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Mais la sagesse des nations nous remémore à temps un mot trivial mais profond, que nous n'avons peut-être pas assez écouté... Qui trop embrasse mal étreint!!! -Aussi bien avons-nous peut-être déjà trop abusé de votre bienveillante attention en vous développant un travail dont nous reconnaissons tout l'incomplet. Nous n'avons pas eu la prétention de poser des principes indiscutables ou éternels. Tout au plus voudrions-nous provoquer l'attention et faire sortir notre arme d'un marasme dangereux pour elle et pour toute l'armée.

Notre société, messieurs, a ce noble but et elle ne doit pas le méconnaître; luttons donc sans nous laisser décourager par les difficultés matérielles, et méditons ces grandes paroles du général LarocheAymon, qui semblent avoir été écrites pour nous:

<< La cavalerie est l'arme du moment, et un petit nombre de cava<<liers, donnant à propos, vaut mieux qu'un plus grand nombre << dont ont on ne peut disposer que difficilement et surtout tardive

<< ment. >>

Pour nous, nous ne pouvons mieux terminer ce long exposé qu'en nous assimilant ces belles paroles du général de Brack: « Le but de <«< toute notre ambition sera atteint si nos observations sont de quel<«< que utilité à une arme peu généralement comprise et à laquelle << nous consacrons nos faibles ressources et notre cœur. »

Fernand D'ALBIS,

Sous-lieutenant dans la compagnie de dragons n⚫ 17.

Lausanne, 27 novembre 1873.

Postface.

Après la lecture de ce travail il s'est engagé une discussion dont le résultat, loin de nous décourager, nous engage, au contraire, à maintenir nos conclusions et notre projet, ne fût-ce qu'à titre d'essai et en quelque sorte provisoire.

Il ressort en effet de cette discussion que nous sommes dans la position suivante, position pénible et équivoque s'il en fut: D'une part il faut absolument faire quelque chose, et le plus vite possible, pour nos remontes. D'un côté l'introduction d'une masse considérable de chevaux étrangers paraît fort difficile pour de nombreuses raisons; d'un autre l'impulsion donnée à l'élevage, de manière à nous permettre de nous suffire à nous-mêmes, est bien certainement le noeud gordien de la situation. Mais en supposant même que l'on s'en occupe immédiatement, il faudra plusieurs années pour arriver à un commencement de résultat, et pendant ce temps nous en serons toujours au même point, et nous sommes dès lors condamnés à un statu quo fâcheux et qui n'a déjà que trop duré.

Or, pour ces diverses raisons et aussi à titre d'essai de ce que peut procurer l'initiative privée soutenue et encouragée par l'Etat, nous demandons avec instance que notre projet soit pris en sérieuse considération et que l'on essaye, ne fût-ce que pendant quelques années et provisoirement, de le mettre en pratique.

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No 7.

SOMMAIRE.

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Le 19 avril.

Lausanne, le 11 Avril 1874.

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XIXe Année.

Hygiène militaire, par L. Rouge, médecin de division. Suite.) De l'économie des forces et de la discipline du feu, par le major-général Bestagno. (Fin.) Bibliographie. Pajol, par le général Pajol ; Zwei- oder dreigliederig, von W. von Scherf, major. Nouvelles et chronique

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LE 19 AVRIL.

Fidèle à son programme, la Revue militaire reste en dehors des débats politiques où la confraternité d'armes, ce bien précieux de toute armée, risquerait de s'ébrécher. Nous ne parlerons donc du vote du 19 avril que pour donner une analyse impartiale, une sorte de bilan statisque des articles militaires, afin que chacun y voie plus clair et se décide par ses propres appréciations.

Les nouvelles dispositions militaires sont contenues surtout aux articles 12, 18, 19, 20, 21, 22, 30, 36 et 1 a des transitoires.

L'art. 12 interdit, dans l'armée fédérale, le port de décorations ou titres de gouvernements étrangers et l'acceptation de distinctions de ce genre à tout officier, sous-officier et soldat. C'est clair et net. Il faudra peut-être encore décider, par le règlement, si les titres académiques de l'étranger sont aussi compris dans cette interdiction.

Les articles 18-22 posent les bases organiques proprement dites. En plusieurs parties de leur texte ils sont contradictoires ou obscurs. Il en pourra sortir des interprétations fort diverses, des contestations peut-être; mais l'accord sera mis par la législation fédérale, seule chargée de prononcer sur les points douteux.

Pour le moment deux grands principes généraux paraissent hors de discussion:

1o Les lois organiques émanant de la Confédération, d'elle seule; principe absolu qui n'est soumis à aucune restriction.

2o Ces lois sont exécutées dans les cantons par les autorités cantonales, sous la surveillance de la Confédération et dans des limites qui seront fixées par la législation fédérale.

A côté de cette double restriction, deux exceptions formelles sont apportées à l'exécution par les cantons des lois fédérales, à savoir : a) L'instruction de toutes les troupes est affaire exclusivement fédérale. L'autorité centrale aura en même temps le commandement et l'inspection des troupes à l'instruction; elle prescrira le lieu et la durée des écoles, le nombre des participants, la tenue des hommes et des corps, l'effectif de ceux-ci, le matériel, le drapeau, les accessoires, les indemnités, la solde, etc., par ses propres fonctionnaires et officiers. Restera à savoir si elle appellera nominativement les hommes à ces services, ou par l'intermédiaire des cantons. Les deux modes étant déjà en usage en ce qui concerne les officiers, ils seront sans doute maintenus.

b) L'armement devient, comme l'instruction, affaire exclusivement

fédérale. Il se divise en deux catégories: l'armement devant rester en mains du soldat, fusils, carabines, etc..., sous le contrôle des autorités fédérales; et l'armement qui ne reste pas en mains du soldat, canons, caissons, outils divers, qui seront à la seule disposition de l'autorité fédérale dans les magasins et arsenaux à sa convenance.

Mais si l'instruction et l'armement sont exceptés de l'exécution des lois fédérales par les cantons, les limites apportées par la future législation fédérale à la part restante de fonctions exécutives des cantons sont limitées à leur tour par deux exceptions: elles ne peuvent englober ni la fourniture ni l'entretien de l'habillement et de l'équipement, qui restent dans la compétence cantonale.

Les corps de troupes seront formés de troupes d'un même canton, à moins que des considérations militaires ne s'y opposent. Pour la composition de ces corps, le maintien de leur effectif, les nominations et promotions d'officiers, les cantons auront à suivre les prescriptions générales qui leur seront transmises par la Confédération. » Ces prescriptions générales seront-elles précisées par la législation ou laissées à la compétence de l'administration supérieure, c'est ce qui reste à déterminer.

Enfin tous les immeubles ayant une destination militaire, casernes, arsenaux, magasins, châteaux-forts, places d'armes, stands, etc., peuvent passer à la Confédération moyennant indemnité.

Les articles 30, 36 et 1er transitoire déterminent les nouvelles ressources financières de l'autorité fédérale par le moyen des péages et des postes, dont les recettes ne seront plus réparties aux cantons.

HYGIÈNE MILITAIRE

par le Dr Rouge, médecin de division. (Suite.)

VI. Soins de propreté. Bains.

Il est de toute nécessité que le soldat soit propre. Il le faut dans son intérêt particulier; il le faut dans l'intérêt des autres.

Exposé par la nature de ses occupations à se salir beaucoup, transpirant sur les champs de manoeuvre ou dans les marches sur des routes poudreuses, il est urgent qu'il se livre à de fréquentes et larges ablutions.

Le défaut de soins de propreté se trahit dans les dortoirs par une odeur désagréable, par des émanations nuisibles à la santé générale. Le soldat doit être propre non seulement sur l'uniforme, mais dessous, mais sur la peau.

Il faut qu'un ordre exemplaire règne aussi dans les locaux qu'il occupe; que tout y soit lavé, frotté, balayé. Il suffit d'avoir vu une de nos casernes pour se faire une idée de la négligence qui règne à cet égard. Et cependant il ne s'agit que d'une affaire d'ordonnance et de règlement. Pourquoi en effet, ainsi qu'on l'a dit ailleurs, une caserne ne serait-elle pas tenue aussi proprement qu'un navire? Pourquoi les corridors, les parquets des salles, le mobilier ne seraient-ils pas entretenus avec le soin qu'y mettent les marins sur les vaisseaux? Cette simple et importante question peut être bien vite résolue par

un mot de l'autorité, par un ordre des chefs. Dans les écuries on fait un luxe de propreté, et l'on a raison; de plus on étrille, on brosse,, on lisse les chevaux sous l'inspection d'un sous-officier, et personne ne surveille la propreté personnelle des hommes de la troupe.

Pour chacun la propreté est la condition indispensable de la santé ; elle l'est surtout dans la vie en commun, dans cette promiscuité permanente des soldats sur les rangs, sous la tente, au corps de garde, dans les dortoirs de la caserne. Il serait à désirer que chaque soldat commençât et finît sa journée en se lavant à fond avec une éponge et du savon. Il faudrait à cet effet pourvoir les casernes de chambres de toilette placées en communication directe et immédiate avec le dortoir. Outre que la santé, la vigueur du corps se trouveraient bien de cette manière de faire, on éviterait cette odeur désagréable des salles, on se mettrait en garde contre l'extension des maladies de la peau, et l'on donnerait au soldat des habitudes qu'il garderait dans la vie civile.

C'est aussi pour des motifs de propreté que la troupe doit avoir les cheveux coupés courts; nous ne sommes plus au temps où le guerrier romain, portant son casque suspendu à l'épaule, n'avait que ceux-ci pour coiffure; je ne comprends pas les chefs qui tolèrent dans les rangs des militaires étalant des chevelures graisseuses sur le col de leur uniforme. Ces soldats devraient être immédiatement livrés aux ciseaux du frater.

Le règlement du service intérieur prescrit que le soldat fasse son lit dès qu'il est levé; c'est une faute; il serait infiniment préférable qu'il aérât sa couche en la laissant découverte jusqu'au retour de l'exercice du matin; la transpiration, les émanations du corps ne seraient point enfermées dans les draps qui sécheraient en s'aérant. Il serait bon que la literie fût portée dehors, exposée à l'air au moins une fois par semaine si le temps le permet. Les draps doivent être renouvelés tous les quinze jours en été, tous les mois en hiver. Chaque samedi les couvertures de lits et les effets d'habillement doivent être battus hors de la caserne sous la surveillance du chef de chambrée. Le linge sale est remis chaque semaine au sous-officier qui le donne à la blanchisseuse.

Une fois par semaine on lavera les tables, les bancs et les planchers. Chaque jour, les cours, les salles, les corridors, l'escalier seront balayés avec le plus grand soin.

Je voudrais que les lieux d'aisance fussent si bien installés, si bien entretenus et si bien surveillés, que personne n'osât et ne pût les salir. Qu'on fasse diparaître ces immondes cloaques, ces réduits infects, ces urinoirs fétides, et il aura été fait déjà beaucoup pour la salubrité des casernes, pour le confort et pour la santé du soldat. (') Nous sommes excessivement arriérés pour tout ce qui concerne les soins de propreté de la troupe. Les hommes sont obligés d'allér faire leur toilette à la fontaine, en plein air, chaque matin, par tous

() N'est-il pas indigne, par exemple, de voir à Lausanne à côté de la caserne No 1 des urinoirs pestilentiels dont quatre largement établis et sales en proportion de leur étendue, occupent les quatre coins de la porte St. Maire, seule issue, unique accès d'un quartier si fréquenté!

les temps. Ce système est déplorable, il importe qu'il soit abandonné, et qu'on établisse, ainsi que je l'ai dit, des cabinets abondamment pourvus d'eau, de bassins pour les bains de pieds, de robinets, de savon, comme cela se fait en Angleterre. En Hollande on fait encore mieux. C'est ainsi que dans la caserne de Kampen il y a 28 cabinets de bains séparés pour les hommes de la garnison. Les soldats y sont conduits chaque semaine ; la durée du bain est de demi-heure. L'installation de l'établissement a couté 6000 fr., et chaque bain revient à un demi-centime. (1)

Il faudrait imiter cet exemple. Chaque caserne devrait avoir une salle de bains; il serait facile d'utiliser dans ce but la chaleur perdue des fourneaux de cuisine pour avoir de l'eau chaude ou de la vapeur; tous les hommes pourraient ainsi se laver successivement par escouades dans un local chauffé. Il existe à Paris une caserne dans laquelle sont installés six bassins de 80 centimètres de largeur sur 60 centimètres de profondeur; dix litres d'eau à 100° mêlés à 20 litres d'eau froide donnent un bain chaud de 30°. Le baigneur se plonge jusqu'à la ceinture et se lave le corps avec une grosse éponge. Les hommes du bataillon se suivent de vingt minutes en vingt minutes; l'escouade qui arrive vide les bains et remplit les bassins; en 24 heures, on donne vingt-six bains. Les six bassins ont coûté 78 francs; chaque bain revient à deux centimes par homme. Ce qui est encore plus économique, c'est l'installation de piscines pour 80 à 100 hommes, à raison de 35 à 48 litres d'eau par personne; on voit ce système de lavage en activité dans quelques casernes anglaises.

Dans la belle saison, les soldats profiteront du voisinage d'un lac ou d'un cours d'eau pour se baigner. (2)

La troupe sera conduite au bain par un officier accompagné d'un médecin. Le meilleur moment de la journée pour cela, c'est le matin avant déjeûner, ou le soir un peu avant le coucher du soleil. Les soldats ne se baigneront jamais que trois ou quatre heures après le repas. La durée du bain ne doit pas dépasser un quart-d'heure.

Pour que l'eau soit agréable, il faut que la température oscille entre 19° et 25° centigrades. La température de nos rivières varie de 0° à 28°, les torrents qui sortent des glaciers ont de 10 à 5o; il ne faudra pas les utiliser. D'une manière générale, il n'y a que les hommes robustes qui puissent supporter un bain d'une température inférieure à 18o, et cela seulement pour quelques courts instants.

Les bains d'eau courante paraissent toujours plus froids que ceux pris dans un lac, et, toutes choses égales d'ailleurs, plus les eaux sont rapides, plus elles saisissent le baigneur. M. Herpin a fait de ce sujet une singulière expérience. On sait qu'à Genève les bains du lac sont tempérés, tandis que ceux du Rhône au-dessous de la ville sont redoutés par leur froidure; or la différence entre les deux températures

(1) Le règlement de notre Hôpital cantonal exige que chaque malade prenne un bain à son arrivée, si la maladie dont il affecté ne le contre indique pas; nous voyons tous les jours la sagesse de cette mesure, qui trouverait une application aussi justifiée à chaque entrée au service.

(*) Jamais on ne pense à l'école d'instruction de Lausanne à conduire les recrues au moins une fois au lac en été.

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