Page images
PDF
EPUB

COLAS BELCOUR, C. PERRIER DE SAINT-DENIS.

Le sieur Perrier de Saint-Denis avait vendu successivement, en 1813, en novembre et décembre 1818, et en 1819, quatre immeubles au sieur Colas Belcour. Plusieurs créanciers hypothécaires du vendeur étaient inscrits sur ces immeubles; l'acheteur, sans remplir les formalités prescrites par le code civil pour purger les hypothèques, paya comptant au sieur Perrier le prix des deux premières acquisitions.

Le 23 octobre 1823, les créanciers hypothécaires du sieur Perrier ont fait sommation au sieur Belcour de payer ou de délaisser

Le sieur Belcour a reconnu qu'il était tenu de payer une seconde fois le prix des deux premières ventes, et il a offert ce prix, ainsi que celui stipulé dans les deux derniers contrats; mais lorsqu'il a fallu régler l'ordre entre les créanciers, une contestation s'est élevée sur le point de savoir à qui devaient être attribués les intérêts du prix des deux dernières ventes.

Les créanciers hypothécaires prétendaient que ces intérets devaient être mis en distribution immobilière, attendu qu'ils étaient l'accessoire des immeubles, et que par suite ils devaient leur être dévolus,

Pour le sieur Belcour on soutenait au contraire que les créanciers hypothécaires n'avaient droit qu'aux intérêts postérieurs à la sommation de payer ou de délaisser ; que, quant aux intérêts qui avaient couru depuis le jour des deux derniers contrats jusqu'au jour de la sommation, ils étaient la propriété des créanciers chirographaires du sieur Perrier, d'après l'art. 2176 du cod. civ., aux termes duquel les fruits de l'immeuble hypothéqué ne sont dus par le tiers détenteur qu'à compter du jour de la sommation de payer ou de délaisser; que, le sieur Belcour étant créancier chirographaire du sieur Perrier pour le prix des deux premières ventes, il était fondé à retenir, en compensation, les intérêts du prix des deux dernières.

Jugement du tribunal civil d'Argenton qui rejette cette compensation, et ordonne que les intérêts du prix des deux dernières ventes seront distribués aux créanciers hypothécaires. Sur l'appel du siear Belcour, ce jugement a été réformé par l'arrêt suivant.

Du 13 avril 1826, ARRÊT de la cour royale de Caen, première chambre, M. Regnée président, MM. Delisle, Marc et Bayeux avocats, par lequel :

-

« LA COUR, — Sur les conclusions de M. Prefeln, avocat-général; — Considérant, en droit, qu'aux termes de l'art. 2176 du cod. civ., les fruits de l'immeuble hypothéqué ne sont dus par le tiers détenteur qu'à compter du jour de la sommation de payer ou de délaisser; qu'ainsi la déclaration passée par Colas Belcour, dans sa présentation à l'état d'ordre, qu'il était comptable, quant à ses deux derniers contrats d'acquisition, des intérêts du prix des objets par lui acquis, à compter du 17 décembre 1818, sur 3,000 fr., et du 24 juin 1819, sur 2,400 fr., prix du dernier contrat, ne peut avoir l'effet de changer la nature des intérêts antérieurs au 23 octobre 1823, époque de la première sommation de payer ou de délaisser; Que ces intérêts, n'étant pas atteints par les droits hypothécaires inscrits, ne pouvaient entrer en distribution immobilière, s'ils étaient réclamés par des créanciers chirographaires; qu'à la vérité, lors de l'état d'ordre du prix des immeubles acquis par Colas Belcourt, aucun créancier chirographaire de Perrier de Saint-Denis ne s'est présenté pour réclamer la distraction des intérêts antérieurs à la sommation de payer ou de délaisser; mais que cette distraction a été demandée par Colas Belcour, qui a prétendu qu'ayant payé à son vendeur le prix des deux premiers contrats de vente à lui consentis, et étant obligé de payer ce prix une seconde fois aux créanciers de sondit vendeur, il devait être admis à compenser contre partie du prix par lui payé, et jusqu'à concurrence les intérêts antérieurs à la sommation qui lui avait été faite de payer ou de délaisser ; Que, jusqu'au moment de la sommation de payer ou délaisser, faite à Colas Belcour, le 25 octobre 1823, ce dernier n'avait aucun titre positif pour prétendre s'approprier, par voie de compensation, les intérêts des prix de ses deux dernières acquisitions, puisque alors il n'avait éprouvé aucun trouble formel; mais qu'au moment même où la sommation lui a été faite, et lorsque, pour conserver ses acquêts, il a consenti à représenter leur prix aux créanciers hypothécaires de son vendeur, il est incontestable qu'il est devenu créancier de son vendeur du prix qu'il lui avait payé en contractant, et que, ce prix étant liquide et certain, la compensation s'en opérait de plein droit et jusqu'à concurrence, aux termes de l'art. 1299 du cod. civ., contre les intérêts du prix des dernières acquisitions dont il était redevable à sondit vendeur, qui, dans ce cas, n'aurait eu aucun moyen légal de le contraindre au paiement desdits intérêts; — Que, si Perrier de Saint-Denis n'avait aucun moyen valable à opposer à la compensation réclamée par Colas Belcour, ses créanciers hypothécaires n'ont pas plus de droits que lui, et ne peuvent faire mettre en distribution immobilière des deniers mobiliers qui ne sont pas soumis à l'exercice de leurs droits ; que dès lors le tribunal civil d'Argentan a eu tort de maintenir le projet d'ordre arrêté

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

par le juge-commissaire, quant aux intérêts du prix des deux contrats d'acquisition de Colas Belcour........ ; — Infirme. »

S.

COUR DE CASSATION.

Est-il nul l'exploit d'appel dont la copie présente, dans le parlant à..., une telle contradiction avec l'original, qu'on ne sait, en définitive, à qui cet exploit a été laissé? (Rés. aff.) Cod. de proc., art. 61 et 456.

PELOUSSE, C. VIÉ ET AUTRES.

[ocr errors]

Les biens du sieur Pelousse sont saisis à la requête des veuves Janson, et adjugés au sieur Vié le 26 août 1824. Le 14 septembre, Pelousse interjette appel du jugement d'adjudication vis-à-vis des poursuivantes, et le dénonce à l'adjudicataire le 6 octobre. Les dames Janson reprochent à l'exploit différentes irrégularités, et demandent qu'il soit déclaré nul.

Le 25 janvier 1825, arrêt de la cour de Limoges qui pro nonce effectivement cette nullité, « Attendu que tout exploit doit être laissé à la partie assignée; que, s'il est laissé à toute autre personne qu'à la partie assignée, il faut qu'il soit dit clairement que c'est pour elle; Attendu que, dans l'epèce, les copies sont terminées ainsi : Et j'ai, auxdites Jeanne Arnaud et Philippine Sabatier (ce sont les dames Janson'), ainsi qu'audit Jean Vié, dans leurs domiciles respectifs à Montréal, laissé à chacune la copie du présent, varlant à son fils Janson...., tandis que l'original porte, parlant à leurs personnes; - Qu'il est impossible, par suite, de savoir si la copie fut laissée à Janson fils, pour la dame Sabatier, la dame Arnaud, ou le sieur Vié; — Qu'il y a également une contradiction avec la copie laissée au sieur Vié et l'original de la signification, puisque dans l'une l'huissier déclare parler à l'épouse de Vié, et que dans l'original -il déclare parler à la personne de l'assigné........... »

Pourvoi en cassation de la part de Pelousse , pour fausse application des art. 61 et 456 du cod. de proc., en ce que, dans l'hypothèse où l'exploit du 14 septembre aurait été irrégulier, cette irrégularité se trouvait réparée par l'acte du 6 octobre. Mais ce moyen portait à faux, puisqu'il est

[ocr errors]

jugé en fait par l'arrêt attaqué que l'un n'était pas plus régulier que l'autre.

Du 9 novembre 1826, ARRÊT de la section des requêtes, M. Henrion président, M. Borel de Bretizel rapporteur, M. Odillon-Barrot avocat, par lequel :

« LA COUR, -Sur les conclusions conformes de M. de Vatimesnil, avocat-général; Attendu que l'art. 456 du cod. de proc. exige, à peine de nullité, que les actes d'appel contiennent assignation; que l'art. 61 du même code exige, sous la même peine, dans les exploits d'ajournement, la mention de la personne à laquelle la copie de l'exploit est laissée; Attendu que l'arrêt attaqué a constaté des irrégularités dans le parlant à des copies d'actes d'appel des 14 septembre et 6 octobre 1824, par conséquent l'omission de mention régulière conforme à l'art. 61 ci-dessus rappelé; qu'en admettant, ce qui peut être contesté, que le second exploit eût réparé partie des irrégularités du premier, le vice n'aurait été couvert qu'à l'égard de l'un des intimés; qu'il subsisterait à l'égard des deux avtres intimés sur l'appel, qui, comme poursuivants de la saisie immobilière qui a donné lieu au procès, étaient parties principales ; Attendu, d'ailleurs, que la copie du second exploit lui-même, du 6 octobre 1824, présentait une contradiction avec sa minute, quant à ladite mention de la personne à laquelle ledit exploit était laissé : d'où résulte qu'il a été fait, par l'arrêt attaqué, une juste application des art. 61 et 456 du cod. de proc.; REJETTE. >>

[ocr errors]

B.

COUR DE CASSATION.

Le fait d'un accusé d'avoir pris et signé un FAUX NOM dans un interrogatoire devant le juge d'instruction ne constitue-t-il ni crime ni délit? (Rés. aff.)

CARLIN, C. LE MINISTÈRE PUBlic.

Du 29 avril 1826, ARRÊT de la section criminelle, M. Portalis président, M. Ollivier rapporteur, par lequel :

-

КА

[ocr errors]

-

que

et

« LA COUR, Sur les conclusions de M. Fréteau, avocat-général; Après délibéré en la chambre du conseil ; Attendu le prévenu, arrêté et traduit devant le juge d'instruction pour subir un interrogatoire, n'est pas astreint par la loi à déclarer ce qui pourrait être à sa charge, que les mensonges qu'il emploie pour se disculper, rentrant, à son égard, dans le cercle d'une défense qu'il croit nécessaire, n'ont aucun caractère de criminalité; — Que, dans l'ancienne législation, où, lors de son interrogatoire, l'accusé prêtait serment de dire la vérité, l'on tenait pour constant que ses réponses mensongères ne lui faisaient point encourir la peine

du parjure;

Qu'a fortiori, dans notre législation actuelle, où l'accusé a été dispensé de prêter serment, le mensonge de ses réponses ne saurait constituer ni crime ni délit; - Que, par conséquent, si, dans l'objet de se disculper, il se permet, lors de son interrogatoire, de prendre un nom supposé, et confirme sa supposition de nom par sa signature, ce fait isolé he peut être rangé dans la classe des faux punis par l'art. 147 du cod. pén., ni dans celle d'aucun crime ou délit puni par la loi;

« Et attendu que, dans l'espèce, c'est lorsqu'il était arrêté et traduit devant le juge d'instruction que, dans son interrogatoire, le prévenu a ris et signé le faux nom de Puy-Fourcat ; · Que ce fait est le seul dont e jury l'ait déclaré coupable; — Et que, néanmoins, c'est à raison de ce seul fait, et malgré qu'il ne constitue ni crime ni délit, que la cour d'asises du département de la Moselle l'a condamné, par application de l'art. 147 du cod. pén.; en quoi cette cour a fait une fausse application de cet article; - Par ces motifs, CASSE et ANNULE l'arrêt de la cour d'assises du lépartement de la Moselle, du 7 mars dernier, qui condamne EtienneSéraphin-Joseph Carlin à la peine de cinq ans de travaux forcés et à la létrissure; - Et vu ensuite l'art. 429 du cod. d'inst, crim., dont le dernier alinéa porte : « Lorsque l'arrêt sera annulé parce que le fait qui aura x donné lieu à une condamnation se trouvera n'être pas un délit qualifié par la loi, le renvoi, s'il y a une partie civile, sera fait devant un tribunal de première instance autre que celui auquel aura appartenu le = juge d'instruction, et s'il n'y a pas de partie civile, aucun renvoi ne = sera prononcé.» ; Et attendu qu'outre l'absence de crime ou de délit, 1 n'y a pas de partie civile, la cour déclare qu'il n'y a lieu à aucun

-envoi. »

COUR DE CASSATION.

Peut-on prescrire au-delà du titre, quoiqu'on ne puisse pas prescrire contre le titre? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 2240. ET PARTICULIÈREMENT, une commune qui n'avait qu'un droit de pacage dans une forêt a-t-elle pu y acquérir par prescription un droit de glandée, malgré la clause insérée au titre constitutif QU'ELLE NE POURRA PRÉTENDRE AUCUN AUTRE DROIT, cette clause étant nulle, comme présentant une renonciation anticipée aux effets de la prescription? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 2220.

Dans les pays où les servitudes discontinues pouvaient s'acquérir par la possession immémoriale, les tribunaux peuvent-ils encore aujourd'hui admettre la preuve de cette possession, sans violer l'art. 691 du Cod. civ. (Rés. aff.)

« PreviousContinue »