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une de celles qui étaient approuvées. Cette défense était fort sage et conforme à l'esprit de la plus pure antiquité. Ce sont les paroles du judicieux abbé de Fleury.

C'est un autre fait, comme il le remarque, que ce décret a été si mal observé qu'il s'en est beaucoup plus établi depuis que dans tous les siècles précédents.

« Les évêques et les prêtres, dit un magistrat, sont éta>> blis de Dieu pour instruire les peuples et pour prêcher la >> religion aux fidèles et aux infidèles. Il y a eu dans l'Église >> des temps malheureux où les prêtres et les clercs n'étaient » guère en état de s'instruire eux-mêmes. L'ignorance était >> grande et les moyens d'acquérir la science étaient diffi>> ciles. Pour s'autoriser à fonder la plupart des ordres reli>> gieux, du moins ceux qui ont eu des fonctions dans l'É» glise, on a supposé d'abord que les pasteurs ordinaires >> ne s'acquittaient pas de leur devoir, que les peuples » étaient privés d'instructions et ensevelis dans une pro»fonde ignorance, et il faut convenir que cette supposition » n'a pas toujours été sans fondement.

>> En 1216, c'est-à-dire l'année d'après les défenses qu'a>> vait faites le concile de Latran, saint Dominique, Espagnol, >> institue un ordre dont l'objet était de prêcher la religion >> et de défendre la foi contre les hérétiques.

» Saint François d'Assise, en Ombrie, venait d'en insti>> tuer un autre, dont le but était plutôt d'édifier que d'in>>struire; cependant il prêchait, quoiqu'il ne fût que » diacre. Ses disciples préchèrent également.

» Vers la fin du quinzième siècle, saint Gaëtan, Vénitien, >> fonda celui des théatins, pour réformer les clercs et dé» fendre la foi contre les hérétiques.

>> Matthieu Barchy, Italien, réforma, dans le commence» ment du seizième siècle, les frères mineurs, et s'adonna >> à la prédication de la parole de Dieu avec ses compa» gnons, qu'on appela capucins.

» Les récollets, qui sont un autre rejeton des religieux » de saint François, furent établis en 1531.

» L'établissement des barnabites eut à peu près le même » objet que celui des théatins dans le même siècle.

>> Enfin, saint Ignace se proposa de catéchiser les en»fants, de convertir les infidèles et de défendre la foi contre »les hérétiques. Son institut fut approuvé par Paul III, » en 1540.

» Je ne parlerai pas de l'ordre de saint Benoît, qui se » proposa d'abord, suivant les véritables principes de la » vie monastique, de vivre dans la solitude, comme de » simples chrétiens qui travaillent à leur salut particulier.

» Ils se trouvèrent, quelques siècles après, fort éloignés de » l'observance exacte de la règle. Clugny, Citeaux, furent des » réformés qui eurent bientôt besoin de réformation.

» Je ne parle point d'une infinité d'autres religieux qui avaient d'autres objets, et des communautés d'hommes et de femmes instituées en différents temps.

» Mais je ne puis m'empêcher de remarquer que l'objet › de l'institut de la plupart de ces ordres est entièrement le même savoir, la conversion des pécheurs en général, l'instruction des fidèles, des infidèles et des bérétiques. >> Je dis donc que ces ordres ayant été établis sur la supposition que les pasteurs, étant peu instruits, ne donnaient pas aux fidèles les instructions nécessaires, il était plus naturel et plus conforme à l'esprit de l'Église de ⚫ commencer par travailler à la réformation et l'instruction du clergé même, afin de le mettre en état d'enseigner les peuples, que d'aller chercher en Espagne ou en Italie des moines étrangers qu'on fut bientôt obligé de réformer. Les fondateurs de ces ordres et leurs premiers disciples étaient des hommes vertueux; mais des personnes sensées ont remarqué que la première ferveur se ralentit bientôt, qu'elle ne dure tout au plus qu'un siècle dans chaque

» ordre, après quoi il faut le rappeler à sa première insti>>tution.

» Au lieu de protéger les pasteurs ordinaires, qui sont » de la hiérarchie de l'Église, on a élevé sur leur tête un » clergé régulier, qui les a opprimés, et pour employer des » troupes mercenaires et auxiliaires, on a négligé les >> troupes nationales. Ces nouveaux ordres ont été comblés » de biens, de faveurs, de priviléges; on a multiplié les » exemptions au préjudice de la juridiction des évêques, >> qui ont abandonné leur clergé avec peu de prévoyance. » De ces divers établissements est provenue une multitude » d'ecclésiastiques, de communautés et d'ordres distingués » par l'habit, divisés d'intérêt, de principes et de partis. » L'État a été surchargé de mendiants, de gens oisifs. Ou>> bliant leur première institution, chaque ordre de reli>> gieux a ordinairement amené un ordre de religieuses sous » la même règle.

>> Une bonne œuvre à faire, un abus à réformer, ont >> produit un ordre dans l'Église; un acte de dévotion a >> fait établir de nouvelles maisons, et, à force d'œuvres pies, >> les États se ruinent et se dépeuplent insensiblement.

» Mais les États profitent bien moins de leurs fautes que » les particuliers. L'expérience des siècles passés est perdue » pour les siècles qui les suivent, et toutes les fois que le » zèle présente un bien réel ou apparent, il se trouve des >> personnes pieuses qui, sans examen et sans vues, favo>> risent de nouveaux établissements.

» Je ne nie pas le bien passager qu'ont fait les fonda>>teurs et quelques religieux de ces ordres; mais on ne peut » se dissimuler le mal réel et permanent qui en résulte en

empêchant les curés, les vicaires, ceux qui portent le » poids du jour, de s'instruire et d'être suffisamment dotés; >> mal presque irrémédiable et que l'Eglise avait voulu pré» venir en défendant la multiplication des ordres.

» Je ne parle que d'après les conciles, et j'énonce le vœu >> des plus savants et des plus pieux évêques, des théolo» giens les plus éclairés qui aient été dans l'Église. Il fallait » réformer le clergé, l'instruire et le doter, ou incorporer >> les ordres qui avaient un même objet. Il fallait au moins » réformer les premiers avant que d'en créer d'autres. » Voilà ce que demandait la religion et ce que l'État doit » désirer, sans quoi les établissements iront à l'infini dans » la chrétienté; car on ne manquera jamais du prétexte » d'avoir des ignorants à instruire, des hérétiques et des in>> fidèles à convertir, de bonnes œuvres à faire et des abus » à réformer1.»

On sait ce qui s'est passé en France depuis la destruction des jésuites.

Diverses lois avaient été portées pour la suppression de plusieurs monastères, pour rétablir la conventualité dans d'autres, et pour incorporer certains ordres dépendants originairement de la même règle,

Les religieux n'offraient plus qu'un spectacle peu édifiant tous les tribunaux retentissaient des réclamations que la plupart de ces religieux formaient journellement contre leurs vœux. Le nombre de ces réclamations fixa l'attention du législateur, qui, croyant en apercevoir la source dans l'âge auquel on pouvait s'engager par la profession solennelle, décida qu'on ne pourrait plus s'engager par des vœux religieux qu'à vingt et un ans.

Cette mesure écarta les novices; les ordres religieux, minés par le temps et par les mœurs, ne pouvaient plus se recruter; ils languissaient dans un état d'inertie et de défaveur qui était pire que l'anéantissement.

En 1773 il parut un édit qui ordonna quelques réformes. Il n'était plus temps de donner un nouvel être à des insti

1 Premier compte des Constitutions des jésuites, par M. de la Chalotais, procureur général à l'ancien parlement de Bretagne.

tutions qui n'étaient plus adaptées à l'esprit du siècle, dans les choses qui tiennent à l'opinion. On est bien plus gouverné par les mœurs que par les lois.

Chaque siècle a ses idées dominantes. Le siècle des institutions monastiques était passé.

C'est sur ces entrefaites que la révolution est survenue. L'assemblée constituante a proscrit les ordres religieux, et il valait mieux les détruire que de continuer à les avilir.

Nous le demandons à tout homme raisonnable, eût-il été sage de rétablir ou de ramener des institutions depuis longtemps discréditées dans l'opinion générale, et qui ne pouvaient plus remplir le but de leur établissement originaire?

En fait d'institutions religieuses, il ne suffit pas de tolérer ce qui n'est pas mauvais; il ne suffit pas même de faire ce qui peut être bon en soi; il faut encore chercher ce qui est convenable'.

SECTION DEUXIÈME.

DES ARCHEVÊQUES OU MÉTROPOLITAINS.

Les articles 13, 14, 15, qui composent cette section, déterminent les droits des archevêques ou métropolitains.

Les métropoles sont très-anciennes dans l'Église; les droits des métropolitains sont connus. Nous n'entrerons ici dans aucun détail, car il serait superflu de rappeler des règles et des principes qui ont été développés par tous les canonistes. Les archevêques ou métropolitains sont supérieurs aux évêques; ils jugent, en cas de recours ou d'appel, les causes qui leur sont portées des différents diocèses qui composent l'arrondissement ecclésiastique.

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L'art. 12 ne comporte aucune observation particulière, n'étant relatif qu'à des circonstances étrangères à la religion et à l'Église; il ne porte que sur les titres que les évêques peuvent prendre dans la société.

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