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« Attendu que la loi spéciale du 29 septembre 1791, loin d'avoir éta- ̧ bli, sur la poursuite des délits forestiers, aucune règle particulière et contraire aux principes généraux de la législation criminelle, les a confirmés; qu'en effet, il résulte de l'art. 8, tit. 9, cette loi, que, pour arrêter le cours de la prescription qu'il établi, il suffit que des actions en réparation de ce délit aient été intentées dans s trois mois du jour de leur reconnaissance; qu'ainsi, toutes les fo's qu'il y a eu action en réparation d'un délit forestier, intentée dans ce délai, soit à la requête de la partie civile, soit à celle de la partie publique, aucune des deux actions ne peut être déclarée éteinte et prescrite, lorsque l'une d'elles a été exercée utilement; et qu'enfin, la loi spéciale n'ayant point exigé, pour arrêter la prescription, le concours simultané des deux actions, il faut nécessairement s'en tenir sur ce point à la règle générale établie par le Cod. d'inst. crim.;

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«Attendu, en fait, que, par une citation donnée en temps de droit par la dame de Gautron, aux nommés Barbabesse et Mercanton, pour paraître devant le tribunal correctionnel de Grenoble, savoir, Barbabesse pour s'y voir condamner à payer les dommages et intérêts de la dame de Gautron, à raison des délits commis dans une forêt à elle appartenant, et Mercanton, adjudicataire subrogé d'une coupe dans ladite forêt, pour être déclaré civilement responsable de cedit délit ; — Que, par cette citation, le tribunal correctionnel se trouvait donc saisi non seulement de l'action privée qu'intentait la partie civile, mais encore de l'action publique qui venait s'y rattacher; — Que, sur la plainte de la dame de Gautron, le tribunal correctionnel, par un jugement du 1er août 1825, trouvant qu'il y avait un délit dans la coupe illégale de plusieurs baliveaux réservés par elle, avait ordonné une vérification pour déterminer la quotité des dommages dus à ladite dame de Gautron; - Que, sur l'appel de ce jugement in- terlocutoire, interjeté par lesdits Barbabesse et Mercanton, la cour royale de Grenoble, statuant sur l'appel de ce jugement, et homologuant le rapport d'experts ordonné par un précédent arrrêt, a condamné Barbabesse à ૩ payer à la dame de Gautron la somme de 2,017 fr., pour dommages par elle éprouvés à raison des délits commis à son préjudice, et déclaré Mer – canton civilement responsable desdites condamnations; Que le même arrêt donne acte au ministère public de ses réserves et protestations relatives au même délit ; qu'en conséquence, le procureur-général a fait citer lesdits Barbabesse et Mercanton devant la cour royale, chambre correctionnelle, pour s'y voir condamner solidairement au paiement de l'amende par eux encourue, conformément à l'art. 4, tit. 32, de l'ordonnance de 1669, pour avoir coupé en délit les baliveaux dont l'abatage avait déjà motivé une condamnation au profit de la dame Gautron, contre lesdits Barbabesse et Mercanton; Que cet exercice de l'action publique a eu lieu avant que le délai d'un mois fùt écoulé depuis l'arrêt qui avait consacré les réserves et prostestations dont ladite action était le résultat ;

« Attendu que cependant la cour royale a, par l'arrêt attaqué, mis hors d'instance lesdits Barbabesse et Mercanton, sur les motifs que, rela

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tivement au fait à eux imputé, il n'avait été exercé à temps aucune poursuite de la part du ministère public, et que, depuis l'époque de la connaissance des délits jusqu'à l'arrêt du 28 janvier, il s'était écoulé plus de trois mois; qu'enfin les poursuites faites par la partie civile n'ayant pas interrompu la prescription à l'égard de la partie publique, la prescription était acquise aux termes de la loi du 29 septembre 1791; Que cette manière d'interpréter une loi en contient évidemment une fausse application, puisque, d'après sa disposition même, la prescription est interrompue dès qu'il y a eu action intentée, dès que le tribunal a été saisi de la cause et le prévenu mis à sa disposition, pour être condamné, s'il y a lieu, aux peines prononcées par la loi et à l'indemnité due à la personne offensée ; - Que la prescription ne saurait être interrompue en faveur de la partie civile sans l'être en faveur du ministère public, qui est nécessairement partie jointe dans toute procédure criminelle; Qu'ainsi la cour royale, dans l'arrêt attaqué, a, par une fausse application de l'art. 4, tit. 9, de la loi du 29 septembre 1791, violé ce même article, et, par suite, les dispositions de l'ordonnance de 1669, dont elle avait à faire l'application; -Par ces motifs, CASSE et ANNULE l'arrêt rendu par la cour royale de Grenoble, chambre des appels de police correctionnelle, le 2 mars dernier, dans la cause entre le Ministère public, d'une part, les sieurs Barbabesse et Mercanton d'autre part. >>

COUR D'APPEL DE PARIS.

Le vendeur primitif d'un immeuble peut-il encore demander la résolution de la vente, pour défaut de paiement du prix, après que l'immeuble a été revendu par suite d'une saisie immobilière pratiquée sur l'acquéreur, sans avoir besoin d'attaquer le jugement d'adjudication? (Rés. aff.) Le vendeur peut-il former l'action résolutoire, lors même qu'averti de la saisie par la notification du placard indiquant la première publication, il n'a point revendiqué l'immeuble, si d'ailleurs il n'a par aucun fait personnel approuvé la revente? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 1184, 1654, 2182; Cod. de proc., art. 731.

BOISMARD, C. DE VIGNACOURT.

Voilà le troisième arrêt de la cour royale de Paris qui joge ces questions dans le même sens (1): inutile par conséquent de se livrer à une longue discussion, qui ne pourrait amener que des redites fastidieuses. Entrons donc en matière, et rap

(1) Voy. le tom. 2 de 1822, pag. 152, nouv. édit.

pelons en peu de mots les faits dont la connaissance est nécessaire pour l'intelligence de l'arrêt qui fait l'objet de cette notice.

Par un acte notarié du 26 mars 1815, le sieur de Proisy vend au sieur Hébert les fonds et superficie de différentes parties de bois, moyennant 125,000 fr., payables à des ter

mes convenus.

Un sieur Nicolas obtient contre Hébert un jugement de condamnation au tribunal de commerce, et met en saisie immobilière les bois acquis par ce dernier le 26 mars 1815. Le placard indicatif de la première publication est notifié au sieur de Proisy, vendeur originaire, comme aux autres créanciers inscrits; et, le 30 juillet 1818, l'adjudication a lieu au profit d'un sieur Boismard, pour le prix de 65,500 fr., outre les charges.

Le sieur Proisy étant décédé dans l'iutervalle, saus avoir reçu les 125,000 fr., montant de la vente qu'il avait faite à Hébert, le sieur de Vignacourt, son neveu et son héritier, forma une demande en résolution de la vente du 26 mars 1815, et cette demande, il la dirigea tant contre les représentants d'Hébert, mort insolvable, que contre Boismard, adjudicataire. Le 29 août 1825, jugement du tribunal civil d'Epernay, qui prononce cette résolution, « Attendu qu'aux termes des art. 1184 et 1654 du Cod. civ., il y a lieu à la résolution de la vente d'immeubles à défaut de paiement du prix; que l'action en résolution peut être exercée utilement contre les tiers détenteurs; que la loi ne distingue pas les diverses espèces de mutations, sa disposition étant générale et saus exception ; que, par conséquent, il importe peu que le sieur Boismard possède en vertu d'une adjudication intervenue sur saisie immobilière, attendu qu'aux termes de l'art. 2182. du Cod. civ., le vendeur ne transmet à l'acquéreur que la propriété et les droits qu'il avait lui-même sur la chose vendue; que, suivant l'art. 751 du Cod. de proc. civ., l'adjudication définitive sur saisie immobilière ne transmet à l'adjudicataire d'autres droits à la propriété que ceux qu'avait le saisi; que le vendeur, puisqu'il n'est point payé de son prix, peut en tout temps demander la résolution du contrat de vente, tant qu'il n'y a pas formellement renoncé; attendu que, dans l'espèce, aucune renonciation ne peut être opposée au sieur de Vignacourt, et qu'elle ne peut résulter de la

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notification du placard faite au sieur de Proisy; que celui-ci a bien été averti, par cette notification, de la poursuite de saisie immobilière; mais qu'il n'y est pas intervenu, et n'y a fait aucun acte; que c'est en qualité de créancier privilégié et hypothécaire qu'il y a été appelé par ladite notification, mais que le droit hypothécaire est différent de l'action en résolution du contrat de vente; que l'exercice de l'un ne peut pas porter atteinte à l'autre, tant qu'il n'y a point de renonciation formelle ; qu'il en résulte que l'adjudication faite au sieur Boismard ne peut porter obstacle à la résolution demandée par le sieur de Vignacourt. »

Les héritiers d'Hébert et le sieur Boismard ont déféré ce jugement à la censure de la cour royale. Suivant eux, la demande en résolution était, dans l'hypothèse, non recevable sous deux rapports: d'abord, parce qu'au moyen de la notification qui lui avait été faite du placard indicatif de la saisie et de la première publication, le sieur de Proisy était devenu partie nécessaire dans la poursuite d'expropriation, et ensuite parce qu'au lieu de s'opposer à la saisie, il avait laissé consommer l'adjudication définitive, sans même attaquer le jugement qui la prononçait.

Mais, le 26 juin 1826, ARRÊT de la cour d'appel de Paris, 2o chambre, M. Cassini président, MM. Persil et Gairal avocats, par lequel:

« LA COUR, -Sur les conclusions de M. Terray, conseiller-auditeur; Considérant que la notification du placard faite à de Proisy, comme aux autres créanciers inscrits, ne suffit pas pour lui enlever l'action résolu toire, qu'il ne pourrait perdre que par un fait personnel émané de sa propre volonté, et dans lequel il aurait joué un rôle actif, tel par exemple que la demande de sa collocation dans l'ordre........ (1); — MET l'appellation au néant, ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet. » B.

COUR D'APPEL DE PARIS.

Lorsque le propriétaire d'une maison dont l'emplacement est déclaré devoir être réuni à la voie publique a reçu

(1) C'est ce qui a été jugé par un arrêt de la cour de cassation, du 16 juillet 1818. - Voy. anc. coll., tom. 1er de 1819, pag. 215, et nouv. édit., tom. 20, pag. 552. Toutefois M. Merlin critique cette décision. Voy. Qucstions de droit, vo Option, § 1or.

de l'autorité administrative la défense de la réparer, et ensuite l'ordre de la démolir pour cause de péril imminent, sous l'offre de lui rembourser le prix d'acquisition', et lorsqu'il n'a pas attaqué les arrêtés qui ordonnent la démolition, peut-il rejeter l'indemnité offerte et réclamer en justice celle qui est accordée dans le cas D'EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE? (Rés. nég. )

DEMOISELLE LEBON, C. M. LE PRÉFET DE LA Seine. Deux décrets, l'un du 24 février et l'autre du 19 mai 1811, ont adopté les plans présentés pour la formation de la grande halle de Paris: il y est dit que toutes les maisons qui occupent le terrain destiné à l'agrandissement de cette halle seront achetées par la ville et démolies.

En exécution de ces décrets, M. le préfet de la Seine avait acquis plusieurs maisons, rue de la Fromagerie, qui ont été abattues par ses ordres. Il paraît que, par l'effet de la démolition de la maison n° 7, voisine de celle portant le no 5, et appartenant à la demoiselle Lebon, le pilier ou jambe étrière de celle-ci avait perdu son aplomb.

Par deux arrêtés successifs de M. le préfet de police, administrateur de la petite voierie, l'un du 12 novembre et l'autre du 26 décembre 1823, il fut enjoint à la demoiselle Lebon d'abord de faire démolir ou réparer sa maison, en obtenant dans ce dernier cas la permission nécessaire de l'autorité compétente, puis de la faire étayer. Dans l'intervalle, et le 11 dudit mois de décembre, la demoiselle Lebon s'était adressée à M. le préfet du département pour obtenir l'autorisation de la faire réparer. Mais, par arrêté du 19 janvier 1824, cette autorisation lui fut refusée, et il lui fut fait défense, sous les peines de droit, d'exécuter les travaux mentionnés dans sa pétition, par le motif que l'emplacement Occupé par sa maison devait être réuni à la voie publique, en exécution du plan arrêté pour la formation de la grande halle.

Le 28 du même mois, la demoiselle Lebon s'adressa de nouveau à M. le préfet de la Seine pour lui demander s'il entendait acquérir pour cause d'utilité publique sa maison; elle lui déclara que, dans le cas contraire, et attendu le refus qu'il lui avait fait de l'autoriser à la réparer, elle le ren-. dait garant et responsable des événements qui pouvaient ar

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