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à vous éclairer sur le meilleur système de finances qui convient à la France.

» L'administration des douanes achevait de travailler à un tarif dans lequel se combinaient sagement les intérêts de l'industrie, du commerce et des consommateurs. Tout était disposé pour encourager notre navigation et notre commerce renaissans.

>> Nous avions l'espérance, si chère au cœur de Sa Majesté, que les impôts indirects, relatifs aux boissons surtout, dont elle n'avait consenti à grever le peuple que pour payer les dettes de l'État envers l'armée, allaient être adinis et coordonnés aux mœurs françaises.

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Pourquoi faut-il que le génie du mal soit venu tout à coup interrompre, ces travaux et ces espérances !

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Quoi qu'il arrive, messieurs, continuons nos travaux. Votre attention va sans doute se porter d'abord sur les circonstances graves qui ont causé votre convocation extraordinaire ; et comme, dans l'intervalle du temps qu'elles vous laisseront, il est dans votre pensée de suivre les travaux commencés, je vais vous rappeler les principaux objets qui vous restaient à terminer.

» Vous vous proposiez d'adopter quelques changemens à votre réglement, surtout en ce qui concerne le droit de pétition, que vous vouliez consacrer de nouveau et consolider, en écartant les abus par lesquels on cherchait à rendre un si beau droit ridicule.

» Vous regrettiez, en vous séparant, de n'avoir pu changer en résolution cette proposition qui devait maintenir à jamais la Légion-d'Honneur, que vous vouliez doter irrévocablement.

» Vous aviez suspendu votre résolution relative aux réfugiés espagnols, parce que, bien que le ministre de la guerre vous eût écrit que les réfugiés civils étaient traités comme les militaires, vous attendiez que l'état des finances fût réglé pour leur accorder une hospitalité plus libérale. Nous nous ménagions par là le moyen d'achever notre réconciliation avec un peuple voisin, dont nous avons tant de raison de déplorer les malheurs. » De toutes les lois dont vous avez envoyé les propositions à la Chambre des Pairs, celle relative à la responsabilité des ministres était l'objet de votre principale sollicitude, et ce n'est pas dans les circonstances actuelles que le président doit déveTopper les raisons qui vous la font plus vivement désirer.

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Continuons, messieurs, à nous occuper avec votre sagesse accoutumée des travaux commencés, dans tous les momens qui ne seront pas consacrés au salut de la patrie. »

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Le 12, communication des mesures prises par le gouvernement pour la sûreté de l'Etat.

Le 13, avant la séance publique, M. le lieutenant général Desfourneaux fait une proposition tendante « à ce que le roi soit supplié de rendre une ordonnance qui, conformément à l'article 69 de la Charte constitutionnelle, accorde aux militaires de tout grade, qui étaient en activité le 31 août 1814, la totalité à vie de leur solde, sans aucune autre indemnité, si ce n'est lorsqu'ils seront employés activement.» M. le général Desfourneaux demandait en outre que la solde fût acquittée non par trimestre, mais par mois, comme cela se pratiquait précédemment. » Ces propositions sont renvoyées au ministre de la guerre.

On introduit les ministres. Les portes de la salle sont ouvertes au public.

DISCOURS de M. l'abbé de Montesquiou, ministre de l'intérieur. Séance du 13 mars 1815.

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Messieurs, le roi m'a ordonné de vous faire connaître la situation de nos départemens, c'est à dire leur bon esprit, leur courage, et leur dévouement à sa cause et à celle de la liberté. Au premier moment de cette agression inouie, nous nous sommes empressés d'écrire aux départemens menacés, d'appeler les gardes nationales et la population entière à la défense de la patrie.

» Le préfet du Var avait déjà donné le signal, et la ville de Marseille y avait répondu avec cet élan de liberté et de reconnaissance dont elle a donné tant de preuves. La Drôme a publié son indignation dans une adresse au roi qui appelle la France entière à la défense commune. Les départemens que Bonaparte a parcourus ont pu être surpris, mais aucun n'a été ébranlé; le Var, les Hautes et les Basses-Alpes l'ont vu passer comme l'ennemi public. Ne pouvant le combattre, ils l'ont reçu avec un morne silence, qui lui a fait connaître dès son entrée en France les sentimens qui l'y attendaient.

» Le département du Rhône, sans armes, sans défenses, s'est vu envahir; mais Bonaparte peut-il douter du patriotisme des Lyonnais? Quelle ville surpasse celle de Lyon en générosité! Nous n'avons reçu d'elle que les témoignages les plus honorables de son dévouement, jusqu'aux derniers instans de sa liberté. Ce succès de l'ennemi, loin d'avoir ralenti l'ardeur des autres contrées, leur a inspiré un nouvel enthousiasme.

de

» Les départemens de Saône-et-Loire, de la Côte-d'Or, la Nièvre, du Doubs, de la Meurthe, de la Marne, de l'Aube,

1.-2° Série.

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de la Haute-Marne, de Seine-et-Marne, de Seine-et-Oise, de la Seine-Inférieure, du Calvados, de l'Orne, du Loiret, de Loir-et-Cher, de l'Aisne, de la Somme, de l'Yonne, du Nord, de l'Oise, de Maine-et-Loire, de l'Eure, en un mot tous ceux qui ont eu le temps de faire parvenir leurs adresses, envoient à l'envi d'admirables témoignages de leur fidélité. Les villes disputent de zèle avec les départemens. Nous sommes occupés de réunir toutes ces adresses pour consacrer à jamais ce monument du courage, et de la haine de la tyrannie. Eh! quel Français voudrait revoir ces jours d'oppression et de perfidie! Ils ont passé, et l'horreur est le seul sentiment qui en reste.

» C'est assez que nous ayons à gémir sur l'égarement de quelques guerriers; la France ne peut avoir que des défenseurs de la liberté; elle désavoue et proscrit à jamais ces cœurs dénaturés qui osent la sacrifier à un vil intérêt. Nous le disons en frémissant, il nous était resté dans nos misères une gloire nationale: nous la devions à nos armées; nous les présentions avec orgueil aux étrangers; nous aimions à rappeler leurs triomphes, et cette générosité admirable qui les faisait courir d'un pôle à l'autre, partout où il y avait des dangers. Pourquoi faut-il que cette race de héros compte aujourd'hui des infidèles, et que les soutiens de la gloire nationale voient des déserteurs! Gémissons avec ces soldats vraiment Français, qui, dans tous les temps, n'ont su que verser leur sang pour la patrie; qui, toujours fidèles à sa voix et étrangers à toutes nos discordes, n'ont voulu que la servir et mourir pour elle; ils vengeront aujourd'hui leur pays, que l'on veut asservir, et leur gloire, qu'on a osé obscurcir: tous les chefs montrent à leurs frères d'armes les sentiers de l'honneur ; chacun est à son poste prêt à marcher à la voix de la patrie.

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Déjà le maréchal de Trévise a instruit son corps d'armée des perfidies de nos ennemis, et toutes les troupes abusées sont revenues sous les drapeaux de l'honneur. Le général d'Aboville n'a pas vu un infidèle dans ses soldats; tous, au contraire, ont repoussé le traître qui avait osé tenter leur fidélité.

» Le maréchal Ney réunit ses légions, et porte dans cette cause cette fermeté de caractère et de principes qui l'ont toujours illustré. Le maréchal Macdonald, après avoir fait des prodiges à Lyon, et tenté l'impossible, revient porter au roi ses talens et ce caractère de loyauté et d'honneur qui le rendent également cher à la France et à l'armée.

» Le maréchal Oudinot est à la tête de ces grenadiers de France, de cette illustre vieille garde, si renommée dans toute l'Europe, et qui s'est réservé la gloire d'être le modèle et l'exemple de toutes les armées : fidèle à son roi et à son chef,

également couverts de cicatrices et de gloire, on les verra l'un et l'autre marcher au secours de la patrie, et contenir par leur renom, comme par leurs armes, tout ce qui aurait le malheur d'hésiter.

» Le maréchal d'Albufera n'a besoin que d'être nommé pour inspirer une même confiance à la France et aux armée. Tout le royaume ne voit donc que des défenseurs : les provinces, les villes, les campagnes; les généraux, les officiers, les soldats, tous repoussent l'ennemi qui nous porte la guerre étrangère, la guerre civile, la servitude et la mort! C'est à vous, messieurs, à seconder cette noble ardeur. Ordonnons, ou plutôt confirmons cette levée générale de tous les amis de la liberté. Tous les Français répondent à la voix du gouvernement; qu'ils entendent également la vôtre : on ne peut payer de trop d'éloges un zèle si généreux. Que tous les noms qui s'illustrent dans cette belle cause soient inscrits dans vos annales comme dans les nôtres; que les défenseurs de la patrie soient couverts de toute la gloire nationale!

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» Déjà le roi a répandu ses bontés sur les officiers et les troupes qui ont donné les premiers témoignages de la fidélité. Qu'ils sachent par vous combien ils ont mérité de la patrie. A-t-il connu toutes les ressources de la liberté, cet homme qui connut si bien celles de la servitude? Sait-il ce que peut une nation animée de ses droits, et commandée par un prince qu'aucune difficulté n'étonne, pour qui le danger n'est qu'une épreuve de son courage, qui s'inquiète pour ses sujets, et qui, alors même, ne s'alarme que pour exciter leur bravoure? Ce n'est pas sous un tel roi que l'on conquiert la France..

» Laissons les ennemis de la liberté accuser la douceur de son gouvernement. Les peuples ne sont pas courageux à rai¬ son de leur servitude; il est une générosité qui n'appartient qu'aux âmes libres, et qui fait naître les héros: la France en sera un éternel exemple. Si elle a pu, sous la tyrannie, conquérir l'Europe, quel audacieux pourra la combattre sous la liberté ! Soyons unis, messieurs, et dans un moment nous verrons disparaître cette entreprise insensée, qui fera rougir ses partisans, et ne sera qu'un gage de plus de la sagesse de nos nouvelles lois, et de ce régime paternel que la sagesse du roi a puisé dans son cœur. »

Après ce discours le même ministre expose ainsi, au nom du roi, les motifs du projet de loi relatif aux récompenses nationales:

Messieurs, vous avez eu connaissance des différentes or

donnances que le roi a rendues pour assurer la défense de l'Etat. Il a convoqué la garde nationale dans tout le royaume; il a appelé les volontaires à la défense commune, et leur a donné des officiers et un chef renommé pour les commander. Il a en même temps prononcé les peines les plus graves contre les déserteurs de la patrie, contre les traîtres, et contre tous les perturbateurs qui tenteraient de favoriser la trahison. Le roi vous adresse aujourd'hui une ordonnance plus consolante; il veut donner un caractère particulier à des récompenses méritées, et qu'il décerne à ceux qui ont déjà illustré leur talent et leur fidélité : il a témoigné sa satisfaction à la garnison de La Fère, à celle de Lille, aux généraux qui commandent dans les différentes provinces; mais il veut que la nation s'associe à cette satisfaction. C'est ainsi que tous les faits glorieux de cette guerre doivent être recommandés à la génération présente et à la postérité : l'amour de la patrie ne connaît pas de plus grandes récompenses que de l'avoir bien servie.

>> Que ne puis-je, messieurs, décerner ici les mêmes récompenses à ces écrivains distingués que nous voyons se jeter avec tant de courage dans la cause de la liberté, qui y ont consacré leurs talens, et n'ont pas craint de se désigner euxmêmes à la tyrannie comme le premier objet de sa haine et les premières victimes de ses fureurs! Qu'ils reçoivent du moins le tribut d'éloges qui leur est dû; qu'ils sachent aussi que la patrie est reconnaissante de leur zèle, ou, pour mieux dire, qu'ils s'assurent avec nous que cette belle cause triomphera, et que leurs écrits et leurs noms soient immortels comme votre zèle et l'héroïsme de nos guerriers ! »

Sur la proposition du président, motivée d'après l'urgence, la Chambre ordonne le renvoi dans les bureaux du projet présenté par le ministre, pour y être délibéré à l'instant même.

Le duc de Feltre, Clarck, à qui le portefeuille de la guerre n'a été remis que depuis vingt-quatre heures, informe la Chambre des événemens qui sont à sa connaissance : parmi les détails qu'il transmet, les uns ont déjà été publiés, et les autres, fort consolans, ont le malheur de n'être pas exacts. Aucun autre ministre ne demande la parole.

M. Delhorme propose un amendement au projet de loi qui vient d'être présenté : « Je regrette, dit-il, de ne pouvoir en développer les motifs; mais sans doute vous trouverez qu'il se justifie de lui-même. Le voici : « La Chambre » des Députés déclare que le dépôt de la Charte constitu

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