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velis sous les terres provenant de l'éboulement. D'ailleurs le mur de terrasse peut et doit être regardé comme servant de fondation au mur de clôture; et les réparations des fondations d'un mur font bien certainement partie des réparations de ce mur. Cependant je ne dois pas dissimu ler que l'on oppose à cette décision un arrêt du Parlement de Paris, du 26 mai 1762, rapporté dans l'ancien DENISART, verbo MUR, no 13, lequel a jugé que c'était au propriétaire supérieur à faire réparér, seul et à ses frais, le mur de terrasse. Mais je n'en persiste pas moins dans mon opinion. Cet arrêt paraît avoir été rendu dans une espèce particulière. Il s'agissait d'une église qui était bâtie sur cette terrasse. Rien ne prouve que le mur qui était au dessus, fût mitoyen; il est possible que le propriétaire inférieur ait déclaré qu'il préférait supporter l'éboulement des terres, plutôt que de contribuer aux réparations du mur. La fabrique ne pouvait faire la même déclaration, puisque la terrasse soutenait l'église : il était donc naturel qu'elle payât seule les réparations; et ce qui appuierait cette présomption, c'est que l'arrêt, dit l'auteur qui lé rapporte, fut fondé sur ce que la réparation ne profitait qu'à la fabrique. Et en conséquence je penserais que la décision consacrée par cet arrêt devrait effectivement avoir lieu, dans tous les cas où, la clôture n'étant pas forcée, le propriétaire inférieur abandonne tout droit, tant au mur de terrasse qu'au mur qui pourrait être bâti par dessus.

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La mitoyenneté est une servitude légale, par laquelle deux propriétaires voisins, ayant clôture commune, sont tenus l'un envers l'autre, à des obligations respectives. Cette matière étant très-usuelle, doit être traitée avec quelques détails: nous diviserons, en conséquence, cette Sec-. tion en deux paragraphes, dont le premier traitera de l'acquisition du droit de mitoyenneté; et le second, des effets résultant du droit acquis.

[ Ainsi ce droit diffère de celui de clôture, en ce que,

dans celui-ci, il s'agit de forcer le voisin de se clore; au lieu que, dans celui de mitoyenneté, on considère la clôture comme existante; et l'on établit les obligations respectives qui en résultent. Aussi, la servitude de clôture n'existe-t-elle que dans les villes et faubourgs, tandis que celle de mitoyenneté existe partout où il y a des clôtures mitoyennes, ou présumées telles. ]

$ Ier

De l'Acquisition du Droit de Mitoyenneté.

On peut se clore avec un mur, un fossé, ou une haie. Nous ne parlerons pas ici du cas où il y a preuve que le mur, le fossé ou la haie, ont été établis à frais communs, et par accord entre les propriétaires : il est évident que, dans ce cas, le droit de mitoyenneté est acquis incontestablement à chacun d'eux. Mais, comme la clôture peut exister, sans qu'il reste de trace de la manière dont elle a été établie, et qu'il importe cependant de prévenir les contestations déjà si fréquentes entre voisins, il a bien fallu recourir, dans ce cas, à une présomption légale..

[Nous avons vu précédemment ce qu'on doit entendre par présomption légale. Nous rappellerons seulement que c'est, en général, une conséquence tirée de ce qui a lieu le plus ordinairement, ex eo quod plerumque fit. Ainsi, comme il arrive le plus souvent que la clôture entre deux voisins est mitoyenne, la loi présume, jusqu'à ce que le contraire soit prouvé, que toute clôture est mitoyenne.]

En conséquence, le principe général, à cet égard, est que tout mur de séparation, entre bâtimens jusqu'à l'héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs, est présumé mitoyen, s'il n'y a titre ou 655. marque du contraire.

[La séparation doit être immédiate; car s'il y avait un espace au delà, quelque modique qu'il fût, appartenant au propriétaire du terrain qui est en deçà du mur, ce serait au contraire une preuve que le mur appartient en entier à ce propriétaire. Il en serait de même si l'espace était public. ]

[Héberge est un vieux mot qui signifie logement, d'où vient le mot héberger, etc. Entre bâtimens jusqu'à l'hés berge, c'est-à-dire, que le mur entre deux bâtimens est présumé mitoyen, jusqu'au point d'élévation du bâtiment le moins élevé. Si donc un des bâtimens a cinquante pieds de haut, et que l'autre n'en ait que trente, le mur est censé mitoyen jusqu'à trente pieds.

Quid, si le mur était plus haut que le bâtiment le plus élevé ? Je ne pense pas que cela puisse augmenter le droit du propriétaire du bâtiment moins élevé, qui ne pourrait toujours réclamer la mitoyenneté que jusqu'à son héberge; et tout le surplus appartiendrait à l'autre propriétaire, qui serait présumé avoir fait élever son mur, dans l'intention d'élever un jour son bâtiment plus haut.]

[ Quid entre bâtimens et jardins? Je pense qu'il faut distinguer : Si c'est dans un endroit où l'on peut être forcé de se clore, comme dans une ville ou un faubourg, le mur doit être présumé mitoyen jusqu'à la hauteur de clôture. Dans les autres lieux, il faut encore distinguer : Si le jardin est clos de tous côtés, je pense que le mur doit être présumé mitoyen, jusqu'à la hauteur du mur qui forme la clôture des autres côtés. Si le jardin n'est clos que du côté du bâtiment, je pense que le mur doit être présumé appartenir en entier au propriétaire du bâtiment. (Argument tiré de l'art. 670.) Il n'est pas probable que le propriétaire d'une cour ou d'un jardin, ouvert de trois côtés, ait contribué volontairement à la clôture d'un seul côté. ] [Lorsque l'on dit entre enclos, l'on entend dire entre deux champs tous deux enclos en entier; car si un seul était clos, et que l'autre ne le fût que du côté où est le mur dont il s'agit, je pense que le mur devrait être présumé appartenir en entier au propriétaire du champ clos. (Argument tiré de l'art. 670, et de ce qui est dit dans la note ci-dessus, à l'égard des cours et jardins, dans les endroits où la clôture n'est pas forcée.)]

[Lorsqu'il s'agit d'enclos entre les champs, c'est-à-dire entre cours, jardins et enclos, le mur est censé mitoyen dans toute sa hauteur, s'il n'y a titre ou marque du contraire. ]

[Quid, s'il y a tout à la fois marque de non-mitoyen. neté, et titre qui prouve la mitoyenneté ? Le titre doit l'emporter à moins qu'il n'y ait prescription; ce qui peut avoir lieu, si les marques sont apparentes et existent depuis trente ans, et si elles sont appuyées de la possession: par exemple, si, depuis le même temps, l'un des propriétai→ res a agi comme propriétaire seul et unique du mur; putà, s'il l'a toujours fait réparer à ses frais, s'il y a fait des ouvrages sans appeler l'autre propriétaire, etc. (Argument tiré de l'article 690.)]

Il y a marque de non-mitoyenneté, lorsque la sommité du mur est droite et aplomb de son parement d'un côté, et présente de l'autre un plan incliné, ou lorsqu'il n'y a de chaperon que d'un côté; ou enfin, lorsqu'il n'y a également que d'un côté des filets et corbeaux de pierre qui ont été mis en bâtissant le mur. Dans ce cas, le mur est censé appartenir en entier à celui du côté duquel sont le plan 654. incliné, le chaperon, les corbeaux ou les filets. Mais néan moins, dans tous les cas, et quand même la non-mitoyen→ neté du mur serait constatée par titre, le propriétaire voisin a toujours le droit de le rendre mitoyen, en tout ou en partie, même sans le consentement de celui à qui il ap¬ partient, en lui remboursant la moitié de la valeur du ter¬ rain sur lequel le mur est bâti, ainsi que la moitié de la valeur actuelle de la portion de mur qu'il veut rendre mi661. toyenne.

[La première des marques de mitoyenneté, ci-dessus indiquée, est encore une présomption légale, fondée sur ce qu'ordinairement les murs ne se construisent de cette ma¬ nière, que quand ils appartiennent en totalité à celui qui les fait construire.

Ces marques doivent-elles faire présumer la non-mitoyenneté du mur dans toute sa hauteur ? Je pense qu'il faut distinguer. Si c'est dans un lieu où la clôture n'est pas forcée, je pense que le mur entier doit être présumé non-mitoyen; mais dans les villes ou faubourgs, il y a toujours présomption de mitoyenneté jusqu'à la hauteur légale. On ne peut pas présumer que celui qui pouvait faire payer au voisin

la moitié de cette hauteur, ait préféré faire le mur entier à ses frais.]

[Le mur doit former un plan incliné, pour servir d'égout aux eaux de pluie qui alors ne tombent que d'un côté. Or, l'on ne peut présumer que le propriétaire, du côté duquel les eaux s'écoulent, eût consenti à les recevoir en totalité, si le mur eût été commun,]

[On appelle filets la partie du chaperon qui déborde le mur, afin que l'eau, tombant au delà du parement du mur, ne le dégrade pas, Ce filet se nomme aussi larmier, (Des¬ GODETS.)]

[L'on nomme corbeau une pierre en saillie, que l'on a coutume de mettre aux murs peu épais, afin de poser les poutres dessus, et de leur donner moins de portée, Mais il ne faut pas confondre ces corbeaux, avec ce qu'on appelle des harpes, ou pierres d'attente, qui sont des pierres que fait saillir du côté du voisin, celui qui bâtit le premier; afin que, quand le voisin viendra à bâtir à son tour, les deux maisons se trouvent liées ensemble, et qu'il ne soit pas nécessaire de faire des entailles et des incrustemens. qui détérioreraient la jambe boutisse de la première maison. L'on voit par là que ces harpes ne peuvent fournir aucun préjugé relativement à la mitoyenneté.]

[On reconnaît que le corbeau a été mis en bâtisant le mur, quand l'épaisseur du mur et la saillie sont faites d'une seule pierre. Cette condition est exigée, parce qu'autre→ ment il serait possible à un propriétaire de placer ces cor→ beaux de son côté, à l'insu de l'autre, et de se procurer par là frauduleusement une marque de non-mitoyenneté, Par la même raison, je pense que ces mêmes corbeaux, placés depuis la construction, ne pourraient fonder une prescription. Car la possession qui en résulterait, n'aurait pas le caractère de publicité requis pour la prescription ( Article 2229), puisqu'ils pourraient très-bien être inconnus à l'autre propriétaire. ]

[Le mur est censé appartenir à celui du côté duquel sont les marques de non-mitoyenneté, parce que ce n'est toujours qu'une présomption, qui cesserait, si la mitoyen

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