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Il est important que la nation en soit convaincue, et Votre Majesté jugera sans doute à propos de mettre sous les yeux des deux Chambres toutes les pièces relatives à notre situation. Eclairées sur la nature des périls dont la France est menacée, leur patriotisme et leur énergique sagesse répondront à l'appel qui le leur aura fait connaître elles sentiront qu'il faut au gouvernement de grandes ressources en tout genre; elles n'hésiteront pas à les lui donner. La France veut être indépendante; la France restera indépendante, et l'union sincère du peuple avec le monarque formera autour de la patrie un mur d'airain contre lequel viendront se briser tous les efforts des ennemis de son bonheur, de sa liberté, de l'industrie nationale et de l'honneur français. >>

PIÈCES CITÉES duns ces deux rapports.

(Voyez, au § 1er, la Déclaration du Congrès en date du 13 mars, le Rapport du Conseil d'état sur cette Déclaration et la Lettre de Napoléon aux souverains.)

-

TRAITÉ DU 25 MARS 1815, entre les puissances alliées; avec les NOTES du ministre des affaires étrangères de l'Empire français, Caulaincourt, duc de Vicence. (Pour les traités de Chaumont et du 30 mai 1814, voyez tome xx, pages 468 et 547.

«S. M. l'empereur d'Autriche, roi de Hongrie et de Bohême, et S. M. le roi du royaume uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, ayant pris en considération les suites que l'invasion en France de Napoléon Bonaparte et la situation actuelle du royaume peuvent avoir pour la sûreté de l'Europe, ont résolu, d'un commun accord avec S. M. l'empereur de toutes les Russies et S. M. le roi de Prusse, d'appliquer à cette circonstance importante les principes consacrés par le traité de Chaumont (1). En conséquence, ils sont convenus de

(1)« Le traité de Chaumont est devenu comme une sorte d'arsenal mystérieux, où les cabinets, jaloux du bonheur de la France, vont faire choix des armes dont ils ont besoin selon le moment et les circonstances. En faisant retentir sans cesse le nom d'une alliance qui pût, à l'époque de sa conclusion, avoir un objet justifié par la position des divers états, on en a complètement dénaturé le fond, et maintenant,

renouveler par un traité solennel, signé séparément par chacune des quatre puissances avec chacune des trois autres, l'engagement de préserver contre toute atteinte l'ordre de choses si heureusement rétabli en Europe, et de déterminer les moyens les plus efficaces de mettre cet engagement à exécution, ainsi que de lui donner, dans les circonstances présentes, toute l'extension qu'elles réclament impérieusement. » A cet effet, etc.

(1) Art. 1. Les hautes puissances contractantes ci-dessus dénommées s'engagent solennellement à réunir les moyens de leurs états respectifs pour maintenir dans toute leur intégrité les conditions du traité de paix conclu à Paris

à l'aide d'une interprétation forcée, on trouve dans la teneur de ce traité le contraire de l'esprit de ses dispositions primitives. Son but dans le principe devait être de réduire la France à ses anciennes frontières. Le but a été atteint. Aujourd'hui, sous le même prétexte, on arme l'Europe pour attaquer la France jusque dans le cercle où on l'a renfermée ; tandis que d'abord il ne s'agissait que de forer l'empereur Napoléon à se contenter de l'ancienne France, il s'agit à présent d'empêcher l'ancienne France de conserver pour souverain l'empereur Napoléon. On ne se propose rien moins que d'obliger la nation française à recevoir un roi d'une main étrangère, et, tout en prétendant qu'on ne veut combattre que son chef, on tend à l'affaiblir, à l'épuiser et à la démcmbrer, pour en placer ensuite les lambeaux échappés au partage sous le sceptre d'un prince pusillanime qui, sacriɓant tout intérêt national aux calculs envieux de peuples rivaux, ne rougisse pas de régner sur le squelette de la patrie. Telle est en 1815 la tendance avouée d'un traité nouveau auquel le traité de Chaumont est censé servir de base, quoiqu'il y ait une opposition absolue entre les principes de l'un et de l'autre. »

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(1) L'empereur Napoléon, étant rétabli par la nation française sur le trône de France, n'a point, dans l'ordre politique, d'autre position que celle de la France même. C'est une hypothèse gratuitement inimicale que de prêter à sa volonté individuelle des desseins contre lesquels il soit nécessaire de se prémunir. Son premier soin a été de faire connaître qu'il désirait le maintien de l'état de paix tel qu'il a été réglé par le traité de Paris. Quant aux stipulations signées au Congrès de Vienne, il est notoire qu'en aucun temps elles ne pouvaient être agréables au gouvernement français : elles ont blessé même le ministère royal, malgré sa disposition à la condescendance la plus étendue. On juge aisément qu'elles ne peuvent pas aujourd'hui plaire davantage; mais enfin l'empereur, comme le dernier gouvernement, sans y donner son approbation, n'entend point faire la guerre pour s'y opposer: peut-on lui demander plus que de s'en tenir aux déclarations des plénipotentiaires de France au Congrès ?

» La question ici change de nature; elle se complique, et l'on confond ensemble deux objets très distincts. Le sens du traité de Chaumont et celui de la déclaration du 13 mars n'ont aucun rapport ensemble, et c'est un jeu d'esprit d'une inconséquence audacieusement

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le 30 mai 1814, ainsi que les stipulations arrêtées et signées au Congrès de Vienne dans le but de compléter les dispositions de ce traité, de les garantir contre toute atteinte, et particulièrement contre les desseins de Napoléon Bonaparte. » A cet effet, elles s'engagent à diriger, si le cas l'exigeait, et dans le sens de la déclaration du 13 mars dernier, de concert et de commun accord, tous leurs efforts contre lui et contre tous ceux qui se seraient déjà ralliés à sa faction, ou s'y réuniraient dans la suite, afin de le forcer à se désister de ses projets, et de le mettre hors d'état de troubler à l'avenir la tranquillité et la paix générale, sous la protection de laquelle les droits, la liberté et l'indépendance des nations venaient d'être placés et assurés.

(1) » 2. Quoiqu'un but aussi grand et aussi bienfaisant ne permette pas qu'on mesure les moyens destinés pour l'atteindre, et que les hautes parties contractantes soient résolues d'y consacrer tous ceux dont, d'après leur situation respective, elles peuvent disposer, elles sont néanmoins convenues de tenir constamment en campagne chacune cent cinquante mille hommes au complet, y compris pour le moins la proportion d'un dixième de cavalerie, et une juste proportion d'artillerie, sans compter les garnisons, et de les employer activement et de concert contre l'ennemi com

mun.

(2)- 3. Les hautes parties contractantes s'engagent réci

réfléchie que de faire sortir d'un acte essentiellement défensif le texte de la nécessité d'une agression. La dernière partie de l'article, en rappelant la déclaration du 13 mars, en reproduit le langage. Selon cette grammaire nouvelle, la France est à Gand, et les vingt-huit millions d'habitans qui couvrent le sol français sont une faction! Que répondre à de pareils argumens? >>

(1)« Il y a ici une distinction à faire, et, cette distinction admise, toutes les opinions seront d'accord. Si, comme on cherche à le faire croire, l'empereur Napoléon voulait bouleverser le monde, le but de la ligue que l'on forme contre lui serait grand et bienfaisant; tous les efforts pour le repousser seraient légitimes: mais si, comme il en donne l'assurance solennelle, il n'a d'autre désir que de conserver la paix ; si la France, comme lui, ne peut avoir d'autre intérêt ni d'autre vœu, il faut supposer aux armemens des puissances un but moins grand, moins bienfaisant que celui qu'on leur prête, puisqu'il n'y aurait ni grandeur ni bienfaisance à conspirer l'asservissement ou le démeinbrement d'une nation dont l'immobilité ne fournit aucun prétexte aux immenses préparatifs dirigés contre elle. »

(2) « Enfin voilà de la franchise! Les puissances contractantes pouvaient s'abstenir d'entortiller leurs intentions, dans les deux premiers articles pour les mettre à nu dans le troisième. De toutes manières, ce

proquement à ne poser les armes que d'un commun accord, et avant que l'objet de la guerre, désigné dans l'article 1er du présent traité, n'ait été atteint, et tant que Bonaparte ne sera pas mis absolument hors de possibilité d'exciter des troubles et de renouveler ses tentatives pour s'emparer du pouvoir suprême en France.

(1) — » 4. Le présent traité étant principalement applicable aux circonstances présentes, les stipulations du traité de Chaumont, et nommément celles contenues dans l'article 16, auront de nouveau toute leur force et vigueur aussitôt que le but actuel aura été atteint.

» 5. Tout ce qui est relatif au commandement des armées combinées, aux subsistances, etc., sera réglé par une convention particulière.

» 6. Les hautes parties contractantes auront la faculté d'accréditer respectivement, auprès des généraux commandant leurs armées, des officiers qui auront la liberté de correspondre avec leurs gouvernemens pour les informer des événemens militaires et de tout ce qui est relatif aux opérations des armées.

(2) » 7. Les

engagemens stipulés par le présent traité ayant pour but le maintien de la paix générale, les hautes parties contractantes conviennent entre elles d'inviter toutes les puissances de l'Europe à y accéder.

(3)

- » 8. Le présent traité étant uniquement dirigé dans

troisième article arrive trop tard. La prétention des alliés est d'empêcher P'empereur Napoléon de s'emparer en France du pouvoir suprême. Même en adoptant leur logique dans toute sa plénitude, l'acte est incomplet; il manque ici une clause de prévoyance: il fallait prévoir le cas où ce qu'elles veulent prévenir serait déjà consommé, il fallait raisonner dans cette supposition. A la vérité, la supposition cût été inexacte, et les faits en ont déjà fourni la preuve. Il est une autre chance à laquelle on n'a pas songé ; c'était celle où, par un mouvement universel de la population française, le pouvoir suprême se retrouverait tout d'un coup entre les mains de l'empereur. C'est précisément ce qui est arrivé. S'il est bien démontré qu'il est impossible qu'un seul homme ait conquis une grande nation, il faut bien convenir que c'est cette grande nation qui a reconquis son défenseur et son souverain. >> (1)« Renvoyer l'exécution de quelques clauses jusqu'après le moment où le but de la convention aura été atteint, ressemble beaucoup à un ajournement indéfini. »

(2)« Si on ne se propose en effet que le maintien de la paix générale, l'empereur est la première partie contractante de la présente convention; il avait accédé au traité avant qu'il existât. »

(3) « Les puissances contractantes semblent, à chaque article du traité, avoir besoin d'en expliquer encore une fois le but; mais la

le but de soutenir la France ou tout autre pays envahi contre les entreprises de Bonaparte et de ses adhérens, S. M. très chrétienne sera spécialement invitée à donner son adhésion et à faire connaître, dans le cas où elle devrait requérir les forces stipulées dans l'article 2, quels secours les circonstances lui permettront d'apporter à l'objet du présent traité. » 9. Le présent traité sera ratifié, etc. »

CONVENTION additionnelle au traité du 25 mars 1815, conclue à Vienne le 30 avril suivant.

«S. M. britannique s'engage à fournir un subside de cinq millions sterling pour le service de l'année finissant au 1er avril 1816, pour être divisé en égales proportions entre les trois puissances, savoir, entre S. M. le roi de Prusse, S. M. l'empereur d'Autriche, roi de Bohême et de Hongrie, et S. M. l'empereur de toutes les Russies.

dernière explication embrouille de nouveau ce qui avait paru éclairci dans un article intermédiaire. Ce but est, dit-on encore, de soutenir la France ou tout autre pays envahi contre les entreprises de Bonaparte et de ses adhérens. Il est question ici de deux choses, de la France ou de tout autre pays envahi. Pour la France d'abord, l'allégation d'envahissement n'est-elle pas dérisoire? Peut-on qualifier du titre d'envahissement une réunion volontaire qui suit une séparation forcée? Soutenir la France contre les adhérens de Bonaparte!... Ces adhérens qui sont-ils ? La France elle-même. C'est donc soutenir la France contre la France. La France rend grâce à cet excès de zèle dont elle n'a pas besoin, et ne veut à aucun prix d'un soutien étranger. On est prêt de même à soutenir tout autre pays envahi... La question est différente; mais quels pays sont menacés d'un envahissement, si ce n'est cette même France, paisible, occupée de ses lois intérieures, les discutant avec son souverain, et qui n'est troublée dans son repos domestique que par le bruit d'une attaque qui la menace sous le nom de secours, par les éclats avant-coureurs d'une guerre qu'on lui apporte sous le titre de protection et d'amitié ?

» Le prétendant est invité à donner son adhésion à l'accord du 25 mars. Nous aimons à croire que ce prince, s'il n'était dominé par sa famille et par ses entours, ne pourrait jamais entrer dans un arrangement dont le résultat, s'il était heureux, scrait la ruine de la France. Mais si, cédant à la fatalité qui a précipité la seconde et dernière chute de sa maison, il mêle son étendard à des étendards ennemis, ce n'est pas le moyen d'accélérer son retour sur notre territoire ; c'est montrer encore à la nation effrayée la chimère de la possession de droit divin, une légalité insultante, et le sceptre odieux de la féodalité. Vingt-cinq années n'avaient pu dégager la famille des Bourbons de cet horrible cortége. Leur destinée est de vivre et de s'éteindre ensemble, loin du sol régénéré de l'Empire français. »>

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