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fonds, il ne peuvent néanmoins les couper ou arracher, ni les élaguer, sans l'autorisation du préfet (1). »

Tout ce qui concerne les arbres plantés, au bord des routes, est donc du ressort de l'administration, et ne peut concerner le juge de paix.

A l'égard des chemins vicinaux, c'est différent: les propriétaires de fonds joignant 'ces chemins, ne sont point tenus de planter ; et s'ils y ont fait des plantations, ils demeurent maîtres de les arracher, élaguer, d'en disposer enfin, comme ils trouvent convenir. Seulement, d'après la loi du 21 mai 1836, ils ne pourront, à l'avenir, planter qu'à la distance qui serait prescrite par l'arrêté de réglement du préfet, dont il va être parlé : l'élagage de ces arbres reste donc soumis aux règles du droit commun; par conséquent, c'est devant le juge de paix que doit être portée la demande en élagage qui serait formée par la commune.

Mais, le juge de paix ne pourrait-il pas aussi être appelé à connaître de l'élagage, comme juge de police ? Si l'autorité municipale ou préfectorale prenait un arrêté à cet effet, le refus d'y obtempérer rendrait-il le récalcitrant passible de l'amende de un franc jusqu'à cinq, qu'inflige l'art. 471, n° 5, du Code pénal, à ceux qui auront négligé ou refusé d'exécuter les réglements relatifs à la petite voirie ?

L'affirmative a été décidée, par un arrêt du 22 juillet 1837, qui a cassé un jugement du tribunal de simple police de la ville du Mans, attendu qué l'arrêté du préfet de la Sarthe, du 23 no⚫vembre 1836, n'a fait, par ses articles 4 et 5, que renou⚫ veler les dispositions d'un arrêté antérieur, en date du 8 fé▾ vrier 1829, relativement à l'élagage et à l'abattage des arbres » qui se trouvent plantés, ou qui penchent sur la voie publique ; > attendu que cet arrêté, pris dans les limites de l'autorité préfec⚫torale, doit continuer d'être exécuté, jusqu'à ce qu'un régle

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ment ait été fait, en exécution de la loi du 21 mai 1836, et , approuvé par l'autorité supérieure. » (D., pag. 533 de 1837.) La loi du 21 mai 1836, art. 21, prescrit effectivement aux préfets de faire un réglement, dans l'année qui suivra la promulgation, lequel doit être accompagné d'une délibération du con

(2) Traité du domaine public, tome 1, no 272, pag. 392.)

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seil général et approuvé par le ministre, pour fixer, dans chaque département, la largeur des chemins vicinaux, etc., et statuer, en même temps, sur tout ce qui est relatif.... aux plantations, A L'ÉLAGAGE, aux fossés, etc. Et, dans une circulaire du ministre de l'intérieur, à la date du 10 octobre 1839, Vous com⚫ prendrez, dit-il aux préfets, que les dispositions relatives à l'élagage sont également sous la sanction de l'art. 21 de la ⚫ loi du 21 mai 1836. En l'ordonnant, vous vous attacherez toujours à concilier ce qu'exige l'intérêt de la vicinalité, avec ce que demande l'intérêt des propriétaires riverains; car si l'élagage est nécessaire à l'assèchement du chemin, il faut ⚫ pourtant éviter, qu'en le rendant trop fréquent, ou en le » faisant faire à des époques inopportunes, on nuise tellement aux plantations, qu'on arriverait à les détruire, etc..

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Cependant il nous paraît difficile de prescrire, à l'avance, dans un réglement général, les mesures à prendre pour l'élagage, dans chaque commune du département, mesures qui dépendent des circonstances et varient, suivant l'accroissement que peuvent acquérir tels ou tels arbres, dont l'ombrage, nuisible en certaines localités, peut convenir dans d'autres.

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Dira-t-on, que c'est au maire de la commune, à prescrire l'élagage de tels ou tels arbres, sur tel ou tel chemin, par un arrêté particulier, et qu'à défaut d'obtempérer à ce réglement municipal, le contrevenant sera passible des peines de police? Mais, les tribunaux ne peuvent étendre les dispositions pénales des cas qu'elles expriment, à d'autres cas qu'elles n'expriment » pas; il n'appartient qu'au législateur d'ajouter à ces dispositions et d'en combler les lacunes (1). Or, ce n'est point à l'autorité municipale, c'est au préfet que l'art. 21 de la loi du 21 mars 1836 accorde le droit de faire, relativement aux plantations et à l'élagage des arbres qui joignent les chemins vicinaux, un réglement dans les formes dont on vient de parler. On a même vu, pag. 69, deux arrêts de la Cour suprême déclarant illégaux et inobligatoires des arrêtés de préfets qui avaient cru pouvoir ajouter, à leur réglement antérieur, d'autres dispositions,

(1) Voy. notamment l'arrêt du 11 février 1839 et les conclusions du procureur-général Dupin, D., pag. 84 et suiv.

sans que le nouveau réglement eût été accompagné d'une délibération du conseil général, approuvée par le ministre.

L'élagage ne peut donc être prescrit que par un réglement du préfet rendu dans les formes exigées par la loi ; et ce réglement serait inexécutable, s'il disposait que, dans chaque commune, les propriétaires seront tenus, à telle époque de l'année, d'élaguer tous les arbres qui bordent les chemins. Dans la crainte d'une poursuite indiscrète, il faudrait donc que ces propriétaires eussent, sans cesse, le mètre à la main, pour mesurer la dimension des branches, afin de s'assurer si elles n'avancent pas sur le sol du chemin.

Le seul moyen d'exécuter la loi d'une manière rationnelle, serait, à ce qu'il nous semble, de prescrire, en général, que l'élagage aura lieu, dans telle saison, toutes les fois que le propriétaire de tels ou tels arbres en sera requis par le maire de la commune, s'il le juge nécessaire; et, qu'à défaut d'obtempérer à cette réquisition dans le temps prescrit, le récalcitrant sera poursuivi pour contravention à l'arrêté du préfet. La réquisition du maire n'étant, en ce cas, que l'exécution de l'arrêté préfectoral, le contrevenant ne pourrait se soustraire à l'amende prononcée par l'art. 471 du Code pénal.

Ainsi pour ce qui concerne les arbres plantés au bord des chemins vicinaux, le juge de paix a tout à la fois juridiction civile et criminelle.

S IV.

Du curage des fossés et canaux.

La loi attribuant ici aux juges de paix la connaissance des actions relatives au curage soit des fossés, soit des canaux servant à l'irrigation des propriétés ou au mouvement des usines, il s'agit de voir, quand et comment ils doivent user de cette double attribution.

Des fossés.

34. Les fossés sont établis pour la conservation des propriétés publiques ou particulières.

Les routes sont ordinairement accompagnées de fossés laté

raux, soit pour servir à l'écoulement des eaux, soit pour mettre obstacle aux anticipations, de la part des riverains. C'est à ceux-ci que les lois anciennes imposaient l'obligation du curage, et la même mesure avait été prescrite par les art. 32 et 109 du décret du 16 décembre 1811; mais cette disposition, contraire à la justice, a été abolie par la loi du 12 mai 1825, dont l'art. 2 porte, qu'à dater du 1" janvier 1827, le curage > et l'entretien des fossés qui font partie de la propriété des > routes royales et départementales, seront opérés par les soins ⚫ de l'administration publique, et sur les fonds alloués au main>> tien de la viabilité desdites routes.» Cet objet donc est totalement étranger à la compétence des juges de paix.

Il en est de même des fossés, que, d'après l'art. 21 de la loi dụ 21 mai 1836, le préfet peut faire établir le long des chemins vicinaux, et dont il doit déterminer la largeur et la profondeur : ces fossés font partie des chemins; ils ne peuvent être pris sur les propriétés particulières sans une indemnité à régler d'après les art. 15 et 16 de ladite loi (1). C'est par l'administration qu'il doit être pourvu au curage de ces fossés; les fonds limitrophes ne sont grevés d'aucune autre servitude que celle de recevoir, sur leurs bords, les terres et déblais provenant du curage, ainsi que cela se pratique à l'égard des routes.

Ce n'est donc qu'au curage des fossés particuliers, que peut s'appliquer notre article.

Ces fossés sont de deux sortes: les uns servent à la délimitation des héritages, les autres sont destinés à l'écoulement des eaux, au desséchement des fonds.

55. Fossés de délimitation. Celui qui veut délimiter, au moyen d'un fossé, doit le pratiquer sur son propre terrain; le voisin ne peut être obligé de contribuer à ce genre de délimitation, mais seulement à la position des bornes.

L'art. 4, tit. 27, de l'ordonnance de 1669, obligeait les propriétaires de bois joignant les forêts de l'état, de les séparer par des fossés, dont l'entretien était à leur charge. Mais cette servitude onéreuse a été abolie par le Code forestier; l'art. 14

(1) Voy. part. I, pag. 27 et suiv,

porte: Lorsque la séparation ou délimitation sera effectuée par un simple bornage, elle sera faite à frais communs. Lorsqu'elle sera effectuée par des fossés de clôture, ils seront ⚫ exécutés aux frais de la partie requérante, et pris, en entier, D sur son terrain. »

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Ainsi, pour ce qui concerne le fossé délimitatif d'une forêt, le curage ne peut être l'objet d'une action, que dans le cas où les deux propriétaires seraient convenus de délimiter de cette manière, et d'entretenir le fossé en commun; alors, comme la loi attribue au juge de paix la connaissance du curage, sans distinction, c'est devant ce magistrat que devrait être portée la demande, fût-elle dirigée par ou contre le préfet, ou le maire d'une commune, s'il s'agit d'une forêt domaniale ou communale.

Le juge de paix serait également compétent pour ordonner le curage des fossés, qui, d'après l'art. 71 du Code forestier, doivent être pratiqués, à frais communs, entre les usagers et l'administration, pour empêcher les bestiaux de s'introduire dans les coupes non défensables.

36. Lorsqu'il existe un titre attestant la mitoyenneté ou la propriété exclusive d'un fossé délimitatif, il faut s'y conformer. Mais, à défaut de titre, la loi veut que le fossé soit réputé mitoyen, à moins de marques contraires. Voici quelles sont, à cet égard, les dispositions du Code :

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Art. 666. Tous fossés entre deux héritages sont présumés mitoyens, s'il n'y a titre ou marque du contraire.» (Il ne peut être ici question, comme pour les haies, de distinguer l'héritage en état de clôture.)

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» 667. Il y a marque de non mitoyenneté, lorsque la levéc ou le rejet de la terre se trouve d'un côté seulement du fossé. ,668. Le fossé est censé appartenir exclusivement à celui » du côté duquel le rejet se trouve.

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» 669. Le fossé mitoyen doit être entretenu à frais communs.» Ainsi, le fossé mitoyen est le seul dont on puisse requérir le curage celui qui á la propriété exclusive d'un fossé peut le laisser combler et en disposer de toute manière.

La présomption légale étant pour la mitoyenneté, à moins de marques du contraire, il serait à désirer que la loi en eût attribué la reconnaissance au juge de paix, en cas de contestation;

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