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Les véritables fabriques, les fabriques proprement dites, celles qui ont existé dans tous les temps et qui datent d'aussi loin que les églises mêmes, sont celles qui sont près les églises, dont la loi du 12 germinal an x a ordonné l'établissement, et qui ont été organisées dans le même moment où les paroisses l'ont été. Dans ces fabriques les curés ont voix délibérative. Les évêques y surveillent l'exécution de leurs propres règlements. L'administration de ces sortes d'établissements, qui embrassent tout ce qui concerne l'entretien et la conservation des choses consacrées au culte, a des rapports intimes avec le service divin et la police intérieure des temples.

Les maires, s'ils ne sont pas élus membres des fabriques dont il s'agit, n'ont aucun pouvoir hiérarchique sur ces fabriques. Ce sont les évêques qui sont les premiers inspecteurs de l'administration fabricienne, et qui en sont personnellement responsables au gouvernement.

Quand des donations sont faites aux fabriques sans désignation particulière des fabriques établies par l'arrêté du 7 thermidor an XI, ces donations se rapportent aux fabriques proprement dites; c'est-à-dire non à celles qui n'existent que par exception et pour une cause toute particulière, mais à celles qui sont toujours entrées dans la constitution même des paroisses, et qui, par cette raison, ont été l'ouvrage de la loi qui a rétabli le culte en France.

En général, toutes les donations ou fondations qui ont pour objet l'entretien des ministres et l'exercice du culte doivent être acceptées par les évêques et ne peuvent être exécutées qu'avec l'autorisation du gouvernement. C'est la disposition formelle de l'article 73 de la loi du 18 germinal an x. Il n'est question dans cet article ni des maires ni des préfets. Nul doute que quand une donation est faite à une commune, à la charge de quelque condition profitable au culte ou aux ministres du culte, c'est la commune qui doit ac

cepter, et c'est alors le cas de l'application des règles qui exigent une délibération du conseil communal et l'avis des préfets et sous-préfets. Alors, s'il y a lieu, l'évêque est simplement consulté sur ce qui peut intéresser le culte et ses ministres.

Mais les donations faites à la fabrique d'une paroisse ne sont pas des donations faites à la commune dans laquelle cette paroisse existe. C'est l'évêque qui accepte ces donations, et qui est seul autorisé, par la loi même, à les accepter. L'intervention du maire et du conseil de la commune et celle même du préfet sont alors très-inutiles. Dans ces cas, la loi a donné sa confiance à l'évêque et l'a reconnu juge naturel de l'utilité de l'église, et certainement on peut croire que des évêques sont plus jaloux de faire le bien des églises de leur diocèse que ne pourraient l'être des maires et des préfets, qui professent souvent un culte différent, et qui, dans aucun cas, ne peuvent apporter le même zèle que l'évêque.

Quoique les donations soient acceptées par l'évêque, le législateur a voulu qu'elles ne puissent être exécutées sans l'autorisation du gouvernement; mais les maires et les préfets ne sont pas le gouvernement. Le gouvernement ne réside que dans la personne auguste de Sa Majesté. Dans les donations pour lesquelles la loi s'est contentée de l'accep tation des évêques, les évêques, qui prêtent serment entre les mains de Sa Majesté, et qui lui sont personnellement comptables de leur administration, s'adressent directement à Sa Majesté elle-même, et ils ne sauraient avoir besoin de faire parvenir leurs vœux par la voie intermédiaire des préfets.

Dans les choses où l'avis des préfets est nécessaire, la loi du 18 germinal an x n'a pas manqué de l'exprimer formellement. Dira-t-on que dans les donations mêmes qui n'ont besoin que de l'acceptation des évêques, il peut y avoir des

choses capables de grever les communes, ou au moins de les intéresser? Il est facile de répondre que les communes ne peuvent être liées que par les contrats qu'elles passent, et qu'en conséquence elles ne peuvent, dans aucun cas, être obligées par des conditions ou des clauses qui leur seraient préjudiciables et qui auraient été insérées dans un acte auquel elles n'auraient pas concouru selon les formes prescrites par les règlements de l'État. Une donation, en pareille hypothèse, est pour la commune res inter alios acta. Nimporte que la donation eût été autorisée par le gouvernement, l'autorisation du gouvernement ne lierait pas plus la commune que ne peut le faire la donation même. Il est de principe que les autorisations du gouvernement ne sont jamais accordées que sauf le droit du tiers, salvo jure tertii. Cela est si vrai que, si le gouvernement avait autorisé une donation ou un legs fait à une église ou à un hospice, dans un testament nul, les héritiers naturels ne seraient pas moins fondés à arguer de la nullité de ce testament. Nous en avons des exemples connus et récents.

On peut, d'ailleurs, prendre l'avis des autorités locales, quand l'intérêt de la commune l'exige.

Mais si, sous le prétexte d'un intérêt vague ou éloigné de la commune, il fallait dépouiller les évêques de leur droit d'acceptation et traiter toutes les donations pour le culte comme on traiterait les donations faites directement à la commune et pour un objet communal, il n'y aurait plus ni fixité dans les principes ni stabilité dans les fonctions; tout ordre serait renversé, et les distinctions sagement établies par la loi entre la surveillance des évêques et celle des officiers civils seraient entièrement détruites.

J'ai cru, monsieur et cher collègue, devoir mettre ces considérations sous vos yeux; elles naissent des dispositions des lois et décrets intervenus sur la matière, et elles sont inhérentes à la nature même des choses.

Je ne saurais trop le faire remarquer à votre excellence, la religion obtient trop peu de faveur auprès de plusieurs fonctionnaires publics pour qu'on puisse arbitrairement livrer toutes les affaires ecclésiastiques à ces fonctionnaires. Il en arriverait souvent que les vues de Sa Majesté, qui s'est réservé à elle seule de me faire connaître ses intentions sur certains objets, seraient journellement éludées et même contrariées. C'est avec une entière confiance que j'ai l'honneur d'exposer à votre excellence les réflexions que sa sagesse appréciera.

RAPPORT

A SA MAJESTÉ IMPÉRIALE ET ROYALE

SUR LES ÉGLISES, LES PRESBYTÈRES, LES DESSERVANTS, ET, A CE SUJET, SUR LES IMPOSITIONS QUI NE PEUVENT ÊTRE ÉTABLIES QUE PAR UNE LOI, ET CELLES QUI PEUVENT L'ÊTRE SANS CETTE FORMALITÉ.

17 JUIN 1807.

SIRE,

J'ai eu l'honneur de présenter divers rapports à Votre Majesté sur le mauvais état des églises et des presbytères, et sur la triste situation des desservants qui sont à la charge des communes. Votre Majesté avait renvoyé ces rapports à l'examen et à la discussion de son conseil d'État; le consei d'État n'avait pu encore s'en occuper; cependant les évêques, les préfets et les communes ne cessaient de m'adresser des réclamations; j'ai cru me conformer aux intentions justes et bienveillantes de Votre Majesté en pressant le conseil d'État d'examiner et de discuter les rapports, dont Votre Majesté lui avait fait le renvoi. J'ai offert à la section de l'intérieur de conférer avec elle: ma proposition a été acceptée et le travail a marché.

En conséquence, un projet de loi a été rédigé sur les objets qui avaient été la matière de mes rapports, et dans ce moment ce projet doit avoir été présenté à la sanction de Votre Majesté.

Mon devoir est de rendre compte à Votre Majesté des motifs qui ont déterminé l'avis de son conseil d'État.

Une loi existante porte que les communes ne peuvent s'imposer, pour leurs dépenses accidentelles et locales, sans y être autorisées par une loi spéciale qu'il faut solliciter dans chaque cas particuliers. Cette règle avait été établie dans un temps où les assemblées délibérantes exerçaient tous les pouvoirs, et conséquemment il n'y avait, en quelque sorte, qu'un gouvernement sans gouvernement. Dans ce système, il faudrait plus de cinquante mille lois par année, pour faire face aux besoins variables de toutes les communes : qu'en arrivait-il? Les ouvrages publics, dans les municipalités, languissaient ou sont même entièrement abandonnés, les édifices communaux, les églises, les presbytères, tombent en ruines. Avec de légères réparations on pourrait les entretenir et les conserver, et, pour peu qu'on tarde à les réparer, on sera bientôt forcé de les reconstruire. On était frappé de ces considérations majeures, mais on se laissait encore séduire par les fausses idées que la révolution avait introduites sur l'étendue et les limites du pouvoir législatif, on continuait à confondre les actes de législation avec les actes d'administration.

L'office de la loi est de statuer généralement, abstraction faite de toute hypothèse particulière; les objets et les faits individuels sont du ressort de l'administration.

Ainsi la levée d'une imposition proprement dite, qui frappe sur un nombre indéfini de contribuables, et qui est établie pour un objet d'intérêt général, ne peut être faite que par une loi, mais c'est à l'administration qu'il appartient d'autoriser les contributions particulières qu'une com

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