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Votre Majesté peut juger par ces détails qu'il n'y avait point de rite général et uniforme pour la solennité de la consécration.

Dans ces circonstances, ne s'agissant que d'empêcher les ecclésiastiques nommés à des évêchés d'aller se faire sacrer à Rome, une simple disposition de police me paraît suffire pour remplir le but.

Votre Majesté n'a qu'à ordonner qu'aucun évêque, aucun ecclésiastique promu à un évêché ne puisse sortir de son royaume d'Italie sans une permission spéciale de sa part. Un tel règlement n'est qu'un acte politique, que, dans aucun système, on ne peut contester au souverain; et un tel règlement est le moyen dont tous les princes ont usé pour empêcher les évêques d'aller se faire sacrer à Rome. La mesure est efficace, et elle a l'avantage de mettre à l'écart toute discussion théologique, et de prévenir jusqu'au soupçon de vouloir prononcer sur des objets spirituels.

Le deuxième article du projet de décret est pour le payement des bulles d'institution. Il paraît que Votre Majesté a l'intention de fixer le prix de ces bulles au quart du revenu de l'archevêché ou de l'évêché, puisqu'elle adjuge trois mois de ce revenu. En France, par un décret impérial, la fixation a été portée au tiers, et cette différence provient de ce que les évêchés de France, étant moins bien dotés que ceux du royaume d'Italie, le quart du revenu de ces derniers représente une plus forte somme que le tiers du revenu des évêchés français.

J'ai rédigé le projet de décret dans le sens des observations que j'ai l'honneur de soumettre à la haute sagesse de Votre Majesté.

LETTRE

A SA MAJESTE IMPERIALE

RELATIVE A L'INCONVENIENT QUI PEUT RÉSULTER DE DÉCORATIONS ÉTRANGÈRES CONFÉRÉES A DES ECCLÉSIASTIQUES FRANÇAIS, NOTAMMENT PAR LE pape1.

6 nivôse an XIII.

M. Jean-Baptiste Boll, autrefois chanoine régulier de Marbach, aujourd'hui simple prêtre à Colmar, diocèse de Strasbourg, expose que le pape Pie VII lui a conféré, par un bref, l'ordre dit de l'Éperon d'or, suivant l'institution

de Pie IV.

Cette décoration, dit l'exposant, n'a aucune analogie avec les distinctions de l'ancienne chevalerie. Elle est uniquement, comme l'annonce le bref, la récompense du mérite et des vertus ecclésiastiques, et, dans la circonstance présente, elle a été accordée au prêtre Jean-Baptiste Boll pour des charités exercées envers les infortunés et même envers des Français.

Par ces considérations, cet ecclésiastique sollicite de son souverain la faculté de porter publiquement cette marque de distinction.

Mais si le pétitionnaire peut s'appuyer dans sa demande des motifs particuliers et louables, sans doute, qui lui ont fait décerner la décoration dont il s'agit, il ne saurait également prouver que la distinction de l'Éperon d'or n'est pas susceptible de la proscription, prononcée par la Constitution, contre toutes les décorations étrangères. Les motifs de cette proscription subsistent dans leur intégrité. A cette considération on peut en ajouter une, tirée de la nature

• Inédit.

même des mérites

dans le prêtre Boll.

que le pape a cru devoir récompenser

En effet, combien d'ecclésiastiques français pourraient produire les mêmes titres! Il suffit à un prêtre de vivre dans l'esprit de son état et de pratiquer ses premiers devoirs pour exercer des charités et faire des aumônes; dès lors, les décorations décernées par un chef spirituel et néanmoins souverain étranger, devraient se multiplier à l'infini, ou bien il faudrait avouer que la vertu seule et la bonne conduite ne suffisent pas pour obtenir une récompense que l'on présente comme leur apanage exclusif, mais que les sollicitations et l'intrigue doivent encore s'en mê ler, ce qui, dans le cas présent, ne diffèrerait guère d'une obédience ultramontaine, qu'il n'est certainement pas dans l'intention de Votre Majesté d'introduire dans ses États. Un ecclésiastique français que l'on mettrait dans la nécessité de solliciter une faveur de la Cour de Rome serait bientôt disposé à sacrifier nos maximes gallicanes et à acheter, par cette complaisance, ce qu'il ne pourrait souvent pas obtenir par d'autres voies.

Or, c'est ce qui arriverait certainement si l'on accordait à la distinction de l'Éperon d'or, par exemple, ou à toute autre distinction donnée par le pape, l'autorisation de se produire publiquement en France.

J'aurai donc l'honneur de proposer à Votre Majesté de ne pas autoriser la demande du prêtre Jean-Baptiste Boll.

LETTRE

A SA MAJESTÉ IMPÉRIALE

SUR L'INCONVENIENT QU'IL PEUT Y AVOIR A NOMMER LES CURÉS ÉVÊQUES.

27 FRIMAIRE AN XII 1.

Envoi de la copie du Rapport du 8 brumaire sur le curé de Dieppe; Sa Majesté impériale l'ayant demandé le 24 frimaire.

On ajoute :

Rien de plus utile à l'État et à la religion, et rien de plus respectable en soi qu'un bon curé; mais je crois qu'à quelques exceptions près et en petit nombre, il ne serait peut-être pas sans inconvénient de choisir les évêques dans la classe des curés; les fonctions de ces deux sortes de ministres sont si différentes, qu'il est rare que le même homme puisse également convenir aux unes et aux autres.

L'habitude qu'un curé contracte de diriger les consciences particulières des fidèles, et de conduire en maître ceux qui lui donnent volontairement l'empire sur leurs opinions et sur leur conscience, le rend souvent peu propre à la conduite générale d'un diocèse, dans laquelle on doit moins s'occuper du salut de chacun que de la paix de tous: on a toujours exigé plus de piété dans un curé, et plus de philosophie dans un évêque.

Cependant, comme il peut arriver que la même personne ait tout ce qu'il faut pour être et bon curé et bon évêque, on aurait tort d'exclure de l'épiscopat tous ceux qui ont pu remplir les fonctions curiales.

Dans les circonstances particulières, Votre Majesté ne me demandant une liste de candidats que pour l'évêché

1 Inédit.

de Rennes, c'est peut-être une raison de plus pour ne pas proposer un curé, qui n'en imposerait pas assez dans ce diocèse.

J'abandonne entièrement ces observations à la haute sagesse de Votre Majesté.

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