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le supérieur pourrait avoir négligé de donner; ou qu'elle ne fût punie que d'un simple avertissement, lorsque, par sa nature et son caractère, elle pourrait mériter la censure, la suspension, peut-être même une autre peine; ou qu'enfin, pour procurer éventuellement l'application d'une peine de discipline nécessaire, l'avertissement fût donné dans cette prévoyance et sous le plus léger prétexte. Il est aisé de sentir combien un tel système est à la fois peu raisonnable et destructif de toute discipline.

« Si la loi ( ajoutait cette circulaire) a voulu réprimer les simples écarts de conduite, l'oubli momentané qu'un magistrat ferait de sa propre dignité, elle a voulu, à plus forte raison, réprimer et punir les fautes sérieuses par l'application immédiate des peines de discipline. »

Ainsi la cour aurait dû faire droit au réquisitoire du ministère public, puisque la mesure préalable de l'avertissement n'était pas applicable dans cette circonstance.

En second lieu, le ministère public, lorsqu'il eroit devoir déférer à l'examen des corps judiciaires la conduite privée ou publique de l'un de leurs membres, leur fait principalement connaître les faits qu'il a recueillis, puisque c'est aux tribunaux et aux cours qu'est réservé le soin de les caractériser et de statuer selon leur nature et leur gravité.

S'ils n'y voient qu'un de ces torts qui peuvent être suffisamment punis par l'application d'une peine de discipline, là s'arrête l'exercice de leur autorité. Si, au contraire, les reproches allégués contre un magistrat leur paraissent constituer un délit ou un crime, en ordonnant qu'il sera procédé à son égard conformément au liv. 2, tit. 4, chap. 3, du Cod. d'inst. crim., ils doivent aussi le suspendre de ses fonctions, en vertu de l'art. 50 de la loi du 20 avril 1810, surtout quand la partie publique le requiert, cas où il serait peu convenable que l'exercice lui en fût laissé, tandis qu'on reconnaîtrait qu'il y a compromis assez gravement la dignité de son caractère pour devenir l'objet d'une poursuite extraor

dinaire.

Ce considéré, il plaise à la cour, etc. Fait au parquet, ce 18 février 1826.* Signé MOURRE. Du 25 février 1826, ARRET de la section criminelle, M. Portalis président, M. Ollivier rapporteur, par lequel ;

« LA COUR, — Sur les conclusions de M. Laplagne-Barris, avocatgénéral ; — Statuant sur le réquisitoire du procureur général en la cour; Adoptant les motifs du réquisitoire, CASSE et ANNULE, dans l'intérêt de la loi, la décision rendue, en matière de discipline, par la cour royale de Toulouse, le 7 janvîer dernier, à l'égard du sieur***, président du tribunal de première instance de..... >>

COUR DE CASSATION.

L'individu accusé de banqueroute frauduleuse, qui ne s'est pas pourvu dans le délai prescrit par l'art. 295 du Cod. d'inst. crim. contre l'arrêt qui prononce son renvoi devant la cour d'assises, est-il recevable à soutenir plus tard qu'il n'était pas en état de faillite (Rés. nég.)

Le seulfait de la cessation de ses paiements, de la part d'un

négociant, le constitue-t-il en état de faillite, quelle que puisse être la cause qui y ait donné lieu. (Rés. aff.) Cod. de comm., art. 437.

Lorsqu'une des questions soumises aux jurés présentait

comme COLLUSOIRE une dette passive du failli, et qu'ils y ont répondu affirmativement, ce dernier est-il fondé à contester leur déclaration, comme étant contraire à ce qui résulte de ses livres.....? Entre-t-il dans les attributions de la cour de cassation de rechercher les éléments de cette déclaration? (Rés. nég.) Cod. d'inst., art. 342. La disposition de l'art. 557 du Cod. d'inst. crim., relative à la position des questions résultant de l'acte d'accusation, est-elle seulement indicative de la manière dont ces questions doivent être posées, et non prescrite à peine de nullité? (Rés. aff.)

Les circonstances non mentionnées dans l'arrêt de renvoi ni dans l'acte d'accusation, qui sont soumises aux jurés, sont-elles toujours censées résulter des débats, quoique cela ne soit pas exprimé? (Rés. aff.) (1) L'accusé est-il fondé à arguer d'irrégularité une question ayant pour objet l'existence d'une dette cOLLUSOIRE, et dans laquelle le nom du créancier FICTIF n'a pas été énoncé,

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(1) Voy. ce recueil, tome 1er de 1816, p. 185, et tom. 1er de 1826, p. 496.

lorsqu'il se trouve désigné dans l'acte d'accusation, dont la supposition de ce créancier fait l'une des principales bases, et lorsqu'il a été entendu comme témoin dans les débats? (Rés. nég. )

Lorsqu'une question alternative a été posée, les jurés peuvent-ils adopter cumulativement l'une et l'autre hypothèses, si elles ne présentent rien de contraire, sans étre astreints à opter pour l'une d'elles ? (Rés. aff.)

Le défaut d'audition de Tovsdes témoins, tant à charge qu'à décharge, est-il une cause de nullité de la procédure, lorsque l'accusé n'a point demandé qu'ils fussent rovs entendus? (Rés. nég.) Cod. d'inst., art. 315.

L'erreur existant dans la liste des jurés notifiée à l'accusé, relativement à leurs prénoms et à la désignation du lieu de leur domicile, entraîne-t-elle la nullité de cette notification, lorsqu'ils y ont été désignés de manière à ce que l'accusé pút exercer ses récusations en connaisance de cause? (Rés. nég.) Cod. d'inst., art. 594. (1)

Lorsque les réponses des jurés aux questions qui leur sont soumises présentent entre elles des contradictions telles qu'elles se détruisent les unes par les autres,J a-t-il lieu à prononcer la nullité de leur déclaration, et à casser l'arrêt qui en a été la conséquence ? (Rés. aff. )

DERMENNON-ANNET, C. LE MInistère public.

Dermennon-Annet, accusé de banqueroute frauduleuse, fut traduit devant la cour d'assises du département de la Seine. Il y fut déclaré, par le jury, coupable de ce crime, et il fut condamné à la peine des travaux forcés à perpétuité, par arrêt du 30 décembre 1825, attendu qu'il était en état de récidive.

Dermennon-Annet s'est pourvu en cassation; il a proposé quatre moyens à l'appui de son pourvoi. Il a soutenu, en premier lieu, que les faits qui lui étaient imputés avaient été mal à propos qualifiés crimes; que la cessation des paiements d'un négociant ne le constituaient en état de faillite que lorsqu'elle avait lieu par sa faute ou par son imprudence, mais non lorsqu'elle était occasionée par une force majeure

(1) Voy. ce recueil, tom. 3 de 1817, p. 30g.

et indépendante de sa volonté; que, s'il avait été obligé de suspendre les siens, il fallait en voir la cause dans la circonstance de son arrestation, étrangère à son commerce et ordonnée par mesure administrative, par laquelle il avait été mis dans l'impuissance de vaquer à ses affaires et d'aviser aux moyens de satisfaire à ses engagements; qu'on ne pouvait donc lui imputer raisonnablement le retard qu'il y avait apporté; que l'art. 457 du Cod. de comm. ne lui était point applicable, puisqu'il n'était point en faute par son fait; et que, s'il ne pouvait être considéré comme étant en état de faillite, il était conséquent d'admettre qu'il n'avait pu être poursuivi comme banqueroutier.

Son second moyen, qui se divisait en cinq parties, consistait à dire 1o que, dans la réponse à la troisième question qui leur avait été soumise, les jurés avaient, contrairement à la vérité du fait constaté par ses livres, déclaré collusoire, comme ayant été consentie au profit d'un créancier fictif, une dette passive dont l'existence remontait à une époque antérieure à l'établissement de son commerce;

2o Que la cour d'assises était contrevenue aux art. 337 et 338 du Cod. d'inst. crim. en ajoutant à la troisième question une circonstance tendant à établir l'existence de la simulation de cette dette, et qu'il soutenait ne résulter ni de l'acte d'accusation, ni des débats qui avaient eu lieu en jugement; -3° Que cette troisième question avait été d'ailleurs présentée d'une manière imcomplète, puisqu'elle n'indiquait pas le nom du prétendu créancier fictif; et qu'elle manquait d'exactitude, puisqu'on y assignait à la dette une date postérieure à l'époque où il était supposé être en état de faillite, tandis qu'il était prouvé par ses livres qu'il l'avait contractée avant qu'il se mélât du commerce; 4° Que, la même question offrant une alternative aux jurés, ceux-ci auraient dû opter pour l'une ou l'autre hypothèse; et qu'au lieu de se déterminer pour l'une ou pour l'autre, ainsi que cela leur était demandé, ils les avaient adoptées toutes les deux dans leur réponse; 5o Qu'il existait une contradiction manifeste entre la seconde et la quatrième réponse du jury, comparées à la troisième, puisqu'il résulterait de celle-ci qu'il avait supposé une dette passive avec un créancier fictif, en faisant des écritures simulées, tandis qu'il résulte des deux premières que ses livres

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présentent sa véritable situation active et passive, et qu'il a justifié de l'emploi de toutes ses recettes.

Il soutenait, en troisième lieu, qu'il avait été contrevenu à l'art. 315 du Cod. d'inst. crim., qui veut, disait-il, qu'on entende tous les témoins assignés, soit à la requête du ministère public, soit à la requête de la partie civile, soit à celle de l'accusé; et il faisait résulter cette contravention de ce que deux témoins à charge et trois témoins à décharge n'avaient. pas été entendus dans les débats.

Enfin, il prétendait, en quatrième lieu, qu'il avait été privé de la faculté de prendre à l'égard des jurés les renseignements nécessaires pour exercer ses récusations en connaissance de cause, parce que la liste qui lui avait été notifiée contenait des erreurs dans l'énonciation de leurs prénoms, et qu'elle n'indiquait ni la ville où ils avaient leur domicile, ni la rue qu'ils habitaient.

Le 18 mars 1826, ARRÊT de la cour de cassation, section criminelle, M. Portalis président, M. de Bernard rapporteur, M. Isambert avocat, par lequel :

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« LA COUR, Sur les conclusions de M. Fréteau de Pény, avocatgénéral ; — Attendu, sur le premier moyen, que, l'arrêt de renvoi et l'acte d'accusation ayant considéré le demandeur comme étant en faillite, et que, ne s'étant pas pourvu dans le délai de l'art. 296 du Cod. d'inst. crim., quoique dûment averti, il n'y est plus recevable; Que, d'ailleurs, le fait de la cessation de ses paiements l'a constitué en état de faillite, quelle qu'en fut la cause, l'art. 457 du Cod. de comm. n'en précisant aucune; « Attendu, sur la première partie du deuxième moyen, que la cour d'assises, en qualifiant de collusoire la dette passive dont il s'agit dans la troisième question soumise aux jurés, s'est conformée à l'arrêt de renvoi, à l'acte d'accusation, et à l'art. 337 du Cod. d'instr. crim.; que les jurés l'ont répondue affirmativement, et qu'il n'entre pas dans les attributions de la cour de rechercher les éléments de leur déclaration; - Attendu, sur la seconde partic dudit moyen, que la disposition de l'art. 337 dudit Code n'est point prescrite à peine de nullité; qu'elle n'est qu'indicative de la manière dont la question peut être posée ; que les circonstances non mentionnées dans l'arrêt de renvoi, ni dans l'acte d'accusation, qui sont soumises au jury, sont présumées être résultées des débats; qu'enfin la troisième question, telle qu'elle a été proposée aux jurés, a été littéralement conforme au § 4 de l'art. 593 du Cod. de comm., et que, dans une question ainsi posée, il ne peut y avoir aucune irrégularité; Attendu, sur la troisième partie du même moyen, que le nom du créancier déclaré fictif était désigné dans l'acte d'accusation; qu'il fut cité pour les débats, et

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