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en écriture authentique ou privée, sur lesquels il dispose par les §§ 3 et 4 du même chapitre; que les premiers ne sont punis que de peines correctionnelles, sauf l'exception portée à l'art. 162, tandis que les autres sont qualifiés et punis comme crimes; — Qu'il s'agit, dans l'espèce, 1o d'un certificat de capacité pour remplacement, délivré par le maire de Caen; 2o d'un congé absolu, délivré par un conseil d'administration ; — Que ces actes sont émanés de fonctionnaires ou officiers publics exclusivement chargés par la loi, ou par les règlements d'administration publique, de leur rédaction ou de leur délivrance; qu'ils constituent par conséquent des écritures publiques et authentiques; — Qu'on ne peut ranger ces actes dans la classe des certificats dont il est question dans l'art. 161 du Cod. pén.; que cet article, ne concernant que les personnes qui fabriquent, sous le nom d'un fonctionnaire ou officier public, un certificat tendant à appeler la bienveillance du gouvernement ou des particuliers sur les personnes y désignées, est inapplicable à l'espèce, où il s'agit de pièces délivrées par les fonctionnaires publics ou officiers compétents, et des faits véritables par eux certifiés n'étant nullement de nature à appeler la bienveillance ou la protection soit du gouvernement, soit des particuliers;

« Que vainement on dirait que les altérations commises ne l'ont été dans les deux actes que sur des notes étrangères à la substance et au corps de ces deux actes; que ces notes font évidemment partie des actes; qu'elles sont destinées, par l'autorité supérieure qui a adressé et envoyé les modèles, à lui faire connaître la vérité des faits auxquels elles se rapportent et qu'il lui importe de connaître; que les officiers publics chargés de remplir ces notes sont soumis, dans les témoignages qu'elles contiennent', à la même responsabilité et à la même obligation de dire toute la vérité; qu'ainsi les falsifications et altérations commises sur ces notes ont les mêmes caractères de criminalité que celles qui auraient eu lieu dans les autres parties des mêmes actes; - Attendu, par ces divers motifs, que les faits de la prévention ont les caractères de faux commis en écriture publique et authentique, et doivent être réglés par les dispositions du § 5, liv. 3, tit. 1, chap. 3, du Cod. pén.; Disant droit sur le pourvoi, et statuant par règlement de juges, sans s'arrêter à l'arrêt de la chambre des mises en accusation de la cour royale de Caen, du 18 novembre dernier, ni à l'arrêt de la chambre des appels de police correctionnelle, du 16 marş suivant, en ce qui concerne la qualification de falsification et altération commises sur le certificat délivré par le maire de Caen, RENVOIE le prévenu et les pièces de la procédure devant la chambre de mises en accusation de la cour royale de Rouen. » J. L. C.

COUR DE CASSATION.

Lorsqu'un individu qu'on prétend en démence prouve l'exis tence de sa famille, le ministère public est-il recevable à

provoquer d'office son interdiction, sous prétexte qu'il ne donne pas une INDICATION PRÉCISE des noms et demeures de ses parents? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 491. Cette indication précise est-elle à la charge de celui dont on provoque l'interdiction? (Rés. nég. )

SCHIRMER, C. LE MINISTÈRE PUBLIC.

Le sieur Schirmer avait été contrôleur des contributions directes. Il avait révélé des abus et reçu quelques lettres de satisfaction du ministre des finances, M. le comte Corvetto. Il avait même obtenu un léger avancement; mais ne l'ayant pas trouvé proportionné à ses services, il paraît qu'il s'était rendu importun aux ministres et à plusieurs fonctionnaires et députés, auxquels il avait adressé ou fait signer un grand nombre de pétitions. On prétend aussi qu'il avait fait quelques actes indiquant la démence.

Dans cet état de choses, M. le procureur du roi du tribunal de la Seine a cru pouvoir provoquer l'interdiction du sieur Schirmer pour cause de démence, en vertu de l'art. 491 du Cod. civ., qui accorde cette faculté au ministère public, lorsque l'individu réputé en démence n'a pas de parents

connus.

Un conseil de famille composé d'étrangers est convoqué et donne son avis. Dans son interrogatoire, le sieur Schirmer fait connaître ses noms et prénoms, le lieu de sa naissance; il indique les noms des nombreux parents qu'il a dans le département des Vosges, et notamment de son père, de ses oncles et de ses tantes.

Devant le tribunal de la Seine, le sieur Schirmer soutient que le ministère public est non recevable à provoquer son interdiction pour cause de démence, puisque, ses parents étant connus, l'art. 491 n'est point applicable.

Le 12 février 1825, jugement qui rejette cette fin de non recevoir, mais qui, toutefois, surseoit à statuer sur la demande en interdiction du ministère public, jusque après un traitement de trois mois, auquel le sieur Schirmer devait être soumis dans la maison royale de Charenton.

Appel de la part du sieur Schirmer, en ce que les premiers juges n'ont pas déclaré le procureur du roi purement et simplement non recevable dans sa poursuite.

Appel incident du procureur-général, en ce que le tribunal n'a pas prononcé de suite l'interdiction.

Arrêt de la cour royale de Paris qui pose la question en ces termes : « A défaut d'indication précise par Schirmer des noms et demeures de ses parents, le ministère public at-il pu considérer le sieur Schirmer comme n'ayant point de parents connus, et était-il recevable dès lors, en vertu de l'art. 491 du Cod. civ., à provoquer l'interdiction du sieur Schirmer pour cause de démence? » La cour considère ensuite que, Schirmer n'ayant pas fait connaître les noms et demeures de ses parents, le ministère public est recevable, aux termes de l'art. 491 du Cod. civ. En conséquence, statuant au fond, et attendu que des interrogatoires et des écrits de Schirmer résulte la preuve de démence, elle prononce l'in terdiction.

Le sieur Schirmer s'est pourvu en cassation contre cet arrêt. Il a produit un grand nombre d'actes qui prouvent l'existence de sa famille, des lettres de son père et de ses oncles, qui déclarent improuver la demande en interdiction : il a soutenu, en conséquence, qu'il y avait eu, de la part de la cour royale de Paris, violation expresse de l'art. 491 du Cod. civ. M. le procureur-général a fait défaut.

Du 7 août 1826, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Bonnet rapporteur, M. Odillon-Barrot avocat, par lequel:

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que

«LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. Cahier, avocat-général; Vu l'art. 491 du Cod. civ.; Considérant le ministère public n'a le droit facultatif de provoquer, pour démence, l'interdiction d'un individu, que lorsqu'il n'a pas de parents connus; Que, dans l'espèce, Schirmer avait un grand nombre de parents connus, et que l'arrêt de la cour royale de Paris ne s'est fondé que sur ce que Schirmer n'avait pas donné d'indication précise des noms et demeures de ses parents; mais que la loi ne met point à la charge de celui dont on provoque l'interdiction ces indications précises des noms et demeures de ses parents, surtout quand il indique, comme le faisait Schirmer, le lieu de sa naissance, sa profession, et les lieux où existe sa nombreuse famille; Qu'ainsi l'arrêt, en prononçant l'interdiction, dans l'espèce, sur la scule provocation et les conclusions du ministêre public, a violé l'art. 491 précité du Cod. civ.; DONNE défaut contre M. procureur-général de la cour royale de Paris, ct, pour le profit, CASSE. »

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S.

COUR DE CASSATION.

L'appel est-il recevable, quoique l'appelant ait signifié le jugement à l'intime, avec sommation de s'y conformer, si, dans cette signification, il s'est réservé le droit d'en appeler? (Rés. aff.) Cod. de proc., art. 444.

Peut-on employer la force publique pour mettre à exécution un jugement qui enjoint à une femme de rentrer dans le domicile conjugal, alors surtout que le mari a vainement tenté de l'y ramener par tous autres moyens, notamment par la saisie de ses revenus? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 214.

LA DAME LIEGEY, C. SON MARI.

La première question ne pouvait faire difficulté. Voy. plusieurs arrêts qui consacrent virtuellement le même principe, anc. coll., tom. de 1809, p. 247; tom. 1er de 1814, p.. 153 et 154, et tom. 2 de 1818, p. 312; nouv. éd., tom. 9, p. 475; tom. 15, p. 153 et 154, et tom. 19, p. 810. Voy. aussi M. Carré, sur l'art. 444 du Cod. de proc.

La seconde question, au contraire, est grave et d'une solution difficile; elle se rattache aux principes qui garantissent l'ordre social et la liberté individuelle. Les difficultés qu'elle présente ont été diversement appréciées par les cours royales. Les cours de Paris, de Turin et de Colmar ont décidé, par arrêts des 29 mai 1808, 17 juillet 1810 et 4 janvier 1817, que la femme qui refuse d'habiter avec son mari peut y être contrainte par la saisie de sa personne. (Voy. 1er sem. de 1809, p. 171; 1er vol. de 1818, p. 249; et nouv. éd., tom. 9, p. 329; tom. 11, p. 710, et tom. 19, p. 4.)

Mais la cour d'appel de Paris avait jugé en sens contraire le 22 prairial an 13, et la cour de Toulouse a consacré la même opinion le 24 août 1818. (Voy. 2 sem. de l'an 15, p. 419, et 2 vol. de 1821, p. 387; nouv. éd., tom. 6, p. 252, et tom. 20, p. 674.)

L'arrêt suivant, par lequel la cour de cassation a statué pour la première fois sur ce point délicat de jurisprudence, fera-t-il cesser cette divergence d'opinions? Cela nous paraît douteux. L'arrêt prouve très-bien que, dans l'intérêt de la

société, la loi doit assurer et assure l'exécution des jugements par tous les moyens qui sont en son pouvoir, et même par l'emploi de la force publique; que ce principe est conservateur de l'autorité judiciaire et de l'ordre social. Mais l'arrêt ne répond point aux objections qui tendent à établir que cette règle, quelque générale' qu'elle soit, doit souffrir exception lorsqu'il s'agit d'exécuter un jugement qui enjoint à une épouse de rentrer dans le domicile conjugal. Employer la force publique pour mettre un tel jugement à exécution, c'est, dit-on, offenser la pudeur publique et la sainteté du mariage; c'est violer la loi qui défend de prononcer la contrainte par corps, et même d'arrêter un individus hors les cas qu'elle détermine; c'est, lorsque la femme habite loin du domicile de son mari, et qu'on est contraint, en l'y conduisant, de stationner dans des maisons privées, se rendre coupable, envers elle, de détention arbitraire ( Cod. de proc., art. 788); c'est enfin employer un mode d'exécution sans résultat, puisque la femme, réintégrée dans le domicile marital, peut le quitter sur-le-champ, et qu'ainsi, en définitive, force ne restera point à la loi qui oblige la femme à habiter avec son mari. (Cod. civ., art. 214.)

Ces raisons, qu'on trouvera développées dans l'arrêt cité de la cour de Toulouse, ne peuvent-elles pas porter à croire qu'il n'y a pas lieu d'appliquer au jugement ordonnant la réintégration de l'épouse dans le domicile conjugal le principe qui veut que les jugements soient exécutés, au besoin, par l'emploi de la force publique ?

Par arrêt de la cour royale de Nanci, du 8 août 1825, la dame Liegey fut déboutée de sa demande en séparation de corps d'avec son mari.

Ce dernier lui fit signifier cet arrêt, avec invitation de rentrer dans les vingt-quatre heures dans le domicile marital. Depuis, diverses injonctions, diverses invitations amicales, lui furent faites sans succès.

C'est alors, et le 29 novembre 1825, que le sieur Liegey fit assigner la dame Liegey, sa femme, par-devant le tribunal de première instance de Lunéville, aux fins d'obtenir contre elle les moyens coercitifs pour l'obliger à rentrer dans le domicile conjugal.

Le 6 décembre 1825, jugement par lequel, en refusant au

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