaires sommaires ; << Attendu, en outre, que les avoués se prévalent en vain de l'art. 67 du tarif du 16 février 1807, qui défend d'allouer des honoraires aux avocats dans les affaires sommaires; - Que cette défense, utile aux parties et honorable pour le barreau, se concilie très bien avec le droit exclusif de plaider accordé aux avocats par cette ordonnance; -Que, par conséquent, en maintenant les avoués près le tribunal civil de Laon dans le droit de plaider toutes les affaires sommaires dans lesquelles ils occupent, la cour royale d'Amiens est contrevenue aux dispositions de cette ordonnance; CASSE et ANNULE. »

Nota. L'arrêt émané de la cour régulatrice est d'autant plus intéressant qu'il fixe la jurisprudence jusque alors incertaine et vacillante sur la question qui nous occupe. En effet, indépendamment de celui qui vient d'être cassé, la cour royale d'Amiens avait déjà rendu, le 31 décembre 1824, un premier arrêt qui décidait également que l'ordonnance de 1822 n'avait pas enlevé aux avoués des chefs-lieux de département le droit qu'ils tenaient du décret du 2 juillet 1812, de plaider, concurremment avec les avocats, les causes sommaires (1), tandis que la cour de Paris a jugé au contraire, par arrêt du 15 juillet 1826, rendu entre les avocats et les avoués de Versailles, que l'ordonnance de 1822 avait abrogé le décret de 1812, et que, d'après l'art. 5 de cette ordonnance, le droit des avoués, sans distinction, se réduit à plaider les demandes incidentes qui sont de nature à être jugées sommairement, et tous les incidents relatifs à la procédure. B.

COUR DE CASSATION.

Le juge nommé pour procéder à une vérification d'écriture peut-il tenir pour reconnue la pièce à vérifier, dans le cas où le défendeur fait défaut sur la sommation à lui faite

(1) Voy. cet arrêt, fom. 2 de 1825, pag. 37. *

de comparaître pour convenir de pièces de comparaison? (Rés. aff.) Cod. de proc., art. 199.

Ce juge peut-il, dans cet état des choses, concourir au jugement rendu par le tribunal à la suite de son rapport, et qui tient aussi ladite pièce pour reconnue ? (Rés. aff.) L'ordonnance par laquelle le juge-commissaire à déclaré tenir la pièce pour reconnue, et renvoyer la cause et les parties à l'audience, pour y être statué sur son rapport, est-elle, comme le jugement dont elle est suivie, susceptible d'étre attaquée par la voie de l'opposition? (Non rés.) Lorsque l'opposition à ce jugement est suivie d'un jugement contradictoire qui la reçoit POUR LA FORME, ordonne que le précédent jugement sera exécuté selon ses forme et teneur, par la raison (ÉNONCÉE EN TERMES GÉNÉRAUX) que les causes alléguées par la partie opposante pour excuser sa non-comparution ne sont point valables, peut-on soutenir avec fondement que le jugement contradictoire soit dénué de motifs dans cette partie, et que le tribunal n'a pas examiné l'opposition au fond? (Rés. nég.) Cod. de proc., art. 141.

LES HÉRITIERS DELAQUERRIÈRE, C. DELAQUERRIÈRE.

La solution qu'a reçue la première question est contraire à l'opinion unanime des auteurs les plus recommandables qui ont écrit sur le Code de procédure civile. Ils sont tous d'avis que, dans le cas de non-comparution devant le jugecommissaire, soit du demandeur, soit du défendeur en vérification, le rejet de la pièce à l'égard du premier doit être ordonné, non par ce juge, mais à l'audience, et sur son rapport, par le tribunal, et que c'est aussi par le tribunal, et non par le juge-commissaire, qu'elle peut être tenue pour reconnue à l'égard du second. Voici comment s'exprime Pigeau, tom. 1er, 4e édit., p. 589, no 5: « Si le demandeur en vérification ne comparaît pas, le tribunal rejette la pièce. » Et pag. 390, no 6: « Si c'est le défendeur qui ne comparaît pas, le tribunal pourra tenir la pièce pour reconnue. Quoique l'art. 199 dise que, si le défendeur en vérification ne comparaît pas, le juge pourra tenir la pièce pour reconnue, néanmoins c'est le tribunal entier qui prononce la décision dans ce cas, comme dans celui où le deman

deur ne comparaît pas, et non pas le juge - commissaire. Celui-ci constate seulement le défaut de comparution, et le jugement est rendu sur son rapport, à la première audience, ainsi que le prescrit la suite de l'article. » — M. BerryatSaint-Prix, pag. 270, 11° 22, partage ce sentiment. «Ces deux décisions, dit-il, sont rendues à la prochaine audience, sur le rapport du juge-commissaire, sans à venir et sauf opposition.» M. Carré, dans sa note sur ledit article, tom. er des Lois de la procédure civile, pag. 513, dit : « Dans le cas où l'une ou l'autre des parties fait défaut devant le jugecommissaire, le procès verbal ne doit que mentionner ce défaut: car ce n'est pas à lui, c'est au tribunal qu'il appartient prononcer sur les effets que doit entraîner ce défaut. Le mot juge ne nous paraît en effet avoir été employé que pour désigner le tribunal entier, etc. »

de

L'arrêt de la cour régulatrice qui consacre une doctrine contraire sur cette question, qui, suivant nous, n'avait point encore été agitée devant les tribunaux, vient renverser les idées généralement admises sur le sens qui appartient à l'art. 199 da Cod. de proc. Néanmoins, et malgré l'autorité imposante de cet arrêt, nous nous permettons de penser encore que le pouvoir du juge-commissaire se borne à présider à la vérification, et qu'il n'est point investi de celui de juger les effets de la non-comparution des parties devant lui, ni les difficultés qui pourraient s'élever entre elles relativement à l'opération qui lui a été confiée. S'il devait en être autrement, s'il avait le droit de porter une décision, on concevrait difficilement l'objet du rapport qu'il est tenu de faire au tribunal, et du jugement qui doit être rendu à l'audience, puisque déjà tout aurait été jugé par lui.

La procédure en vérification d'écriture n'est réellement qu'un sorte d'instruction par écrit, soumise à des formes particulières et spéciales. La cour de cassation elle-même, par son arrêt, ne considère le juge-commissaire, dans ce cas, que comme un juge-rapporteur ordinaire, puisqu'elle décide, sur la deuxième question, qu'il est juge nécessaire dans l'affaire qu'il rapporte. Or, nous le demandons, s'il lui était dévolu des pouvoirs plus étendus, s'il avait celui de juger, pourrait-il ensuite venir siéger comme juge parmi les membres du tribunal qui, dans le système adopté par cet arrêt, Tome Ier de 1827. Feuille 16.

serait appelé, a reviser son jugement.... Un droit aussi exorbitant ne serait-il pas contraire aux règles d'administration de la justice ?... Ces observations nous paraissent de nature à mériter de fixer toute l'attention de la cour régulatrice, et nous formons le vœu que la difficulté qui nous occupe lui soit de nouveau soumise, pour qu'un nouvel arrêt vienne lever les incertitudes que fait naître celui que nous recueillons aujourd'hui, sur un point qui avait semblé jusqu'à présent ne devoir donner lieu à aucune contradiction sérieuse.

La cour de cassation n'a pas jugé nécessaire de s'occuper de la troisième question, à laquelle appartient, selon nous, une solution négative, si, comme nous l'avons dit, le jugecommissaire n'a pas le droit de tenir pour reconnue la pièce à vérifier, si le pouvoir qui lui est attribué se borne à dresser procès verbal des opérations qui ont lieu devant lui, et si l'ordonnance de renvoi à l'audience, qu'il doit rendre, aux termes de l'art. 199, est, comme nous le pensous, moins un jugement qu'un acte d'instruction pour arriver au jugement. La voie de l'opposition n'étant admise par la loi que contre les arrêts et les jugements rendus par défaut, et non contre les actes de procédure et d'instruction, qui sont soumis à d'autres règles, il faudrait tenir pour certain que l'ordonnance dont il s'agit ne pourrait être attaquée par cette voie. Au reste, l'artiele cité tranche toutes les difficultés à cet égard, en déclarant le jugement seul susceptible d'opposition: on ne saurait donc étendre cette disposition législative, sans ajouter à la loi. Voici l'espèce de l'arrêt qui nous a suggéré ces réflexions préliminaires, dont nous avons jugé la publication utile.

Le sieur Jean-Baptiste Delaquerrière, légataire de tous les biens meubles de la dame Legendre, veuve Delaquerrière, sa taute, morte en 1818, trouva dans la succession de celleci une obligation sous seing privé de la somme de 700 fr., qui avait été souscrite à son profit, le 9 avril 1805, par le sieur Étienne Delaquerrière son beau-frère. Il fit assigner les héritiers de ce dernier devant le tribunal de Louviers, pour s'entendre condamner au paiement du montant de ladite obligation; et, sur leur déclaration, portant qu'ils n'en reconnaissaient ni l'écriture ni la signature, attribuées à leur auteur, il intervint, le 13 juin 1823, un jugement qui en ordonna la vérification par experts.

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