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» Et, quoique intimement persuadés que la France entière, >> se ralliant autour de son souverain légitime, fera incessam»ment rentrer dans le néant cette dernière tentative d'un » délire criminel et impuissant, tous les souverains de l'Europe, animés des mêmes sentimens, et guidés par les mêmes principes, déclarent que si, contre tout calcul, il pouvait » résulter de cet événement un danger réel quelconque, ils » seraient prêts à donner au roi de France et à la nation fran»çaise, ou à tout autre gouvernement attaqué, dès que la » demande en serait formée, les secours nécessaires pour » rétablir la tranquillité publique, et à faire cause commune >> contre tous ceux qui entreprendraient de la compromettre. >>> La présente déclaration, insérée au protocole du Congrès » réuni à Vienne, dans sa séance du 13 mars 1815, sera >> rendue publique.

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» Fait et certifié véritable par les plénipotentiaires des huit puissances signataires du traité de Paris.

» A Vienne, le 13 mars 1815.

(Suivent les signatures dans l'ordre alphabétique des cours:
::)

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RAPPORT de la commission des présidens du Conseil d'état.

Du 2 avril 1815. (1)

En conséquence du renvoi qui lui a été fait, la commission, composée des présidens des sections du Conseil d'état, a examiné la déclaration du 13 mars, le rapport du ministre de la police générale, et les pièces qu'il y a jointes.

(1) Cette pièce est, quant au fond, de Napoléon lui-même. Le conseiller d'état Boulay (de la Meurthe) en adoucit seulement le style, et lui donna les formes d'un rapport.

» La déclaration est dans une forme si inusitée, conçue dans des termes si étranges, exprime des idées tellement antisocialés, que la commission était portée à la regarder comme une de ces productions supposées par lesquelles des hommes méprisables cherchent à égarer les esprits et à faire prendre le change à l'opinion publique.

» Mais la vérification des procès-verbaux dressés à Metz, et des interrogatoires des courriers, n'a pas permis de douter l'envoi de cette déclaration n'eût été fait par les membres de la légation française à Vienne, et elle doit conséquemment être considérée comme adoptée et signée par eux.

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» C'est sous ce premier point de vue que la commission a cru devoir d'abord examiner cette production, qui n'a point de modèle dans les annales de la diplomatie, et dans laquelle des Français, des hommes revêtus du caractère public le plus respectable, commencent par une espèce de mise hors la loi, ou, pour parler plus nettement, par une provocation à l'assassinat de l'empereur Napoléon.

» Nous disons, avec le ministre de la police, que cette déclaration est l'ouvrage des plénipotentiaires français, parce que ceux d'Autriche, de Russie, de Prusse, d'Angleterre, n'ont pu signer un acte que les souverains et les peuples auxquels ils appartiennent s'empresseraient de désavouer.

» Et d'abord ces plénipotentiaires, coopérateurs pour la plupart du traité de Paris, savent que Napoléon y a été reconnu comme conservant le titre d'empereur et comme souverain de l'ile d'Elbe; ils l'auraient désigné par ces titres, et ne se serait écartés, ni au fond ni dans la forme, du respectueux égard qu'ils imposent.

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»Ils auraient senti que, d'après les lois des nations, prince le moins fort par l'étendue ou la population de ses états jouit, quant à son caractère politique et civil, des droits appartenans à tout prince souverain, à l'égal du monarque le plus puissant; et Napoléon, reconnu sous le titre d'empereur et en qualité de prince souverain par toutes les puissances, n'était pas plus qu'aucune d'elles justiciable du Congrès de Vienne.

» L'oubli de ces principes, impossible à supposer dans des plénipotentiaires qui pèsent les droits des nations avec réflexion, sagesse et maturité, n'a rien d'étonnant quand il est manifesté par quelques ministres français à qui leur conscience reproche plus d'une trahison, chez qui la crainte a produit l'emportement, et dont les remords égarent la raison.

Ceux-là ont pu risquer la fabrication, la publication d'une pièce telle que la prétendue déclaration du 13 mars,

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dans l'espoir d'arrêter la marche de Napoléon, et d'abuser le peuple français sur les vrais sentimens des puissances étrangères.

>> Mais il ne leur est pas donné de juger comme elles le mérite d'une nation qu'ils ont méconnue, trahie, livrée aux armes de l'étranger.

» Cette nation, brave et généreuse, se révolte contre tout ce qui porte le caractère de la lâcheté et de l'oppression; ses affections s'exaltent quand leur objet est menacé ou atteint par une grande injustice; et l'assassinat, auquel provoquent les premières phrases de la déclaration du 13 mars, ne trouvera de bras pour l'accomplir ni parmi les vingt-cinq millions de Français dont la majorité a suivi, gardé, protégé Napoléon de la Méditerranée à la capitale, ni parmi les dix-huit millions d'Italiens, les six millions de Belges ou riverains du Rhin, et les peuples nombreux d'Allemagne, qui dans cette conjoncture solennelle n'ont prononcé son nom qu'avec un souvenir respectueux, ni au sein de la nation anglaise, indignée, dont les honorables sentimens désavouent le langage qu'on a osé prêter

aux souverains.

» Les peuples de l'Europe sont éclairés; ils jugent les droits de Napoléon, les droits des princes alliés et ceux des Bourbons.

>> Ils savent que la convention de Fontainebleau est un traité entre souverains. Sa violation, l'entrée de Napoléon sur le territoire français, ne pouvait, comme toute infraction à un acte diplomatique, comme toute invasion hostile, amener qu'une guerre ordinaire, dont le résultat ne peut être, quant à la personne, que d'être vainqueur ou vaincu, libre ou prisonnier de guerre ; quant aux possessions, de les conserver ou de les perdre, de les accroître ou de les diminuer; et que toute pensée, toute menace, tout attentat contre la vie d'un prince en guerre contre un autre, est une chose inouïe dans l'histoire des nations et des cabinets de l'Europe.

» A la violence, à l'emportement, à l'oubli des principes qui caractérisent la déclaration du 13 mars, on reconnaît les envoyés du même prince, les organes des mêmes conseils qui, par l'ordonnance du 6 mars, mettaient aussi Napoléon hors la loi, appelaient aussi sur lui les poignards des assassins, promettaient aussi un salaire à qui apporterait sa tête.

» Et cependant qu'a fait Napoléon? Il a honoré par sa sécurité les hommes de toutes les nations, qu'insultait l'infâme mission à laquelle on voulait les appeler; il s'est montré modéré, généreux, protecteur envers ceux-là même qui avaient dévoué sa tête à la mort.

» Quand il a parlé au général Excelmans, marchant vers la colonne qui suivait de près Louis-Stanislas-Xavier; au général comte d'Erlon, qui devait le recevoir à Lille; au général Clausel, qui allait à Bordeaux, où se trouvait la duchesse d'Angoulême; au général Grouchy, qui marchait pour arrêter les troubles civils excités par le duc d'Angoulême; partout enfin des ordres ont été donnés par l'empereur pour que les personnes fussent respectées et mises à l'abri de toute attaque, de tout danger, de toute violence dans leur marche sur le territoire français, et au moment où elles le quitteraient.

>> Les nations et la postérité jugeront de quel côté a été dans cette grande conjoncture le respect pour le droit des peuples et des souverains, pour les règles de la guerre, les principes de la civilisation, les maximes des lois civiles et religieuses; elles prononceront entre Napoléon et la maison de Bourbon.

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Si, après avoir examiné la prétendue déclaration du congrès sous ce premier aspect, on la discute dans ses rapports avec les conventions diplomatiques, avec le traité de Fontainebleau du 11 avril, ratifié par le gouvernement français, on trouvera que sa violation n'est imputable qu'à ceux-là mêmes qui la reprochent à Napoléon.

» Le traité de Fontainebleau a été violé par les puissances alliées et par la maison de Bourbon en ce qui touche l'empereur Napoléon et sa famille, en ce qui touche les intérêts et les droits de la nation' française.

des

» 1°. L'impératrice Marie-Louise et son fils devaient obtenir passe-ports et une escorte pour se rendre près de l'empereur; et, loin d'exécuter cette promesse, on a séparé violemment l'épouse de l'époux, le fils du père, et cela dans les circonstances douloureuses où l'âme la plus forte a besoin de chercher de la consolation et du support au sein de sa famille et des affections domestiques.

» 2°. La sûreté de Napoléon, de la famille impériale et de leur suite était garantie (article 14 du traité) par toutes les puissances; et des bandes d'assassins ont été organisées en France, sous les yeux du gouvernement français, et même par ses ordres, comme le prouvera bientôt la procédure solennelle contre le sieur de Maubreuil, pour attaquer et l'empereur, et ses frères, et leurs épouses. A défaut du succès qu'on espérait de cette première branche du complot, une émeute a été disposée à Orgon, sur la route de l'empereur, pour essayer d'attenter à ses jours par les mains de quelques brigands; on a envoyé en Corse, comme gouverneur, un sicaire de Georges, le sieur Brulart, élevé exprès au grade de maréchal de camp, connu 2 Série.

I.

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en Bretagne, en Anjou, en Normandie, dans la Vendée, dans toute l'Angleterre, par le sang qu'il a répandu, afin qu'il préparât et assurât le crime; et en effet plusieurs assassins isolés ont tenté à l'île d'Elbe de gagner, par le meurtre de Napoléon, le coupable et honteux salaire qui leur était promis.

» 3°. Les duchés de Parmé et de Plaisance étaient donnés en toute propriété à Marie-Louise, pour elle, son fils et ses descendans; et, après de longs refus de les mettre en possession, on a consommé l'injustice par une spoliation absolue, sous le prétexte illusoire d'un échange sans évaluation, sans proportion, sans souveraineté, sans consentement; et les documens existans aux relations extérieures, que nous nous sommes fait représenter, prouvent que c'est sur les sollicitations, sur les instances, par les intrigues du prince de Bénévent que Marie-Louise et son fils ont été dépouillés.

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4. Il devait être donné au prince Eugene, fils adoptif de Napoléon, qui a honoré la France, qui le vit naître, et conquit l'affection de l'Italie, qui l'adopta, un établissement convenable hors de France, et il n'a rien obtenu.

» 5o. L'empereur avait (article 9 du traité) stipulé, en faveur des braves de l'armée, la conservation de leurs dotations sur le Monte-Napoleone; il avait réservé, sur le domaine extraordinaire et sur des fonds restans de sa liste civile, des moyens de récompenser ses serviteurs, de payer les soldats qui s'attachaient à sa destinée : tout a été enlevé, réservé par les ministres des Bourbons. Un agent des militaires français, M. Bresson, est allé inutilement à Vienne réclamer pour eux ła plus sacrée des propriétés, le prix de leur courage et de leur sang.

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6°. La conservation des biens meubles et immeubles de la famille de l'empereur est stipulée par le même traité (article 6); et elle a été dépouillée des uns et des autres, savoir: à main armée, en France, par des brigands commissionnés ; en Italie, par la violence des chefs militaires; dans les deux pays, par des sequestres et des saisies solennellement ordon

nées.

7. L'empereur Napoléon devait recevoir deux millions, et sa famille deux millions cinq cent mille francs par an, selon la répartition établie article 6 du traité; et le gouvernement français a constamment refusé d'acquitter cet engagement; et Napoléon se serait vu bientôt réduit à licencier sa garde fidèle, faute de moyens pour assurer sa paie, s'il n'eût trouvé, dans les reconnaissans souvenirs des banquiers et négocians de Gênes et d'Italie, l'honorable ressource d'un prêt de douze millions, qui lui fut offert.

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