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inutile d'en donner une analyse; nous nous bornerons aux observations suivantes :

Le traité relatif à l'établissement respectif des Français en Suisse et des Suisses en France remplace celui du 30 mai 1827, dont il reproduit les principales dispositions, mais il laisse subsister celui du 18 juillet 1828, qui stipule, entre autres dispositions: 1o que les jugements rendus compétemment par les tribunaux des deux pays en matière civile et ayant acquis force de chose jugée, seront respectivement exécutoires en France et en Suisse sur un simple pareatis; -2° que les Français et les Suisses sont affranchis de tous droits, dépôts et cautions auxquels ne sont pas soumis les nationaux, et spécialement de l'obligation de fournir la caution judicatum solvi; - 3° que dans les instances personnelles ou de commerce ils ont respectivement le droit de demander à être jugés par leurs juges naturels, à moins que les parties n'aient stipulé le contraire ou qu'elles soient présentes au lieu où est intervenu le contrat. — Cesdispositions restent donc en vigueur et applicables aux contestations en matière de propriété industrielle, artistique et littéraire.

En ce qui touche la garantie de la propriété littéraire, artistique et industrielle, nous signalons la forme particulière de la convention, qui se distingue de toutes celles conclues avec les autres nations étrangères, en ce qu'elle contient deux séries distinctes de stipulations : les premières, de l'article 1er à l'article 17, applicables à la France, et les dernières, de l'article 17 à l'article 50, applicables à la Suisse. Celles-ci reproduisent les principales dispositions réglementaires de notre législation tant sur les marques de fabrique que sur la propriété littéraire et artistique, et deviennent ainsi un code uniforme pour tous les cantons dont les législations particulières différaient entre elles, ou même se taisaient sur ces matières1.

Quant à l'époque de la mise en vigueur et la durée de ces deux conventions, il faut, pour les déterminer, se reporter aux articles 30 et 31 du traité de commerce du même jour, auxquels elles se réfèrent et qui sont ainsi conçus :

Voir notamment ce que nous avons dit de la Suisse au sujet de la propriété littéraire et artistique à l'article 399, t. V, p. 65 et s.; et suprà, p. 77.

« ART. 30. Le présent traité restera en vigueur pendant «< douze années, à partir du jour de l'échange des ratifications. << Dans le cas où aucune des deux hautes parties contractantes <«< n'aurait notifié, douze mois avant la fin de ladite période, son << intention d'en faire cesser les effets, il demeurera obligatoire << jusqu'à l'expiration d'une année, à partir du jour où l'une ou «<l'autre des hautes parties contractantes l'aura dénoncé... »

« ART. 31.-Le présent traité et les tarifs y annexés recevront « leur application dans les deux pays le 1er janvier 1866, ou plus tôt si les hautes parties contractantes reconnaissent, d'un « commun accord, que cette date peut être anticipée. - En tout « cas, ce traité sera exécutoire en même temps que le traité de « commerce conclu le 2 août 1862 entre la France et la Prusse.»

Le point de départ de la durée est; comme on le voit, fixé d'une manière certaine par le traité lui-même; c'est du jour de l'échange des ratifications, et par conséquent du 24 novembre 1864, qu'a commencé à courir la période de douze années. Mais il n'en est pas de même de l'époque de la mise en vigueur. Le traité la fixe bien au 1er janvier 1866, mais ce n'est là qu'un délai maximum, car, outre qu'il laisse aux gouvernements respectifs la faculté de rapprocher cette époque, il la fait également dépendre de la mise en vigueur du traité de commerce conclu entre la France et la Prusse, lequel peut dès lors avoir pour effet de diminuer le délai de mise en vigueur mais non le reculer, il va sans dire que si l'une des deux hypothèses se réalise, nous ferons connaitre la déclaration de mise en vigueur, sinon elle aura lieu de plein droit le 1er janvier 1866.

La dernière observation que nous ayons à faire porte sur le protocole final et la déclaration dont nous avons emprunté le texte au Moniteur, mais qui ne se trouvent pas compris dans le décret de promulgation, et qui, par suite, n'ont pas été insérés au Bulletin des lois. Cela tient à ce que ces protocole et déclaration ne contiennent pas des engagements fermes formant dès à présent, et par eux-mêmes, des droits acquis pouvant être invoqués par les parties intéressées. Les plénipotentiaires français ont bien pu, en effet, promettre la présentation au Corps législatif d'un projet de loi pour faire déclarer, contrairement à la jurisprudence, que la reproduction de morceaux de musique moderne

dans les orgues et boîtes à musique, ne constitue pas une contrefaçon, mais ils ne pouvaient pas lier le Sénat et le Corps législatif, qui restent libres soit de repousser complétement le projet de loi qui leur sera présenté, soit d'en restreindre l'application à la Suisse. Il en serait, dans ce dernier cas, de ce mode particulier de reproduction de la musique, comme du droit de représentation théâtrale, ou de celui de traduction, qui ont bien pu être réglementés et limités, par les traités diplomatiques, pour les pays étrangers, mais qui restent entiers en France. Si une disposition pareille était admise, et nous ne croyons pas qu'on puisse aller au delà, les boîtes à musique fabriquées en Suisse seraient placées au même rang que les produits industriels qui sont garantis par des brevets en France. La fabrication en est licite et libre en pays étranger, mais les parties intéressées peuvent s'opposer à leur introduction et à leur vente en France.

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Nous ferons nécessairement connaître quel sera le résultat de l'engagement pris à ce sujet dans le protocole final de la convention, mais nous croyons utile de prémunir les fabricants suisses contre les dangers d'une reproduction qui, quant à présent et jusqu'à ce qu'il en ait été décidé autrement, constitue une contrefaçon. PATAILLE.

TRAITÉ DU 30 JUIN 1864

Concernant l'établissement des Français EN SUISSE et des Suisses

EN FRANCE.

(Echange des ratifications à Paris le 24 novembre 1864.- Promulgation en France par décret impérial du 28 du même mois, inséré au Bulletin des lois le 10 décembre 1864 et au Moniteur universel du 14 du même mois).

Le gouvernement de S. M. l'empereur des Français et le gouvernement de la Confédération suisse, animés du désir de resserrer les liens d'amitié et de multiplier les rapports de bon voisinage qui unissent les deux peuples, ont décidé de régler, d'un commun accord et par un traité spécial, les conditions auxquelles sera soumis l'établissement des Français en Suisse et des Suisses en France, et ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir S. M. l'empereur des Français, M. DROUYN DE LHUYS, sénateur de l'empire, grand-croix de son ordre impérial de la Légion d'honneur, etc., son ministre et secrétaire d'Etat au département des affaires étrangères, et M. RouAER, sénateur de l'empire, grand-croix

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de son ordre impérial de la Légion d'honneur, etc., son ministre d'Etat; et la Confédération suisse, M. KERN, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de ladite Confédération près S. M. l'empereur des Français; - Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants : ART. 1°г. Les Français, sans distinction de culte, seront reçus et traités dans chaque canton de la Confédération, relativement à leurs personnes et à leurs propriétés, sur le même pied et de la même manière que le sont ou pourront l'être à l'avenir les ressortissants chrétiens des autres cantons. Ils pourront, en conséquence, aller, venir et séjourner temporairement en Suisse, munis de passe-ports réguliers, en se conformant aux lois et règlements de police. Tout genre d'industrie ou de commerce permis aux ressortissants des divers cantons le sera également aux Français, et sans qu'on puisse en exiger aucune condition pécuniaire ou autre plus onéreuse1.

ART. 2. Pour prendre domicile ou former un établissement en Suisse, les Français devront être munis d'un acte d'immaculation constatant leur nationalité, qui leur sera délivré par l'ambassade de France, après qu'ils auront produit des certificats de bonne conduite et de bonnes mœurs, ainsi que les autres attestations requises.

ART. 3. Les Suisses jouiront, en France, des mêmes droits et avantages que l'article 1er ci-dessus assure aux Français en Suisse.

ART. 4. Les sujets ou ressortissants de l'un des deux Etats établis dans l'autre ne seront pas atteints par les lois militaires du pays qu'ils habiteront, mais resteront soumis à celles de leur patrie. Ils seront également exempts de tout service, soit dans la garde nationale, soit dans les milices municipales.

ART. 5. Les sujets ou ressortissants de l'un des deux Etats établis dans l'autre et qui seraient dans le cas d'être renvoyés par sentence légale ou d'après les lois ou règlements sur la police des mœurs et la mendicité, seront reçus, en tout temps, eux et leurs familles, dans les pays dont ils sont originaires et où ils auront conservé leurs droits conformément aux lois.

ART. 6. Tout avantage que l'une des parties contractantes aurait concédé ou pourrait encore concéder à l'avenir d'une manière quelconque à

1 L'article 26 du traité de commerce du même jour porte, en outre, ce qui suit : « Les fabricants et marchands français ainsi que leurs commis voyageurs, dûment patentés en France dans l'une de ces qualités, pourront dans la Suisse, sans y être soumis à aucun droit de patente, faire des achats pour les besoins de leur industrie et recueillir des commandes avec ou sans échantillons, mais sans colporter des marchandises. Il y aura réciprocité en France pour les fabricants et marchands des cantons de la Suisse et leurs commis voyageurs. Les formalités nécessaires pour obtenir cette immunité seront réglées d'un commun accord. »

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une autre puissance, en ce qui concerne l'établissement et l'exercice des professions industrielles, sera applicable de la même manière et à la même époque à l'autre partie, sans qu'il soit nécessaire de faire une convention spéciale à cet effet.

ART. 7. Le présent traité recevra son application dans les deux pays en même temps que le traité de commerce conclu sous la date de ce jour, et il aura la même durée 1. - Il sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Paris dans le délai de six mois, ou plus tôt si faire se peut, et simultanément avec celles du traité de commerce précité.

En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé le présent traité et y ont apposé le cachet de leurs armes.

Fait à Paris, le 30 juin 1864.

(L. S.) Signé: DROUYN DE LHUYS.
(L. S.) Signé: E. Rouher.

(L. S.) Signé: KERN.

CONVENTION DU 30 JUIN 1864

Conclue entre la FRANCE et la CONFÉDÉRATION Suisse, pour la garantie réciproque de la propriété littéraire, artistique et industrielle.

(Echange des ratifications à Paris le 24 novembre 1864. Promulgation en France par décret impérial du 28 du même mois, inséré au Bulletin des lois, le 10 décembre 1864 et au Moniteur universel du 14 du même mois.)

Le gouvernement de S. M. l'empereur des Français et le gouvernement de la Confédération suisse, désirant assurer la garantie réciproque en France et en Suisse de la propriété des œuvres de littérature et d'art, ainsi que des marques et dessins de fabrique, ont résolu de conclure, à cet effet, une convention, et ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir: -S. M. l'empereur des Français, M. Drouyn de LHUYS, sénateur de l'empire, grand-croix de son ordre impérial de la Légion d'honneur, etc., son ministre et secrétaire d'Etat au département des affaires étrangères, et M. ROUHER, sénateur de l'empire, grand-croix de son ordre impérial de la Légion d'honneur, etc., son ministre d'Etat ; et la Confédération suisse, M. KERN, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de ladite Confédération près de S. M. l'empereur des Français ;

Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

DISPOSITIONS APPLICABLES EN FRANCE.

ART. 1er. Les auteurs de livres, brochures ou autres écrits, de compositions musicales ou d'arrangements de musique, d'œuvres de dessin, de

1 Voir, à cet égard, les observations qui précèdent le texte du traité cidessus, p. 418.

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